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Blue Rhapsody - 1. Awakening de BlueBreon



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» Auteur : BlueBreon - Voir le profil
» Créé le 14/09/2014 à 13:01
» Dernière mise à jour le 01/06/2015 à 22:08

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CT09 . EASTER EGG

— Des golems ? répéta Wally après avoir écouté Arno lui expliquer leur présence à Hoenn. Ça a l'air intéressant. Ça veut dire que l'on va voir des Pokémon légendaires ?
— Comme je viens de le dire, insista le garçon au bonnet, il y a très peu de chances pour que l'on en rencontre un. Et je ne vois pas ce qui te rend si joyeux dans le fait de voir un des Golems ? …
— Ah ? Je pensais que tu serais le premier à trouver ça excitant. C'est toi qui les cherches, non ?
— Chercher des traces et faire face à ce genre de Pokémon, ce n'est pas la même chose. Aller courir après un Golem, c'est du suicide …
— Hmmm …

Wally leva les yeux vers le ciel de la route 114, les mains jointes derrière la tête.
Le temps était encore au beau fixe alors que le quatuor se dirigeait vers Lavandia, « la ville brillante du fun ». Là-bas, Sebii tenterait d'y décrocher un second badge d'arène face à Voltère et ses Pokémon Électrik.

— Quoi qu'il en soit, j'attends ta future défaite avec impatience, blondinet.
— Qu'est-ce que tu racontes ? s'énerva Sebii. Comme si j'allais perdre ! Et je te rappelle que tu me dois un combat, tête de gazon !!
— « T-Tête de gazon » … ?! Tu crois que tu es mieux, avec ta mèche bizarre, là ? C'est cooomplètement démodé !
— Ça souligne mon dynamisme !! Mais bon, c'est une question de style, aucune chance que tu puisses comprendre !
— Quoi ?! C'est à moi que tu dis ça !? C'est évident qu'en tant que coordinateur, j'ai une meilleure vision du style que toi !

Et voilà qu'ils se jetaient encore l'un sur l'autre. Ces deux-là n'avaient pas arrêté de se chercher depuis que Wally avait rejoint le groupe à Vergazon ; tantôt vantant leurs victoires respectives dans des combats acharnés ou des concours fortement disputés, tantôt cherchant à décider qui des deux avait gagné leur premier duel à Rosyères.

Regardant de loin les chamailleries du dresseur et du coordinateur qui marchaient quelques mètres devant lui, Arno soupira.
Il retirait ce qu'il avait pensé la veille : laisser ce Wally les accompagner était une mauvaise idée en fin de compte !

— Haa, soupira-t-il, ces deux-là ne peuvent vraiment pas se voir en peinture …
— Ah bon ? fit Luna qui marchait à ses côtés. Je trouve qu'au contraire, ils ont l'air de plutôt bien s'entendre.
— Tu es sûre que l'on voit la même chose ? lui demanda Arno avec un regard douteux.
— Même si l'on se chamaille, ça ne veut pas forcément dire que l'on ne s'amuse pas. C'est un peu comme vos petites brouilles, entre Sebii et toi.
— Tu trouves que j'ai l'air de m'amuser dans ces moments-là ?!

Cela relevait plus de la souffrance mentale que de l'amusement !

— Mais … je suppose qu'il y a du vrai.
— N'est-ce pas ?
— …

Décidément, la jeune fille voyait le positif dans tout. Ce n'était sans doute pas une mauvaise chose ; Arno savait qu'il pourrait lui-même profiter d'un peu d'insouciance et d'optimisme quelques fois. Et puis, à bien y penser, Sebii avait peut-être besoin de quelqu'un d'aussi insupportable que lui pour pouvoir se défouler.
Enfin, de là à parler d'amusement … Les deux garçons trouvaient-ils vraiment du plaisir à se disputer comme ça ? Tout ce qu'une dispute apportait, c'était du stress inutile, non ? Aucune chance qu'il arrive à comprendre ça.

