Smirnoff : Renaissance de Domino

« Ô Rose
Si un jour je t'indispose Rose
Si un jour vient l'overdose Rose
Fais comme si tu n'avais rien vu »
(Miossec - Rose)

« Bonsoir, ici le téléphone rose. Avons-nous un correspondant ? »
(Etienne à Linda dans le chapitre 20 « Idylle au bout du fil »)


- C'est tellement déprimant… soupira Rachel.
- Mais il faut bien le faire… soupira Malcolm.

La petite bande était chez Rachel à faire les paquets. Malcolm, Claire, Charlie, Léopold, Finn, Perrine, Lily, David, Kyle. Mais pas Yann.

- Quelle excuse votre loupiot a trouvé pour ne pas faire les cartons ? Souffla Roland.

Charlie et Léopold se regardèrent.

- Eh bien il est à la maison… commença Charlie.
- Avec son amie… continua Léopold.
- La petite Rose ! Admit Charlie.

Tout le monde regarda le couple.

- Seul avec une fille ?! S'étonna Malcolm.
- C'est le grand frisson, vous devez être morts de peur, une créature féminine dans votre antre… soupira Roland.
- Disons qu'on n'a pas l'impression qu'ils font quelque chose de mal alors bon…
- Ouh… marmonna Lily.
- Ouh les naïfs… marmonna Roland.
- Ouh les parents homosexuels inexpérimentés de la vie… marmonna Malcolm.

Claire et Rachel levèrent les yeux au ciel. Charlie soupira en secouant la tête.

- Yann est un grand garçon, il sait ce qu'il fait.
- On aurait dû lui laisser des préservatifs, vous croyez ? Demanda Léopold.

Pétrification générale. Tout le monde secoua la tête.

- Nan, mais nan on plaisantait ! Marmonna Roland.
- Mais oui, Yann n'est pas crétin à ce point ! Sourit Malcolm.
- On rigolait ! Souffla Lily.
- Bien joué, Léo… sourit Charlie.
- Bien joué de quoi ?!

***

Yann et Rose regardaient un film.

- Désolé que ça se finisse comme chez toi avec Dimitri.
- C'est pas grave… J'avais pas vraiment envie de te faire la classe, tes parents se débrouillent assez bien pour ça, tu deviens meilleur jour après jour.
- Ah bon ?
- Ah oui ça se voit, je t'assure.

Yann sourit.

- C'est juste dommage qu'on n'ait plus l'occasion de te voir officier en combat direct !
- Ouais, ça va faire bizarre une prof qui fait vraiment ses cours…
- Je pense que ce sera mieux malgré tout mais Mademoiselle Heine va me manquer… Elle était respectueuse des élèves qui n'aimaient pas combattre.

Yann hocha la tête.

- On va peut-être tomber sur une immonde harpie, le prochain coup…
- Oui… Euh… Pour parler de tout à fait autre chose, pourquoi n'as-tu pas invité Dimitri ?
- … pourquoi ça t'embête ?
- Je ne sais pas, vous êtes amis ?
- Bah oui…
- Alors pourquoi…
- Bah… J'ai essayé de l'appeler mais…
- Mais ?
- Mais… il voulait pas venir !
- Vraiment ?
- Ouais.
- Ah.

Ils continuèrent à regarder le film.

- Comment tu as connu ce film ?
- Par mes parents.

Rose hocha la tête.

- « A Serious Man » des frères Coen… C'est particulier…
- D'après Charlie c'est exigeant.
- Les seules choses qui me font rire ce sont les apparitions du… de l'amant… de la femme…
- Oui voilà en fait la vie de ce type est horrible.
- Ah ça oui… C'est… assez poignant.

Yann et Rose étaient côte à côte sur le canapé. Relativement proches.

- Je peux poser ma tête ?
- … où ça ?
- … sur ton épaule ?
- … en quel honneur ?
- Comme ça, pour me reposer !
- … Vas-y… j'suppose qu'il y a pas de problème…

Rose posa affectueusement sa tête sur l'épaule de Yann. Qui eut très chaud, l'espace d'un instant.

***

- Nah, je suis sûr qu'ils sont sages comme tout. On leur a posé un film des frères Coen sur la table basse ! Admit Charlie.
- La super éclate quoi… marmonna Finn.
- On a essayé une fois les frères Coen, on s'est endormis ! Ricana Lily.
- Au fait, félicitations la future maman ! Sourit Charlie.
- Merci ! Désolé tout le monde, Kyle est déjà le futur parrain !

Finn plissa les yeux.

