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» Auteur : fan-à-tics - Voir le profil
» Créé le 20/03/2010 à 19:58
» Dernière mise à jour le 11/06/2010 à 15:55

» Mots-clés :   Présence de personnages de l'animé   Présence de poké-humains   Présence de shippings

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Episode 45 : Pas après Pas, Chutes après Chutes...
Voici le nouveau chapitre ! Il est deux fois plus important que les autres, parce que je voulais finir à un endroit précis dans l'intrigue, histoire de me faire décapiter (oui je suis maso faut croire). Une de mes lectrice m'a empêchée de couper le texte en deux, il fait donc 41 pages. Il parait que c'est mieux, un bon gros chapitre. On verra bien !

Cette même lectrice –auteur des Larmes de Jirachi sur fanfic-fr- a modifié un des passages de ce texte, car j'y faisais intervenir un de ses personnages de manière importante.

Plus j'écris cette histoire, en suivant mon scénario, plus j'ai l'impression de taper l'histoire sans fin, on finit une page et y'en a une autre qui pousse sur le cul du bouquin…Arf !

Bref, je tiens cependant à dire, que DANS LES PROCHAINS CHAPITRES, un des héros trouvera la mort. TOUS sans exception sont imaginable, personnage que l'on m'a donné (oui j'vais pas me gêner pour mon intrigue), secondaire ou même héros du groupe. Saurez-vous deviner lequel ?

Sur ce, je vous souhaite une bonne lecture, et à bientôt !! Bisous !


-Chapitre 45 – Pas après Pas, Chutes après Chutes…

L'air dans la salle en devint presque palpable, cette femme, devant elle incarnait le chef de Twilight, tous ses idéaux, ses croyances, et cela se lisait dans son unique œil. La détermination de cette femme d'apparence si fragile la fit presque vaciller. Elle y dénichait la même force du désespoir qu'on devait voir luire dans ses propres prunelles à elle. Cette lueur dérangeait, marquait les êtres en un sens. Elle rappelait sans cesse la misère humaine, celle de l'être se battant pour une parcelle d'existence.

La jeune femme, Salomée, ne montra aucun véritable intérêt aux intrus qui avaient pénétrés son domaine. Elle fixa quelques secondes la gamine et roula la tête vers le maître de dragon, pour lui lancer une expression pesante. Peter en réponse haussa des épaules, l'air innocent. Elle afficha une grimace et leur tourna le dos sans autre forme de procès.

Une colère sourde s'empara d'Eléa, une fureur inqualifiable, et quand elle aperçut le visage de Miyu, flottant dans les airs, elle en sut la cause. La frimousse déformée par la haine, la mâchoire serrée, il persiffla :

« C'est elle ! C'est cette femme qui m'a tué ! »

Les images brèves de leur séjour à Lavanville, lors de la révélation de Miyu, s'empara d'elle. Elle plissa les yeux, et les rétines mordorées de Mew brillèrent d'un éclat foudroyant.
Voilà pourquoi cette personne lui disait quelque chose !

Eléanore tomba de haut. Cependant ce qui la secouait, c'était cette ressemblance, frappante, entre Samantha et cette Salomée en cet instant. Lien qu'elle n'avait pas fait pendant les réminiscences du spectre, bien trop secouée par la nature de son secret.

-Désolé, Salomée a tendance a foutre des vents aux étrangers…Ce n'est pas volontaire. L'excusa le chef de la ligue avec une mine sincèrement désolée.

Elle essaya de camoufler cette frustration bouillonnante qui l'inondait. Son orgueil pouvait déjà difficilement supporter un dédain pareil, mais avec Miyu à ses côtés qui réclamait des explications –et aussi de tordre le cou de cette fille- ce n'était guère simple. De plus, la sensation dérangeante d'effleurer une vérité importante sans pouvoir la comprendre s'emparait d'elle.

Peter quant à lui soupira lentement, et il tritura les boutons de sa cape comme un enfant mal à l'aise.

-Je suppose que tu es surprise…Commença-t-il maussade.
-Non évidemment je m'attendais à ça depuis le début, une Ginjinka comme vrai maître de l'organisation, ça explique tout ! Je comprenais pas comment vous pouviez être le chef ! Railla Eléa, ne pouvant retenir son ton aigre. Mais après tout, à question idiote, réponse idiote.

L'adulte afficha un rictus affecté, mais pour la compassion, il pouvait repasser, entre ses propres raisons et celles de Miyu, elle ne parvenait pas vraiment à rester neutre.

