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A l'aube du pouvoir (T.1) de Raishini



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Informations

» Auteur : Raishini - Voir le profil
» Créé le 12/05/2012 à 09:21
» Dernière mise à jour le 16/11/2013 à 14:42

» Mots-clés :   Fantastique   Hoenn   Présence de poké-humains   Sinnoh

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Chapitre 2 : L'avènement de l'un, la chute de l'autre
La cellule était grise, terne et monotone. Un petit carré de béton usé et glacé, voilà ce qu'il avait en guise de maison. Quant à ce qu'il avait en guise de compagnie ? Un vieux lit à la charpente délabrée et aux couvertures miteuses, un évier crasseux et un pot de chambre nauséabond. Voilà tout. Et à travers les barreaux d'acier, -neufs en revanche-, il ne voyait que des couloirs lugubres à l'architecture vétuste. On les aurait cru taillés dans un affreux bloc de béton. De fait, la seule couleur qui s'offrait à son regard était du gris. Du gris à perte de vue. Du gris à n'en plus finir. Du gris, en veux-tu, en voilà...

Tel était le quotidien lassant d'un homme. Ni plus ni moins que cela. Rien de plus malheureux, dira-t-on... Mais quoi de mieux pour un prisonnier après tout ?

Orowind, voilà le nom de la forteresse qui le retenait captif. Cette forteresse perdue sur une île au beau milieu de l'océan, en plein cœur d'une jungle hostile. Et il se trouvait à son plus bas niveau, le cinq, qui plus est. Cela faisait déjà dix longues années. Dix longues années qu'il y était enfermé, priant chaque jour pour en sortir. Mais il savait parfaitement que, s'il parvenait par un quelconque miracle à sortir de sa " chambre ", une nuée entière de gardiens lui sauterait dessus. Une nuée de gardiens armés jusqu'aux dents et avertis par une nuée de surveillants, eux-mêmes alertés par une nuée de caméras truffées un peu partout dans le bâtiment. Simple mais efficace. Orowind n'avait pas volé son titre " d'inexpugnable ", force était de le reconnaître.

L'homme tourna en rond dans sa cellule, ayant pour seul bruit de fond l'écho de ses propres pas. Il fallait dire que le niveau cinq, -où étaient incarcérées les pires crapules-, n'abritait pas foule. On l'avait ramené lui, l'homme aux trois millions de PokéDollars, après une brève promenade de vingt-cinq minutes. Hormis cela, il ne sortait de ce dédale de couloirs sombres que pour manger et se laver. Et encore, si on pouvait dire que ce qu'on lui servait était mangeable, ou même que les salles de bains étaient d'une propreté décente.

Le directeur s'était même payé le luxe de lui accorder un appel téléphonique, par " pure miséricorde " bien entendu. Pas de sourire ironique, pas de ton moqueur, juste la volonté de le voir s'effondrer de tristesse une fois qu'il aurait raccroché pour toujours.

Que ces quelques minutes furent dures... Mais s'il devait essuyer une peine d'enfermement de toute une vie, s'il devait vraiment faire de la perpétuité, autant l'entendre une dernière fois. Sa voix. S'assurer qu'elle allait bien. S'assurer que, même sans lui à ses côtés, la vie continuait pour elle. Et surtout, s'assurer qu'elle était heureuse. Il n'en demandait pas plus.

Le prisonnier tomba à genoux, le corps parcouru de légers tremblements et le visage inondé de larmes. Repenser à ce qu'elle lui avait dit lui faisait mal... oui, si mal ! Comment l'amour de sa vie avait-il pu le rejeter ainsi ? Pourquoi ne le comprenait-elle plus comme avant ? Pourquoi donc ? Il n'osait y croire... Ce devait être une erreur ! Elle devait être un peu fâchée sur le coup et ses paroles avaient dépassé ses pensées. Voilà la seule explication plausible. Impossible qu'elle lui voue une quelconque haine. Après tout, ils s'aimaient...

Méditatif, l'homme s'interrogeait de plus en plus sur les raisons qui le motivaient... Avait-il eu raison de se hasarder sur le chemin qu'il avait choisi ? En le suivant, ne faisait-il pas une erreur plus considérable encore que toutes celles qu'il avait pu commettre à l'époque où les Pokéman sévissaient ? Ne se révélerait-il pas ainsi d'une nature similaire à celle qu'on lui soupçonnait ? Prendre une décision ferme le déchirait... Et remuer ses souvenirs ne faisait que rendre plus désagréable encore ce cruel dilemme.