- Ca se choisit pas à deux, ce truc ?
- Hein ?
- Un parrain c'est quelqu'un à qui le couple fait confiance pour élever un enfant s'ils meurent ou si il leur arrive un truc !
- Ooooh oui Finn, j'étais déjà d'excellente humeur, MERCI pour ça ! Ironisa Rachel en souriant.
- De rien poulette !
- Et alors ? S'étonna Lily.
- Bah généralement on choisit des parrains à deux ! Un couple de confiance ! Et ton frère et son mecton…
- Le mecton te remercie et t'annonce qu'il pense à toi à chaque film de fesses avec des militaires ! Sourit Kyle.
- C'est vrai, il le fait… soupira David.
- Trop de détails… geignit Roland.
- Ou pas assez, c'est selon… ricana Rachel.

Rires dans la pièce. Perrine observait un objet, une statuette d'Arcanin en porcelaine.

- Il est joli le chien.

Rachel releva la tête et approcha de ce que Perrine observait, qui se trouvait dans une étagère basse.

- … ça fait des lustres que j'avais pas vu ça en face…
- Ce bibelot ? Marmonna Roland.

Rachel secoua la tête.

- Un… un cadeau de papa, avant que je parte. C'était dans la maison, avant, sur un meuble. Papa disait que ça lui venait de sa mère. Il me disait que je lui ressemblais un peu d'un certain côté… Ce qui d'après Etienne était une affreuse insulte et que j'aurais dû frapper mon père à ce moment là…

Rachel prit l'objet et l'emballa. Perrine regarda Rachel.

- Les chiens volent dans la prairie.
- Oui, Perrine, les chiens volent. Garde ce genre de belles images en tête, ça te sera utile plus tard quand tu seras grande et désabusée… marmonna Rachel, mélancolique.
- Ne déprime pas notre fille ! Grommela Kyle.

Rachel acheva d'emballer l'Arcanin de porcelaine et le posa dans un carton.

- … je fais pas assez attention à toutes les horreurs que j'ai dans cet appartement…
- Et moi j'ai peur pour Mendelssohn…

Rachel regarda le piano.

- Il nous suivra à Hoenn, t'en fais pas, mes gars savent ce qu'il font. C'est déjà un miracle qu'ils nous le transportent à titre gracieux…

Léopold emballait des livres.

- Vous savez quoi ? Vous êtes trop jeunes pour vous en souvenir mais nos parents ont déjà fait quelque chose comme ça. Ce truc d'être séparés, loin les uns des autres… Quand je venais d'être adopté par… Norbert et Eddy, Dieu le garde…

Surprise devant l'entrée de la religion en ces lieux.

- … Ils ont migré. A Sinnoh. Sans raison, comme ça, pour le fun. Ils ont… migré… Enfin, là ça n'est que vous, Roland et Rachel, mais… eux, ils avaient fait le voyage. Tout ça pour ne pas se quitter.

Charlie hocha la tête.

- La fac avait été détruite, la fac où ils bossaient tous…
- Je suis pas allée jusque là quand même ! Sourit Rachel.

Malcolm ricana. Claire était morose.

- Et si… on ne se revoyait plus après tout ça ?

Tout le monde regarda Claire.

- C'est vrai quoi… regardez, Roland n'a pas beaucoup revu Lily et David depuis qu'il est chez Rachel… On voit de moins en moins Charlie et Léo depuis qu'ils ne sont ni à la fac, ni nos voisins…
- Eh bah… C'est la rareté de nos rencontres qui en fera la saveur désormais ! Sourit Roland. Moi je les aime beaucoup plus depuis qu'ils sont loin.
- Jusqu'à ce que tu croies qu'on te déteste ! Sourit Lily.
- Quelle soirée mémorable… marmonna David.
- La minute d'avant j'étais au lit avec sa sœur, la minute d'après je lui servais du thé… résuma Finn.
- Trop détails… marmonna Perrine.

Tout le monde ricana. Claire sourit.

- Ca va me manquer… tout ça… Vous viendrez au mariage, au moins ?
- Non… je comptais envoyer un moi-robot ! Sourit Rachel.
- Et moi je comptais envoyer un petit mot bien glauque genre « Le bouquet est maudit »… sourit Roland.

Malcolm soupira.

- Roland, si je le pouvais, c'est toi que j'épouserais !
- Ah, notre vie à deux serait…passionnante, subversive, sulfureuse, torride, elle ferait bander David…
- Rolaaaaaaaaaand !!!! Grommela David en désignant Perrine.
- Bande à David ? S'étonna la gamine.

Tout le monde la regarda.

- Les allemands ont des mots prétentieux, prétentieux sont les mots des allemands… récita la gamine.

Kyle regarda tout le monde, embarrassé.

- Un… débat entre moi et David, on se demandait pourquoi les noms communs allemands commençaient tous par une majuscule.
- Votre vie de couple est si passionnante ! Sourit Charlie.
- Tu peux parler, monsieur « Attention Yann, ce film est Exigeant » ! C'est d'un prétentieux de lui dire ça !
- Comme les mots allemands ! Sourit Perrine.
- Exactement ! Du bist eine grosse scheisse, Charlie ! Asséna Roland.