Néanmoins, la remarque acerbe de la jeune fille sembla pousser Peter à aller plus loin dans son récit, et il avoua dans un souffle honteux :

-C'est la mère de Silver.

Les plaintes et revendications hargneuses cessèrent instantanément, et Eléanore sentit en même temps que le silence, un vent glacial s'abattre sur eux. Un frisson lui remonta la colonne et ses cheveux s'hérissèrent sur sa nuque. Aussitôt, comme une claque, la rancœur fusa après coup.

-QUOI ? S'époumona-t-elle.

Peter lui jeta un regard triste et se mordit la lèvre inférieure, muet. Cette attitude eut le don de mettre Eléanore hors d'elle.

-Silver a cherché sa mère pendant des ANNEES ! Il a manqué de se faire TUER pour elle, et depuis tout ce temps, elle était ICI ! Et vous ne lui avez RIEN DIT ? Analysa-t-elle, sa voix portant de plus en plus fort, à tel point qu'elle sentit sa respiration se saccader.

Miyu figé en apesanteur, dévisageait cet homme qui ne le voyait pas, avec sidération.

-Je sais ça…Mais…Balbutia Peter, visiblement mal à l'aise.

Eléanore tressaillit, et elle scruta la pièce, à la recherche de la concernée, mais celle-ci avait visiblement préférée s'éclipser après avoir vérifié qui lui rendait visite. Son cœur palpitait dans sa poitrine. Elle avait failli y passer, en essayant de récupérer le rouquin, et de par sa détermination, plus que touchante, le fils aussi, avait frôlé la mort lui aussi…Tout ça, pour découvrir qu'en vérité un de leur allié détenait l'objectif de toutes ces recherches ? Un être, qu'il avait respecté, cru, une personne qui avait…

Un haut le cœur s'empara d'elle et elle observa Peter avec gravité.

Cet homme avait-il feint la peine pendant ces jours d'horreur à l'hôpital, en attente du verdict des médecins sur Silver ?

Sa rage redoubla, la consumant, elle et Miyu, de part en part. Entre quelles mains avaient-ils bien pu remettre leurs destins ?

Le maître des dragons, dut ressentir cette hostilité grandissante à son encontre car il soupira, embarrassé, et toisa Eléanore quelques secondes avant de lâcher faiblement :

-Ce n'est pas ce que tu crois.
-Pas ce que je crois ? Mais moi je ne crois rien ! Je constate c'est tout ! Vous comptiez le dire quand au juste, à Silver…Avant ou après qu'il se soit fait tuer en la recherchant ? Siffla-t-elle, se fermant complètement.
-Ce…
-Et vous savez ce que cette femme a fait ? Que savez-vous d'elle au juste ? A part que c'est une Gijinka ? Elle a peut être déjà tué ! Après tout elle refuse de revoir son fils elle aussi ! S'écria davantage la dresseuse, s'étonnant de la sincérité de ses propos, comme si Miyu criait avec elle.

Le bruit ne semblait même pas déranger outre mesure Salomée, prostrée dans un coin à contempler une feuille clouée sur une des parois de la grotte. Contrairement à Eléanore, elle ne sursauta pas quand Peter haussa brusquement le ton :

-Je croyais pouvoir le protéger moi-même !

Les lèvres d'Eléa se pincèrent, plus aucun son ne lui échappa. Peter lui, fronçait les sourcils, comme harassé, ployant sous le poids du secret, de son péché et il la défia de son regard flamboyant.

-Je lui avais dit, dit de ne pas s'approcher des Teams, de se contenter de faire quelques recherches, de sécuriser le nord de Kanto. Mais je ne pouvais pas le sauver de l'influence de son père, et même quand il y a enfin échappé en s'éclipsant lors d'une mission ennemie, je ne pouvais pas le contrôler à distance ! Je voulais sincèrement lui éviter cette peine, et je pensais qu'il avait compris il y avait quatre ans, quand je lui ai dit d'arrêter ses recherches, lors de son intégration à Twilight…Mais ce gamin est borné !

