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Duel au sommet de olyn



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» Auteur : olyn - Voir le profil
» Créé le 20/08/2013 à 14:39
» Dernière mise à jour le 20/08/2013 à 14:39

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Bonus : Voyage sans retour
- ...et alors je lui mettais mon poing dans sa sale tête de piaf. Ça, ça me faisait un bien fou. Ensuite je lui immobilisais les ailes en les frappant jusqu'à ce qu'elles soient complètement inutiles, et puis je lui brisais le bec d'un coup de pied avant de l'achever proprement.

Teigne termine sa tirade en frappant le sol de ses poings. Elle a rêvé toute la nuit d'un nouveau combat contre le stupide volatile qu'ils ont affronté la veille, et elle a décidé d'en faire le récit complet au Florizarre. Il l'a patiemment écoutée sans l'interrompre une seule fois - une qualité très appréciable, et c'est d'ailleurs en partie pour ça qu'elle l'a choisi comme interlocuteur.

- Tes rêves sont toujours aussi violents ? interroge le gros Pokémon plante.

La Colossinge lui jette un regard étonné.

- Pourquoi, tu rêves de quoi toi ?

- Très rarement de combats, à vrai dire. En général mes songes mettent en scène soit la période où Carapuce, Salamèche et moi étions encore petits, soit notre groupe et notre mission. Cette nuit par exemple, j'ai rêvé que j'éloignais notre dresseuse de l'influence de l'autre humain.

Teigne grogne. Quelque part, ça ne l'étonne pas, mais dans le genre rêve stupide, ça se pose là.

- Tu te fais du mouron pour rien, réplique-t-elle. Moi ce que j'en pense c'est que cet humain est la meilleure chose possible qui aurait pu nous arriver. Il nous a rendus encore plus forts !

- Mais notre humaine est en train de changer à cause de lui, et je n'aime pas ça. Je ne comprends pas pourquoi il lui fait ça, ni comment, et j'ignore où et quand il va s'arrêter.

Il fait une grimace de frustration en prononçant ses mots - enfin Teigne pense qu'il s'agit d'une grimace de frustration en tout cas. Il n'est pas simple de déchiffrer les expressions du Florizarre parfois.

- Si Grignotte était là, il saurait, lui, continue le Pokémon plante d'une voix lasse. Il aurait déjà analysé la situation et trouvé une solution.

- En parlant des disparus... maugrée Teigne. Regarde qui se ramène.

Elle pointe un doigt vers celle qu'elle a surnommée la déserteuse, une raillerie qu'étrangement aucun autre membre du groupe n'a reprise. (Teigne ne comprend pas pourquoi, c'est pourtant la plus stricte vérité, cette petite pisseuse de Feunard les a lâchés du jour au lendemain.) La Feunard en question s'approche d'eux d'un pas mesuré, le vent jouant dans son pelage, ébouriffant les poils de ses queues de bourrasques joueuses.

- Qu'est-ce que tu veux, pleurnicheuse ? se moque Teigne lorsque la Feunard arrive à leur hauteur. T'as perdu une de tes queues et tu veux qu'on t'aide à la retrouver, c'est ça ? Pourquoi tu ne retournerais pas te rouler en boule dans ton trou, il paraît que ça résout tous les problèmes. Oh, attends, non, ça c'est que tu penses, et c'est un beau ramassis d'âneries.

- Je m'en vais, annonce la Feunard.

- Hein ? crache la Colossinge, estomaquée.

Le Florizarre, lui, pousse un soupir.

- C'est dommage, tu sais, déclare-t-il. J'avais l'impression qu'on s'entendait plutôt bien et à mon avis, tu passes à côté de quelque chose. Mais au final c'est ta vie, ton choix.

- Mais non ! explose Teigne. Mais pas du tout ! Qu'est-ce que tu racontes là, le gros ? Déjà qu'elle n'a rien foutu depuis des lustres, et maintenant Madame veut se barrer parce que quoi, son n'amoureux est mort ? C'est quoi cette attitude, tu imagines si on faisait tous pareil ? Si on baissait tous les bras à la moindre difficulté ?

