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Entre infini et au-delà de Cyrlight



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Informations

» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 07/06/2013 à 20:49
» Dernière mise à jour le 17/10/2013 à 20:26

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Chapitre 134 : I'll stand by you
I'll stand by you - The pretenders


Cassy parvint à quitter Ebenelle sans encombre. La Championne n'avait même pas entendu le battant de la porte coulisser lorsqu'elle s'était faufilée dans la pièce, pour remonter presque aussitôt dans le dortoir, ses pokémon bien à l'abri dans leur sphère de métal, elles-mêmes glissées dans la sacoche qu'elle portait en bandoulière.

Comme cela commençait désormais à devenir une habitude chez elle, elle s'enfuit par la fenêtre de l'étage qu'elle laissa ouverte derrière elle, tandis qu'elle s'éloignait en chevauchant hardiment Dracolosse. Apparemment, il gagnait peu à peu de l'endurance, car il semblait mieux supporter les longues distances, désormais.

Elle vola un long moment, à une allure modérée toutefois. Se presser n'aurait servi à rien : la nuit était déjà bien trop entamée pour qu'elle puisse espérer être de retour avant le lever du soleil. Quoi qu'elle fasse, Cynthia s'apercevrait forcément de son absence, autant que cela ne soit pas pour rien.

Arrivée à destination, elle passa une jambe par-dessus l'encolure de sa monture, en amazone, alors que celle-ci tourbillonnait en spirale pour se poser en douceur. La jeune fille n'attendit pas jusque là. Elle se laissa glisser contre son aile rendue humide par la pluie qui tombait déjà depuis la mi-chemin, puis la remercia brièvement avant de la rappeler dans sa pokéball.

Elle rabattit le capuchon obscur de la cape de Sven dont elle ne se séparait jamais devant ses yeux puis alla toquer à la lourde porte en bois finement ciselée. Voyant que personne ne paraissait l'entendre, elle utilisa le heurtoir au métal glacé qui la fit frissonner lorsqu'il rentra en contact avec ses doigts.

Elle attendit patiemment, en dépit des gouttes qui ruisselaient le long de son visage et de son corps aux vêtements trempés. Après tout, il était normal qu'on ne se bouscule pas pour lui ouvrir. Qui pourrait bien ne pas être surpris par une visite intervenant au beau milieu de la nuit ?

- Vous savez quelle heure il est ? aboya le visage d'une vieille femme aux cheveux grisonnants qui retombaient défaits sur le tissu de sa robe noire, apparu dans la lucarne qui venait de s'ouvrir.
- Quasiment deux heures, non ?
- Exactement ! Que sont donc ces manières de déranger les gens en plein sommeil ? On ne vous a jamais appris la politesse ?
- J'ai besoin de voir quelqu'un, interrompit Cassy qui se moquait comme d'une guigne des propos que pouvait bien tenir la vieille folle.
- Qui donc ?
- Yohanna.
- Soeur Yohanna, vous voulez dire.
- Elle-même. C'est important, s'il vous plaît.
- Je regrette, mais elle n'est pas ici. De toute façon, vous ne pouvez pas arriver ici, trempée comme vous l'êtes, à cette heure, et espérer que je vous autorise à parler à l'une des membres de mon couvent.
- Vous ne me faites pas confiance, c'est votre droit, mais il est inutile de continuer à prêcher la bonne parole au près de votre précieux Arceus si vous jugez aussi rapidement sur les apparences. Bonne nuit, madame.

L'adolescente tourna les talons pour s'éloigner en direction de la cathédrale. Quand elle fut au niveau de la porte, un rictus mauvais étira ses lèvres. Bientôt, lui, le Seigneur tout-puissant comme tant de monde l'appelait, payerait pour les malheurs de ce monde. Lui qu'on prétendait invincible serait vaincu, même si pour cela elle devait aider Lilith dans sa soif de vengeance.

- Il ne faut pas croire tout ce que raconte la mère supérieure.

Cassy sursauta en entendant la douce mélodie de ce timbre cristallin à ses oreilles. Elle se retourna dans un mouvement un peu plus brusque qu'elle ne l'aurait voulu pour faire face à Yohanna, debout sous la pluie alors qu'elle n'était vêtue que d'une chemise de nuit en dentelle par-dessus laquelle elle avait enfilé une robe de chambre aussi blanche que la robe d'une Gardevoir.