Il avait tout fait, tout effectué pour pouvoir aider le roux, tout au long des années. L'organisation n'avait pas pu le secourir quand son père l'avait retrouvé, en revanche, il lui avait offert l'anonymat au sein du groupe, lui avait proposé une place, l'avait aidé à se procurer le numéro de Gold, les avait choisi comme coéquipiers pour qu'ils s'entraident. Il avait veillé à chacun de ses pas, à chacune des missions qu'il lui attribuait…Il avait vérifié à chaque fois qu'il s'attaquait aux Rockets que Silver ne risquait rien…Jamais, jamais il n'avait désiré le blesser, lui plus que tout autre. Le jour où le rouquin lui avait désobéit, qu'il avait vu que Gold au lieu de le soutenir, le protéger comme tout ami aurait du le faire, l'avait aidé à se jeter dans la gueule du loup…Le jour où il avait appris que l'adolescent mourrait dans un lit d'hôpital, il avait eu l'impression qu'on avait réduit en cendre toute sa motivation, sa détermination, tout ce qui faisait de lui un homme digne. Il avait failli à sa tâche, celle de le protéger. Ce gamin qui en avait déjà tant bavé, il n'avait même pas été capable de lui montrer un monde stable, protecteur. Ca plus que tout, l'avait anéanti.

-Il suffisait de lui avouer que sa mère était vivante ! S'offusqua aussitôt Eléa, peu touchée par cette apparente compassion.
-Tu ne connais pas toute l'histoire ! Se défendit Peter mollement.
-Ah oui ? Et quel genre d'excuse peut expliquer qu'on préfère laisser un ami dans l'ignorance ?

Elle se tût, soudainement rappelé à l'ordre par sa conscience, par ses souvenirs. Mais elle secoua la tête vivement, en bataille contre elle-même. Non elle avait caché sa maladie, certes, mais cela n'avait jamais été une question d'ordre vital pour l'un d'eux, juste pour elle. Miyu avait compris à ses dépends d'ailleurs, que camoufler la vérité, même pour le bien d'un autre, ne menait qu'au désastre.

Pourtant Peter se crispa, et vivement, il saisit la main d'Eléanore et la mena vers Salomée, toujours prise dans la lecture du mémo. La femme, dont Eléa ne pouvait déterminer l'âge, se tourna vers eux et fit une grimace abattue, puis elle pointa du doigt la feuille, coupable :

-Je ne comprends pas, tu n'as pas marqué sur la feuille que tu venais avec quelqu'un d'autre que la blonde nommée Cynthia, aujourd'hui.

Eléa se braqua, et jeta une œillade sur la note qu'elle pointait, et malgré sa vue de moins en moins fiable, elle put voir aisément plusieurs photos, avec des noms marqués en dessous, ainsi qu'un emploi du temps rapide.

-Je sais, excuse-moi Salomée, c'était imprévu, mais elle avait l'air d'aller bien donc j'ai profité de l'occasion pour te l'amener ici. C'est la petite Eléanore, tu sais, l'enfant Gijinka dont je t'ai parlé.

L'adulte devant eux pencha sa tête sur le côté, et afficha une expression soucieuse, perdue. Peter soupira et pointa une ligne sur une des fiches, ainsi qu'une photo prise à la va vite qui représentait Eléa. Salomée resta coite un moment et son regard se voila, son métabolisme se figea complètement.

Eléanore sentit un soubresaut provenant de Peter, et elle remarqua sa grimace attristée tandis qu'il fixait la jeune femme, maintenant inerte. Inquiète, Eléanore bafouilla, confuse :

-Qu'est-ce qui lui prend ?

Hésitante, elle tâta rapidement le corps de la femme, celui-ci chancela légèrement, mais se remit en position, vivant, mais sans réaction consciente.

-Une absence. Cela lui arrive fréquemment. Expliqua simplement Peter tentant de recouvrer son masque impassible.

La jeune dresseuse sentit poindre l'anxiété, et le maître des dragons enchaîna :

-Je te l'ai dit, je l'ai retrouvée flottant dans la mer, morte…Enfin, en train de subir la transformation en Gijinka. La femme que connaissait Silver n'est plus, c'est une autre personne que tu as devant toi. Enfin…je ne suis même pas sûr moi-même de ça…

Il contempla sérieusement Eléa, et souffla :

-Cette femme a conscience d'avoir été la mère de Silver, elle sait tout ce qui est arrivée à l'être qu'elle était auparavant, et il me semble que parfois, je parle véritablement avec cette « autre ». Elle a un pouvoir extraordinaire, la première fois que je suis venu ici, tout n'était que ruine, mais dès qu'elle a mis les pieds ici, dans cette grotte, les habitations à l'extérieur sont redevenues comme neuves, un immense temple et souterrain s'est creusé sous mes yeux à cet endroit. Mais…

Il se tourna à nouveau vers Salomée, et caressa le collier qui s'incrustait dans le chair de sa gorge, Eléanore put alors détecter d'autres cicatrices, bien douloureuses aux embouchures des bijoux, et une crainte la frappa.