Charlie s'étonna.

- Tu parles cette langue, toi ?
- Un peu. Je viens de te dire que tu étais impertinent !
- Oh.

Finn, Kyle, David et Malcolm ricanèrent. Charlie plissa les yeux.

- J'en ai pas l'impression…
- Ah oui ? Tu parles allemand peut-être ?
- Nooon mais Malcolm a des origines allemandes et peut confirmer !

Malcolm hocha la tête.

- Tu es très impertinent, Charlie. Grosse Scheisse !
- Scheisse ! Sourit Perrine.
- PERRINE ! Grommela David.
- Pardon Papa-maman-oui-oui.

Roland regarda David qui soupira.

- Pendant une dispute, Kyle m'a appelé Oui-oui parce que j'étais une carpette avec la gosse…
- Il lui achète tout ce qu'elle veut ! Grommela Kyle.
- Et elle veut quoi ? Demanda très sérieusement Rachel.

Kyle soupira.

- Mademoiselle a cinq ans, 5 ANS et elle raffole des livres d'art.
- Elle passe des heures devant des livres avec de grandes photos de peintures de diverses obédiences, c'est sans danger pour elle mais c'est très impressionnant… marmonna David.
- Elle déteste Picasso, on lui a montré Guernica, elle a pleuré… marmonna Kyle.

Roland plissa les yeux.

- Perrine, veux-tu m'épouser ?
- Trop détails tonton !

Tout le monde éclata de rire.

***

- …
- …
- C'est… tellement…
- … frustrant ? Demanda Yann.

Rose secoua la tête.

- Merveilleux ! C'est… On vient de voir la vie devant nos yeux !

Yann plissa les siens, intrigué.

- Ah ouais ?
- Mais oui !
- Cette fin est quand même… nulle !
- Mais si ! Ca devient de pire en pire ! Et l'annonce de cette tornade, tu te dis « Bon sang, ça recommence » et hop, fin ! C'est… C'était un film merveilleux !

Yann grimaça.

- J'ai trouvé ça ennuyeux, moi, quand je l'ai vu avec mes pères !
- Oh Yann, un garçon sensible comme toi…
- Non, vraiment… Je devrais le montrer à Dimitri pour voir ce qu'il en pense !

Rose plissa les yeux.

- Yann ?
- Hm ?
- Tu es amoureux de Dimitri ?
- … non… pourquoi tu demandes ça ?
- Tu parles tout le temps de lui. Tu es toujours là à dire « Dimitri adorerait ça » ou « Dimitri dirait ça »… quand il n'est pas là tu le ramènes toujours sur la table.
- … Je suis pas amoureux de lui !
- Vraiment ?
- M… Rose, c'est… blessant ! J'te demande à toi si t'es amoureuse de lui ?
- C'est un ami, Yann.
- Et moi ?

Rose regarda Yann et répondit sans sincérité aucune :

- Un ami aussi !
- Et bah moi c'est pareil vous êtes tous les deux des amis !
- Ok.
- Ok !

Yann regarda Rose. Petit silence. Yann semblait émotionnellement atteint.

- … Est-ce que tu m'as demandé ça parce que mes parents sont gays ?

Rose regarda Yann.

- … probablement.
- C'est… c'est blessant !
- N… Non, non absolument pas !
- M… Tu sais à quel point j'ai peur d'être jugé là-dessus ? Tu sais ce que ça me fait ?
- N…
- C'était méchant.

Yann bouda un petit moment devant une Rose désemparée.

- D… D… Désolée, Yann, c'était pas…
- Bah si, c'était.
- Yann, je suis vraiment désolée !
- … T'es bizarre comme fille.

Rose plissa les yeux.

- Pourquoi… pourquoi tu t'intéresses à moi comme ça, pourquoi… pourquoi on a continué à se parler tous les deux, on s'est rencontrés de façon soudaine, idiote, on aurait pu… être dans deux classes différentes, mes parents auraient pu m'adopter plus tôt…

Yann regarda en l'air et regarda Rose.

- On aurait pu ne jamais se rencontrer ! T… Tout ce qui s'est accordé ensemble pour qu'on se voie… pour qu'on se parle, pour qu'on échange… C'est dingue !

Rose regarda Yann qui la regardait.

C'est elle qui l'embrassa furtivement. Sur la bouche. Comme ça, pour rien. Yann regarda Rose, surpris. Elle se mordit les lèvres, regarda Yann qui était interloqué, et puis elle se leva, alla vers la sortie, prit peur parce que du coup elle ne savait pas très bien où aller ensuite, alors elle alla… s'enfermer dans les toilettes de l'appartement.

- Rose ? M…

Yann se leva et alla vers les toilettes.