Son cœur serré tambourinait à lui rompre les cotes dans sa poitrine. Il ne se sentait plus homme. En fait, il ne se sentait plus du tout, comme réduit à rien. Les dernières paroles hargneuses de sa bien-aimée avaient ôté en lui les dernières parcelles de son âme. Elles avaient transformé son humanité en poussière, n'en laissant que le pale souvenir... Il était à présent telle une coquille vide, seule et éloignée de tout sur une plage déserte.

Cela faisait bien longtemps que ses entrailles se tortillaient douloureusement, mais il venait tout juste de le réaliser. Maintenant qu'elle l'avait rejeté, maintenant qu'elle avait brisé son être d'une poigne impitoyable, il comprenait. Sa femme l'avait abandonné. Comme sa petite fille. Comme tous les autres.

Alors qu'il ressassait cette funeste vérité, ses pleurs redoublèrent d'intensité. Un flot successif de questions lancinantes venait le submerger et embrouillait ses sens. Pourquoi ne le comprenait-on pas ? Qu'avait-il donc fait qui mérite une telle cruauté ? Vouloir changer les choses était-il donc un péché capital ? N'était-il né que pour souffrir et marcher sous les sifflets de la foule ? N'avait-il pas droit au bonheur ? En somme... qu'avait-il fait de mal ?!

" Tu n'as pas fait de mal... TU ES LE MAL. "

Une voix moqueuse et caquetante avait résonné, non pas à l'extérieur, mais à l'intérieur de lui Elle provenait tout droit de son esprit, bousculant sa conscience et prenant un peu plus le pas sur ses pensées à chaque seconde...

- Mais qui es-tu ? souffla le prisonnier, haletant.

L'homme se soutint d'un bras pour ne pas tomber, se tapotant le crâne avec l'autre. Il ressentait un picotement désagréable, comme démangé par un insecte à la piqûre particulièrement féroce...

" Ça ne se devine pas ? répondit la voix en lui martelant le cerveau. Mais pourtant c'est simple... Je suis celui qui a osé te faire dire ce que tu taisais. Je suis celui qui a fait de tes projets secrets une réalité. Je suis celui qui a redonné un semblant d'honneur à l'individu faible que tu étais... je suis toi. "

Le prisonnier n'osait y croire et demeura coi un instant, retenant son souffle. Cela n'avait rien de rationnel !

- Non, tu mens ! Foutaises, tu n'existes pas ! Tu es le produit de mon imagination et je peux te faire disparaître aussi vite que tu es apparu !

- Très bien. Dans ce cas ne te gène pas, vas-y ! "

L'homme déglutit. Cette fois, les paroles ne provenaient pas de son esprit... elles avaient franchi ses lèvres ! Que lui arrivait-il ?

- C'est ce que je pensais, je n'ai eu aucun mal à prendre possession de tes fonctions motrices. Tu es faible... TU ES FAIBLE !

En proie à un effrayant dédoublement de personnalité, le prisonnier conversait à grands renforts de cris. Tantôt sa voix était grave, tantôt elle était mielleuse et aiguë. Il vociférait, gesticulait, postillonnait...

- Laisse-moi... TRANQUILLE ! disait l'homme.

- Non, n'y compte pas ! répliquait son affreux homologue. IL EST TEMPS QUE QUELQU'UN REPRENNE LES RÊNES ! Ça fait déjà trop longtemps que je sommeille en toi. Je t'ai déjà imposé ma volonté une première fois, je peux bien réitérer cet exploit !

- PARS ! VAS T'EN !

Le prisonnier se jeta sur son lit en le faisant dangereusement grincer. Dans une suite ininterrompue de convulsions, de grimaces et de hurlements, il articula :

- Aujourd'hui, tu es à moi ! Je suis... je suis le ROI !

L'être d'origine se trouvait étrangement détaché, comme si sa conscience risquait de s'envoler. Ses pensées devenaient une sorte de brouillard noir. Il perdait tout contrôle et se sentait disparaître progressivement. Allait-il rejoindre les dieux dans le ciel ? Serait-ce donc ça... mourir ?

Un gloussement résonna alors. Un gloussement froid, un gloussement à vous figer le sang. Les cris, les gesticulations... Tout avait cessé. Il avait gagné.

Désormais, ce corps avait un maître. Un nouveau maître.