Le garçon regarda Luna du coin de l'œil, avant de reposer ses yeux sur Wally et Sebii, qui semblaient s'être un peu calmés.

Il n'avait pas pu achever la conversation qu'il avait eu avec la jeune fille la veille, durant le Concours, et il y avait repensé toute la matinée. Il y avait un truc bizarre dans ce qu'avait dit Luna, mais il n'arrivait pas à mettre le doigt dessus.
Aaah, encore du stress dont il se serait bien passé …

— Luna, à propos de brouilles--
— Hé, Arnooo~!

Arno sursauta en pleine phrase quand Wally l'appela en agitant son bras.
Bon sang, pourquoi fallait-il toujours qu'on l'interrompe chaque fois qu'il cherchait à avoir une conversation sérieuse ?! Il y avait un complot contre lui, ou quoi ? Il avait juste besoin de deux minutes, deux petites minutes !

— Tu n'as pas trop chaud sous ce bonnet~?

Le coordinateur, qui le regardait un air faussement innocent, s'était mit à marcher à l'envers, menaçant à chaque pas de basculer et de s'écraser par terre sous le poids de son énorme sac de randonnée.

— Tu devrais plutôt regarder devant toi au lieu de t'inquiéter de mon bien-être, le prévint Arno pour esquiver la question. D'ailleurs, qu'est-ce qu'il y a dans ce sac pour qu'il soit aussi gros ?
— Ma cape et du matériel. Mais je ne m'inquiète pas que pour toi, tu sais ? Mais L-L-Luna semble moins incommodée que toi.
« Tiens ? Il bégaie maintenant ? »

Au passage, Arno aurait bien aimé savoir quel genre de « matériel » Wally pouvait bien transporter là-dedans.

— Tu sais que dans la région, la météo est plus clémente qu'ailleurs, même en hiver ? poursuivit le coordinateur.
— Je vais très bien, merci. J'ai enlevé mon pull, j'arriverai à supporter la température.
— Et pourtant tu gardes ton bonnet, alors que n'importe qui aurait commencé par ça …

Wally accompagna ses mots d'un sourire malicieux.
Évidemment. Depuis le début, c'était le bonnet qui l'intéressait, pas le quelconque inconfort de ses compagnons de route. Arno n'était pas dupe.

— Qu'est-ce qui pourrait bien te pousser à le garder ? Aurais-tu quelque-chose à cacher sous ce bonnet ? Une mèche rebelle ? Des oreilles de lapin ?
— Ho ! Est-ce que c'est vrai, Arno ?! s'exclama Luna. Tu caches des oreilles de lapin sous ton bonnet ?!
— Mais bien sûr que non !!! J'ai l'habitude de le porter, c'est tout !
— Ah ? fit la jeune fille, visiblement déçue de ne pas avoir affaire à un homme-lapin. Dommage …
— Alors il n'y a rien d'autre ? s'entêta Wally. Absolument rien~ ?
— Hé, et si tu t'occupais de tes affaires, Lily ? intervint Sebii avec véhémence.
— Oh ? Tu sais quelque-chose que j'ignore, blondinet ?
— De toute manière, ce serait plutôt à toi de répondre à nos questions, tu ne penses pas ?rebondit Arno. Tu étais censé nous parler de ces deux personnes en poncho, et pour l'instant rien.

Se rendant compte qu'il n'avait aucun droit de poser des questions, Wally riposta par une moue et cligna des yeux de manière féminine.