- Rose ?!
« J'suis désolée ! »
- M… Mais enfin Rose !
« J'voulais pas, j'te demande pardon ! »
- Rose, sors, c'est débile, on peut en discuter, on peut trouver une solution…
« … une solution ? »
- Bah oui, on n'a qu'à dire que tu l'as pas fait exprès !
« … »
- … Rose, c'est nul de pleurer aux toilettes. Je l'ai déjà fait quand… à Noël. Quand ils m'avaient tous donnés de super cadeaux et j'me sentais… Bizarre. Bête. Pas méritant. Et… Trop petit pour tout ça. Toute cette grandeur, cette vague… devant moi, de… sentiments que je pouvais pas porter.

Rose sortit des toilettes. Yann sourit.

- On oublie ce qui s'est passé ?
- … Non.

Yann plissa les yeux.

- J'avais… j'avais envie de le faire.
- Tu avais envie de m'embrasser ?
- C'est si dur à croire ?
- Bah… J'sais pas. T'es la première qui… essaie. Et je suis content que tu sois « La » et non pas « Le ».

Rose hocha la tête.

- C'est juste que… Enfin, des trucs, tu vois… Toi… moi… moi qui te regarde, toi qui… me regarde…
- Ouais c'est toujours bizarre. T'as eu peur ?
- Oui…
- C'est rien. On regarde un autre truc ?
- On pourrait juste… ne rien regarder ?
- On laisse la télé en bruit de fond et on discute ?

Rose hocha la tête et soupira.

- Désolée de faire l'enfant.
- … moi aussi, j'ai l'impression que… je fais l'enfant, là.

Rose hocha la tête à nouveau. Yann hésita. Il invita Rose à passer devant, ce qu'elle fit. En fait il voulait lui tenir la main.

***

- Et pendant que nous parlons, que nous dissertons sur la vie, l'amour et la mort…

Malcolm regarda Roland qui partait dans une envolée lyrique de haute volée.

- … des millions de Chenipan naissent, meurent et revivent par le biais d'un Chrysacier. Il en sort un Papilusion et Bam, c'est la naissance de l'amour.

Rachel soupira.

- Vous comprenez pourquoi j'attends beaucoup des centres de désintox à Hoenn…
- C'est le destin, Rachel. Un retour aux sources ultimes ! On retourne dans la ville de nos parents respectifs, si c'est pas un signe ça !
- Repenses-y la prochaine fois qu'on sera au lit tous les deux !
- Trop détails ! Ricana Charlie.

Tout le monde ricana.

- Nell va grandir, Perrine va grandir… Yann va grandir… Le bébé de Lily va grandir !
- Et j'ai la nette impression qu'il y en aura quinze… marmonna Roland.
- Non ! Grogna Lily. Je flippe assez pour celui-là !
- Je pense que ça fera un peu Gros caca version L'autre côté !

Claire, Rachel et Lily firent des têtes dégoûtées. Perrine sourit.

- J'aime pas faire caca !
- On sait, Ralph Wiggum, on sait ! Sourit Roland.

David leva les yeux au ciel.

- On joue au jeu des couples ? Sourit Léopold.

Charlie haussa les sourcils.

- On n'est pas dans un bar gay, primo, deuxio il y a deux petites filles dans la pièce ! Dont une qui a de très bonnes oreilles !
- De très, très bonnes oreilles. Délicieuses ! Sourit Perrine.
- Oui ma puce !
- Ca consiste à former des couples…
- Léo… grommela Charlie.
- …complètement improbables entre les gens de la pièce ! Par exemple Rachel et Charlie !

Rachel ricana.

- Impossible !
- Et pourquoi ça ? On s'entend bien ! Ricana Charlie.
- Quel jeu débile ! clama Claire.
- Oui mais Charlie, deux hommes dans le même lit, ça ne fonctionne pas !

Tout le monde ricana. Roland plissa les yeux.

- Moi je propose Kyle et Lily !
- Merci de me mettre avec ta sœur…
- Je sais pas, vous iriez bien ensemble !
- Pourquoi pas Toi et Claire ! Sourit Lily.

Roland regarda Claire qui haussa les épaules.

- Nell n'aurait pas été aussi mignonne en ce cas ! Admit Claire.
- Bien parlé ! Sourit Malcolm.

David sourit malicieusement.

- Roland et Malcolm !

Léopold éclata de rire. Rachel ricana aussi et regarda David.

- Pas mal, pas mal !
- Nan ! Nan !! Berk ! Geignit Malcolm.
- Laissez-moi hors de votre jeu… marmonna Finn qui souriait aussi.
- Finn et David ! Cria Kyle.

David regarda Finn qui le regarda.

- On dine un soir ? Demanda Finn.
- … jamais le dimanche ! Sourit David.

Malcolm se mit à pouffer de rire, suivi par Lily. Claire secoua la tête.

