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Team Rocket X-Squad de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 18/05/2014 à 07:58
» Dernière mise à jour le 06/06/2020 à 12:00

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 236 : Les liens brisés
Siena n'enviait finalement plus trop à Vilius les fonctions qu'il avait pu occuper alors qu'elle jouait à la guerre. Etre Agent Spécial du Boss, et de surcroit l'Agent 002, le plus proche derrière le tout puissant Lord Judicar, avait certes quelque avantages. Les simples sbires s'inclinaient devant elle comme si elle était la réincarnation d'Arceus. Siena se rappelait avoir méprisé Zelan pour prendre plaisir à la soumission des autres, mais finalement, maintenant qu'elle était à sa place, c'était très grisant, comme sensation. Elle avait un bureau à elle au Quartier Général, et pouvait ordonner tout ce qu'elle voulait à n'importe qui, sauf au Boss, au général en chef et aux autres Agents.

Le pouvoir et la renommée étaient une chose, mais maintenant que la guerre était finie, Siena allait devoir en conquérir encore plus grâce à une autre sorte de guerre, qu'on nommait la politique. Les élections anticipées pour le futur Parlement se tenaient dans deux jours. Siena avait bien l'intention que ses partisans de la GSR en raflent une bonne quantité, aussi restait-elle désormais à Azuria pour faire campagne. Le Parlement et ce simulacre de démocratie décidé par Giovanni seront un bon moyen pour elle de gagner encore plus de pouvoirs indépendamment de ce que le Boss pourrait lui donner. Plus elle aurait de sièges au Parlement pour la GSR, plus elle pourrait influencer sur la politique de la région.

Et ce qu'elle voulait était simple : déclarer la guerre à Johto. Il était certain qu'Erend Igeus s'était réfugié là-bas. Johto avait toujours été un grand allié des Dignitaires, et la région n'allait sûrement pas rester les bras croisés tandis que la Team Rocket créait son pays à Kanto. Bien sûr, ni la population de Kanto, ni le Boss ne seraient favorables à une autre guerre sitôt la dernière finie. Siena devrait être patiente, et être fine politique. Et la politique, ce n'était pas vraiment son truc.

Heureusement, elle avait Silas avec elle pour la seconder. Malgré son accession au titre d'Agent 004, Silas continuait de la conseiller et de l'appeler « colonel ». Lui et Esliard faisaient des miracles quand il s'agissait de soigner son image. Siena était en train justement d'examiner leur nouvelle affiche de campagne pour la Team Rocket. Elle s'y voyait elle-même, en tenue de commandante de la GSR, l'air sévère et triomphante, avec derrière elle des centaines de drapeau de la Team Rocket. Et il y avait ce slogan qui disait : « Fille du général Tender. Petite-fille du Généralissime Karus. Etes-vous plus Rocket qu'elle ? »

- Vous êtes sûrs de votre truc, là ? Leur demanda Siena l'air sceptique.

- Bien évidement, Agent 002, répondit Esliard. Une affiche des plus patriotiques, qui ne pourra qu'interpeler tous les hommes et femmes loyaux envers la Team Rocket.

- J'ai des doutes moi. J'ai toujours tenté de forger ma réputation sur autre chose que mes liens de parentés avec Tender et Karus. Et puis, j'ai tué mon grand-père, tandis que j'ai envoyé chier mon père aux yeux de tous les Rockets.

- Ce n'est pas important ça, colonel, lui expliqua Silas. Il s'agit de créer une image de vous bien conforme à la Team Rocket traditionnelle. La GSR a tendance à effrayer ceux qui sont le plus ancrés dans une tradition de continuité de la Team Rocket. En mettant en avant vos liens avec ces deux grands noms, ça fera de vous et de vos candidats pour le Parlement avant tout des membres de la Team Rocket pour la Team Rocket. Faire campagne sous le symbole de la GSR pourrait être... problématique. Ça pourrait donner l'impression - fausse bien sûr - que vous faite campagne pour vous-même et non pour la Team.