- C'est tout de même une sacrée difficulté, fait remarquer Salade alors que la Feunard ne bronche pas.

- Et alors ? rétorque Teigne. Elle n'est pas la seule à avoir perdu un proche. Moi aussi j'en ai bavé, sûrement plus qu'elle d'ailleurs, et je ne me suis pas effondrée pour autant, je suis allée de l'avant. Mais elle, elle se terre dans son trou et elle passe ses journées à pleurer. Elle nous affaiblit tous avec ses sentiments. Ce n'est qu'une sale traîtresse, voilà tout.

Après cette dernière phrase accusatrice, la Colossinge croise les bras. Elle a les poings qui la démangent, mais elle sait très bien que l'autre interviendrait, et ça l'énerve prodigieusement. Il se prend pour celui qui fait les règles, tout ça parce qu'il a été le premier de leur petite troupe à avoir été choisi par leur humaine. Pfff.

L'humeur de Teigne s'améliore d'un chouilla lorsqu'elle constate que les autres membres de l'équipe les rejoignent à leur tour, sans doute alertés par ses éclats de voix. Bien. Eux seront forcément de son côté, et ils sauront trouver les mots pour expliquer au gros que le seul remède au problème de la Feunard est un poing dans sa gueule. Le sien de préférence.

C'est d'abord Plouf qui traîne sa grande carcasse jusqu'à eux. (Sérieusement, comment fait-il pour se déplacer ? Si le corps de Teigne était aussi grand et long, elle est certaine qu'elle se casserait tout le temps la figure. Mais d'un autre côté, elle pourrait sûrement faire de gros dégâts avec une queue pareille, sans parler des dents du Léviator... C'est à considérer.) Puis arrive ce satané volatile qu'elle doit se retenir de frapper. Bon, il faut cependant admettre qu'il a du cran. Lors du combat contre l'oiseau jaune la veille, il lui a foncé dessus tête la première. Malgré le fait qu'il soit un piaf, il s'en sort mieux question courage que l'autre peureuse de Feunard.

Les derniers à rejoindre le groupe en formation sont le Magmar et le petit Saquedeneu qui ne le lâche pas d'une semelle. Teigne cherche brièvement le Ronflex des yeux, et le trouve au même endroit que tout à l'heure, affalé dans l'herbe en train de pioncer. Rien d'étonnant là-dedans.

- Il se passe quoi ? s'enquiert Vésuve en regardant tour à tour tous ceux présents. Tu as encore besoin de te défouler, c'est pour ça que tu cries ? Moi je suis partant, ajoute-t-il à l'intention de Teigne.

D'habitude la Colossinge n'aurait jamais décliné pareille invitation, mais à l'instant présent la colère qui bouillonne en elle n'a qu'une seule cible, et cette dernière est bien plus poilue que le Magmar.

- La Feunard a décidé de nous abandonner, révèle-t-elle, la rage sous-tendant chacun de ces mots.

- Ah oui ? Ça ne me surprend pas, indique Plouf.

- C'était déjà le cas depuis longtemps, non ? lance l'oiseau.

- Si c'est ce qu'elle veut... glisse le Magmar.

Mais... ils sont tous de son côté ! Comment osent-ils la soutenir ? Ne comprennent-ils pas que la Feunard n'est qu'une faible qui n'a même pas le cran d'affronter la peine qu'elle ressent ? Teigne se sent trahie, elle qui croyait que les autres réagiraient intelligemment...

Seule une voix s'oppose à tous ces acquiescements, une petite voix fluette et ridicule :

- Mais ti le monde il est tri tri gentil ici ! couine le Saquedeneu. Pirquoi ti veux partir ?

- Et il aura fallu que ce soit le plus jeune de nous tous qui pose la question la plus évidente, dit la Feunard, prenant enfin à nouveau la parole depuis son annonce choc. Tu vois Teigne, ce petit bonhomme est plus malin que toi. Il a mis la patte sur la question cruciale.

Teigne ronchonne. Nia, nia, nia. Et puis qu'est-ce que ça veut dire "cruciale" d'abord ? Si la Feunard balance encore un seul mot compliqué, elle va lui faire voir son poing de plus près. Tout ça pour l'embrouiller en plus, elle en est sûre.