Cet objet, était-il, incrusté, en elle ?

Le poing de Peter se ferma sur du vide et il ramena son bras contre lui, peu fier.

-Mais, ce pouvoir bien qu'elle montre un immense savoir dessus…Est totalement incontrôlable. Elle m'a expliquée que la cause en serait ce collier, elle m'a dit que son mari, pour l'empêcher de fuir, de lui désobéir, lui avait imposé ça pour limiter ses dons. Et elle pense qu'au cour du processus de transformation en Gijinka, qu'il n'a pas pu empêcher, il s'est déglingué, causant ainsi plusieurs dérèglements. Elle change d'apparence à tout va, une fois je l'ai retrouvée ici à l'état de nourrisson…Les faits s'embrouillent dans sa tête, elle confond des dates, elle oublie les noms, les visages, elle me dit qu'elle est devenue un être atemporel…Je n'irai pas jusqu'à dire qu'elle est folle, mais elle n'est pas en état de vivre normalement.

Il plissa les paupières douloureusement.

-Cette grotte a un effet étrange sur elle. Toutes ses blessures que sa transformation en Gijinka n'avait pas pu refermer se sont soignées ici…Mais elles se rouvrent dès qu'elle sort du périmètre de la grotte. Ici, le temps s'arrête, si tu entres avec tes pokéball fermées, tu ne pourras pas appeler tes Pokémons durant tout ton séjour. De même tu n'as ni besoin de manger, ou de dormir…Ici, tu vis…Sans vivre étrangement. Tu n'es qu'un corps stagnant et une conscience.

Eléanore resta silencieuse, encaissant toutes ces révélations avec de plus en plus de difficultés, Miyu lui-même, dont la haine était pourtant justifiée, s'affaissait, leur colère commune s'amenuisait peu à peu.

-Cela…n'explique pas …Pourquoi vous avez caché à Silver la vérité…maugréa-t-elle tout de même, penaude.
-Tu crois sincèrement que voir sa mère dans cet état, lui aurait fait plaisir ? Demanda sincèrement Peter.
-Bien entendu ! La voir, en vie, être capable de lui parler, la remercier…Je suis sûr qu'il n'espère que ça ! S'irrita Eléa aussitôt.

Un ricanement jaune échappa au maître des dragons.

-Je crois que tu n'as pas bien compris mes explications Eléanore. Certes, s'il vient ici, il verra le corps de sa mère animé de vie. Mais ce sera bien tout. Et quand bien même il parviendrait à entamer le dialogue avec elle, elle n'en garderait absolument aucun souvenir la seconde d'après. Salomée oublie presque toujours les personnes qu'elle rencontre ici, dès qu'elles mettent un pied en dehors de la grotte, tout s'évapore sur eux dans son esprit…D'ailleurs, si tu veux t'entraîner avec elle, il faudra probablement te représenter à chaque fois.
-Mais vous avez dit que…Que vous pouviez voir de temps en temps la personne qu'elle était avant…bafouilla Eléa, désemparée.

Peter resta muet, puis il se mordit la joue, coupable.

-Cela ne changera rien du tout, même si Silver a assez de chance pour arriver dans un de ces moments là. Je te l'ai dit, Salomée oublie tout ce qui se passe ici dès que les protagonistes s'en vont. A part à quelques rares exceptions…
-Mais… ! Bafouilla Eléa.
-D'après ce que j'ai compris, également…La Team Opale a fait croire à Salomée que son fils était entre leurs mains, durant son emprisonnement, pour la faire céder. Et voyant qu'elle ne réagissait pas, ils lui ont fait croire qu'il l'avait tué. Et à la suite de cet acte, au lieu de sombrer dans le désespoir, et de tout révéler à ses bourreaux comme ils l'espéraient probablement…Elle s'est juste laissée mourir.

Eléanore tituba. Les yeux écarquillés. La rancœur de Miyu se dégonfla comme un ballon de baudruche percé. C'était tout simplement effroyable.

Peter se tendit comme un arc et son teint pâle vira au rouge, une expression rageuse déformant ses traits :

-Comment est-ce possible de faire endurer une telle chose à une mère ?