Siena se retint de sourire. C'était pourtant la vérité. Elle ne pourrait transformer et moderniser la Team Rocket qu'en arrivant aux plus hautes fonctions. Mais Silas avait raison, valait mieux éviter de trop braquer le Boss, surtout qu'il était clair et net qu'il l'avait nommé Agent tout à fait à contrecœur.

- Bon, affichez ces horreurs dans toutes les bases Rockets alors, acquiesça-t-elle en rendant l'affiche à Esliard. Et pour la campagne auprès de la population non-Rocket, on a quoi ?

- Là, c'est tout le contraire, sourit Esliard. Il vous faudra passer la moins Rocket possible, et consommer votre différence avec elle.

Il lui tendit une autre affiche. Cette fois, Siena y était dans une tenue civile qu'elle ne se rappelait même pas avoir un jour porté. À coté d'elle, il y avait Ecleus, sous sa forme normale. La Siena de l'affiche irradiait la prestance et la force, et son regard était tournait vers l'horizon, vers l'avenir. Derrière, il y avait tout un amassement d'humains et de Pokemon qui les regardaient, elle et Ecleus, avec admiration. Le slogan était « Siena Crust, pour un lendemain glorieux à Kanto ». Siena était effaré par la niaiserie de la chose, mais face aux sourires énormément satisfaits de Silas et d'Esliard, elle n'osa rien dire. C'étaient eux les experts en marketing, après tout. Comme ils attendaient sa réaction, elle se força à dire :

- Euh... Oui. Ça a l'air... très impressionnant.

- Nous avons cherché à mettre en avant le coté dresseur de Pokemon, expliqua Esliard. Ceux sont eux qui seront le plus grand électorat populaire, celui que nous ciblons. On a hésité à vous faire apparaître avec des Pokeball, mais on y a renoncé. Ecleus suffit amplement à montrer à tous que vous n'êtes pas une dresseuse comme les autres.

Siena songea que si les dresseurs de Pokemon savaient tout le mépris et l'indifférence qu'elle pensait d'eux, ils ne voteraient sûrement pas pour les membres de sa liste.

- Qui d'autre fait campagne dans la Team ? Demanda-t-elle à Silas.

- Le Boss bien sûr.

- Evidement. Et Vilius ?

- Non. Il fait mine d'accorder son soutien à son père.

Siena se permit un ricanement.

- Amusant. Comme il a compris que je ne serai pas sa partenaire pour le propulser dans le fauteuil de son père, il pense pouvoir revenir dans ses bonnes grâce en se montant contre moi. Il doit pourtant se douter qu'après ce qu'on a fait, Vilius et moi, le Boss va se tourner plus que jamais vers Estelle pour sa succession. Elle a révélé ses propres candidats, j'imagine ?

- Oh que oui. Et tous font une campagne exclusivement basée sur l'anti-GSR. À les écouter, vous serez une abominable despote mégalomane, et moi, un comploteur et un lécheur de bottes. Je crois qu'Estelle n'a pas apprécié que je continue à prendre votre parti alors qu'elle espérait que ma nomination d'Agent me rendrait neutre.

- Je suis moi aussi surprise, admit Siena. Vous n'avez jamais été d'accord avec toutes mes mesures. Pourquoi continuer à me servir, alors qu'en tant qu'Agent, vous pourrez vous-même faire campagne ?

Silas réfléchit un moment, puis dit, apparemment à cœur ouvert :

- Parce que je crois que vous représentez réellement le futur de la Team Rocket. Je n'ai encore jamais rencontré quelqu'un avec un tel idéalisme et une telle volonté. Vous avez tant apporté en un an seulement... Je veux voir le monde tel que vous l'imaginez, ce monde unifié et ordonné que vous décrivez. Il est vrai que je trouve certaines de vos décisions un peu extrêmes, et c'est aussi pour ça que je reste à vos cotés, pour espérer pouvoir vous conseiller et amoindrir votre témérité.

Siena sourit faiblement. Un sourire sincère, dont elle n'avait quasiment plus l'habitude.