Le Florizarre lui doit connaître la signification du mot, car c'est lui qui prend la parole ensuite :

- Nous t'écoutons, Feunard. Quelle est la raison de ton départ ?

- J'ai eu un bébé.

Silence.

Gros gros silence.

Teigne se donne un petit coup de poing pour être certaine qu'elle ne rêve pas. Peut-être est-elle à nouveau piégée dans une vision provoquée par un Pokémon psy ? Est-ce un nouveau genre de torture, lui faire subir des absurdités ?

- J'ai cru entendre que tu disais que tu avais eu un bébé, énonce-t-elle calmement.

- C'est ce qu'elle a dit, confirme Salade, appuyé par un hochement de tête de Plouf.

Quoi ? La Colossinge se demande à présent si elle a correctement débouché ses oreilles ce matin au réveil.

- Mais comment...

- Tu veux qu'on t'explique ? s'enquiert le Léviator.

Teigne fronce le nez. Non mais pour qui il se prend, le gros poisson bleu ?

- Je sais comment on fait, réplique-t-elle sèchement, avant de se tourner vers la Feunard. Mais avec l'autre... le Sablaireau... sérieusement ?

Il avait l'air tellement empoté qu'elle ne se serait jamais imaginé qu'ils aillent jusque là. Et voilà, maintenant elle vient de les imaginer en pleine action. Elle n'a vraiment pas besoin de ça. Mais un bébé... S'il y a un bébé, alors ça change tout. Et ça explique tout. Le comportement de la Feunard qui ne bougeait pas de son trou, occupée à couver son œuf, ses cachotteries, sa décision de s'en aller... Teigne a l'impression qu'on vient de la frapper en pleine figure. Comme elle a eu tort. La Feunard n'a rien d'une peureuse, bien au contraire.

La Colossinge prend soudain conscience que tous les autres la regardent, y compris la Feunard dont les yeux rouges sont fixés sur elle, en attente. Elle sent ses poings s'échauffer, encore, mais cette fois-là la réaction instinctive, non justifiée, et de toute façon sa colère s'est évanouie. Elle a compris.

- Je te demande pardon, Feunard, s'excuse-t-elle, abandonnant les insultes et les termes rabaissants.

- Et tu es pardonnée, répond l'autre.

Elle tend une patte vers Teigne, qui pose alors sa main dessus en retour. Deux sortes de poils blancs s'entremêlent un instant par ce contact amical.

- Bien, vous êtes tous d'accord alors ? Aucun d'entre vous ne s'oppose à mon départ ? interroge ensuite la Feunard.

- Aucune opposition, affirme Salade.

Teigne remarque que son regard s'est porté sur le coin de buisson où la Feunard avait élu domicile : il doit être en train d'essayer d'apercevoir le bébé. Il est bien trop poli pour demander à le voir directement, même si la curiosité doit sûrement le dévorer.

- C'est ta vie, c'est toi qui décides, renchérit Vésuve en expulsant un petite nuage de fumée par la bouche. Et j'aurais sûrement agi de même si j'avais été à ta place.

- Un parent se doit de faire les meilleurs choix possibles pour ses enfants, déclare Plouf d'une voix solennelle.

- Moi ça me va... annonce l'emplumé sans paraître trop concerné.

Teigne se rappelle que c'est la Feunard qui a aidé à sa capture, ce qui explique peut-être qu'il ne la porte pas dans son cœur. Ou alors il a juste mal digéré son petit-déjeuner - impossible de savoir avec ces fourbes ailés.

- Mi aussi ! s'exclame le Saquedeneu en se dandinant d'un pied sur l'autre.

- Reste à régler la question de notre dresseuse, conclut le Florizarre. Crois-tu qu'il faille lui en parler ?

La Feunard émet un grognement négatif.

- Non. Elle ne comprendrait pas. Elle voudrait nous protéger, moi et la petite, sans doute persuadée qu'elle agit pour le mieux. Et puis elle en parlerait sûrement au premier prétendant, et lui il est mille fois plus dangereux qu'elle. Mieux vaut qu'elle ne sache rien. Est-ce que je peux compter sur vous de ce côté-là ?