Objectivement, Peter avait orchestré exactement le même acte, avec la famille Sarl, pensant bien faire, songea Miyu. Il avait décidément bien des problèmes à saisir la logique de la morale humaine.

-Quand elle m'a raconté son histoire, j'ai vraiment réalisé l'ampleur de pourritures, d'ordures qui menaçaient notre monde ! Tu te rends comptes qu'on envoie des enfants de dix ans à peine faire un voyage en pleine nature, démuni ? Alors que de tels monstres rodent !

Ses poings se serrèrent, et il retint une convulsion impulsive.

-Mon demi frère Harry a disparu il y a six ans, pendant son voyage initiatique…Et…Le fait qu'il puisse être perdu quelque part…peut-être dans un des cachots d'une de ces teams, à endurer ce qu'elle a enduré pendant plus de quatre ans…C'est…

Il poussa un gémissement impuissant et s'exclama :

-C'est pour ça qu'avec Salomée nous avons crée Twilight ! Ces êtres doivent êtres mis sous les barreaux, pour ne plus jamais faire de tort.

Eléanore grelotta malgré elle. Peter, resta un moment haletant, pris encore dans son discours tout entier, puis, après quelques secondes lourdes, il se rattrapa et souffla avec désespoir :

-Salomée pense que son fils est décédé à cause de ces Teams…Et j'ai beau lui répéter le contraire chaque jour que je la vois, rien ne change, elle oublie chacune de mes tentatives...J'ai essayé de coller un mémo sur le mur comme tu vois là, pour qu'elle lise chaque jour « ton fils est vivant », mais rien, elle ne voyait qu'une feuille vide, comme si son cerveau refusait de lire l'information. C'est…pour ça, que je ne peux pas révéler la vérité à Silver. Ce ne serait bénéfique…pour personne.
-Mais, et si elle le voit en chair en os…peut-être que…Murmura la dresseuse, de plus en plus bas, l'espoir s'amoindrissant en elle.
-Tu ne sais pas ce qui se passerait, peut être que Salomée se remémora sa vie précédente, ou peut être sombrera-t-elle définitivement dans la folie…Les pouvoirs des Gijinka dépassent l'entendement Eléanore. Elle a une influence bien plus grande que tu ne le penses. J'ai déjà présentée Salomée à nombre de gens, mais très peu retiennent son nom, se souviennent même que quelqu'un vit ici. Elle est parfois incapable de lire certains de mes messages. Elle influence le cerveau des gens Eléanore. Imagine une seconde, ce qui risque d'arriver à Silver si Salomée perd le contrôle en le voyant ? Tu veux courir le risque de le voir lobotomisé ?

Eléa eut l'impression d'étouffer, dos au mur, incapable de trouver une solution à cette échappatoire. Les sentiments qui l'habitaient en premier lieu, dirigés autant vers cette femme que vers Peter, s'étaient évaporés, remplacé par l'impuissance, la conscience de sa propre faiblesse. Elle détestait cette sensation, celle d'être piégée, de n'avoir aucun autre choix que celui qu'on lui dictait.

Soudain, une voix retentit, se répercutant dans la grotte.

-Et bien, vous en faites du bruit.

Une grande femme s'approcha, pourtant ses vêtements noirs, son longs manteau traînant, parurent la retenir un peu entre leur monde et celui incertain, mystérieux, ténébreux de l'abysse dont elle sortait. Sa longue chevelure dorée contrastait fortement avec son teint pâle et ses yeux obscurs, lui conférant des airs d'ange déchu. Eléa la reconnut aisément, pour avoir passé plusieurs heures devant son écran de télévision à hurler ses encouragements pour Sacha, tandis qu'il l'affrontait, elle, Cynthia, la maître de la ligue Sinnoh.

Peter se tourna vers elle et s'étonna :

-Tu es toujours là ? Il fait nuit dehors, tu sais ?

La concernée ne montra aucun signe de fatigue, d'agacement, ou même de stupeur, elle resta totalement stoïque. Eléa crut même voir en elle une attitude de gamin shooté, d'artiste, familière à Daniel.

-On ne voit pas le temps passer ici. Expliqua-t-elle simplement.

Elle se tourna ensuite vers Salomée, et s'émerveilla :

-Oh, elle est en transe ?

Le maître des dragons haussa des épaules, juste peiné.

-Je ne crois pas. Mais en tout cas, une chose est sûre, plus rien ne l'atteint.