— Rooh, ne sois pas si pressé. Je vous dirai tout ce que je sais, mais pas maintenant. Au lieu de parler de choses aussi sérieuses, on devrait profiter du beau temps !
— On a pas le temps de profiter du beau temps ! Mon prochain combat d'arène m'attends déjà à Lavandia.
— Je ne te demandais pas ton avis, blondinet …
— Le planning que j'avais prévu était plutôt large, Sebii, le rassura Arno – qui n'avait aucune envie de voir son ami leur fausser compagnie à l'improviste. On a plusieurs jours d'avance, alors tu pourrais en profiter pour peaufiner ton équipe avant qu'on atteigne Lavandia.
— Pas-be-soin ! Je m'entraîne déjà bien assez.
— Alors capture au moins d'autres Pokémon. Une équipe de trois, ce sera un peu juste face à Voltère.
— Ils en valent au moins six à eux trois !! Et puis tu peux parler, mais toi aussi tu n'as que trois Pokémon !
— Tu as tout faux. J'ai capturé mon dix-neuvième Pokémon hier.

Le groupe s'arrêta d'un coup, et Arno sentit les regards de ses compagnons sur lui. Luna le fixant avec un air surpris, Sebii le dévisageant avec des yeux incrédules, et Wally se retenant de pouffer de rire face à la scène.

Le dresseur blond brandit un doigt accusateur :

— Depuis quand tu as autant de Pokémon ?!?
— C'est vrai que je ne m'entraîne pas trop, mais ça ne veut pas dire que je chôme pour autant. Le professeur m'a demandé de tester l'Indexon, et j'ai besoin d'avoir plus de Pokémon à portée de main pour voir toutes ses possibilités. Et comme que je me lève plus tôt que vous, j'ai l'occasion d'aller explorer un peu.
— Kh, fit Sebii comme s'il avait reçu un coup fatal. Moi qui pensais te battre aussi à la capture …
— Vu ta manière de voir les choses, aucune chance, asséna Arno.
— PPFFFFFFFFFFT …  !
— Hé !! Qu'est-ce qui te fait rire comme ça, Lily !?
— Hi haha ha haha !!! Vous êtes géniaux ! J'ai bien fait de me joindre à vouuus huhu hahaha !!

La crise de fou-rire de Wally dura une bonne dizaine de minutes. Le groupe resta là, impuissant, tandis que le coordinateur s'effondrait par terre, se tenait le ventre de douleur et riait à gorge déployée, à moitié écrasé par son énorme sac.

Il fallut ensuite quatre minutes de plus pour remettre le garçon sur ses deux pattes.

— Au fait, ce professeur, c'est ce « Bibacier » dont tu as parlé tout-à-l'heure, c'est ça ? interrogea Wally, à peine remit de sa crise – et marchant de nouveau à l'envers – avant d'étouffer un rire. Il enseigne quoi, exactement ?
— Il n'enseigne pas, corrigea Arno. Il fait des recherches sur les Pokémon. Les légendaires en particulier. C'est un peu le référent dans la région de Wénora.
— Wénora ? … Attends, vous venez de Wénora ??
— Sebii et moi arrivons de Wénora. Pourquoi ça ?
— J'étais censé déménager là-bas avec ma famille, pour le travail de ma mère. Encore une bien belle coïncidence, pas vrai~?
— Hein ?
— Quoi ?? Tu te fiches de nous ? Ça veut dire que même après le tournoi, on va encore te recroiser ?! s'agaça Sebii, que la nouvelle n'enchantait guère.
— Désolé, blondinet~

Wally eût comme un moment d'hésitation. Puis il lança d'une voix enjouée :

— Et toi Luna ? Tu es la sœur de cet idiot, tu doit venir de Wénora aussi, non ?
— Je suis née là-bas, mais je vis à Kanto depuis cinq ans ! répondit la jeune fille.
— Oh. D'accord.
— T'as l'air déçu, Lily.
— Q-Quoi ? Même pas dans tes rêves les plus fous !

Le coordinateur se retourna dans le bon sens – suivi par son sac qui manqua de le renverser à nouveau sous son poids – et recroisa les mains sur sa nuque. Arno ne put retenir un léger rictus.

