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» Auteur : fan-à-tics - Voir le profil
» Créé le 25/06/2012 à 16:50
» Dernière mise à jour le 26/06/2012 à 22:34

» Mots-clés :   Présence de personnages de l'animé   Présence de poké-humains   Présence de shippings

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Trailer 4 - Scarlet Road...
Happy birthday to me. Happy birthday to you !

Bonne lectuuuure !


Trailer 4 - Scarlet Road !

Doublonville ressemblait énormément à son double de Kanto. Fang ne lui trouvait donc qu'un intérêt tout limité. Epuisée et sale après un voyage un peu trop long, elle secoua ses articulations gravement endolories, puis leva la tête. Outre la tour radio qui s'élevait, noire et pointue, comme menaçant de vouloir éventrer le ciel, Fang n'avait pas l'habitude des grattes-ciels. A Rhodes, les rares immeubles qui perçaient la voûte se composaient de tôles usées et de bouts de métaux branlants, aussi, il était impossible de faire des architectures vertigineuses. Même si, elle avait entendu dire que certains groupes de bandits avaient tenté le coup dans le désert, elle n'avait jamais rien vu de tel de ses propres yeux. Et Fang ne croyait que ce qu'elle voyait.

-Bon, maintenant, je vais où ?

Elle gardait l'habitude de se parler toute seule, et ma foi, ici ou ailleurs, cela ne dérangeait personne. Elle se trouvait juste derrière la voie ferrée, le genre de coin qui est toujours en chantier, entre les wagons à l'abandon et les différents matériaux de rechanges en cas de réparation. Le coin lui plaisait assez. Les endroits trop propres la rendait mal à l'aise. Il fallait être maniaque et donc pas bien dans sa tête pour tout ranger.

« Dit la fille skyzo. »

Fang ricana, et sortit de son sac une bouteille d'eau pour y boire directement au goulot. N'empêche, qu'elle ne savait toujours pas où aller à présent. Elle tâcha de regrouper ses vagues connaissances sur la région ; mais tout ce qu'elle avait entendu sur Jotho, elle le tenait de Daniel, le doux étranger d'un soir, qui lui avait conté ses aventures. Il lui semblait que ce dernier avait parlé d'un village, Acajou. Comme le bois ? C'était pas plutôt Alca boule ? Peu importe, un nom dans ce genre là.

-Bon !

Elle se redressa, mais en jetant un regard à sa chère Betsy, sa belle moto recouverte de boue, et des faibles étincelles violacées qui parcouraient son capot de manière nerveuse, elle prit pitié. Motisma avait besoin d'une pause.

-T'as une heure. Concéda-t-elle, simplement, avant de tourner des talons.

Après tout, elle, on ne lui accordait pas de pause quand elle avait du travail. Maintenant, il ne lui restait plus qu'à trouver un coin où l'écouler tranquilloute. Elle songea une seconde à son estomac. Depuis qu'elle était partie, la veille, ils ne s'étaient accordé qu'un quart d'heure de repos toutes les 6. Elle avait faim. Ses Pokémons aussi, sûrement.

Apparemment elle était de corvée de course, par la force des choses.

Fang s'aventura donc à travers les rues de Doublonville, célèbre pour son centre commercial d'ailleurs. Inutile de dire qu'elle fut rapidement dépassée par la foule. Elle n'aurait jamais cru qu'autant de gens puissent se coller les uns les autres, sans craindre les pickpockets. Ils brandissaient même fièrement leurs achats dans des sacs colorés. Ces idiots n'auraient pas tenus plus d'une demi-seconde à Pyrites.

« Pas de sentiment ! »

Grâce à ses doigts particulièrement collants, elle arriva à voler un portefeuille plutôt bien garni, sans se faire prendre. Pas besoin d'argent en voyage, en ce qui la concernait, elle trouvait tout sur place.
Elle finit par trouver une sorte de fast-food tout à fait respectable, où il n'y avait absolument AUCUN menu végétarien. Le pied total quoi.

Elle entamait son premier hamburger, le reste destiné à ses Pokémons, déjà emballés dans un coin, quand un grognement attira son attention. Elle regarda trop tard pour découvrir l'origine du bruit, en revanche elle vit un petit blondinet tendre le cou tout comme elle. Elle lui envoya un regard interrogateur, et il lui répliqua par un sourire lumineux, ses yeux gris brillants.

Apparemment, il restait encore des gens aimables sur la planète.

Le garçon d'en face éternua alors brusquement, et le pot de fleur rouge qui faisait office de séparation entre les tables l'aspergea de pollen.

Risquait-elle de se sentir coupable, en assassinant un des derniers représentants du genre humain, aimable ?

-Ah-ah, je vous ai aspergé on dirait ! Désolé.

Il se gratta la tête rendant sa coiffure déjà digne de quelqu'un ayant confondu bigoudi et pétard, puis lança à une femme occupée à prendre les commandes des gens.

-Madame, les fleurs là, c'est quoi ?

Déjà, la madame ne sembla pas ravie d'être vieillie de plusieurs années et mariée sans son consentement. Il est vrai qu'elle faisait tout juste 20 ans, ils devaient d'ailleurs avoir tous les deux à peu près le même âge à bien y regarder. Ce gamin était peut-être souriant mais pas diplomate.

-Vous êtes pas du coin. Ce sont des Scarlet. Siffla cette dernière, méchamment.

Le garçon ne s'en offusqua pas mais il pencha la tête sur le côté dans une expression que même elle aurait qualifié de mignonne. Le genre d'attitude, que font les filles se sachant belle, quand elle penche le buste pour que l'interlocuteur ait une vue plongeante sur la poitrine. En l'occurrence, et même si le blondinet était un mec, cela eut le même effet.

-Tu ne sais pas ce que sont les scarlet ? S'inquiéta la serveuse, avec une mine cette fois, attendrie.

Il fit un non, penaud du crâne. Il était fort le gamin.

« Tu es plus jeune que lui, et tu le traites de gamin. » Fit remarquer la voix dans son crâne.

-On les appelle aussi les Crimson à Hoenn ? Tenta la jeune femme.

Le blondinet ricana de sa propre ignorance, stimulant la part maternelle de la victime.

-Les fleurs du Jugement ? Les Larmes d'Arcéus ? Les fleurs vampiriques ?

Certes, tous ces noms définissaient la même plante, mais la discussion devenait bien trop végétale au goût de Fang, qui commença à emballer ses affaires. C'est alors que du coin de l'œil elle capta un mouvement, si infime, si peu à sa place dans cette ville de naïf, qu'elle en resta pétrifiée en plein mouvement.

« Le blondinet n'est pas un ange. » Constata-t-elle avec un sourire. Ah ; il cachait bien son jeu.

De son côté la serveuse avait totalement craqué, et s'était assise à la table, traitant le jeune homme comme elle l'aurait fait avec un gamin demeuré.