Ribambelle d'acquiescements. Teigne est la première à opiner du chef. Que la Feunard parte avec son bébé, c'est la meilleure solution à ses yeux. Il y a d'autres choses que le combat dans la vie. Elle est responsable d'une mini Goupix à présent, et il faut qu'elle en prenne soin. La petite grandira déjà sans son père, pas question que sa mère se mette en danger en repartant au combat, même si elle en est probablement capable. Teigne ne pense pas que leur dresseuse l'y obligerait. L'autre humain cependant ce n'est pas si sûr, et elle comprend soudain les doutes exprimés par le Florizarre tout à l'heure.

- Plus vite tu partiras et mieux ce sera, déclare-t-elle, échangeant un regard entendu avec le gros Pokémon vert alors qu'il se déplace ostensiblement pour bloquer la vue de la Feunard depuis la cuisine.

- Justement, à ce propos... lance la Feunard. J'ai besoin de votre aide. Il faut que l'un d'entre vous aille casser ma boule-prison, afin de couper tout lien avec notre dresseuse.

- Je m'en occupe, propose Teigne en frappant ses poings l'un contre l'autre. Où est-ce qu'elle est ?

- C'est ça le problème, je n'en ai aucune idée, avoue la Feunard d'un air dépité.

Elle fixe alors Salade avec espoir. Il est certain que si quelqu'un est au courant de l'organisation des affaires de leur dresseuse, c'est son tout premier Pokémon.

- Je n'en suis pas sûr, dit-il cependant. Peut-être au fond de son sac ?

- Vis parlez di quoi ? demande le Saquedeneu.

Teigne soupire. Il ne pourrait pas aller jouer ailleurs lui ? Les adultes sont occupés, là.

- Notre dresseuse garde une boule rouge et blanche quelque part qui empêcherait la Feunard de partir, résume patiemment Vésuve. Il faut qu'on la détruise mais on ne sait pas trop où elle est.

- J'en ai vi une, j'ai en vi une ! piaille le petit Pokémon plante, soudain tout excité. Sir son bireau dans la chambre, et mime qu'elle la touche tit les soirs en rigardant par la fênitre avant de si coucher !

Salade laisse échapper un léger grognement.

- Tu vois, elle tient à toi, souligne-t-il, visant la Feunard.

Cette dernière ne répond pas. Teigne décide qu'il est temps de passer à l'action.

- On est sûr que c'est celle-là ? vérifie-t-elle auprès des autres. Ça pourrait être celle du Sablaireau ou de la Persian après tout non ?

- Celles-là sont grises sur leur partie supérieure, fait remarquer Plouf. Or le petit a bien vu une rouge, n'est-ce pas ?

- Rige, oui ! confirme le Saquedeneu avec entrain.

- Est-ce que tu sais au moins quelle couleur c'est, le rouge ? demande la Colossinge, pas franchement convaincue.

- Rige ! obtient-elle en réponse, et une liane se tend pour pointer l'un des bras de Vésuve, qui est effectivement de la couleur en question.

- Tu ne devrais pas douter de lui, ajoute le Magmar. C'est un petit bonhomme plein de ressources.

Teigne choisit de ne pas discuter l'affirmation et, sans perdre plus de temps, elle prend le chemin de la maison. Se glissant dans la cuisine sans un bruit, elle monte à l'étage, profitant du fait que les humains sont en pleine conversation. Elle se rend dans la chambre de leur dresseuse, et là, trônant sur le bureau situé en-dessous de la fenêtre, se trouve la boule de la Feunard, comme indiqué par le Saquedeneu. Elle s'en empare, puis, alors qu'elle s'apprête à redescendre, une pensée la frappe : si la boule se contente de disparaître, leur dresseuse aura des soupçons.

Un regard autour d'elle lui apporte la solution. C'est une boule identique piochée dans le sac de leur dresseuse qui vient prendre la place de celle de la Feunard, puis la Colossinge fait demi-tour et s'apprête à redescendre. Elle s'arrête sur le seuil de la chambre, songeant qu'elle pourrait sauter par la fenêtre - ce serait plus rapide -, mais écarte finalement l'idée, car ça risquerait d'attirer l'attention des humains. Elle emprunte donc à nouveau les escaliers, cachant son butin dans son poing fermé. En bas, ça discute toujours. La Colossinge ne s'attarde pas et en quelques enjambées elle est de retour dans le jardin.