- Je vous remercie de votre sincérité et de votre loyauté, Silas. J'accorde à elle deux, ainsi qu'à votre amitié, une importance particulière.

Elle parlait réellement. Depuis qu'elle avait fondé la GSR, elle ne voyait en les autre que des moyens d'atteindre ses objectifs. Elle se fichait de ce qu'ils pouvaient bien penser d'elle. Sauf pour Silas. Elle voulait son approbation. Depuis un an, il était son partenaire. Il avait beau faire partie des Gardiens de l'Innocence - une secte dont Siena n'était pas loin de mépriser l'idéologie - Silas comptait beaucoup pour elle. Avec Horrorscor, il faisait office de voix intérieure. Tandis qu'Horrorscor la poussait à toujours plus de volonté pour acquérir le pouvoir, Silas lui conseiller la prudence pour acquérir la sagesse, mais tous les deux œuvraient dans le même but : la gloire de Siena. Elle ne pouvait pas encore dire qu'elle leur faisait totalement confiance, à l'un ou à l'autre. Elle n'était plus sûre de pouvoir accorder sa confiance à quiconque désormais. Mais elle les considérait comme de véritables amis. Sans doute les deux seuls qu'elle avait, désormais. Elle secoua la tête, comme pour chasser ce sentimentalisme écœurant.

- Revenons à la campagne. Savons-nous qui mène les listes parmi les civils ?

- Le professeur Chen est le plus visible, bien sûr, reprit Silas. Il semble accepter, avec résignation, la victoire de la Team Rocket sur Kanto, mais ne va sûrement pas nous laisser régner à notre guise.

- Giovanni compte traiter directement avec lui, de toute façon. Chen est la clé de Kanto, maintenant que les Dignitaires et Lance sont hors-jeu. Tant qu'il accepte de jouer le jeu du Parlement, on pourra gouverner.

- Oui. Les dresseurs qui sont derrière lui ne nous sont pas automatiquement défavorables, mais ils attendent un geste d'apaisement de notre part. Si nous libérions le Général Lance et que nous lui accordons l'amnistie...

- Je ne peux pas faire ça, et vous le savez, contra Siena. Si je libère Lance, il va sans nul doute rejoindre Erend Igeus à Johto. D'après ce que nos espions affirment, Igeus a déjà pris le contrôle de l'armée là-bas.

- Je doute qu'Igeus veuille la guerre entre nos deux régions. D'ailleurs, l'armée de Johto ne représente rien du tout. Elle est dirigée par un général incompétent nommé par nos anciens Dignitaires, et ne compte qu'un millier d'homme...

- Raison de plus pour ne pas leur remettre Lance. Il serait capable de faire de Johto une menace. Si nous...

Mais Siena fut coupée par le son d'une biperie provenant de son communicateur. Ce n'était pas un appel, juste un message écrit.
« J'ai à te parler. C'est important. Viens à 18h00 aux ruines de Céladopole, seule. »
Et le message était signé Penan.


***


Penan n'avait pu se sortir les paroles de Vrakdale de la tête. Siena aurait tué quatre de ses anciens cadets et détruit une prison Rocket dans le but de libérer un criminel pour s'en servir secrètement à son compte. Penan n'avait pas voulu y croire. Impensable. Certes, Siena avait changé ces derniers temps, mais pas au point de s'en prendre à ses camarades d'autrefois, dont l'un d'entre eux avait été très proche d'elle. Ça irait contre tout ce que Penan lui avait enseigné, les liens qu'il avait tenté de forger entre camarades Rockets.

Pourtant, pour cesser de se torturer l'esprit, il était allé enquêté. Il s'en voulait de douter de Siena, mais il ne retrouverai la paix que lorsqu'il aurait pu la mettre hors de cause. Hélas, ce ne fut pas le cas. Il était d'abord allé sur les lieux de l'explosion. Les experts Rockets envoyés là-bas avait conclut à une attaque surprise du gouvernement. Il était vrai que cette prison n'était pas réellement protégée, car la Team Rocket n'aurait jamais pensé que le gouvernement irait attaquer une prison.