- Vous êtes tous débiles !
- Claire et Rachel !
- Naaaaaaaan ! Geignit Rachel.
- Rachel ! Rachel ! Cria Charlie.
- Ca va trop loin ! Ricana Claire.

Silence. Perrine regarda tout le monde.

- Perrine et Ca'turne !

Tout le monde regarda la gamine. Roland la désigna.

- La plus crade du tas, c'est la gamine de cinq ans ! Standing ovation !

Tout le monde applaudit Perrine, intriguée.

***

Un jeu télévisé débile à la télé. Yann et Rose, devant, éloignés l'un de l'autre sur le canapé.

« Alors Gisèle, dites-moi le prix de ce sac à patates ?
- … Mille Pokédollars !
- Elle est bien, Gisèle, elle ose ! Vous habitez où, Gisèle ?
- Euh… Euh… Dans ton c… »

Yann avait éteint. Ils venaient de rater une scène qui deviendrait culte dans tous les bêtisiers.

- Ca me gonfle.
- … c'était pas très glorieux, oui…
- Toi aussi des fois tu trouves des trucs débiles ?

Rose hocha la tête.

- Et t'oses pas dire que c'est débile…
- Hm !
- Parce que c'est fait par des adultes, alors forcément c'est pas débile.

Elle hocha la tête.

- Et donc toi dans ta tête tu te dis « Eh, c'est n'importe quoi, c'est censé être raisonnable un adulte, pourquoi il fait l'idiot ! », disserta Yann.
- Oui… ânonna Rose
- Mais… au fond il le fait parce qu'il est libre. Comme toi t'es un enfant tu comprends pas ça, tu te dis c'est n'importe quoi, et t'oses pas le dire. On dit pas que les adultes sont débiles, sinon, on est…
- …
- On est…
- … on est pris pour un débile, continua Rose.
- Ouais. On est débile parce qu'on a une opinion sur ce que font les adultes. Et eux, parce qu'on a raison, ils… Ils nient.
- Hm…
- C'est peut-être débile ce que je dis.
- Non c'est très sensé.
- On a une discussion bizarre.
- On a toujours une discussion bizarre quand on veut pas parler de quelque chose.

Yann hocha la tête.

- Ouais.
- …

Rose regarda le sol. La moquette du salon de Charlie et Léopold. Alias le salon de Yann.

- …
- Rose ?
- Mon frère l'adorait.

Yann cligna les yeux.

- Il l'adorait ? T'as un frère ?
- J'avais.
- …
- Il est mort pendant la guerre.

Yann ouvrit la bouche, stupéfait.

- Il adorait ce poème. « Mignonne, allons voir si la rose, qui ce matin avait déclose. Sa robe de pourpre au soleil, a point perdu cette vesprée »… La vesprée c'est la tombée du jour.

Yann hocha la tête.

- « Les plis de sa robe pourprée et son teint au vôtre pareil… »
- C'est joli…
- C'était un homme bien. Il avait tout pour réussir. Il était comme un électron libre dans la maison, il volait de personne en personne. Il essayait d'avoir de grandes conversations avec mon père. Ils s'adoraient mais ils évitaient de se le dire. Il parlait beaucoup avec ma mère, il avait une habitude macabre, de lui annoncer les morts des célébrités quand il les apprenait sur le net. Il descendait et il lui disait « Mauvaise nouvelle ! » Et il lui disait qu'untel ou une telle était mort… Et moi…

Rose enfouit son visage entre ses genoux repliés.

- Moi je le détestais.
- …
- Il venait me proposer des films, des livres, des musiques… Je l'envoyais balader. Ca ne m'intéressait pas. Et juste avant la guerre, il arrive dans ma chambre, sans que je ne l'entende, et il me récite ce poème. Un beau poème. Et ensuite il part dans la camionnette des soldats au front. D'après ce qu'on m'a dit, il a essayé de se rebeller quand les troupes ont été réquisitionnées pour déporter les gens vers Hoenn.

Yann acquiesça.

- Quand on est rentrés avec mes parents, on espérait tellement le voir… Et il n'est jamais revenu…

Yann se mordilla les lèvres. Elle commença à pleurer.

- Rose…
- C'est horrible de se dire que tu n'as jamais traité quelqu'un assez bien de son vivant ! De te dire qu'il n'y a que mort qu'il compte pour toi, c'est horrible, et c'est nul !
- …
- Et donc depuis ce jour j'essaie de traiter les gens du mieux que je peux. Je trouve Dimitri un peu débile parfois mais je l'aime bien en fait. Il prend tout avec légèreté.
- …
- J'suis désolée de pleurer chez toi, je pensais que tu devais le savoir, tu as vu ce poème, tu t'y es intéressé, ça… ça représentait quelque chose. Je voulais juste que tu le saches.
- R… Rose… désolé pour… ton frère, c'est nul ce qui lui est arrivé.
- Bah oui mais à qui je peux dire un truc comme ça ? A la maison on n'en parle même pas… Et toi qui te met à exhumer tout ça… c'est dur.