Le gros pionceur s'est enfin levé et les autres ont dû lui expliquer la situation car il fixe Teigne avec la même anxiété que toute la troupe. Lorsqu'elle les rejoint, la Colossinge se place à nouveau derrière le Florizarre afin d'être cachée, puis elle ouvre son poing pour dévoiler la boule de la Feunard.

- Et voilà, déclare-t-elle, pas peu fière.

- L'humaine va s'apercevoir qu'elle a disparu, objecte la Feunard.

- Je l'ai remplacée par une vide, évidemment, contre Teigne, contente d'y avoir pensé afin de ne pas passer pour une idiote. Je n'ai qu'à l'aplatir et c'est bon, tu seras libre ?

- C'est ça.

La Colossinge referme brusquement son poing sans plus de cérémonie. Un craquement se fait entendre, le son de l'objet torturé qui grince et cède sous la pression. Puis Teigne relâche ses muscles. Lorsqu'elle rouvre la main, c'est un bout de plastique complètement froissé et déformé qui s'offre aux regards de tous.

- Ça suffira, vous croyez ?

La Feunard opine.

- Il faut s'assurer que l'humaine ne puisse jamais retrouver les débris maintenant.

- Je peux le MANGER ? demande le Ronflex, ouvrant une bouche dans laquelle Teigne pourrait facilement tenir toute entière.

- Bonne idée, déclare la Feunard, et Teigne propulse les restes de la boule rouge et blanche dans la gueule du grand Pokémon.

Un unique crunch retentit, et bientôt la boule n'est plus qu'un souvenir.

La Feunard s'étire puis se secoue.

- Comment tu te sens ? cherche à savoir le Léviator, se penchant vers l'avant pour scruter la Pokémon nouvellement libérée. C'est différent quand le lien avec la boule disparaît ?

- C'est le jour et la nuit, estime la Feunard. J'ai l'impression d'être devenue légère comme l'air, comme si un poids m'écrasait auparavant et qu'il vient de disparaître. Vous ne pouvez pas savoir le bien que ça fait si vous ne l'avez pas vécu. Être affranchi de sa boule-prison, c'est vraiment quelque chose...

- Bof, j'ai pas vu une grande différence quand l'humaine m'a attrapée moi, grogne Teigne.

- Moi si, annonce le Magmar.

- Oui, c'est certain que lorsqu'on se retrouve liée à l'espèce d'œuf, certaines choses changent, renchérit Fulgure.

Salade lui reste silencieux. Quant au Ronflex, il s'est déjà dormi, à nouveau couché de tout son long dans l'herbe chauffée par le soleil.

- Peut-être que l'humaine vous libérera lorsqu'elle aura atteint son but ? hypothèse la Feunard.

Sa phrase est accueillie par un long silence. Chacun pense sans doute à cette alternative. À vrai dire, Teigne préfère la situation actuelle. Elle peut comprendre que les autres veuillent s'arrêter à un moment ou à un autre, faire autre chose, mais elle, elle sait qu'elle ne se lassera jamais des combats. Et de toute façon, la vie qui s'offre à la Feunard n'est pas pour elle - sa chance à elle d'en avoir une pareille est morte dans le sang sous les serres d'un Roucarnage il y a bien longtemps.

- Je ne sais pas ce qui se passera pour nous, déclare finalement Salade, mais j'espère que vous serez heureuses, toi et la petite.

La Feunard incline la tête, et l'éclat de ses crocs brille un instant au soleil alors qu'elle laisse pendre sa langue.

- Je crois qu'il est temps que je vous la présente, souffle-t-elle.

Se dirigeant d'un pas léger vers les buissons, elle disparaît quelques instants puis en ressort rapidement, portant dans la gueule une petite Goupix au poil tout roux et dotée d'une unique queue. La Feunard dépose doucement son bébé au centre du cercle formé par les autres Pokémon, puis la gratifie d'une léchouille sur le haut du crâne qui ébouriffe sa fourrure. S'asseyant sur son arrière-train, la Goupix dévisage les adultes avec intérêt, un intérêt qui lui est bien rendu.