Mais apparemment, Penan avait quelque années d'expériences de plus que ces soit-disants experts qui ne s'étaient pas trop cassés la tête. L'explosion ne portait pas du tout la marque du gouvernement. Penan savait reconnaître une bombe Rocket quand il en voyait le résultat, il en avait utilisé assez dans le passé pour ça. Mais ça aurait pu être une coïncidence. Alors il était allé chercher plus loin, et surtout plus discrètement, car il avait enquêté sur la GSR même.

C'était très risqué s'il se faisait prendre, mais Penan était probablement le meilleur soldat de toute la Team. Il connaissait les combines pour enquêter discrètement, même sur quelque chose d'aussi gros que la GSR. Et bingo, en fouillant leurs données, il avait repéré une anomalie datant du jour où la prison avait explosé. Une unité de la GSR avait vraisemblablement quitté leur base, mais sans aucune destination à la clé. Et en creusant encore plus loin sur les registres du personnel, il était clair que quelqu'un avait rejoint l'unité ce jour-même. Le fait que ce quelqu'un ne soit pas inscrit clairement, et qu'il n'ai pas de localisation fixe voulait tout dire.

Pour conclure, Penan avait espionné quelque membres de la GSR à leur insu. Beaucoup parlaient de la bataille de Safrania, et le nom de Crenden avait surgi quelque fois. Plus aucun doute possible. Siena avait bien attaqué cette prison, tué les anciens cadets de Penan et toute la garnison présente. Il en avait connu une grande tristesse. La faute de l'élève était celle de son professeur, tout comme la faute de l'enfant était celle de celui qui l'avait élevé. Penan n'avait pas su empêcher Siena de devenir ce qu'elle était. Qu'avait-il mal fait avec elle ? Siena avait toujours été bien plus facile à comprendre que les jumeaux. Une fille obéissante, ne se laissant pas entraîner par ses émotions, effectuant son travail toujours très adroitement. Mais au final, Penan n'avait jamais vu ce qu'il y avait sous ce verni. Même toute jeune, Siena n'avait jamais laissé rien transparaître de ses émotions.

Penan s'en souvenait encore, quand Tender était venu le voir, après l'accident de laboratoire qui avait couté la vie à Livédia. Il lui avait amené Siena, qui parlait à peine, et les jumeaux, encore bébés. Siena venait de perdre sa mère, et son père la confiait à un inconnu. Pourtant, elle avait rarement pleuré. Penan en avait conclu qu'elle était forte. Mais peut-être ce traumatisme était-il plus profond, sommeillant en elle, bien caché de tous. Penan n'avait jamais pu parler à cœur ouvert avec Siena. Une fois, alors qu'elle avait dix ans, elle avait disparu de la base pendant des mois entiers, et n'avait jamais révélé pourquoi ni où.

Oh oui, Siena Crust avait bien des secrets, car elle ne se confiait jamais à personne. Elle affrontait tout elle-même. Et cette envie irrépressible de tout dominer qui semblait l'habiter aujourd'hui, peut-être venait-elle de son enfance qu'elle n'avait pas pu contrôler. Ou alors, sans jamais le voir, Penan avait élevé un serpent, un être pourri de l'intérieur dès le début. Il ne savait pas. Mais ça n'avait aucune importance, à présent. S'il y avait une chose à laquelle Penan tenait plus que tout, c'était ses enfants. Tous ses enfants. Tous les jeunes cadets qu'il avait entraîné. À chaque fois que l'un d'eux était mort, Penan avait toujours fait en sorte de les venger. C'était une promesse qu'il s'était faite à lui-même. Et le commandant Penan ne brisait jamais ses promesses, pour qui que ce soit.