« Oh, si, tu as bien l'air déçu, Wally. »

Comme s'il avait entendu ses pensées, ce dernier tourna la tête dans sa direction et changea de sujet :

— Enfin, bref. On arrive à la Pension Pokémon. J'ai à y faire, vous m'accompagner ?
— Tu cherches vraiment à nous faire perdre du temps, ma parole ! s'énerva Sebii.
— Ma question ne s'adressait pas à toi …

À une petite centaine de mètres se dessinait effectivement une petite bâtisse en bois au toit de tuiles rouges. Plissant les yeux, Arno discerna également une longue palissade qui devait former un grand enclos pour les Pokémon laissés par les dresseurs en vadrouille.

— Ce n'est pas comme si ça nous forçait à faire un détour, jugea-t-il après un instant de réflexion. En plus, on a déjà fait plus de la moitié du chemin jusqu'à Lavandia.
— Pff … Faites comme vous voulez, je m'en fiche, fit Sebii en guise d'abandon.
— Moi je vote pour !
— Je ne pense pas qu'on ait besoin de voter, Luna …
— Moi aussi je vote pour~!
— Et c'est toi qui as proposé l'idée !

L'idée ne rencontrant aucune opposition, le groupe s'accorda donc à s'arrêter à la Pension Pokémon.

La porte d'entrée de la pension s'ouvrait directement sur une large pièce principale, à l'ambiance chaleureuse malgré sa certaine vacuité ; à part une table et quelques chaises sur un tapis usé qui couvrait un parquet bien abîmé, ainsi qu'une borne PC, il n'y avait pas grand-chose pour meubler l'espace. Il semblait y avoir une autre pièce au rez-de-chaussée : le mur à leur droite était percé d'une ouverture sans porte.

Lorsqu'Arno tendit le cou pour tenter d'apercevoir ce qui pouvait s'y trouver, une voix chevrotante les accueillit derrière un comptoir en bois.

— Bien le bonjour, jeunes gens.
— Salut, grand-père~!

Wally s'accouda sur le comptoir et posa sa tête sur ses mains jointes. Le vieil homme un peu chétif à qui il faisait face – et qui devait être le gérant de la Pension Pokémon – sembla content de le voir.

— Les affaires marchent toujours aussi bien~?
— Très bien, comme toujours, mon petit Wally, lui répondit le gérant. Je vois que tu n'es pas venu seul, cette fois-ci.
— Je voyage avec eux en ce moment~
— Oh, je vois. Et qu'est-ce qui vous amènent donc par ici ?
— Je suis venu récupérer mes petits chéris.
— Bien, bien … Dans ce cas, attendez un peu ici, je reviens tout de suite.

Le vieil homme sortit par une porte qui semblait donner vers l'enclos extérieur de la pension, laissant le petit groupe seul.
Arno s'approcha de Wally et lui demanda, perplexe :

— Vous êtes parents ?
— Hein ? Ah, non, pas du tout ! Je ne connais pas son nom, et comme il est très vieux et tout ridé, je l'appelle grand-père. Mais on a aucun lien de parenté.
— Heureusement qu'il n'est pas là pour t'entendre …
— Ne t'inquiètes pas pour ça, il a sans doute tout entendu. Il a beau être aussi vieux que son tapis, il a l'ouïe fine, le bougre …

N'était-ce pas une raison de plus pour de ne pas le traiter de vieux tout ridé comme il le faisait ? Même s'ils semblaient bien se connaître, à sa place Arno aurait mit un point d'honneur à ne pas jouer ce genre de jeu avec le gérant de la pension – en tout cas pas avant d'avoir récupéré ses Pokémon.

— Tu laisses souvent tes Pokémon dans cette pension ?
— Hmm, réfléchit Wally en portant un doigt à sa joue. Je crois qu'ils y sont presque tous passés, à un moment ou à un autre. Jusque-là, j'évitais de tous les emporter avec moi, histoire de ne pas leur faire courir trop de risques. Et le grand-père s'occupe bien d'eux quand je m'absente.
— C'est à cause d'« eux » ?
— Oui. Mais ce n'est pas une si mauvaise chose ! Ça m'a donné l'occasion de tester quelques compatibilités pour des accouplements~

Arno se doutait bien que Wally ait recouru à ce genre de méthode : les accouplements permettaient, grâce à deux parents méticuleusement choisis, d'obtenir un Pokémon avec de meilleures compétences et des attaques particulières que l'espèce ne pouvait apprendre d'elle-même.
Pour un coordinateur comme pour un dresseur, c'était un moyen efficace d'acquérir un Pokémon fait sur mesure pour la compétition.