Yann hocha la tête.

- J'le referais plus, promis.
- Non c'est pas grave, c'est juste dur. Dur à évoquer… Ca me fait du bien d'en parler.

Dit-elle en s'essuyant le visage. Yann piocha dans la réserve secrète de Léopold et tendit un mouchoir à Rose.

- Merci… Je suis affreuse…
- Mais non.
- Excuse-moi de t'imposer ça.
- Mais non, répéta Yann.

Elle acheva de s'essuyer et regarda Yann. Il se passa quelque chose d'étrange en Yann. Il s'avança vers Rose et l'embrassa. Très directement, très naturellement. Quand il cessa, Rose le regarda et l'embrassa à son tour.

***

Tout le monde descendait les cartons dans les escaliers en chantonnant une vieille chanson. Perrine ne comprenait pas grand-chose mais elle suivait le mouvement.

- You would be there ! Chantèrent Charlie et Léopold en chœur.
- When I needed somebody… continua Claire en ricanant.

Kyle ricana.

- You would be there… ricanèrent Rachel et Roland.
- The only one who could help me… marmonna Malcolm.

Tout le monde rigolait mais ils descendait vraiment les cartons.

- Les locataires vont nous tuer ! Ricana Rachel.
- C'est pas ça la suite des paroles ! Sourit Finn.
- Bah vas-y si t'es si malin !

David, Kyle et Léopold ricanèrent. Finn se racla la gorge.

- Hey-hey-hey, I - had a picture of you in my mind !

Tout le monde éclata de rire.

- C'est la descente la plus folle jamais effectuée ! Sourit David.
- Never knew it could be so wrong… marmonna Kyle.
- Why'd it takes me so long just to find… continua Charlie.

Roland hocha la tête.

- … the friends that were there all along…
- … C'est au singulier normalement ! Marmonna Rachel.
- Vraiment ? Tu crois que Boyzone aurait écrit « ami » au singulier ? Nan. Ils avaient des potes. Par centaines de milliers. Des femmes hystériques prêtes à violer ces cinq Léopold en herbe !
- Comment foutre en l'air une chanson… soupira Léopold.
- Et souiller un groupe ! Ajouta Malcolm.
- Ouais, si on s'était filmés ça aurait fait un super clip ! Grommela Lily.
- On tapait le million de visites sur Youtube… admit Kyle.

Ils arrivèrent au camion. Finn l'ouvrit. Il y avait déjà les autres cartons.

- C'était la dernière tournée…
- Hm…

Claire tenait Nell. Perrine accompagnait les adultes. Tous semblaient hésiter.

- … allez hop, on charge et… Vous pourrez partir.

Roland et Rachel soupirèrent. Tous montèrent dans le camion et posèrent les cartons dans les cales. Une fois cela fait, ils sortirent du camion que Finn ferma.

- Et voilà. Quand les types qui livreront le camion arriveront, vous leur refilerez ce camion là à ramener.

Roland et Rachel hochèrent la tête. Finn souffla.

- Si vous partez maintenant… Vous serez à Hoenn vers 19 heures.

Gros soupir. Rachel regarda tout le monde.

- … p… Pas comme ça, ça craint trop…
- On n'a pas vraiment le choix… On a déjà de la chance que le père Hadley ait changé nos licenciements en Mutations…

Rachel acquiesça.

- Une vraie chance…

Roland regarda tout le monde qui ne semblait pas chaud pour des adieux.

- Euh, bah… Salut tout le monde, rendez-vous à Bercy…

Sourires dans l'assemblée. Rachel soupira.

- J'aurais jamais cru que ce serait aussi dur… A une époque j'avais envie de me barrer loin, mais là…

Roland se dirigea vers David.

- Continue d'élever Ralph avec sagesse !
- Oui. Et toi évite de te fâcher avec le prochain doyen…
- Oui papa.

Roland serra son frère dans ses bras.

- Ne nique pas bêtement mon rein !
- J'penserais à toi en buvant des sodas.

Roland sourit. Il serra la main de Kyle.

- Occupe-toi bien de lui !
- Roger !

Roland se pencha vers Perrine.

- Tu es un garçon, d'accord Perrine ?
- Pourquoi tuer un garçon ?

Roland caressa les cheveux de Perrine.

- Adorable. Lily, accouche sans péridurale !
- Quoi ? Pourquoi ?
- Pour la repentance. T'en as tué un, souffre pour le deuxième !
- Connard… Tu vas me manquer !
- Appelle dès que Nathaniel ou Libby sera né, je serais là à la première heure.