Mais avant, il allait faire face à Siena. Il n'allait pas l'attaquer par surprise. Il devrait savoir. Elle aussi devrait savoir. Il lui devait, et le devait à Livédia. Mais ensuite, plus d'honneur, plus de pitié, plus de remord. Penan avait hésité à en parler au Boss. Si Giovanni avait appris que Siena était la responsable de ce crime contre la Team Rocket, il n'aurait eu d'autre choix que d'agir. Ça aurait été du devoir de Penan de l'avertir. Mais il ne l'avait pas fait. Car pour Penan, la vie et la mort de ses enfants passaient avant son devoir envers la Team Rocket. Il règlerait ça lui-même avec Siena. Et si ensuite le Boss ou la GSR décidait de le punir, il l'accepterait sans mal.


***


Après avoir longuement hésité à y aller, Siena s'était finalement rendue au rendez-vous de Penan. La dernière fois qu'ils s'étaient parlés, Siena l'avait envoyé balader. Elle n'avait pas changé d'opinion. Penan faisait parti de la vieille garde qui n'acceptait pas le changement qu'elle voulait imposer. En cela, il était un ennemi, et Siena ne voulait rien entendre qu'il pourrait avoir à lui dire. Mais elle était curieuse. Penan était un homme sérieux, elle le savait. Jamais il ne lui proposerai un rendez-vous seul à seul s'il n'avait pas une bonne raison. Ce n'était sûrement pas pour la féliciter pour la prise de Safrania ou pour la tancer de son attitude.

Et puis, en dépit de leur positions divergentes, Siena avait encore du respect pour l'ancien commandant. Il l'avait élevée, elle et les jumeaux, alors que rien ne l'y obligeait. Il l'avait nourrie, éduquée, entraînée, et même aimée. Pour Siena, il faisait bien plus office de père que Tender, qui s'était débarrassé d'elle comme un lâche. La jeune femme ne souhaitait pas qu'ils soient fâchés. Elle souffrait de perdre peu à peu l'amour de ses proches. Mais elle l'avait accepté. Si elle devait se couper de tout le monde pour créer le monde idéal qu'elle voulait, eh bien ainsi soit-il.

Céladopole n'était plus qu'un champ de ruine et de désolation depuis le passage des Shadow Hunters. Il n'y avait personne. On s'était juste contenté d'extirper les cadavres, puis on avait tout laissé tel quel. Question reconstruction, Safrania était prioritaire, d'autant que pour Céladopole, il ne s'agissait plus de reconstruire, mais de créer bel et bien une nouvelle ville. Penan l'attendait au centre, à coté de ce qui avait été jadis l'hôtel de ville. Il paraissait tendu, et encore plus sombre que d'habitude. Horrorscor l'interpella dans son esprit.

- Prends garde. Je sens comme une envie de meurtre en lui.

De meurtre ? Certes, leur relation n'était pas au beau fixe pour le moment, mais de là avoir envie de la tuer... Mais elle suivi le conseil du Pokemon, et laissa sa main près de l'éclair d'Ecleus.

- Commandant, commença Siena. Quel est le but de cette rencontre ?

- Cela dépendra de ta réponse, jeune fille.

Jeune fille... C'était ainsi que Penan l'appelait toujours autrefois, généralement quand il était en colère contre elle.

- Ma réponse à quoi ?

- À une question toute simple. Es-tu responsable de la destruction de la prison de Basroch, et donc de la mort de Richel, Mael, Clevis et Straint, qui furent tes frères d'armes à une époque ?

Oh, c'était donc ça ? Siena se serait donnée des gifles. Bien sûr que Penan allait enquêter là-dessus. Il ne laissait jamais passer la mort d'un de ses anciens cadets. Et s'il avait appris la vérité, c'était qu'elle n'avait pas assez couvert ses traces. Maintenant, inutile de mentir. S'il y avait bien un homme qui pouvait repérer un mensonge les yeux fermés de Siena, Galatea ou Mercutio Crust, c'était lui.

- Oui, dit-elle simplement.

Penan encaissa la réponse d'un simple cillement des yeux.

- Pourquoi ?

- Car j'avais besoin de Crenden pour prendre Safrania. Si j'en avais fait la demande, le Boss ne me l'aurai jamais autorisé.

- Et pour cela, tu as tué tes anciens camarades ?

Siena soupira, agacée.