Pokémon #491
Une nuit sombre se profilait par-delà le crépuscule orangé. Le vent charriait d'importantes masses de cumulonimbus. Ils avaient l'air d'étranges taches inconsistantes au milieu du ciel. Quelques étoiles brillaient déjà d'une lueur ondoyante, petits points lumineux dans cette immensité étincelante. Un grondement résonna au loin, suivi d'un fracas reconnaissable entre milles. Celui d'un éclair. Visiblement, un orage tumultueux s'annonçait.

Hyde s'humecta l'index et le pointa à la verticale, l'air absent. Oui, le vent amenait l'intempérie dans sa direction. Aucun doute possible à émettre là-dessus. Il faisait, malgré l'obscurité grandissante, une chaleur quelque peu étouffante. A coup sûr, l'océan de Sinnoh aurait le droit à un bon vieil orage tropical.

Derrière l'homme, un imposant bâtiment rectangulaire élevait ses quatre tours d'angle et dressait ses hauts remparts de béton gris et monotone. A première vue, ce monument architectural aux rares fenêtres à croisillons était impénétrable et des plus terrifiants. Mais Hyde savait que ce n'était que la partie visible de l'iceberg. Une fois passée la porte en bois massif qui constituait l'entrée... le spectacle était autrement plus sinistre,

A Orowind, c'était comme ça. Lorsqu'on y avait mis les pieds ne serait-ce que quelques minutes, on s'en trouvait hanté par le souvenir de ce que l'on y avait vu et entendu. Invariablement, cette prison réputée comme la meilleure au monde marquait ceux qui se retrouvaient entre ses murs. Captifs comme geôliers, visiteurs comme visités.

Hyde détestait cet endroit. Mais contribuer en tant qu'inspecteur à l'arrestation de criminels était sa seule raison de vivre, la seule chose qui lui ait permis de tenir bon après toutes ces années... Depuis dix-sept ans ans exactement.

L'homme avait perdu vingt kilos entre-temps. Il avait coupé ses cheveux très courts et opté pour des lentilles de contact, comme pour tirer définitivement un trait sur son passé. Son visage avait toujours un côté juvénile, mais il s'y était rajouté quelques rides. Hyde ne souhaitait plus penser à tout cela. A présent, il n'était plus le même. Il avait changé, aussi bien physiquement que mentalement.

Oui, laisser ça derrière lui sur le sentier rocailleux qu'il parcourait, ne plus y penser...

Des hêtres formaient une rangée bien nette de part et d'autre du chemin que l'homme empruntait. Absorbé dans ses pensées, il ne remarqua pas un fait insolite : l'individu qui se tenait en équilibre sur la branche d'un des arbres et semblait l'observer attentivement. Mais alors qu'il atteignait une pente douce, l'inconnu sauta brusquement devant lui, arrachant un bref sursaut à Hyde.

- Et alors ? ironisa le nouvel arrivant. Sortir aussi tardivement sans escorte ne ressemble pas à l'Inspecteur en Chef d'Orowind ! Ce n'est pas une conduite très prudente pour un tel représentant de l'ordre !

Hyde demeura ahuri, les sourcils si rapprochés qu'ils semblaient n'en former qu'un. Il venait de reconnaître la mine revêche, la peau crayeuse et les yeux rouges et cruels...

- D'un autre côté, tu as bien changé... reprit son interlocuteur en lui jetant un regard torve, sa bouche s'étirant en un affreux rictus. Regarde-moi cette silhouette d'athlète et ces trapèzes ! Mon dieu, ne me dis pas que tu as fait vœu d'abstinence sur les sucreries et les soirées passées dans le canapé ? Quelle abnégation, bravo ! ajouta-t-il de son ton le plus mielleux en faisant mine de l'applaudir. Il paraît aussi que tu as une femme maintenant...

Hyde gesticula imperceptiblement, mal à l'aise. Si de prime abord les propos doucereux de son vis-à-vis ne l'avaient pas réellement gêné, ils commençaient désormais à prendre un tout autre tour... Un tour qui ne lui plaisait pas.

- Dis-moi, tu as bien vite oublié Ève, lança l'inconnu, bien plus mauvais que précédemment. Aurais-tu également oublié ton cher petit frère, Hyde ?

Le timbre de plus en plus menaçant de sa voix était sans équivoque. Le rancœur qu'il gardait en lui émergeait au fur et à mesure qu'il parlait, et Hyde ne le sentait que trop bien.

- Bien sûr que non Xavier, ou plutôt devrais-je dire, Orion ! répondit ce dernier en masquanr difficilement son malaise. As-tu donc si honte de ton prénom d'origine ? Quoi que tu fasses, tu seras toujours le même ! Et changer d'appellation n'y fera rien !