La blonde se retint le menton en signe de profonde réflexion, puis son regard coula sur Eléanore, et elle lui sourit gentiment :

-Bonjour toi ! Enchantée, je suis Cynthia. Et je suppose que tu es Eléanore ? La nouvelle Gijinka, d'après ce que Peter m'a confié.

La championne lui serra la main avec une mine solennelle, et la gamine se sentit toute chose, minuscule. Elle se contenta de hocher la tête timidement, et Miyu soupira d'exaspération :

« Bon sang, c'est qu'une femme normale ! Digère et ensuite étripe l'autre là ! »

Eléa lui lança une œillade plutôt froide et renvoya en retour : « Cette femme est un monstre de puissance, elle a faillit avoir Sacha à la ligue Sinnoh, tout c'est joué à un cheveux ! Son seul défaut c'est de ne pas utiliser les Pokémons feux ! Et ensuite, tu ne crois pas que Salomée est assez punie pour ce qu'elle a fait ? Tu crois sincèrement que se venger changera ton état actuel ? »

Le spectre persiffla, agacé, et il maugréa, plus pour lui-même que pour elle :

« Non mais ça me soulagerait qu'elle se prenne un coup de latte. »

Eléa préféra ignorer cette remarque, d'ailleurs, la conversation avait dérivée pendant son dialogue avec le fantôme. La belle blonde avait lâché sa main, pour s'approcher de Salomée et la dévisager.

-Quel dommage, j'aurais aimé lui poser plusieurs questions sur elle, et ce lieu fascinant.
-Je vais la raccompagner dans ses appartements, de toute évidence, elle n'est pas en état d'accueillir Eléanore…Regretta Peter.
-Tu veux que je lui fasse faire le tour du propriétaire ? Proposa Cynthia gentiment, naturellement.

Peter écarquilla les yeux, puis il afficha un sourire mal à l'aise :

-Tu peux vraiment… ? Je t'avoue que ça m'arrangerai, après tout je l'ai fait se déplacer dehors, dans le froid alors qu'elle est malade, alors si au moins, cette sortie pouvait servir…

Eléa tiqua. On discutait de son avenir comme si elle n'était pas présente, et en prime on la qualifiait d'agonisante, qui ne supportait même pas de faire dix mètres dehors ? La gentillesse, la compréhension, la prévention de Peter la touchait, à son égard, mais franchement là, il exagérait. D'ailleurs, à la suite des révélations, elle constatait une chose, il exagérait souvent.

-De rien ! Après tout, je connais presque cet endroit fascinant mieux que toi, plaisanta-t-elle. Des étoiles dans les yeux, elle se tourna vers Eléa, et murmura un autre « fascinant » presque effrayant.

Pendant une seconde, la dresseuse d'Ash craignit que la blonde ne la chope et ne la dissèque rien que pour pouvoir réemployer ce mot. Peter affirma qu'il les rejoindrait dès que salomée retrouverait ses esprits, et Cynthia attrapa le poignet d'Eléa pour l'entraîner à sa suite. La blonde, visiblement ravie, montra à droite et à gauche les parois de la grotte et récita avec enthousiasme :

-J'ai analysé cette roche spécifique avec Stevens Rochard et son petit ami, Marc. C'est fascinant figure toi que l'eau qui suinte dessus, entraîne parfois une réaction chimique, qui peut, les rendre phosphorescents. Incroyable non ? Fascinant, tout simplement fascinant.

Ce qui était surtout incroyable, c'était surtout la façon dont elle prononçait ce terme, cela rendait son attrait sournois, presque pervers, et voir le regard de Cynthia briller presque amoureusement dès qu'elle observait un tas de cailloux…Cela n'arrangeait rien. Ce qu'on disait d'elle et de sa passion d'archéologie se révélait complètement exact.

Eléanore remarqua que peu à peu les murs autour d'eux devenaient taillés, sculptés dans la falaise même, de moins en mois d'humidité régnait dans le boyau. Des portes se mirent à apparaître à l'horizon, elles venaient comme de pénétrer l'immense couloir d'une demeure troglodyte. Des lettres étranges, ayant des formes similaires à des Pokémons, ornaient les murs de manière colorée, elles étincelaient, rougeoyaient, conférant une certain luminosité, ambiance tamisée au nouveau lieu.
Elle entendait une douce mélopée s'élever faiblement du fin fond de l'abyme, comme pour attiser les flammes de la quiétude que renfermait cet endroit.
La gamine pouvait voir des espaces aménagés à l'intérieur des alcôves qu'elle croisait, comme d'immenses pièces de séjour, ou parfois, probablement destinées à un rituel ancien. Cynthia de plus en plus enthousiasmée, déclarait joyeusement à la gamine qu'elle venait à peine de rencontrer :