- Vous m'avez toujours enseigné la notion de sacrifice pour atteindre la mission. J'ai sacrifié ces quatre là, ainsi que quelque autres, pour gagner cette guerre au plus vite. Pour la Team Rocket !

- Le sacrifice pour atteindre un but est louable. Mais il doit venir et être accepté de la personne concernée. Il s'agit alors d'un don de vie pour ses camarades, né de la confiance des uns des autres. Ces vies ne t'ont pas été données, Siena. Tu les as volées. Tu as brisé les liens entre camarades, tu as détruit cette confiance, et ce n'était pas pour la Team Rocket, mais pour toi. Je ne peux te pardonner cela. Tu vas expier tes fautes, ici-même.

Siena fut prise de court. Dès que Penan eut fini sa phrase, elle se sentit projetée vers l'avant, suite à une série de petites explosions derrière elle. Comme Penan ne faisait montre d'aucune surprise, c'était lui qui avait du placer ces bombes. Et comme Siena n'avait rien vu dans Futuriste, il devait avoir activé le détonateur discrètement, sans doute les mains dans le dos. Quelle erreur grotesque elle avait fait ! Une erreur qui pouvait lui couter la vie. Car Penan, bien que n'ayant aucun pouvoir, était le plus grand tueur de la Team Rocket. Il était vieux, mais sa vieillesse reflétait l'expérience, pas la faiblesse.

Projetée au sol, Siena roula immédiatement afin d'éviter le tir de pistolet de Penan. Son bouclier d'Eucandia ne marchait que si elle avait la main tendue devant elle. Et Penan devait le savoir, car il lui sauta dessus pour lui bloquer le bras droit. Elle souleva alors l'éclair d'Ecleus pour tenter de lui enfoncer la pointe dans la gorge, mais fut contrée par l'autre bras de Penan. Siena avait beau être entraînée physiquement, elle n'arrivait pas à tenir contre lui, et Ecleus se retourna peu à peu contre elle-même. Et elle ne pouvait pas le déployer en forme normale si près d'elle. Il les tuerait tous les deux en se métamorphosant.

N'ayant pas d'autre option pour se dégager, Siena serra l'éclair de telle sorte à lui faire cracher sa foudre. Siena et Penan furent tous les deux électrocutés, mais l'ayant anticipé, Siena fut remise avant lui. Elle leva son brassard d'Eucandia vers Penan et tira un rayon violet. Les reflexes de Penan étaient encore affutés, car il l'évita. Siena jura. D'ordinaire, c'était elle qui évitait les attaques des autres grâce à Futuriste, et qui se contentait de trouver une faille dans l'attaque adverse pour ensuite l'achever. Mais là, les rôles étaient inversés. Penan n'avait rien d'un soldat ordinaire. Il semblait prédire tous les gestes de Siena, mais lui n'avait pas Futuriste. Il les anticipait tout simplement parce que c'était lui qui les lui avait appris.

Quand Siena abattit Ecleus, Penan roula et dut activer quelque chose pendant ce temps, car une autre explosion retenti tout près. Pas assez près pour être dangereuse, mais assez pour distraire Siena une seconde. Une seconde que Penan mit à profit pour dégainer un autre pistolet et faire feu. Futuriste sauva Siena, mais sa distraction avec l'explosion ne lui permit pas d'éviter la balle. Elle ne put que bouger assez pour se la prendre dans l'épaule à la place du cœur. Tâchant d'ignorer la douleur, elle se servit de son gant magnétique pour envoyer Ecleus sur Penan. Le commandant roula en dessous pour l'éviter, et étant donné la faible distance entre eux, Siena ne put rediriger la trajectoire de l'éclair à temps. Elle en perdit le contrôle avec son gant pour pouvoir utiliser ce dernier afin de repousser les prochains tirs de Penan.