— Tu doit être fort en accouplement, Wally, non ?? demanda innocemment Luna en souriant.

Arno tiqua sur la question de la jeune fille, qui regardait le coordinateur avec une pointe d'admiration. Alors qu'il s'attendait à voir ce dernier répondre par une blague aussi douteuse que celles du professeur Bibacier, le coordinateur écarquilla les yeux et devint rapidement aussi rouge qu'une baie Tamato.

— A-Ah … ? Euh, h-hem … C-C'est-à-dire …
— ELLE PARLAIT D'ACCOUPLEMENTS DE POKÉMON, ESPÈCE DE GROS PERVERS !! s'écria Sebii, dont les tempes saillirent de colère.
— J-JE LE SAIS, IMBÉCILE !

Le regard de Luna se porta tour à tour sur son frère, puis sur le coordinateur cramoisi. Puis, comprenant soudainement le malentendu, elle poussa un petit « Oh ! » en guise d'eurêka.
Wally, un peut affolé, tenta désespérément de sauver les meubles :

— C-C'est pas du tout ce que vous pensez !!
— …
— …
— C'est exactement ça, pas vrai ? conclut impitoyablement Arno.
— JE VIENS DE DIRE QUE NON !

Le garçon pouvait dire ce qu'il voulait, il était trop tard maintenant ; sa réaction à l'innocente question de Luna était une révélation à elle seule. À nier comme il le faisait, il s'enfonçait plus qu'autre chose.
Arno se sentit soulagé de ne pas avoir été à la place de Wally. Lui aussi aurait été troublé par la formulation légèrement ambiguë de la question. Enfin, pas au point de plonger à pieds joints dans ce mauvais piège, non plus. Là, le coordinateur avait été remarquable, dans le mauvais sens du terme.

Ce fut le moment que choisit le vieux gérant pour réapparaître derrière le comptoir.

— Oh, je vois, je vois. Alors tu t'es mis à un nouveau type d'accouplement, mon petit Wally ?
— MAIS NON !!!
« Et le vieux n'est pas mieux, en fait … »
— Wally ?

Le coordinateur tourna lentement la tête vers Luna, se préparant au pire : pleurs, regard dégoûté, insultes …
Et la jeune fille de lui demander de l'air le plus naturel au monde :

— C'est vrai que tu es un pervers ?

*BONG*
Arno bondit en entendant le crâne du garçon aux cheveux verts s'abattre sur le comptoir avec un grand bruit sourd. Le coordinateur tourna la tête sur le côté, un rictus tremblant sur le visage et les larmes aux yeux.

— Pourquoi … Pourquoi, monde cruel … ?
— … ?? Wally ?

Aaah, le pauvre, tout le monde s'acharnait sur lui. Et dire que Luna ne le faisait même pas exprès ; la jeune fille avait posé cette question tout comme elle lui aurait demandé l'heure, et elle semblait d'ailleurs ne pas comprendre pourquoi le coordinateur était si déprimé.

— Puisque l'on parle d'accouplement, les interpella le gérant de la pension après un rire entrecoupé d'une quinte de toux, que diriez-vous de voir des œufs de Pokémon, les enfants ? Il se trouve qu'en ce moment, j'ai pas mal d'œufs qui attendent d'être récupérés par leurs dresseurs.
— Vraiment ?? Je veux les voir ! fit capricieusement Luna.
— Ça ne risque pas de vous poser des problèmes ?
— Pas du tout ! Les amis de ce petit Wally sont toujours les bienvenus. Allez, suivez-moi, les jeunes.