-J'ai vu ton combat de loin, et j'ai vu que tu avais quelques notions en physiques –tu es une excellente combattante, avec ta partenaire-…Sache que toute cette architecture n'est pas explicable, la falaise est totalement instable, et les tunnels comme ceux là, la parcourent de part en part, un vrai labyrinthe, emplis de piège qui plus est. C'est tout simplement un édifice impossible à bâtir pour les humains.

Elle lâcha la mimine d'Eléa et joignit les siennes dans un signe d'extase profonde, elle soupira d'aise.

-On peut dater cet édifice d'avant même l'apparition des pokéballs…Et pourtant, il est parfaitement conservé grâce aux pouvoirs de Salomée. Si je désirais casser un mur, il suffirait que Salomée mette un pied dans ses environs pour qu'ils se remettent en place de lui-même ! Les Gijinka sont vraiment des créatures fascinantes !

Eléa recula, et Miyu, de plus en plus embarrassé, lui souffla, apeuré : « Je te propose de t'enfuir à 3… ». Mais elle ne l'écouta pas, même si elle avait très envie de lui obéir pour une fois. Sa curiosité l'emportait malgré tout.

-Tu vois, ce passage qui descend, décrivit Cynthia doucement.

Eléa avisa une sorte de meurtrière, une faille béante brisant la continuité de la tranchée, elle y perçut des escaliers raides et glissants, très peu engageants et interrogea la blonde du regard avec plus ou moins d'appréhension.

-Si tu vas dans cette direction, tu arriveras dans une sorte de cachot antique. C'est ici que Peter a décidé d'enfermer les membres des Teams en attendant leurs procès, comme le certain Gilles. Ainsi, twilight n'a pas à se soucier de leur donner à manger ou à boire, ce serait gaspiller nos ressources bien maigres.
-Vous ne leur donnez pas à boire et à manger ? S'offusqua Eléa, blême.
-Evidemment, cet endroit rend ce genre de détail de l'existence totalement obsolète ! S'émerveilla Cynthia dans un rire. –Ici je crois que l'on peut vivre éternellement !

Eléa resta silencieuse, mais une idée âpre monta en elle. Miyu se pencha vers elle souffla :

« Si c'est vrai ce qu'elle dit, tu crois que…Tu pourrais y survivre ? »

La gamine se mordit la lèvre, le cœur battant la chamade dans sa poitrine. Etait-ce pour cette raison, entre autres, que Peter voulait à tout prix qu'elle prenne connaissance de tous les détails de ce temple souterrain ? Espérait-il, qu'il puisse, au mieux lui sauver la vie, au pire lui faire gagner quelques secondes précieuses ?

Ses pensées s'égarèrent, et elle s'avoua totalement perdue envers les sentiments qu'elle portait au maître des dragons. Cynthia, très peu préoccupée par cette possibilité, continua son discours, au comble de la joie de pouvoir partager le fruit de ses recherches ardues à une personne, même une presque inconnue.

-Encore en dessous, il y a un autre escalier, et on se perd dans un dédale incroyable un bon moment. Mais j'ai tout de même pu dénicher une sortie de « secours », comme dans les vieux châteaux. On sort de la partie « atemporelle » et pourtant, impossible de sortir ses Pokémons de leurs balls. C'est un système extrêmement intelligent, je ne sais pas comment il marche véritablement, encore un mystère de ce lieu, mais en tout cas, on peut voir un mécanisme de monte-charge et de valves. Chaque hiver, la cavité principale de ce tunnel se remplit entièrement d'eau glacée, les valves aspirent l'eau au printemps et la conservent, ainsi si quelqu'un pendant l'été tente de s'infiltrer ici par cette voie, il se retrouve noyé sous des tonnes de liquide. C'est vraiment…
-Fascinant. Devina Eléa, largement moins heureuse d'apprendre que des gens pouvaient mourir là dedans.
-Exactement ! Répliqua Cynthia.

Sans autre forme de procès, elle entraîna Eléa à sa suite, et ils délaissèrent le passage menant en enfer, pour prendre plutôt un escalier montant en colimaçon autour d'un pilier finement ouvragé. Elles déboulèrent dans un étage pour le moins époustouflant. La jeune fille loin du rêve de paillettes et de mondes enchantés, fut frappée de plein fouet par ce côté kitsch.