Après avoir dévié les balles avec sa force magnétique, Siena attira jusqu'à elle le pistolet de Penan. Mais un autre objet métallique vint avec lui. Une grenade, que Penan venait de dégoupiller dès que Siena s'était mise à se servir de son gant. Maudit soit-il ! Avait-il étudié chacune de ses armes et mis au point une stratégie pour toutes ?! Siena ne pouvait pas inverser le flux magnétique d'un coup sans délai, mais elle pouvait le ralentir. La grenade explosa donc entre eux d'eux. L'explosion, si elle ne leur causa que des blessures légères, affecta grandement leurs tympans. Siena se rendit compte qu'elle n'entendait plus rien, mais ça n'eut pas l'air de gêner Penan, qui repassa à l'attaque armé d'un couteau.

Siena contra et rendit coup pour coup. Même si elle était moins forte physiquement que Penan, avec Futuriste, elle avait l'avantage au corps à corps. Malgré son âge, Penan était rapide, précis, exécutant plein de feintes qui auraient trompé la plupart des gens. Mais il était un livre ouvert pour Futuriste. Siena sentit qu'elle reprenait le dessus, et sourit en conséquence. Un sourire qui se transforma bien vite en grimace de douleur quand Penan effectua un geste que Futuriste ne put retranscrire à l'avance. Ou plus exactement, il le retranscrit, mais Siena ne put le voir, tout comme elle n'aurait pas pu le voir dans le temps réel. Un discret croche patte qui la déséquilibra. Concentré sur ses bras, elle n'avait pas fait attention à ses pieds. Penan profita de cette ouverture pour planter son couteau en plein dans son brassard d'Eucandia. Comme il avait atteint la source d'énergie, Siena fut obligée de reculer précipitamment et de se le retirer avant qu'il n'explose.

Même Futuriste ne fut pas assez rapide pour gérer à la fois le brassard et Penan. Au moment où Siena le lança le plus possible d'elle, elle sentit une douleur fulgurante à son genoux, que Penan venait sans doute de briser avec une prise du pied. Elle fut ramenée à terre, plaquée par son ancien instructeur et père adoptif, sans aucun moyen de se défendre. Penan sorti un autre couteau. Un tout particulier, que Siena n'avait pas oublié. Le poignard finement ouvragé que Mercutio, Galatea et elle-même lui avait acheté il y a deux ans pour ses soixante-dix ans. Grâce à Futuriste, Siena vit le couteau se poser sur sa gorge avant même qu'il ne bouge. Quelle joie, de pouvoir contempler sa propre mort quelque secondes à l'avance...

- Je suis désolée de t'avoir déçu, père... dit faiblement Siena. Dis-le à Mercutio et Galatea, que je suis désolée...

- Ils le savent déjà, répondit Penan en se préparant au coup fatal.

À ce stade, Horrorscor n'eut d'autre choix que d'intervenir pour éviter la mort de son hôte, et donc aussi celle des deux tiers de son âme par la même occasion. Il ne pouvait pas attaquer directement, mais fit en sorte, avec ses pouvoirs des ombres, de provoquer une courte illusion dans l'esprit de Penan. Ce ne fut qu'une image, qui ne dura qu'une seconde. Celle de la Siena enfant, innocente, qu'il avait connu il y a des années, se superposant à celle, adulte, qu'il s'apprêtait à tuer.

Quand il la vit, il hésita, et perdit de sa poigne sur son couteau. C'était ce dont Siena avait besoin. Elle utilisa à pleine puissance son gant magnétique pour s'emparer du poignard, et avant que Penan ne réagisse, elle le lui planta en plein cœur. Les yeux du commandant s'agrandirent sous la douleur et la surprise, et aussi sous le choc de sa propre stupidité. Il avait hésité, prisonnier de son passé, et il en payait le prix. Siena se releva en respirant lourdement, tandis que Penan s'affalait au sol. Il tenta de s'arracher le poignard de la poitrine pour continuer à se battre, mais Siena secoua la tête.

- C'est terminé. Ne lutte pas. Laisse-toi aller, père. Pars tranquillement.

Penan regarda Siena avec un tel mépris qu'elle se sentit obliger de se justifier.