Lily se serra contre son frère.

- … merci d'avoir été cool.
- Merci d'avoir été chiante !

Roland se sépara de sa sœur.

- T'es pas chiante !
- Et t'es pas cool !

Sourire échangé. Roland regarda Finn.

- Toi j'm'en fous, j'te connais pas !
- Probable futur beauf Finn, général !

Roland sourit.

- Mais t'es marrant et tu bois comme un trou !
- Et toi t'es con comme un vrai militaire, c'est bien !

Roland sourit en tapotant l'épaule de Finn alors que… Rachel pleurait dans les bras de Claire.

- T'es la meilleure amie que j'ai jamais eue !!!
- TOI AUSSIIIIIIIIIIIIIIII PARS PAAAAAAAS ! Sanglota Claire.

Roland plissa les yeux et regarda Malcolm.

- Entre belles-sœurs, c'est de l'inceste ?!
- Non, tout au plus légalement très bizarre ! Suggéra Malcolm.

Rachel regarda Claire en pleurant.

- Tu vas tellement me manquer !
- ET TOI DONC ! Sanglota Claire en se serrant contre Rachel.

Léopold et Charlie pleuraient eux aussi.

- C'est trop mignon… geignit Léopold.
- Et Yann manque ça ! Admit Charlie.

Roland alla vers les deux hommes.

- … mes petits gays préférés…
- Notre petit hétéro favori… geignit Charlie.
- Toi Léo, toujours le mot pour rire !
- Oh ta gueule ! Sanglota Léopold.
- Et toi Charlie, toujours là pour un peu de piano !
- Allez, dégage, qu'on en finisse ! Ricana Charlie entre deux sanglots.

Rachel libéra Claire pour écraser Malcolm sous son poids.

- MAAAAAAAAAAAAAC !
- Ca va sœurette, tu vas me manquer aussi !

Roland plissa les yeux. Il approcha de Claire et la serra tendrement contre lui.

- A bientôt, Claire.
- Merci pour tout, Roland…
- Mais non…
- Tu es tellement inestimable dans ma vie…
- Mais nan, y'a Malcolm aussi. Et Moustillon ! Tu pourrais le revendre pour des tonnes de briques sur eBay !

Claire sourit, s'éloigna de Roland et le tapa gentiment.

- Tu vas me manquer !
- Tu pourrais au moins dire un gros mot pour faire plus réaliste !
- … Nan, j'peux pas. Tu vas trop me manquer !
- Et toi donc. Nell, occupe-toi de ta mère ! Change ses couches !

Claire ricana et regarda Roland.

- Toujours le mot pour rire hein…
- Et surtout Nell, le jour où moi et Claire on couche ensemble…

Lily, David et Kyle levèrent les yeux au ciel.

- … assure-toi de ne pas regarder !
- C'était le conseil le plus inutile de l'année, présenté par Roland S. … soupira Lily.

Rachel alla saluer la famille de Roland alors que Roland se dirigeait vers Malcolm.

- Chéri…
- Papa Tabasco… geignit Malcolm.
- Oh mon amour, toi qui comme les soleils d'été ne dure pas toujours mais qui est le plus bel, le plus fou, le plus éphémère des amours…
- De l'aube claire jusqu'à la fin des jours…
- Je ne pleurerais pas pour toi, garce, car tu n'as de femme honnête que le nom… souffla Roland.
- Ah et toi donc qui part, vile catin, n'approche plus, je n'aime plus tes odeurs ni même la candeur chatoyante de ton cou lumineux…
- Aime-moi…
- Non, toi, aime-moi, ou meurs !

Malcolm se jeta dans les bras de Roland.

- Tu étais tout pour moi, ma chérie, jusqu'à ce que cette Jézabel te fasse tourner la tête ! Cria Roland.
- Ah et toi, toi, d'où t'es née l'idée si folle que tu dusses folâtrer avec ma sœur !!

Ils se regardèrent.

- On a l'air cons, là !
- Ouais !

Les autres les regardaient, assez intrigués en effet.

- Seulement l'air ? Marmonna Charlie.
- C'est la drogue, ça… marmonna Kyle.
- Complètement shootés… soupira Lily.

Roland et Malcolm s'étreignirent.

- Tu vas me manquer mon copain… geignit Roland.
- Et toi donc, mon grand… Et toi donc… soupira Malcolm.
- On s'appelle on s'fait un MSN ?
- Ouais ! Sourit Malcolm.

Roland et Rachel regardèrent les autres.

- … On y va, sinon on partira jamais ! Souffla Roland.
- C'est horrible… marmonna Rachel.