-Ces fleurs sont apparues lorsqu'Arcéus a porté son jugement sur l'humanité, et elle a poussé à tous les endroits où il y a eu des morts. Un seul suffit, quand on croise ces fleurs dans la nature, c'est qu'on sait qu'Arcéus a jugé un individu, a pris sa vie, pour en créer une nouvelle.

Elle se trémoussa un peu, et saisit l'infecte plante dans sa paume.

-J'adore leur rouge carmin.

Elle caressa de la pulpe du pouce les doux pétales légèrement courbés, tombant, d'un beau carmin, on pouvait suivre de simples veinures d'un rose plus clair. Le cœur ouvert de la plante laissait entrevoir un nid de pollen parsemé de pistils d'argent. L'or vif du pollen se mêlait sans problème aux embouts cotonneux des tiges, couleur lune. En revanche le végétal n'arborait aucune feuille.

Ouais, si on avait demandé à Fang son avis, ce truc était glauque et morbide, qui admirait la verdure qui poussait sur une terre gorgée de sang ? Sérieusement. Rhodes lui apparût soudain comme particulièrement civilisée et morale.

-Oh, merci beaucoup. S'exclama le blondinet avec un grand sourire.

La serveuse rougit et encore plus quand elle reçut un joli billet en pourboire. Fang sourit. Ce gamin avait un culot monstrueux. Elle le vit partir du fast-food, attrapa ses affaires le suivit discrètement. Elle attendit d'être assez éloignée du lieu du crime, puis chopa l'angelot par le col. Ce dernier, plus petit qu'elle, pivota, déséquilibré et il se retrouva face à elle.

Il lui envoya le même sourire qu'à la serveuse, on lui aurait sûrement le bon dieu sans confession. Quoiqu'elle n'était pas sûre de l'expression. En tout cas, cela ne fonctionnerait pas avec elle.

-Saluuuut. Dis-moi, t'es plutôt gonflé de piquer les pourboires de cette serveuse et de la payer pour ses explications avec un des billets que tu lui as chouré dans son dos.

Et particulièrement stupide, non seulement il perdait de l'argent avec son geste, mais en plus en voulant ranger son dû, la victime risquait de remarquer le vol plus rapidement.

Le garçon haussa des épaules, et Fang remarqua que la peau du garçon n'était pas si belle que ça, il avait du se gratter pas mal durant ses crises d'acnés. De près c'était évident, de loin, moins. Elle le jugea plutôt pas mal globalement. Pas un premier prix, mais l'effet petit ange conférait des avantages certains. Dommage qu'il n'ait pas d'yeux bleus, au lieu des deux billes grises qui le fixaient en cet instant.

Il ricana, et chose étrange, lui tendit son butin sans même chercher à nier ou à le sauver. Spontanément.

-Bon, tu m'as eu, t'es forte ! Rigola-t-il.

Quand elle pris les billets, elle eut l'impression d'avoir racketté un de ces gosses de riches qui s'aventurent stupidement là où ils ne doivent pas puis abandonnent tout au premier venu, terrifiés. Enfin, pour le coup, le blond n'avait pas l'air apeuré pour un sou. Elle sourit pour détendre l'atmosphère.

-Bah, je t'en veux pas d'avoir essayé, moi c'est comme ça que je me suis payée le repas.

Grâce à ses doigts qui collent. Le blondinet écarquilla des yeux, puis sourit à nouveau, à croire qu'il ne savait faire que ça : sourire. C'était assez sympa.

-Moi c'est Sho !

Il lui tendit la main, puis, après réflexion, l'essuya contre son blouson pour en ôter toute graisse de la mal-bouffe, avant de la lui remontrer en invitation. Fang hésita un instant, puis jaugeant le gars d'un regard, elle haussa les épaules. Tant pis, de toute façon elle n'était que de passage ici.

-Fang.

Ils se serrèrent les paumes, elle lui lâcha le col et il retrouva son équilibre. Elle apprécia le fait qu'il ne cherche pas à ajouter un nom de famille derrière son prénom. Mais maintenant qu'elle songeait, il n'en avait pas donné lui non plus.

-Tu fais quoi ici toi ?

Elle haussa des épaules, l'air de dire qu'elle vagabondait. Et c'était vrai, en un sens. Elle désirait juste quitter Rhodes et voir ces fameuses contrées dont son étranger avait décrit les merveilles, quelques années plus tôt.

-Ouais, moi pareil. Ma mère m'a foutu dehors, elle a dit : « Ca suffit tu comptes me coller jusqu'à quel âge ? Dégage et apprend la vie, moi j'vais m'faire quelques filles ! » Puis ensuite Bernie il a démarré, et j'me suis retrouvé comme un couillon là où je savais pas que j'étais.

Elle ricana. Simplement parce que Sho reproduisait les mimiques de sa mère au fil du récit.

-Du coup je cherche un pote. Il est parti définitivement de notre vann il y-a un an, un an et demi. Il doit pas être bien loin. Il faisait encore des allers-retours avec nous avant.
-En gros tu changes juste de personne à parasiter.

Sho sourit et croisa les bras derrière la tête.

-Ouais !

Elle l'appréciait bien celui-là. Cette rencontre avait bien éclairé sa journée, mais il était temps pour elle de partir. Elle fit un signe d'au revoir de la main, puis avança d'un pas.

-Bon courage alors dans ta recherche. Salut.

Elle fit un autre pas, Sho l'imita. Elle s'arrêta, se retourna. Il lui sourit.

Bizarre.

Elle reprit sa marche, lui de même. Elle accéléra la cadence, il tint la distance mais ne la perdit pas.

Flippant.

D'un coup de talon, elle sprinta de toutes ses forces et s'engouffra dans un dédale de petites ruelles. Il la rattrapa sans problème et tint même plus longtemps que lui puisqu'il lui tapota sur le dos alors qu'elle agonisait, sans souffle, contre un mur après sa course.

Okay, elle était foutue. Elle venait de tomber sur un parasite super méga résistant.

-Excusez-moi, vous savez où se trouve le centre de rééducation ?

Fang releva la tête, pâle, vers le passant qui les abordait. Sho secoua la tête :

-C'est par là.

Il pointa du doigt leur direction originale. Fang était persuadée qu'à part des boutiques et le fast-food à la vendeuse dépouillée, ce type ne trouverait pas de centre médical. Mais celui-ci, bonne poire, les remercia avant de s'en aller. Comme elle s'en doutait, Sho lui demanda :

-Hey, tu sais ce que c'est le centre qu'il cherchait ?
-Bah, un truc de rééducation...Genre, t'as eu un accident craignos, tu dois apprendre à rebouger les bras quoi. Marmonna Fang, dont la gorge renâclait un peu plus à chaque mot.
-Mince alors, doit y-avoir vachement d'accidents dans la région alors, parce que c'est la sixième fois qu'on me demande ça depuis que je suis ici.

Ah ouais quand même.

-J'en ai rien à foutre. Lâche-moi. Va où tu veux et laisse moi aller du mien.