- C'est pour mon nouveau monde. Tu devais mourir. Je devais vivre. C'est mon destin de transformer ce monde, de le rendre plus fort et plus juste. Tu devrais être fier ! La fille que tu as élevée et entraînée va changer le monde de l'intérieur ! La Team Rocket ne sera jamais aussi forte que grâce à moi ! Je vais apporter l'ordre à tous !

Penan respirait avec difficulté, et du sang s'écoulait de ses lèvres. Mais il parvint à dire :

- Tu n'as pas... gagné. Mercutio et Galatea... t'arrêteront. Tu ne détruiras pas l'avenir.

- Je suis l'avenir, répliqua Siena.

Penan se contenta de ricaner.

- Je vais t'attendre... tranquillement dans le Monde de Giratina. Tu viendras... me rejoindre bien assez vite, j'en suis sûr. Et alors, ça va chauffer... pour ton matricule... jeune fille.

C'est sur ces dernières paroles de défi que le commandant Penan mourut. Siena resta un moment immobile, comme assommée par ce qui s'était passé. Alors elle se mit à réfléchir à la suite. Si quelqu'un la voyait, couvertes de blessures, proche de l'endroit où Penan était mort, ça éveillerait les soupçons. Elle devait se soigner avant de prévenir la GSR. Mais qui prévenir ? Ian ne parlerai jamais, il était trop loyal, mais il n'avait pas le pouvoir de venir ici avec une capsule médicale. Seul Silas savait où elle se rendait. Lui connaîtrait la vérité, quoi qu'il arrive. Elle était obligée de lui faire confiance, maintenant.

Et puis, Penan avait-il parlé à quelqu'un de ses soupçons avant de venir ici ? Si c'était le cas, raison de plus de mettre Silas au courant pour qu'il enquête et qu'il fasse disparaître qui il fallait. Elle appela donc l'Agent 004, lui demandant de venir aussi rapidement et discrètement que possible avec une capsule Zerecorps, ces engins qui guérissaient pratiquement tout en moins de deux. Silas ne posa aucune question, et arriva une demi-heure plus tard, dans un petit transport de la GSR. Quand il vit le cadavre de Penan, il haussa un sourcil.

- Je l'ai tué, avoua Siena. Il avait découvert pour la prison. Il m'a attaqué. C'était lui ou moi.

Silas hocha la tête en silence. Il ne dit rien. Siena sentait qu'il comprenait. Et elle lui en fut reconnaissante, d'autant qu'il ne releva pas non plus les larmes qui coulaient sur les joues de Siena. Quand Siena fut remise après son passage de la capsule, elle dit :

- Maintenant, partez. Je vais contacter la GSR par les canaux officiels. Les capitaines vont venir. Je leur dirai que j'ai trouvé Penan mort en arrivant. Il m'a donné rendez-vous pour me dire quelque chose, mais a été tué avant que je n'arrive, sans doute par quelqu'un qui ne voulait pas qu'il me parle. Vous saurez garder un secret, Silas ?

- Garder les secrets est ce que je sais faire le mieux, colonel.

Cette phrase mit Siena mal à l'aise. Désormais, elle le savait, elle dépendait exclusivement de Silas. Si jamais il voulait un jour causer sa perte, il avait tout pour. Mais Horrorscor tenta de la rassurer, et lui dit :

- Ne t'inquiète pas. Il ne parlera pas. Car lui aussi a des secrets. Et j'en connais beaucoup.

Siena ne lui demanda pas plus de précision. Elle devait se préparer pour l'arrivée de ses hommes. Elle devait paraître convaincante. Son abasourdissement était tel qu'elle n'aurait sans doute pas de mal. Elle n'arrivait pas encore à réaliser qu'elle venait de tuer son père adoptif. Les capitaines arrivèrent bien vite. Tandis que Ian s'inquiétait pour elle-même, Faduc se précipita sur le corps de Penan et se mit à pleurer à grands cris. Oui, lui aussi avait été élevé un temps par Penan. Il était tout autant un fils pour lui. Siena le rejoignit, et lui posa une main sur l'épaule.

- Nous trouverons le coupable, dit-elle. Je te le promets.