Un silence pesant s'installa soudainement tandis que les deux frères s'observaient, l'un avec animosité, l'autre avec curiosité et appréhension. Orion était plus impressionnant, plus imposant que jamais. Son visage carré à forte mâchoire, son crâne chauve et luisant comme la surface polie d'un miroir, son sourire mauvais aux dents jaunâtres mais pointues... Tout en lui concourait à susciter la crainte, à lui conférer l'allure d'une bête féroce et sanguinaire.

Orion n'avait pas pris la peine de couvrir son torse d'une blancheur lunaire. Il revêtait un simple pantalon à plis marqués d'un vert anis auquel il avait attaché une chaîne sur deux passants opposés. Au moindre de ses mouvements, les maillons métalliques battaient sa hanche gauche dans un tintement sonore. Cela lui donnait l'air d'un bandit tout juste évadé. Par ailleurs, l'imposant tatouage en forme de serpent ailé sur sa poitrine confirmait cette impression Le dessin au style gothique était si réaliste qu'il semblait prendre vie à chaque fois que les muscles d'Orion s'animaient.

Lui, en revanche, n'avait pas changé, pensa Hyde avec nostalgie.

- Ne me dis pas que tu as neutralisé les gardes ? demanda-t-il en sondant son cadet du regard. Tu fais une folie !

- Tu le remarques tout juste maintenant ? souligna Orion d'un ton sarcastique. Mon pauvre, mon apparition a vraiment du te tournebouler !

Hyde ne répliqua pas. Son frère avait visé juste. Sa présence était tout sauf logique. Comment cela se pouvait-il ?

- Tu dois te demander pourquoi, et surtout par quel miracle, je suis ici, dit Orion, devinant les pensées désordonnées de son aîné avec une facilité déconcertante. C'est tout simple, je vais te le dire... après t'avoir emmené avec moi.

- Comment ça ? s'exclama Hyde, sans comprendre.

Son air incrédule fit doucement glousser Orion. Tout en lui avait changé, sauf son expression. Cette expression naïve qu'il lui connaissait si bien et qui avait toujours été la sienne quand il était abasourdi. Oui, c'était celle là qu'il affichait lorsqu'il ne comprenait pas. Et Orion trouvait cela particulièrement risible, pour sa part.

- Très bien, je vais être plus explicite, reprit-il d'une voix dure, les ailes de son nez grec frémissantes. Je ne suis pas venu régler mes comptes avec toi. Non, ça, nous en aurons tout le temps plus tard. Pour l'instant... je suis venu te chercher.

Le visage de Hyde n'exprimait plus le doute, seulement la colère et l'indignation.

- Mais pourquoi donc ? demanda-t-il dans une vaine tentative pour contenir la fureur qui faisait trembler sa voix.

- Alors tu n'as vraiment pas la moindre idée ? Dire que je te croyais bien plus intelligent que quiconque ! Je n'ai pas le temps de t'expliquer, il se pourrait déjà que l'on ait remarqué que quelque chose clochait à l'extérieur. Mon dieu, combien il est regrettable... d'en finir ainsi !

Et, sans prévenir, Orion bondit sur son frère, brandissant férocement le poing. Malgré son costume cravate très peu adapté aux acrobaties, Hyde para un coup, puis un deuxième... et contre-attaqua avec un coup de pied fouetté. Il atteignit Orion en plein menton dans un craquement sinistre. Mais, loin de laisser un quelconque ascendant à son aîné, celui-ci riposta prestement, frappant aussi sec Hyde au niveau de la mâchoire.

Ahanant et tenant dans sa main la zone respectivement touchée par l'autre, les deux adversaires reculèrent et se scrutèrent attentivement, le regard flamboyant. Avec un hurlement belliqueux, ils se ruèrent à nouveau l'un sur l'autre et engagèrent un sévère corps à corps. Dans la confusion qui s'ensuivit, une pluie de coup fut échangée. Quand l'un attaquait, l'autre ripostait aussitôt... Quand l'un parvenait à frapper, l'autre réagissait avec la même vigueur... C'était un combat comme on osait pas l'imaginer. Tendu, rapide et acharné. Et bien malin aurait été celui qui pourrait en prédire l'issue, tant l'opposition était forte.