Elle tâcha de se redresser et de paraître en meilleure forme qu'en vérité. Tracer la route et voir son poursuivant doubler, c'était non seulement démotivant, mais en plus épuisant.

-J'peux pas venir avec toi ?

Il fit la bouille de caninos battu qui avait marché sur la vendeuse. Mais Fang n'était pas ce genre de fille.

-Nan, pas de place, je suis en moto.

Cela aurait du suffire comme argument ; mais le jeune homme saisit son sac, fouilla dedans et en extirpa une chaine munie d'un crochet à un bout, et des menottes à l'autre. Et à y regarder de plus près, son sac paraissait rempli de ce genre de ferrailles. Cela devait être super lourd ce machin, et il l'avait pris de vitesse quand même ! Le petit con. Fang n'avait pas assez d'ego pour être blessée par sa défaite évidente, en revanche sa confiance en son instinct de survie et en ses jambes pris un sacré coup de latte.

-Pas grave tu n'as qu'à utiliser ça pour m'accrocher ! Ma mère faisait souvent ça avec moi quand je l'emmerdais ! Lança le blondinet en lui tendant ses outils.

Fang vacilla, interloquée. Mais ce ne furent pas les questions logiques de la sécurité, qui la secouèrent.

« J'ai toujours rêvé de faire ça ! »

Ses yeux brillèrent de malice. Sérieux ? Sérieusement ? Il y avait quelqu'un sur terre d'assez idiot, mais d'assez aimable pour lui laisser faire ça ? Ce gamin devait être maso. Génialement maso. C'était trop cool. Elle allait faire comme la mafia.

« Fang, bon sang, tu vas le tuer si tu fais ça ! » Murmura la voix dans son crâne.

Une pierre deux coups, en plus elle se débarrasserait du parasite en s'amusant comme une petite folle.

« Qu'est-ce que j'ai loupé avec toi ? »

Rien à foutre. Une idée lui traversa l'esprit, mûe par toutes les idées préconçues qui tournent autour de ce thème, et accentuée en plus, par l'environnement dans lequel elle avait grandi :

-Est-ce que tu es gay par hasard ?

Elle eut du mal à camoufler son expression de ravissement devant cette simple hypothèse. Le garçon écarquilla des yeux, puis lui envoya un sourire, mystérieux cette fois. Il ne répondit pas.

Bon au moins, même si le gosse n'était pas gay, elle pouvait le traîner derrière sa moto. Elle le conduisit à sa bécane, toujours bien en place, nourrit Motisma uniquement, les autres étant dans leurs pokéball, ils pouvaient se contenter d'un repas par jour, voire pas du tout, elle n'avait pas les moyens de faire plus. Puis elle rangea ses affaires pour le voyage. En attendant, derrière elle, Sho avait installé son dispositif. Il n'avait pas l'air terrifié du tout, comme habitué à ce genre de folie. Alors c'était peut-être vrai, cette histoire avec sa mère ?

-Oh, je ne sais toujours pas où je veux aller...Se rappela-t-elle alors qu'elle prenait place et faisait ronronner son moteur et motisma.

Tant pis, elle allait se contenter de suivre la route. Un regard vers Sho insouciant, et un sourire sadique se dessina sur ses lèvres. Ca allait être trop fort. Elle démarra au quart de tour.

Son seul regret dans cette petite expérience, ce fut que Sho ne cria pas des masses, au début il se rétama largement et se fit trainer sur plusieurs mètres, avant de profiter d'un ralentissement de sa part –elle ne savait pas quand il avait trouvé le créneau vu qu'elle n'appuyait quasiment jamais sur les freins, même pas dans les virages, histoire de crever sur le coup en cas d'accident- pour se relever et courir. Ses chaussures s'étaient révélées camoufler des roulettes, et il avait passé le reste du voyage peinard. Même si quelques fois il avait manqué de se manger un arbre en ne contrôlant pas dans les courbes.

Il n'empêche que ça avait été trop cool, les visages conducteurs de véhicules sur leur passage, valait bien le coup. Ils ne devaient pas voir ça tous les jours.

« Tu as juste eut de la chance qu'ils n'aient pas appelé les flics. »

D'un autre côté, si les poulets s'étaient ramenés, elle leur aurait balancé Sho dessus, il faisait un parfait bouclier. Mieux valait fuir plutôt que de s'expliquer dans ces cas là, comme il vaut mieux demander pardon plutôt que la permission. Il y a des règles universelles si on désire survivre.

-Tu te diriges vers Rosalia ? Lui demanda Sho, le soir-même, au moment d'établir un camp. Il se massait les poignets, rouges, mais à part ça semblait aller plutôt bien. Fang ne savait pas si ça lui plaisait ou l'embêtait : son parasite avait tenu la route.
-Où ?

Sho ricana manière bizarre.

-Rosalia. –Il pointa la route qu'elle comptait prendre du doigt. – La ville est fermée d'après ce que je sais. Tu ne pourras pas y rester. Tu vas être obligée d'aller soit à Acajou soit à Oliville.

Le nom fit tilt dans l'esprit de l'originaire de Rhodes. Acajou ! La ville dont lui avait parlé Daniel. Voilà, elle avait sa destination.

-Moi j'irais à Acajou. Mais toi...

Elle laissa sa phrase en suspend, pour bien lui faire comprendre qu'elle en avait rien à foutre de ce qu'irait faire, mais que ce serait sans elle. Sho lui envoya encore un sourire en guise de réponse, elle commençait sérieusement à flairer l'embrouille. Brusquement, alors que le blondinet étendait son sac de couchage sous l'ombre d'un arbre, un promeneur déboula des buissons, l'air perdu, carte en main.

-Excusez-moi, bafouilla-t-il...

Fang commençait à trouver les routes de ce pays relativement trop bondée à son goût. C'est vrai quoi, elle avait passé sa journée à croiser des gamins en chemin, d'à peine 10 ans. Personne ne craignait les kidnappings, les pédophiles ? Cette région était à ce point naïve ? Aucun pays ne prospérait autant, la paix avait toujours tendance à être superficielle.

Le promeneur lança un regard déboussolé à la troupe, puis s'avança vers celui qui lui inspirait le plus confiance : Sho. Il est vrai qu'avec sa tenue de cuir, ses cheveux en bataille, son collier et ses bottes cloutés, Fang ne représentait pas le cliché du bon samaritain. Contrairement à bouille d'ange.

Tss.

Fang était sûre d'être plus fiable que l'autre là, au moins quand elle ne savait pas, elle ne mentait pas.

« Menteuse. »

Roh, la ferme la voix.

-Excusez-moi, jeune homme, on m'a envoyé vers une autre adresse quand j'ai voulu rendre visite à mon frère au centre de Rosalia. Vous savez où se trouve-celui-là ?

Encore une histoire de centre...

Sho hocha simplement du chef.

-Oui, vous continuez jusqu'au parc naturel, vous ne l'atteindrez pas avant la nuit, mais il y a toujours des hôtels par là-bas, parce que c'est près du pokéathlon. Le centre est juste à côté de la pension, un peu au sud de Doublonville. Vous ne pouvez pas vous tromper, c'est un super large bâtiment.