- Elle va être furieuse, mais il parait que c'est important, si mon ouïe ne me joue pas des tours. Rentrons.

La jeune fille blonde passa devant elle pour pousser la porte de la cathédrale. D'un signe délicat de la main, elle l'invita à la suivre à l'intérieur. L'adolescente ne s'avança qu'à contrecoeur, non sans avoir marmonné quelque chose auparavant. Elle secoua ses mèches détrempées dans le narthex, sans plus se préoccuper que cela de la sacralisation des lieux.

Elle chercha ensuite la soeur du regard, qui avait pris place sur l'un des bancs à l'autre extrémité de la nef. Il lui faudrait quasiment la traverser en entier si elle voulait la rejoindre, or Cassy aurait préféré éviter cela. Elle rechigna cependant à aller d'asseoir à ses côtés, tandis que l'autre se contentait de sourire.

- Ton âme doit-être plongée dans de bien durs tourments pour que tu viennes me voir à une telle heure de la nuit. En quoi puis-je t'être utile ?
- Déjà, commence donc par cesser de vouloir absolument faire ta psychologue. C'est tout bonnement inutile.
- Comme tu le désires.
- Je ne sais pas quoi te dire en premier...
- Et si tu essayais par le début ?

Yohanna lui lança un regard amical auquel elle ne répondit pas, avant de poser sa main sur son épaule avec une douceur non feinte. Prenant une grande inspiration, Cassy se lança dans ses explications qui demeurèrent un peu floues car elle ne souhaitait pas trop en révéler non plus à cette parfaite inconnue.

- Imagine que des gens n'aient fait que le mal tout au long de leur vie, et qu'ils décident de continuer au risque de mettre d'autres personnes en danger.
- Je vois l'idée globale. Je t'en prie, ne t'arrête pas.
- Bien, maintenant, songe que moi, j'ai le pouvoir de les arrêter, en sachant que finalement le but que je cherche à les empêcher d'accomplir est peut-être aussi noble que le mien, dans le fond ? D'autant que parmi ces gens, il y en a quelques-uns que j'affectionne, mais surtout, si je souhaite réellement me mettre en travers de leur chemin, je dois agir exactement à leur façon.

La soeur ouvrit légèrement plus ses beaux yeux bleus, sans doute à cause de la surprise, avant de froncer ses sourcils arqués pour mieux se concentrer. La jeune fille savait que, racontée de la sorte, elle ne pouvait rien comprendre, mais elle n'était pas en mesure de lui en raconter davantage.

- Quel est donc cet objectif que tes ennemis poursuivent et auquel tu t'opposes aussi fermement.
- Je ne peux pas te le révéler. Pas tant que je ne suis pas certaine d'avoir confiance en toi. C'est vrai, je ne te connais même pas !
- Non... Pourtant, c'est à moi que tu es venue te confier, pas à quelqu'un d'autre. Souhaites-tu que nous allions dans le confessionnal, si tu tiens vraiment à ce que notre conversation demeure secrète ? Je serais ainsi soumise au sceau du secret et tu n'auras rien à craindre de moi.
- Ce n'est pas la peine.

Cassy leva les yeux au ciel. Cette demoiselle semblait-être un numéro fort étrange, toutefois elle avait également l'impression de sentir en elle une alliée de poids, non pas comme avec ses consoeurs, mais pire : exactement comme avec une amie. Elle sentait qu'elle pouvait tout lui dire sans crainte d'être trahie, ou même jugée.

- Un groupe de gens s'est mis en tête de détruire l'humanité. Exprimé de la sorte, ils passent forcément pour les méchants, cependant leur but en lui-même est presque... noble. Ils ne souhaitent cela qu'afin de créer un nouvel univers où ils instaureraient un ordre parfait car, d'après eux, l'humanité telle que nous la connaissons aujourd'hui est sur le point de s'entretuer.
- Et c'est le cas, répondit simplement Yohanna d'une voix parfaitement neutre.
- Je te demande pardon ?
- Les hommes sont corrompus jusqu'à la moelle, mauvais dans le plus profond de leur être. Jamais nous ne tirerons quoi que ce soit de bon de cette espèce. J'ignore même pourquoi Arceus a permis qu'elle soit créée.
- Comment peux-tu dire cela quand tu es toi-même une créature humaine ?
- Probablement parce que je suis exactement comme les autres. Il ne faut pas croire qu'il n'y ait que du bon ou du mauvais dans la réalité. Si le monde était aussi manichéen, notre tâche en serait grandement simplifié, toutefois ce n'est pas le cas. Nous avons été conçus par la lumière divine, néanmoins Darkrai existe, lui aussi, quelque part dans le monde. Il nous guette, nous tente et nous possède. Et chacun de nous conserve dans son coeur un fragment de sa noirceur.
- Tu ne crois donc pas en la toute puissance d'Arceus ?