« Amis », voilà un mot qui était un peu fort pour qualifier quelqu'un qu'ils n'avaient rencontré qu'à peine 24 heures auparavant, et qui de surcroît ne les accompagnait que par commodité. Mais bon, il n'était pas nécessaire de lancer un sujet aussi stérile maintenant.
D'autant que Wally ne semblait pas vouloir désapprouver les mots du vieil homme. Ou plutôt, il semblait ne plus rien vouloir du tout, avachi ainsi sur le comptoir comme un morceau de gelée.

Le gérant souleva un petit battant pour passer de l'autre côté du comptoir, et traversa l'ouverture qu'Arno avait aperçue en arrivant, invitant les jeunes dresseurs à le suivre.

— C'est dans cette annexe que je garde les œufs.

Luna, Arno puis Sebii pénétrèrent à sa suite dans ladite annexe, laissant un Wally flasque sur le comptoir.

La salle aux œufs, en fort contraste avec la pièce principale, avait tout d'une chambre d'enfant : une fine moquette colorée de figures géométriques tapissait le sol ; les murs, couverts de teintes tout aussi vives, étaient en partie cachés par des meubles à étagères sur lesquelles reposaient, alignés sur de moelleux coussins, des œufs aux couleurs et aux motifs tous plus chatoyants les uns que les autres.

En voyant tous ces œufs colorés, Luna poussa une exclamation émerveillée et alla se jeter à quatre pattes devant un œuf bleu à pois oranges, placé à l'étage le plus bas.

— On dirait des œufs de Pâques !! Celui-ci, c'est un œuf de Gobou !
— Elle ressemble vraiment à une gamine, nota Arno.
— C'EST une gamine, confirma simplement son frère.

Sebii parcourut la pièce du regard, assez peu intéressé par ces simples œufs de Pokémon. Il se décida néanmoins à marcher le long des étagères, histoire de ne pas rester immobile à ne rien faire tandis que sa sœur, toujours par terre, parcourait celle de l'œuf à pois.

— Ces œufs appartiennent vraiment tous à des Dresseurs ? Interrogea-t-elle le vieil homme lorsqu'elle eût achevé le premier mur. Il y en a tellement !
— Eh oui ! Les pratiques ont bien évolué. Jadis, peu de dresseurs étaient désireux de se lancer dans l'accouplement de Pokémon. Mais quand ils ont vu ce que cela pouvait leur apporter, ils ont été de plus en plus nombreux à vouloir s'y mettre.
— Hnn … Je devrais peut-être le faire, moi aussi … Se-- … heu … dis, Arno, tu crois qu'on peut trouver des Métamorph à Hoenn ??
— Aucune idée, désolé. Je ferais des recherches, si tu veux.
— Merci !

Arno laissa la jeune fille retourna à ses joyeux vagabondages, et contempla les rangées d'œufs qui couvraient les murs. Il n'avait jamais vu autant d'œufs de Pokémon réunis dans un même endroit !

Cela lui rappelait cette vieille émission télévisée, qui passait par spots de cinq minutes, et qui mettait les téléspectateurs au défi de deviner le Pokémon qui allait sortir d'un œuf. Petit, Arno s'amusait souvent à chercher la réponse, et avait vu presque toutes les énigmes de l'émission.
En cherchant un peu dans sa mémoire, le garçon retrouva sans difficulté les œufs qui avaient été présentés dans le programme, ainsi que les Pokémon auxquels ils correspondaient.

C'est alors qu'il tomba sur un œuf qui l'intrigua : d'un noir profond et ceinturé d'une bande rouge, il n'était pas rangé avec les autres, mais posé sur un coussin à même le sol, dans un coin de la pièce.
Le garçon s'approcha de l'objet, s'agenouilla et le scruta avec perplexité.
Cet œuf ne lui disait absolument rien. Arno n'était pas bien renseigné sur les œufs, alors il pouvait très bien s'agir d'une espèce qu'il connaissait, mais qui n'était pas passé dans l'émission.