Enfin, dans un ultime cri, les belligérants s'assénèrent mutuellement un uppercut en plein estomac. Foudroyés de douleur, le souffle coupé, ils titubèrent en sens inverse de l'autre. Les yeux clos, la respiration saccadée et le front moite, ils s'agenouillèrent au même instant en crachant de la salive ensanglantée. Ce goût âcre et déplaisant, Hyde avait espéré ne plus jamais l'avoir dans la bouche. Cette souffrance, son corps en feu, tout cela le déstabilisait au plus haut point. C'était comme s'il replongeait dix-sept ans en arrière...

- Je vois que tu n'as pas perdu la main... balbutia Orion en se relevant péniblement. Tu es toujours aussi fort qu'auparavant. Non, ajouta-t-il en épongeant le sang qui perlait à la commissure de ses lèvres, à vrai dire, tu es encore plus fort. C'est donc cela, le fameux Inspecteur Solrei, dit " les Poings Implacables " ? Dis-moi, tu t'es sérieusement entraîné depuis notre dernière rencontre !

Il esquissa un rictus de satisfaction devant la mine défaite d'Hyde. Celui-ci trouvait qu'il avait une étrange façon de lui rappeler cette fameuse nuit où ils s'étaient affrontés pour décider du sort de l'humanité... En son for intérieur, il craignait le pire. Son petit frère n'aurait pas du être en liberté, c'était à n'y rien comprendre...

- Avoue-le, reprit Orion en semblant à nouveau deviner le cheminement de ses pensées, tu savais. Tu savais que, d'une manière comme d'une autre, aujourd'hui comme dans dix ans, ton passé te rattraperait !

Devant le mutisme affligeant de son aîné, l'homme éclata de rire. D'un rire grave, sardonique.

- Je me doutais bien en venant à ton encontre que la partie serait loin d'être gagnée, même si j'arrivais à t'isoler. Aussi ai-je pris mes dispositions avant de me montrer.

- Que veux-tu dire ? s'exclama aussitôt Hyde, la mine soudain livide et le regard alerte. Tu ne serais donc pas seul ?

Orion leva les bras comme s'il invoquait la grâce des dieux, un large sourire flottant sur son visage blafard.

- Gagné ! Tu as deviné juste, comme presque toujours ! Mais vois-tu, il est légèrement trop tard pour songer à la fuite. Ton destin est déjà scellé.

Hyde se redressa, tournant la tête un peu partout. Fermement campé sur ses appuis, il scrutait la forêt qui le cernait à droite comme à gauche. Entendant un bruissement suspect, il s'empara vivement d'une PokéBall qui pendait à sa ceinture. Orion ricana doucement devant la peur que trahissait son frère et leva un index réprobateur en l'agitant dans un mouvement de métronome.

- Si je peux me permettre, tu ne regardes pas où il faut, ironisa-t-il en observant Hyde sonder obstinément la végétation.

Ce dernier comprit trop tard. Un craquement sourd déchira le silence. Puis une ombre l'enveloppa dans un souffle d'air et une silhouette blanche atterrit devant lui. Immédiatement et avant qu'il ait pu réagir, elle le désarma en envoyant sa PokéBall dans un buisson proche. Enfin, une rafale de vent le cingla en même temps que quelque chose de long, de pointu et d'acéré qui lui entailla le torse... Une longue coupure oblique se fit jour à travers sa chemise, laissant échapper un flot de sang qui ruissela le long de son habit.

En un instant, il lui semblait être passé de vie à trépas. Douleur, souffrance mais aussi incompréhension, doute et tristesse... Ce furent tout autant de choses qu'il ressentit en l'instant. Hyde tituba, le corps bouillonnant et envahi par une désagréable chaleur. Une chaleur étouffante...

- Alors, grand frère, ne te rappelle-t-il rien ? s'esclaffa Orion en observant avec un plaisir malsain Hyde s'écrouler lentement. C'est bel et bien lui !

L'inspecteur ne l'entendit qu'à travers un bourdonnement vrillant peu à peu ses oreilles. Son souffle était court, chaque respiration lui paraissait être comme un coup de poignard porté dans ses flancs... Son cerveau asphyxié flottait dans une étrange brume et son regard se floutait, l'emportant dans une inhabituelle somnolence... Il se sentait dépérir.

Hyde poussa un râle. Dans un dernier gargouillis écœurant, il s'effondra de tout son long, la jambe agitée d'un ultime spasme.

- Vite, transportons-le à la planque afin que je puisse le soigner sans accrocs, ordonna Orion avec dédain à la silhouette blanche. Comme ça, je pourra enfin lui demander... où il cache le Cristal de Puissance.