Le randonneur le remercia vivement, puis s'en alla en courant, comme si en se pressant il pourrait tromper le temps qui filait et arriver à destination plus tôt qu'estimé. Fang le regarda partir avec consternation, puis un long silence s'installa.

-Je croyais que tu ne savais pas où était ce centre ?

Son ton le plus sec et suspicieux ne fit même pas tressaillir le blondinet. Il ramassa du petit bois et de la mousse sèche, avant de lui envoyer un autre sourire, plissant des yeux.

-Non, je voulais juste savoir, si TOI, tu savais ce que c'était.

Fang entendit presque le déclic dans sa tête.

-Tu savais aussi parfaitement ce que c'était que cette fleur.
-Mais toi tu as écouté la conversation bien attentivement, tu ne le savais pas. Rit le petit diable à la bouille d'ange.

Il cherchait une petite nouvelle qui ne connaissait rien au pays.

-Puis quand je t'ai proposé le truc de me tirer avec la chaîne, c'est devenu évident. N'importe qui ici aurait refusé tout net, sauf si les plaques d'Arcéus leur avaient prédit mon acte. Pas toi. Toi, tu viens de Rhodes, non ?

Merde, ce gamin était époustouflant. Elle était totalement tombée dans le panneau, finalement sa frimousse d'ange idiot avait fonctionné sur elle, de la même manière qu'avec la serveuse. Elle aurait du se sentir insultée, voire même blessée de s'être fait avoir de long en large comme ça, mais c'était plutôt l'admiration un peu secouée qui l'envahit. Rare étaient ceux qui réussissaient à l'avoir comme ça. Il cachait bien son jeu.

Maintenant restait à savoir ce qu'il lui voulait. D'après ses connaissances, seuls trois types de personnes repéraient les nouveaux de la sorte, et les suivaient/éloignaient des villes. D'abord, les tueurs. Mais Fang doutait qu'on veuille déjà la tuer alors qu'elle venait à peine d'arriver, c'est vrai elle n'avait encore rien fait qui mérite...

Elle se retint et son nez se barra d'une ride contrariée.

Bon d'accord, elle avait probablement fait beaucoup de choses qui méritent que certains esprits tordus veuillent la tuer. Même si c'était un peu exagéré comme châtiment. Mais pas sur ce continent !

L'autre groupe de personne à agir de la sorte, il s'agissait des Teams, ou plus communément de la Mafia. Ces groupes organisés cherchaient les pigeons à racketter ou à faire chanter, les encore-sans-identités à recruter.

Mais en l'occurrence, Fang avait foi en son aura, elle ne dégageait pas l'allure d'un roucool qu'on pouvait plumer facilement, et encore moins d'une personne à engager.

Le dernier, proche des bandits traités plus haut, étaient les moins pires du lot. Ils se contentaient de trouver les petits nouveaux et de les escroquer en leur faisant faire le tour du continent à un prix vraiment trop élevé. Parfois ce genre d'escorte se terminait en un traquenard fatal pour le touriste.

Fang ne savait pas ce qu'elle préférait dans le lot. Et ses préférences ne changeraient rien à ce que le blond était vraiment. Il valait mieux savoir tout de suite à quoi s'attendre, et agir en conséquence. (C'est-à-dire s'il le fallait, le tuer dans son sommeil) Aussi joua-t-il sur la franchise :

-Tu m'veux quoi ?

Sho s'assit sur son sac, paisible, et il ricana. Mais sa bonne humeur permanente apparut soudain aux oreilles de Fang, comme une feinte perpétuelle.

-Moi ? Rien, juste un taxi. Je t'l'ai dit, j'me balade. Le problème c'est que vois-tu, je n'ai pas de Pokémon, et pas du tout envie d'en avoir. Alors pour me déplacer rapidement là où je veux, c'est ennuyeux.

Fang se tût. Sho rigola.

-Tu as une tenue de moto, je t'ai tout de suite repéré, c'est plus simple à voir que ceux qu'ont des arcanin.

Il se pencha.

-J'te propose un truc. Moi j'connais la région, j'suis paumé là-dedans depuis deux mois. J'te renseigne, et tu me déposes là où je te le demande. Si ça te dérange, je paye l'essence.
-Je suis à l'électrique.

Elle détestait ce genre de chantage, mais pour le moment, le gamin semblait appartenir au troisième type, donc il était plus simple de se débarrasser de lui. Au moins elle n'aurait pas une team à dos.

-Les Teams n'existent pas ici.

Fang tressaillit, les prunelles écarquillées. Comment... ?!

« Dark ! » Rugit-elle intérieurement, se mettant sur la défensive.

Sho posa un regard sur elle, plutôt triste, mais il se dépêcha de remettre un sourire sur son visage.

-On s'en fout comment. Je t'informe, c'est tout. C'est bien ce que j'ai dit que j'allais faire. Les Teams ici, c'est fini, le jugement d'Arcéus en a trucidé pas mal il y a 5 piges. Y-en a quelques uns qui ont survécus, mais ce sont ceux qui étaient manipulés, où qui n'ont jamais tués des gens en le voulant. Pas du genre à reconstruire pour se venger.

Fang se mordit la lèvre. Quand bien même, elle n'aimait pas le sentiment qui prenait forme sous son crâne.

-C'est quoi cette merde ? Grinça-t-elle.
-Quelle merde ? Twilight a promis un monde sans bandit. Un monde qui n'existait avant qu'en Idéal.
-Ouais, justement, le truc avec l'Idéal, c'est que c'pas réel.

Sho se détendit, laissant une évidente ouverture qui pouvait bien lui être fatal si on savait s'y prendre. Mais il l'avait déjà tellement mené en bateau qu'elle hésitait.

-Bah, tu penses, c'est malin en fait. Les gens ont tendance à choisir c'qu'est facile. Là, la religion d'Arcéus leur lit l'avenir et leur dit le choix qu'ils ont à faire...Avec la certitude qu'à force, ils parviendront au bonheur.

Sho leva les yeux vers elle et son sourire lumineux s'atténua pour devenir un rictus ironique :

-La certitude.

Fang ne dit rien. Parce que pour elle la certitude n'avait jamais été possible en ce monde. On pouvait un jour être une petite fille pourrie gâtée comme les autres, avoir le malheur de dormir au mauvais endroit, puis le lendemain se réveiller dans un endroit sombre, inconnu, entouré de bandits. La vie était faite ainsi, il n'y avait rien à faire.

-Justement, le truc, c'est que les plaques d'Arcéus, proposent deux choses qui étaient pas possible : la lecture du futur avec certitude, et le bonheur.
-Mais cela fonctionne... ?

Sho ne bougea pas d'un pouce, aussi fut-il étonnant de l'entendre dire sans hésiter :

-Ouais.

Fang fronça les sourcils. Il haussa des épaules.