— Excusez-moi, vous pourriez me dire à quelle espèce appartient cet œuf ? demanda-t-il au gérant.
— Oh ? Eh bien, c'est une bonne question. Je ne suis pas sûr de le savoir moi-même.

Sebii, mains dans les poches, haussa les épaules nonchalamment :

— En même temps, il peut pas savoir ce qu'il y a dans tous ces œufs.
— Détrompe-toi, mon petit ! Je sais exactement de quels Pokémon provient chaque œuf qui se trouve dans cette pièce ; si ce n'était pas le cas, j'aurais du mal à rendre ces œufs aux bonnes personnes. Et donc, je sais quel Pokémon sortira de chacun d'eux. Mais il se trouve que celui-là est un cas un peu particulier …
— Particulier ?

Le vieil homme vint se pencher sur l'œuf noir.

— C'est un dresseur qui me l'a amené un jour. Il disait ne pas pouvoir veiller sur lui et me l'a donné, convaincu que je m'en occuperais mieux qu'il ne le pourrait. Ce n'était pas la première fois que cela arrivait, et j'ai bien entendu accepté. Néanmoins, il ne m'a jamais dit quels Pokémon l'avaient engendré …
— C'est triste ! réagit Luna. Comment a-t-il pu faire ça ?

De l'autre côté de la pièce, la jeune fille s'était assise sur la moquette pour écouter le gérant, et avait l'air chagriné ; elle semblait avoir été plutôt affectée par l'histoire qu'il venait de raconter.
L'homme hocha négativement la tête.

— Les choses ne sont pas toujours simples. Chacun a ses raisons qui lui sont propres. Et je fais en sorte que ce genre de Pokémon soit le plus heureux possible dans cette pension.
— Oui … mais … Je trouve quand même ça vraiment triste …
— Cela fait longtemps que cette personne est venue ici ? demanda Arno.
— Ma foi, ça doit bien faire un an, maintenant.
— Un … un an ?
— C'est possible, ça ?!
— Dis, grand-père, pourquoi tu ne nous le confierais pas ?

Arno se retourna vers Wally qui, visiblement remis de ses émotions, était adossé au mur sur le seuil de l'annexe.

— Les œufs ont besoin de se trouver avec un dresseur pour éclore rapidement. Et puis, c'est le Pokémon d'un voyageur, à la base. Il sera peut-être mieux sur les routes que dans une pension à flâner toute la journée ? suggéra-t-il.
— Hm …
— Wally, je suis d'accord sur le fait que les œufs éclosent plus vite avec un dresseur, mais d'où est-ce que tu sors cette théorie du voyageur ? …
— Quoi, c'est pas logique ? Il doit bien exister une sorte de gène de l'aventure, non ? Et les gènes, ça se transmet aux enfants !
— Je ne suis pas sûr que ça marche pour ce genre de choses …

Le vieil homme, au contraire, parut ravi.

— Pourquoi pas ? Ce n'est pas une mauvaise idée. Tu as raison, Wally ; un œuf comme celui-ci a plus besoin d'un bon dresseur que d'un vieux gérant de pension comme moi. Je pense qu'il a plus de chances d'éclore et de bien grandir en votre compagnie.

L'homme ramassa délicatement l'œuf haut d'une vingtaine de centimètres, et demanda :

— Alors, auquel d'entre vous dois-je le confier ?
— Arno, tu le prends, ok~?
— D'accord. … … … Euh, je te demande pardon ?!
— Il y a un problème ?
— Pourquoi est-ce que c'est à moi de m'en occuper ? Il lui faut un dresseur compétent, non ? Pourquoi pas Sebii-- ah, non, je retire, trop dangereux …
— Sympa, merci !
— Hem … Et pourquoi pas Luna ? Elle est capable de s'en occuper.

Wally soupira, puis lui adressa un sourire amical.