Ils se dirigèrent vers l'avant du camion. Lily, David, Malcolm, Charlie et Léopold avaient l'impression de voir un bout de leur jeunesse partir. Quand les deux entrèrent dans le camion…

- Cent qu'en arrivant, ils rompent et reviennent ici ! Lança Léopold.
- Deux-cent que là, maintenant, ils redescendent ! Soupira Claire.
- Trois-cent que le camion démarre pas, avarie du moteur ! Marmonna Kyle.
- Trois-cent cinquante qu'ils aient un accident et qu'ils soient obligés de rentrer ! Proposa Charlie.
- Tu crains ! Cinq cent qu'ils prennent un autostoppeur fou qui les oblige à revenir ici ! Posa Malcolm.
- Deux-cent qu'ils restent et qu'ils reprennent le travail sans problème ici, dans la fac de Céladopole… marmonna David.

Finn plissa les yeux.

- Z'êtes de drôles de potes…
- Six cent que Roland descende pour nous faire un grand discours sur la vie ! Ricana Lily.
- Trop ça ! Soupira Charlie.
- Trop prévisible… soupira Léopold.
- C'est pas sa sœur pour rien ! Admit Charlie.

Perrine regarda tout le monde.

- Pour cent dollars, ils partent sans rien faire !

Le camion démarra. Les bras saluèrent par les vitres et le camion partit. Le petit groupe salua. Le camion prit la route sans que rien ne se passe. Ils partirent dans le lointain, sans se retourner.

Kyle regarda tout le monde qui était désolé.

- Eh !
- Quoi ?
- Quoi ?
- Quoi ?

Kyle désigna Perrine.

- Elle vous a tous démonté la gueule ! Hop hop hop, on la paye, là !!
- Elle t'a démonté aussi ! Grommela David.
- Ouais, je sais…

***

Rose avait la tête sur l'épaule de Yann. Qui avait la tête sur celle de Rose. Et ils regardaient un film moins « exigeant ».

- « Monstres contre Aliens », ça ne vieillit pas… marmonna Yann.
- Non, c'est vrai…

On frappa à la porte. Yann plissa les yeux.

- Qui ça peut être ?
- Tes parents ?!
- Mes parents qui frapperaient à la porte ?

Yann alla ouvrir à… un homme assez bourru d'apparence.

- Bon… jour… marmonna Yann.
- Je suis le père de Rose, est-ce qu'elle est là ?
- Oui, oui, elle est là…
- J'étais censé venir la chercher, il est seize heures trente…
- Ah oui…
- Papa, tu étais censé me prévenir et passer me prendre en bas de l'immeuble ! Souffla Rose.
- Rose ! Grommela le père.
- … pardon papa.

Elle se leva et alla à la porte.

- Merci pour le film, Yann.
- De rien… a lundi à l'école.
- Oui.
- … Tes parents sont pas là ? S'étonna le père.
- Bah… non !
- Vous êtes restés tous seuls l'après-midi ?
- Mes parents aident des amis à déménager.
- C'est une raison pour vous laisser tous seuls ?
- Papa… soupira Rose.
- C'est pas normal, excuse-moi. Si tes parents savaient ce que ça fait de perdre un enfant…
- Papa ! Protesta Rose.

Yann se tut.

- Ok, ok. Bon, tu diras à tes parents que ça n'est pas une situation que j'approuve !
- Très bien monsieur.
- C'est dur quand même, pauvre Claire…
- Elle était effondrée quand elle a vu que…

Charlie et Léopold, qui revenait de chez Rachel, tombèrent nez à nez avec Rose et son père. Yann tomba des nues.

- … vous êtes ? S'étonna le père.
- … Je… suis le père de Yann et voici… Léopold, un ami !
- Un ami, hein ?
- Oui ! On revient d'un déménagement. Léopold vient prendre un thé.
- Voilà ! Sourit Léopold.

Le père hocha la tête.

- Permettez-moi, monsieur, de vous dire que laisser deux enfants seuls dans un appartement, c'est terriblement risqué et irresponsable !
- P… Pardon pour ça, Yann tenait vraiment à… enfin nous tenions à ce que Yann puisse inviter son amie comme il se devait…
- Vous ? Vous qui ? Où est votre femme ?

Charlie balbutia. Yann grimaça. Le père plissa les yeux.

- Papa, on peut y aller ? Tenta Rose.
- Disons que sa mère est… au travail !
- Au travail, hein ?
- Oui !
- … d'accord. Au travail. Très bien. Au revoir, messieurs.
- Au revoir…
- Au revoir… marmonna Léopold.

Rose et son père descendirent les escaliers. Charlie et Léopold regardèrent Yann qui baissa la tête. Quand Charlie tenta d'approcher, Yann alla s'enfermer dans sa chambre. Léopold regarda Charlie.

- On a merdé ? Demanda Léo.
- … possible…

***

Roland regardait la route.

- Prête pour le grand saut ?
- … avec toi ? Ouais ! Sourit Rachel.

Ils continuèrent leur bonhomme de grand chemin…