-Me regarde pas comme ça, mais c'est vrai. Même si y-a des sacrifices en cours de route, les gens disent qu'l'économie du pays se porte super bien, alors que Rhodes et les états Ranger sont en pleine crise. En plus les inventions aboulent. D'après ce que je sais, quand on est baptisé, soit on finit très heureux en réussissant tout ce qu'on entreprend, soit on finit très malheureux, voire mort. Mais y-a genre, quoi ? 3% des baptisés qui ont pas d'bol ?

Etrange. Cette histoire finit par l'intéresser. Pas parce qu'elle désirait se convertir : le mec qui gérait le karma la haïssait, elle en était persuadée, alors s'il fallait miser sur sa chance elle pouvait tout aussi bien commander le cercueil. Le blondinet retrouva le sourire en la voyant se détendre.

-Super ! Tu veux donc bien m'emmener là où j'te demande si j'joue les guides touristiques ?
-Où tu veux aller d'abord ? Grommela Fang.
-Chais pas !

Le pire, c'est qu'elle était incapable de dire s'il mentait ou non, avec son expression joyeuse continuelle.

-Tu plaisantes ?
-Qui sait ?

D'accord, là ça devenait énervant. Elle se leva. Sho pencha la tête sur le côté.

-Tu veux pas savoir c'qu'est le centre dont tout le monde parle ?
-Non j'vais dormir. J'en ai ras le bol.

Le blondinet sourit, sortit une clope de sa poche, puis se mit à la fumer tranquillement dans son coin. En silence. Fang elle, se mit à lire son bouquin, trépignant d'impatience. Elle s'en fichait des autres, elle voulait juste que le couple secondaire, gay, se pointent. Elle désirait savoir ce qu'ils avaient bien pu fabriquer dans une camionnette, avec du matos de camping et une glacière remplie de viande fraîche, dans le dernier tome. Le reste avait peu d'importance.

Surtout si ça la faisait penser à autre chose que de s'être fait lamentablement avoir par le blondinet. Elle regrettait la pointe d'admiration qu'elle avait eu à son égard et envisageait sérieusement de le buter dès qu'il s'endormirait.

« Plutôt que de l'étouffer avec son oreiller, pourquoi ne pas utiliser l'hypnose... »

Ah ouais, pas bête ! Répliqua-t-elle à la voix.

Ca évitait de commettre un meurtre, vu qu'apparemment dans ce pays Arcéus le voyait très très mal.

-Je te déconseille de faire ça.

La voix de Sho sonna dans son dos, légèrement moqueuse. Bon sang, il lisait dans ses pensées ou quoi ? Elle eut quelques jurons intérieurs et particulièrement inventifs. Il rigola discrètement.

Cette fois ça suffisait. Elle détacha sa pokéball de son collier de chaîne. Dans un rayon rouge, un batracien vert paume à l'air de clown couina de contentement. Mais au lieu d'attaquer le tarpaud sauta jusqu'au blondinet et s'assit face à lui, le fixant de ses yeux globuleux.

Les Bajoues de tarpaud se gonflèrent et il croassa rauquement.

Il y eut un énorme blanc.

Sho poussa soudain un hurlement strident et se redressa tout tremblant. Tarpaud lui trouva ça très amusant et essaya de grimper sur le jeune homme terrifié, qui ne souriait plus du tout pour le coup.

-Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk -Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk Beurk ! ENLEVE-MOI CA !

Coincé entre tarpaud et l'arbre qui était censé l'abrité, il était piégé. Et Fang trouva sa vengeance –bien qu'hasardeuse- très agréable. Elle s'assit et admira le spectacle. Le blondinet semblait vraiment, vraiment terrorisé, il faisait des mouvements saccadés pour échapper à l'étreinte du Pokémon, dont elle n'était même pas sûre qu'ils soient possible physiquement. Juste pour rire, elle imita le croassement de sa grenouille chérie.

Sho devint tout blême et essaya de grimper à l'arbre.

Huhuhuhu. Finalement voyager avec lui serait bien drôle, décida fang. Elle ne risquait rien si le petiot là avait peur des Pokémons. Rien que pour le plaisir de le voir ainsi soumis, lui qui l'avait pourtant bien eu, elle s'avança, caressa son tarpaud histoire d'avoir bien la main enduite de mucus, puis tapota la bouille d'ange en parsemant chacun de ses contacts d'un petit « Chcouic ! Chcouic ! ». A chaque contact les cheveux du blondinet se dressaient sur sa nuque.

Et cela l'occupa toute la soirée.

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Il avait froid, et surtout, surtout, il avait faim. Faim comme jamais. Le petit garçon renifla bruyamment, mais si son nez était encore gorgé de pleurs, ses larmes, elles ne coulaient plus sur ses joues rougies. Chaque goutte d'eau comptait depuis qu'il avait terminé l'unique bouteille que contenait son sac. Il jeta un regard morne à ses vêtements de soie déchirés. Ils ne lui tenaient plus chaud et maintenant entravaient plus ses mouvements qu'autre chose. Il essaya de déchirer son pantalon de velours dont l'ourlet tout entier s'enroulait autour de sa cheville et de son pied. Il n'y parvint pas ses doigts ripèrent sur le tissu. Ils tremblaient rouges, autant à cause du froid que sous la fatigue et les nerfs qui lâchaient un à un.

Le petit garçon finit par n'en plus pouvoir, agacé, il chouina, pesta contre tout ce qui allait de travers et plus particulièrement son pantalon qui avait autrefois été son préféré et était maintenant foutu.

Il aurait bien aimé céder à l'envie, et se recroqueviller dans un coin, bien à l'abri, près d'un arbre. Mais...

Il se retourna et admira un point invisible qu'il savait caché derrière quelques arbres seulement. La bile lui remonta le long de la gorge, il écrasa encore une larme avant qu'elle ne s'écoule. Non. Non. Son père lui avait expliqué ce qu'il devait faire. Il devait avancer tout droit, trouver une ville. Sa prise se raffermit sur les lanières de son sac en forme de couverdure.

Il n'arrivait pas à quitter des yeux ce qu'il laissait derrière lui. Il n'aurait jamais du regarder en arrière, il le savait. Mais il n'arrivait pas à s'en empêcher. Il avait peur. Il était tout seul, dans la forêt, et il avait peur. Il désirait juste rentrer chez lui, sentir l'odeur de sa maman, se nicher dans les bras de son papa, et avaler une bonne dose de chocolat chaud.

Il allait revenir en arrière quand un bruissement le fit sursauter. Il sentit chaque muscle en lui se tendre et la tristesse se désagrégea instantanément pour laisser place à une terreur tout aussi grande. Il eut le réflexe de se jeter par terre sous un buisson.

Personne ne devait le trouver ici. Pas dans cet état. Pas maintenant, son père et sa mère le lui avaient dit. Personne ne devait le trouver tant qu'il n'avait pas atteint une ville.

Pourtant, pourtant...

L'irrésistible envie d'être secouru, d'avoir un contact humain après avoir passé des jours à tourner en rond ici, le prit.