- Il est tri jolie ! s'exclame Poupidou de sa voix fluette.

- Elle, le reprend le Magmar.

- C'est ci que j'y dis ! Il !

- Elle ressemble à son père, juge Salade. Elle a le même regard sage et posé.

- Belles dents, commente le Léviator tandis qu'il fait le guet, à l'affût de toute présence humaine dans le jardin.

- Elle a déjà l'air très forte, approuve Teigne.

La petite se gratte l'oreille, se sentant apparemment peu concernée par de tels compliments, puis entreprend de se lécher sa fourrure sous le regard affectueux de la Feunard.

- Tu as nettoyé ton nid ? s'enquiert soudain Salade.

Teigne songe que ça lui ressemble bien de s'inquiéter de ce genre de détails - mais il faut bien que quelqu'un le fasse après tout, et elle-même n'y aurait jamais pensé.

- J'ai enterré les morceaux de coquilles bien profond à un autre endroit, répond la Feunard, et dispersé tous les poils trop roux qui pourraient laisser penser qu'il y a quelqu'un d'autre que moi dans ce trou.

- Où vas-tu aller ? continue le Florizarre.

C'est sans doute à lui que la Feunard va le plus manquer, estime la Colossinge. Excepté leur dresseuse, bien sûr.

- Je pense qu'il est préférable que je ne vous le dise pas...

- Oui, c'est sans doute mieux, approuve Plouf avec un petit grondement de gorge.

Il y a un instant de silence, vite brisé par un couinement de la petite Goupix.

- Maman, appelle-t-elle. Maman...

La Feunard approche son visage de sa fille et la câline, lui apportant chaleur et réconfort. La petite se blottit contre sa mère en poussant un soupir de bonheur.

- C'est ici que nous nous séparons, conclut la Feunard en relevant la tête vers ses compagnons. Bonne chance pour le reste du voyage.

- Bonne chance à toi, lui répond Teigne, imité par presque tous les autres (le Ronflex n'a qu'un ronflement à offrir, tandis que Poupidou s'écrie un "Binne chance à ti !").

Un dernier échange de regard prend place, et puis la Feunard se penche pour saisir la petite Goupix entre ses mâchoires et s'éloigne enfin, ses neuf queues fièrement dressées derrière elle. Cinq paires d'yeux la suivent jusqu'à ce qu'elle ait disparu.

Une ambiance étrange est tombée sur le groupe, et Teigne se sent bizarrement satisfaite.

- Je suis étonné de ton comportement, Teigne, dit soudain Salade. J'aurais pensé au contraire que tu aurais voulu retenir notre amie Feunard, peu importe les circonstances. N'affirmais-tu pas tout à l'heure qu'elle nous affaiblissait avec ses sentiments ?

- Savoir qu'il y avait une petite a tout changé. La Feunard a le droit à une vie de famille si c'est ce qu'elle désire. Je ne me serais jamais permis de lui dicter ce qu'elle devait faire dans ces conditions.

Le Florizarre hoche doucement la tête. Teigne, elle, réalise que pour la première fois de sa vie, quelque chose d'autre qu'un combat l'a rendue heureuse. C'est un constat qui la plonge dans la perplexité un instant, avant qu'elle ne décide qu'il s'agit d'une bonne chose. Cet événement inattendu a provoqué un changement en elle. Peut-être sera-t-il suivi d'autres, qui sait ?

En tout cas, où que la Feunard se rende, quoi qu'elle fasse, Teigne espère qu'elle et la petite auront une belle vie, remplie de tous ce qu'elles désirent et dépourvue de la grisaille du malheur. C'est tout ce que la Colossinge peut leur souhaiter.

***

Non, Maraude n'est pas morte dans ma partie, mais l'histoire s'est développée de telle façon que je ne la voyais pas rester avec Léa.

(Le pauvre Poupidou a un petit problème d'élocution. J'espère que ses dialogues ne vous ont pas trop fait mal aux yeux. :p)