Yohanna eut un sourire triste avant de souffler sur une mèche dorée qui tombait devant son magnifique visage. Elle se leva, fit quelques pas en direction de l'icône de l'Alpha, puis déclara d'une petite voix :

- Je suis dans une cathédrale. Prétendre le contraire serait parjurer. Je pense cependant que, contrairement à ce qu'en dit la Pokible, il n'est pas miséricordieux et ne pardonne pas. Justement, il fait payer ceux qui pêchent.
- Et quand les Wattouat que nous sommes à ses ordres ne s'éloignent pas du droit chemin quelle raison a-t-il de s'acharner sur nous ?
- La frustration d'avoir créé une espèce imparfaite, j'imagine.
- Donc tu penses qu'au final, la vision de ces personnes que je tends à affronter est la bonne ?
- Pourquoi me poses-tu cette question à moi, puisque les réponses sont censées être là, dans ton coeur, ce dont je ne doute pas ?

Cassy ne releva pas cette phrase qu'elle avait elle-même cité à son interlocutrice pas plus tard que la veille. Son interlocutrice s'était déjà levée pour regagner son couvent dans un tourbillon de dentelle, mais elle interrompit sa progression en passant devant la jeune fille qui l'observait sans ciller.

- Qu'est-ce qu'Arceus t'a fait pour que je vois sans peine cette haine violente qui illumine ton regard ?
- Et à toi ?
- Je ne souhaite pas me venger, moi.
- Non, mais tu portes en ton sein une rancoeur peu commune.
- J'ai commis des erreurs, j'en paye aujourd'hui le prix.
- Et moi, je souffre de celles des autres.
- Les apparences sont souvent trompeuses : je ne peux pas t'aider à choisir ce qui est bien ou ce qui est mal, car si j'étais en mesure de le faire, je pense que je n'en serais pas là aujourd'hui. Cependant, je pense que toi seule doit prendre tes décisions, bonnes ou mauvaises, sans subir l'influence ou la volonté de quiconque. Même si pour cela tu dois commettre un crime, commets-le, mais uniquement à condition d'avoir une raison valable de le faire.
- La légitime défense ?
- La vengeance est aussi un mobile qui se justifie parfois.

Cassy plissa les yeux. Elle n'arrivait vraiment à cerner cette personnalité qui l'intriguait de plus en plus, ange en apparence, mais peut-être démon dans le fond. Elle se contenta d'acquiescer, à défaut de trouver la moindre phrase à prononcer, tandis que son interlocutrice poursuivait :

- Si jamais par la suite ta mauvaise conscience devenait trop lourde à porter, viens donc me trouver. Je la partagerais avec toi.
- Pourquoi ferais-tu cela ?
- Parce que si j'ai choisi la voie de la lumière, en dépit de tout ce qui aura bien pu se produire par le passé, je comprends que d'autres, toi comprise, puisse préférer suivre de Darkrai. Que l'on emprunte le bon ou le mauvais chemin, je crois qu'ils nous mèneront tous deux à la même finalité.
- Et s'il s'agit de la mort d'Arceus ?
- Alors je ferais sonner les cloches de la cathédrale, comme toute bonne arcésienne qui se respecte.

L'adolescente se contenta de la regarder sans mot dire. Yohanna s'apprêtait à disparaître par la même porte dérobée que la veille lorsqu'elle murmura d'une voix un peu rauque, après une légère hésitation :

- Au fait, je m'appelle Cassy. Cassy Rilène.
- C'est l'abrégé de Cassandra ou de Cassidy ?
- Lequel des deux aimes-tu le plus ?
- Cassidy.
- Alors je me nomme Cassidy Rilène, conclut finalement la jeune fille avec un bref sourire qui lui échappa malgré elle.