Il n'eut pas le loisir de choisir. La masse de feuille qui le couvrait se souleva légèrement. Le sang du gamin se glaça dans ses veines. Au dessus de lui, un visage masqué venait de faire son apparition. Une peau plutôt basanée encadré par des mèches noires fourchues, mal entretenues, coupé au niveau de la mâchoire. c'est tout ce qu'il distingua chez l'étranger. Un chapeau étrange couvrait le haut de son crâne, des écouteurs se chargeaient de ses oreilles, et une visière camouflait toute la partie du visage allant du bout du nez aux sourcils. Le petit remarqua une sorte de micro pendouillant au niveau des lèvres.

-C'est un gamin. Maugréa l'inconnu à un interlocuteur invisible.

Le cerveau du gamin enregistra des tonnes d'information superflues sous l'action de la peur. D'abord, sûrement à cause du micro, la voix de son sauveur avait deux tonalités, une féminine, et une masculine, ce qui lui conférait un aspect assez robotisé qui ne rassurait pas du tout et cachait sa vraie nature. Ensuite, il arborait un costume aux couleurs bleus et rouges, une tenue qui laissait envisager que cela pouvait être une femme, tant la corpulence qu'il laissait entrevoir paraissait mince. Celle-ci lui tendit la main, et le garçon entendit un cliquetis significatif : l'inconnue portait quelques bracelets en plaqués or autour des poignets.

-Ca va petit ? Murmura-t-elle simplement en ôtant un des écouteurs de son casque, sûrement pour pouvoir entendre sa réponse.

Le garçon ne parvint à émettre qu'un cri de bête blessée en réponse, et se recroquevilla, d'un seul coup se fichant éperdument de la boue, de la poussière qui maculerait ce qui restait de ses vêtements.

L'inconnue ne s'en offusqua pas et le prit simplement au creux de ses bras. Le petit entendit le murmure grésillant de la musique que son sauveur écoutait en cet instant. Il lui sembla qu'il la connaissait, du moins ses accords principaux, et le contact d'un sujet qu'il maîtrisait un tant soit peu le rassura. La tétanie qui secouait ses muscles se calma.

-Bien, bien. Murmura la jeune femme avec sa voix altérée. –Comment tu t'appelles ?

Le petit se raidit à nouveau dans ses bras.

-Allons, je ne vais pas te manger...

Il devait à peine avoir 8 ou 9 ans ? Et il se trouvait dans un état pitoyable, ses yeux étaient rouges et tellement bouffis qu'on en voyait à peine la couleur. Ses cheveux noirs emmêlés ne formaient plus qu'une massez hirsutes et noueuses sur son crâne, et il était inutile d'essayer de découvrir si le garçon avait la peau sombre ou non : il était noir de boue de la tête aux pieds.

-E...E...

Le petit trembla de froid et avala de travers, avant d'être secoué par une quinte de toux assez violente. D'un geste précis et spontanée, la femme décrocha sa cape –qui avait connu des jours meilleurs- et l'enroula dedans avant de lui frictionner les membres à travers le tissu, pour le réchauffer. Elle attendit patiemment que le petit ait fini de pleurer tout son saoul, puis lui tendit une gourde, qui pendouillait jusque là à sa ceinture. Il but au goulot, et goulument.

-Alors, c'est quoi ton nom ? Redemanda-t-elle après coup.

Encore une fois, le petit garçon sembla hésiter, prémâcher et remâcher ses mots, avant de finalement balbutier :

-E...Lé... Léo...

Le gamin se mordit la langue et baissa la tête, regardant ailleurs.

-Enchanté, moi on m'appelle Scarlet.

Elle lui serra la main comme elle l'aurait fait avec un adulte. Hellion remarqua que de près, sa bouche et ses mains, calleuses, n'avaient rien de féminines.

-Petit, tu viens d'où comme ça... ?

Léo secoua la tête, déglutit, puis pointa du doigt l'horizon, avant de se rendre compte qu'il ne savait pas du tout où il se trouvait et qu'il devrait donc parler de nouveau. Les mots lui raclèrent la gorge.

-Ros...Rosalia ?

Sa voix lui parvint, rauque et usée, il se demanda une seconde si elle allait rester comme ça définitivement.

-Tu y étais tout seul ? Demanda Scarlet, le timbre masculin sonna plus fortement tandis que son double féminin monta dans les aigus de manière non-naturelle.

Le garçon secoua vivement de la tête.

-Non, papa et maman, et papy...ajouta-t-il en sanglotant.

Scarlet ne tressaillit pas, au lieu de ça elle le reprit dans ses bras et le porta sans problème, avant de presser un bouton camouflé dans son casque.

-C'est moi. Je rapporte un gamin qui s'est sauvé de Rosalia. Tu peux le prendre ?

Léo ne perçut aucune réponse, mais l'autre secoua la tête.

-Qu'est-ce que tu entends par incendie ?

Il se tourna pour observer le ciel au loin, un long panache de fumée noir, telle une colonne montait jusqu'aux nuages et éventrait le bleu azur. Léo sentit un frisson lui remonter l'échine et il jeta un regard éperdu à sa sauveuse. Mais à travers la visière grise il ne discerna pas la moindre émotion.

-Petit...

Elle se tourna de nouveau vers lui, et ses cheveux couleur aile de corbeaux lui apparurent aussi noirs que ce qui ravageait les cieux en cet instant. Elle le posa à terre et récupéra sa cape. La morsure du froid fut d'autant plus violente qu'elle l'avait épargné durant quelques longues minutes. Scarlet s'agenouilla pour être à son niveau.

-Est-ce que tu peux me dire à quoi ressemblent tes parents ?

Léo écarquilla des yeux, et secoua la tête, perdu, avant de balbutier :

-J'ai...j'ai les cheveux de mon papa, tout noirs...

Il agrippa une mèche sur sa tête et se salit aussitôt la main.

-M-mais les yeux de ma maman ?

Il hoqueta. Il ne savait pas comment décrire les deux personnes les plus chères à son cœur. Scarlet soupira.

-Tu as une photo d'eux ?

De grosses larmes roulèrent sur les joues d'Hellion qui fixa le sol et ses chaussures sales, penaud. Apparemment non.

-Tu sais à quelle adresse ils étaient ?

Le gamin sembla se concentrer de toutes ses forces pour mettre des mots et des nombres sur ses souvenirs, mais il secoua négativement du chef.

-M-Mais ! Mais on était au grand hôtel près du chemin avec les arbres oranges et rouges ! Se précipita d'ajouter le gamin. –Le super, grand beau hôtel ! Chambre 433 !

Scarlet se contenta d'approuver, puis elle posa ses mains sur ses épaules et son timbre se fit plus grave, bien que son effet s'en trouva amoindri par la couverture mécanique du micro.

-Ecoute-moi bien Léo. Il va falloir que tu sois courageux, d'accord ?

Léo ne voulait pas entendre la suite.