— Je crois sincèrement que tu es la personne qui lui conviendra le mieux.
— Tu dis juste ça pour me convaincre, non ? rétorqua Arno.
— Non, non, j'ai de bonnes raisons de le penser …
« Mais tu ne me les diras pas même si je te les demande, n'est-ce pas ? »

Arno tourna un regard suppliant vers Luna. La jeune fille se releva, épousseta brièvement ses jambes et lui sourit à son tour.

— C'est Wally qui a lancé l'idée de prendre l'œuf. S'il pense que c'est mieux qu'il soit avec toi, alors je lui fais confiance. ☆

Voyant que même Luna se rangeait à l'avis du coordinateur, Arno abandonna le débat et se retourna vers le vieux gérant. Ce dernier, qui avait suivi toute la scène, tendit l'œuf à Arno avec un sourire réjoui.
Le garçon avança nerveusement les mains, puis les posa doucement sur l'œuf et le prit dans ses bras, avant de faire une petite courbette.

— Je ferai de mon mieux pour m'en occuper comme il faut ! assura-t-il avec sérieux.
— Je sais, je sais.
— Bien, bien, voilà une bonne chose de faite ! lança Wally en tapant dans ses mains. Ça te fait combien, maintenant, vingt Pokémon ? Blondinet, tu te sens pas trop à la traîne~?
— Ça va, pas la peine d'en rajouter ! De toute manière, c'est pas de ma faute s'il triche !
— Qui triche ? C'est toi qui ne t'actives pas, Sebii !
— Ouaah ! Il est si mignon, cet œuf !!

Le vieil homme regarda les jeunes dresseurs se rassembler autour de l'œuf avec grand bruit.
Leurs chamailleries lui rappelaient ses propres aventures qu'il avait vécu durant sa jeunesse ; des aventures faites de rires, de disputes et joies. Il revit en ces enfants ses anciens compères de lorsqu'il avait effectué ses premiers voyages.

Cet œuf avait fini par tomber sur de très bonnes personnes.




Le petit groupe repartit peu après l'heure du déjeuner, le vieux gérant leur ayant généreusement offert le repas. Alors qu'ils s'éloignaient de la pension, Sebii et Wally en retrait, Luna fixait le curieux œuf noir qu'Arno portait encore dans ses bras.

— Je me demandes ce qui va en sortir …
— Hé, Arno ! l'appela Sebii. Quand il aura éclos, tu feras un combat contre moi ?
— Je ne vais pas faire combattre un nouveau-né, Sebii !
— Hu hu hu~

Tout à fait enchanté par la tournure qu'avait finalement prit leur arrêt à la Pension Pokémon, Wally approcha Sebii et le piqua du bout du doigt.

— Se pourrait-il que tu sois jaloux, blondinet~?
— Peuh ! Comme si j'allais être jaloux à cause d'un simple œuf de rien du tout. C'est pas comme si c'était un Pokémon rare, non plus. C'est juste un œuf, et-- RAAH, COMMENT T'AS PU CAPTURER TOUS CES POKÉMONS EN SIX JOURS, ARNO !?
— Tu ne vas pas remettre ça, si ? soupira le garçon.
— C'est vrai, blondinet, tu auras l'occasion de le rattraper, faut pas être triste~
— Je t'en ficherai de la tristesse, moi !

Et les deux garçons se jetèrent encore une fois dans une interminable joute verbale, bientôt rejoints par Luna qui chercha à peine à les calmer. Exaspéré, Arno leur jeta un œil discret par-dessus son épaule.
Wally était un coordinateur doué et un fin stratège. Sebii, malgré ses travers, était un génie du combat. Luna, pour finir, était une élève brillante qui deviendrait sans doute une excellente Topdresseuse.

Le garçon releva la tête et planta son regard en direction de la silhouette de Lavandia, qui se dessinait à l'horizon. Il raffermit sa prise autour de l'œuf au contenu mystérieux, et un petit sourire se dessina sur son visage.

Pour pouvoir tenir la comparaison avec eux, il allait devoir se montrer digne de sa nouvelle tâche.



BR1-CT09.EASTER EGG/fin