-Il s'est passé quelque chose de très grave à Rosalia, et peut-être que tes parents ne s'en sont pas sortis, tu comprends ?

Il n'avait pas envie de comprendre.

-Si jamais quelque chose leur est arrivé, il va falloir que je te rapporte quelque chose qui leur appartient.

Parce que sinon, sans corps, on passe sa vie à nier et son existence à s'inquiéter.

Léo plissa les yeux et n'articula rien, il mit toutes ses forces pour ne pas gémir ou penser au pire.

-Mais...mais s'ils vont bien, tu les ramènes ici, hein ?

Scarlet hocha du chef, mais Léo vit bien qu'elle ne plaçait que peu d'espoir en cette possibilité.

Soudain, une chose noire et bruyante déboula sur le sentier, Hellion se jeta au sol dans un réflexe, mais Scarlet elle se leva d'un bond et fit un large mouvement du bras. Les bruits s'arrêtèrent immédiatement. Le garçon osa jeter un regard par-dessus son épaule.

Une espèce de moto usée lévitait au dessus du sol, entourée d'un halot bleuté. Ses occupants, une grande gigue à la chevelure châtaine, grogna et insulta l'engin, alors que derrière elle, un petit blond ricanait.

Mais revenons un peu plus tôt dans la matinée.

Lorsqu'elle se leva, elle avait totalement oublié ses intentions de meurtres envers la personne de Sho. Elle ne risquait plus rien après tout, avec son tarpaud. Celui-là même batifolait joyeusement dans un courant depuis l'aube, il revint vers elle quand elle s'approcha de son sac : le signal du petit déjeuner.

-Désolée, mais on doit ratio...

Elle stoppa sa phrase en son milieu, son adorable grenouille avait tourné au gris-noir pendant la nuit. D'un pas précautionneux, elle s'approcha de la mare où le Pokémon avait barboté, et se figea. Des cendres. Le courant de la rivière charriait une énorme quantité de cendres, du bois flottés s'échouait sur la rive, et autres objets non-identifiés tant ils ne restaient plus d'eux que des masses calcinés informes, avaient été drainés jusqu'ici.

Quelque chose devait se passer en amont.

D'un pas rapide elle rappela Tarpaud dans sa pokéball, sans le nourrir, et rangea ses affaires. Elle jeta un coup d'œil au blondinet endormi dans son coin. Bien emmitouflé dans son sac, cela réduit sûrement le coup qu'elle lui envoya dans le ventre.

-Debout, on y va.

Il lui adressa un regard endormi, de toute évidence son mode « tout sourire » ne fonctionnait pas au pied du lit. Il bailla bruyamment et se gratta le ventre. Fang crut voir, durant son geste, un morceau de son ventre. Il avait des restes de bronzages, et sûrement la peau naturellement basanée, mais ce qui attirait son regard (outre les plaquettes de chocolats –dommage que le gamin ne soit pas gay) c'était un bout de cicatrice. Le genre de cicatrice pas belle en plus. Celles dont on écope après avoir failli clamser. Fang en connaissait un rayon à ce sujet.

-Grouille. Lança-t-elle à ce dernier, alors qu'il regroupait ses affaires.

Elle lui montra la place derrière elle, cette fois pas question de ralentir, même si c'était amusant de le trainer dans son sillage. Son instinct de survie lui criait de se barrer vite, et elle l'écoutait généralement.

« Mais moi tu ne m'écoutes jamais. » Grommela la voix dans son crâne, boudeuse.

Il parut s'étonner de son geste de sympathie, puis afficha son premier sourire de la journée. Même s'il ne fallait pas se fier à lui, et encore moins à sa bonne humeur, Fang apprécia de voir sur la première personne qu'elle croisait de la matinée, ce genre d'expression.

-Attends, tapette n'est pas là ?! S'exclama soudain le blondinet avant de s'installer lui aussi sur sa moto Betsy.

Tapette. En voilà un beau surnom pour son Tarpaud. Fang ne cautionnait pas ce surnom, étant une yaoiste jusqu'au bout des ongles, l'aspect péjoratifs du mot n'allait pas dans le bon sens de sa logique. Mais elle rigola tout de même.

-Non, dans sa pokéball, mais il est prêt à ressortir dès que je le lui demande et à te couvrir de bave !

Sho émit un couinement, mais prit tout de même place, à croire qu'il préférait affronter sa peur plutôt que d'avoir à faire le chemin à pied. Et bizarrement, Fang, en avisant les nuages noirs pas du tout naturels qui s'étendaient derrière le bosquet, le comprenait parfaitement.

Elle démarra, motisma gronda de mécontentement de se réveiller avec du travail mais obéit. En revanche, au bout de quelques minutes, ils perdirent la route de vue et durent passer à travers la végétation. D'habitude Fang se fiait à son intuition pour se diriger, mais là, entourée par autant de vert et d'arbres, de plantes en tout genre, elle se sentait mal à l'aise.

-Et si tu me servais à quelque chose, guide du dimanche, hein ? Puisque t'es là rend-toi utile.

Elle perçut le rire de Sho dans son dos. Elle fut tentée de le jeter en cours de route, surtout que ni lui, ni elle ne portait de casque, elle était donc un peu près certaine de s'en débarrasser définitivement s'il basculait à cette vitesse.

-Hey, c'est pas sympa !

Décidément, ce type était vraiment super bizarre. Elle éclaircirait ça plus tard.

-Bon sur quoi veux-tu que je te parle au juste ?

Fang se concentra, puis envoya celle qui lui tenait le plus à cœur, puisqu'il s'agissait de ce qui risquait le plus de lui arriver :

-Comment on gère les criminels ici ?
-Ca dépend du crime. Si c'est petit, t'as juste un casier, et au bout de 5 délits mineures, t'es irrécupérables, tu passes devant la cours de Twilight. Si tu fais de grosses conneries, ou que tu tues quelqu'un, tu y vas direct.
-Ah, et il se passe quoi dans cette cours de Twilis ?

Sho ricana face à la référence.

-D'après ce qu'on m'a dit, il est impossible de mentir. Ils ont les plus grands maîtres Pokémon psy à leurs service et fouille dans ton cerveau pour en extirper la vérité. Donc si t'es coupable de tout ce dont on t'accuse, et bien, t'es foutu. Sinon t'es libre. Aussi simple que ça.
-Et les droits des hommes alors, et la liberté de pensée quoi ? Respectez un peu l'intimité des autres !
-De telles choses n'existent pas. Ricana tristement Sho. – Enfin, pas pour les criminels selon Twilight. Si tu es accusé et que finalement tu es innocent t'as droit une indemnisation. Donc c'est cool.
-Quel genre d'indemnisation ? Demanda Fang, sa fibre vénale se réveillant d'un coup.
-Aucune idée !
-T'es nul comme guide.

Il ricana.

-En revanche si t'es jugé coupable, les maîtres psy effacent ta mémoire.
-Genre ?

Ca avait pas l'air bien méchant comme punition.

-Non Fang, ils effacent tout. Le criminel doit réapprendre à parler, à marcher, à être propre. Il est envoyé dans un centre de rééducation où des volontaires, des médecins et des membres secondaires de Twilight s'occupent d'eux pour qu'ils ne tournent pas mal encore une fois.

Fang déglutit.

« D'un côté ça te ferait pas de mal » Envoya la voix.

-Ca c'est pas sympa ! Ricana à nouveau Sho.

Fang se figea, elle allait se retourner pour le dévisager, mais la roue de Betsy glissa dans une mare de boue et ils dérapèrent violemment. Ils firent une embardé violente et traversèrent une barrière de buisson sans mal, pour découvrir une pente vertigineuse, presque à la verticale.

Fang sentit le poids de son estomac remonter le long de sa trâchée, puis heurter sa gorge avant de redescendre sensiblement jusqu'au bout de ses orteils. Sho, moins sensible hurla simplement :

-ON VA TOUS CREVER !

Avant d'exploser de rire tandis qu'elle essayait de reprendre le contrôle de son véhicule. S'ils ne faisaient rien, c'était une certitude et pas besoin d'être baptisé à ces foutues plaques d'arcéus pour le savoir !

Fang donna un coup de botte dans le sol pour essayer de stabiliser l'engin, ou tout du moins le ralentir et elle vit Sho faire de même, mais un nid de poule –elle détestait maintenant les poules ! décida Fang- rendit tous leurs efforts vains et ils traversèrent de nouveau une barrière de buisson.

Elle inventait des prières qui s'apparentaient plus dans sa tête à des insultes, quand tout s'arrêta brusquement.

Il fallut un peu de temps et quelques grognements à Fang pour réaliser qu'ils ne risquaient plus rien. Une malédiction à l'encontre de toutes les poules de la planète, pour comprendre qu'ils étaient suspendus dans le vide et que donc leur arrêt n'avait rien de normal. Et enfin, grâce à Sho qui salua les spectateurs de la scène, elle remarqua Scarlet et Léo.

C'était un peu irréaliste comme rencontre.

Surtout avec l'autre là –un mec ou une femme, difficile à dire, et pourtant Fang était yaoiste donc très portée sur le sujet. En tout cas la chose portait un uniforme bizarre, une cape, des écouteurs et une visière, tout en bleus et rouge. Il ne dévoilait qu'une petite parcelle de peau, le bout de ses doigts et le menton, et encore moins de ses cheveux, car un chapeau camouflait le haut de crâne. Elle ne voyait que quelques mèches noires coupés au carré.

En gros, c'était un type (ou une type) louche. Quoique, elle avait un vague renflement au niveau de la poitrine. Mais c'était peut-être une sorte de gilet de protection.

L'inconnue elle, ne se soucia pas vraiment de ça et oublia même les présentations. Une fois le moment embarrassant écoulé Fang la vit se détendre, et elle rangea ce qui devait être une arme dans sa poche.

L'auréole bleutée qui les entourait se dissipa et la moto tomba lourdement dans la boue, soumise de nouveau à la gravité.

Cette fille avait de bons réflexes et surtout de drôles de pouvoirs si c'était elle qui avait fait ça à sa Betsy. Motisma grésilla étrangement sous le capot, accentuant ses doutes.

-Vous tombez-bien. Etes-vous baptisés ? Demanda soudain l'étrange inconnue.

La question surprit. D'abord parce qu'elle était prononcée par une voix pas vraiment humaine, plutôt mécanisée, dont deux tonalités dominaient, une féminine, et une autre masculine.

-Non, aucun de nous deux. Répondit Sho.

La voix du blondinet lui parut bizarre, comme un peu perdue. Il avait une main protectrice posée sur l'oreille droite, et plissait les yeux. Il avait du se faire mal durant la chute.

-Génial. Léo, tu es baptisé toi ? S'exclama la casquée.

Le gamin –dont Fang n'avait pas vraiment pris conscience de sa présence jusqu'à maintenant- sursauta, et fit non de la tête.

-Mais mes parents oui. Ajouta-t-il avec vigueur.

Fang entendit Sho murmurer quelque chose comme « Malin ». L'inconnue en uniforme, elle, hocha du chef avec appréciation.

-Je vais vous demander un service. Pouvez-vous emmener cet enfant à Acajou ? Une fois que vous serez là-bas, allez au restaurant qui surplombe le lac colère et dites au barman : « Nous apportons les fleurs ». Ensuite faites ce qu'il vous dit.

Hey, mais ma moto, c'est pas un taxi ! S'offusqua Fang quand l'autre déposa le garçon dans les bras de Sho, sans vérifier s'ils étaient d'accord ou pas.

-De toute façon je sais pas où c'est Acajou ! Grommela-t-elle, voyant que déjà le blondinet entourait le nouveau venu de ses bras, comme un bien précieux.

L'inconnue murmura :

-Ah oui...

Elle leva les yeux et scruta le ciel quelques secondes, en sortant un pistolet d'une poche du gilet de son uniforme. Fang recula instinctivement à la vision de l'arme. Mais l'étrangère pointa le ciel et tira. La balle fusa, mais Fang lui trouva une drôle de forme, trop étrange pour être totalement dûe à la déformation de l'image par la vitesse. Scarlet elle, tira sur son flingue et une toge de métal se détacha d'elle, comme une goupille, longue et fine, il la fit tournoyer comme une fronde, autour de lui.

-Un ranger ? S'étonna Sho dans son dos.

Fang leva les yeux vers le ciel, et eut à peine le temps de voir un cercle briller autour d'un Pokémon, avant que celui-ci ne se pose près d'eux. Un coxyclaque.

-Ce coxyclaque vous mènera jusqu'à Acajou. Déclara l'inconnue.

Le Pokémon et elle échangèrent un regard entendu, puis elle tourna fit un geste de la main, sec. Le pokémon coccinelle se posa sur son guidon et fit trembler la moto sous son poids. Le temps que Fangs secoue la tête pour se remettre du choc, l'inconnue avait disparue.

-Quelle gonflée celle-là ! Grommela-t-elle.

« Au moins, on ne risque plus de se perdre. »

Le petit garçon dans les bras de Sho retint un sanglot, et fang senti t l'exaspération monter en elle. Trop c'était trop.

-Si tu veux rester sur la moto, tu chiales pas. Bon sang t'as passé l'âge de pleurnicher.

Le gamin se raidit.

-T'as quel âge d'abord ?
-9...ans. Balbutia le petit, intimidé.

Il avait l'air en mauvais état. Il n'empêche qu'on ne montait pas sur Betsy gratis.

-C'est quoi ton nom ?
-E...Léo.
-Ah ? Marmonna Sho en guise de réponse.

Mais il n'ajouta rien d'autre.

-J'te préviens, Léo, une fois arrivé à Acajou, tu payeras le taxi. Avertit Fang.

Le petit n'objecta pas. Fang appuya sur les pédales et suivit le coxyclaque, cette fois, à une allure bien plus modérée et en évitant les nids de poule.