Partout, une fine couche cristalline, reluisante, étincelantes, parcourait la surface. Des motifs et autres statues, ou meubles étaient figés, comme s'écoulant des murs eux même. Un certain aspect homogène suintait de cette grotte de cristal aux milles et un éclats. La mélopée qu'Eléa percevait devint de plus en plus forte et certaine, accentuant la beauté surnaturelle des lieux.

-Regarde Eléanore, tu vois cette phrase écrite ici ? C'est ça qui m'a décidée d'entrer définitivement dans cette organisation.

La championne de Sinnoh pointait du doigt la ligne caligraphiée qui se reproduisait encore et encore, comme un motif sur les parois, comme une rainure dans les innombrables verres miroitants autour d'eux. Mais pour Eléa, cela n'avait l'air qu'à une ligne trop emmêlées sur elle-même pour être compréhensible. Elle appréciait la beauté de cette calligraphie, mais sincèrement, elle n'y comprenait goutte, donc ça n'avait aucun intérêt de graver un texte de manière aussi jolie si personne ne pouvait lire.
Cynthia sembla saisir les difficultés de l'adolescente à déchiffrer les signes et elle inspira profondément avant de murmurer telle une prière :

-« Quand deux êtres se rencontrent, même s'ils sont différents, une nouvelle vie se forme. »

La championne se dirigea vers la gamine et lui sourit.

-J'ai grandie à Sinnoh, où on pouvait lire cette phrase partout. Et aujourd'hui, en ces lieux, elle prend enfin tout son sens.

Dans un geste théâtral elle ouvrit les bras et embrassa entièrement ces ruines.

-Cet endroit est l'ancien temple qui fut construit par la reine Sahara, en l'honneur de la princesse Eléanora.

Eléanore arqua un sourcil, et manqua d'éclater de rire, malheureusement, les derniers évènements ne s'y prêtaient pas. Cependant, le doute l'envahit, cette histoire n'était qu'une légende absurde. Non ?

De toute évidence Cynthia était persuadée du contraire, car elle déclama doucement, une main posée sur son cœur :

-Cette phrase prend son sens quand on sait ce que nécessite le processus pour devenir un Gijinka. Voilà ma théorie : deux êtres se rencontrent, un Pokémon et un humain. Et tous deux abandonnent leurs anciennes vies pour en créer une neuve. Ils coexistent ainsi dans ce nouvel être. Malheureusement, j'ai remarqué avec Salomée, qu'elle ne conserve les souvenirs que d'un seul des êtres qui la compose, celui de celle qu'elle était, une certaine Holly, et non ceux du Celebi avec lequel elle a fusionné. Je pense donc que l'esprit le plus fort entre les deux éradique l'autre au cours du processus, afin de construire une nouvelle personnalité sur ces restes.

Eléanore sursauta, un frisson lui coupa les jambes et elle camoufla son vacillement, choquée, bouleversée. Les cauchemars qu'elle avait faits si souvent pendant l'absence de Miyu revinrent vers elle aussi douloureusement qu'un coup de pied retourné en plein estomac. Combien de fois avait-elle songé à une confrontation entre Eléa, et l'enfant des Sarl, la véritable qu'elle avait remplacée ? Ses remords refoulés lui avaient envoyés les pires insultes à la figure. Elle se remémorait encore le visage cauchemardesque de la gamine de ses songes qui lui hurlaient « Rend-moi ma vie ! » en boucle.

Cynthia quant à elle, enchaînait, prise dans le mécanisme théorique, dans le tourbillon des idées :

-Tout devient logique, après tout, La famille royale Guardian, dont Eléanora et Sahara faisaient parties, est à l'origine dans les légendes des premiers Gijinka. On estime que leur royaume se situait entre Jotho-Kanto et Sinnoh. Ainsi il est normal qu'on ait trouvé des résidus à Celestia de ce genre de phrase ! Dire que tous la rattachent aux Pokémons légendaires de l'espace et du temps ! C'est juste…Fascinant !

Eléanore eut un haut le cœur à la suite de ce énième commentaire, mais ce qui manqua de la faire défaillir, fut la voix chaude et douce qui résonna autour d'eux, se mêlant dans un écho à la litanie hantant cet endroit.

-La famille Guardian est pleine de surprise.

Salomée les rejoignit avec sa démarche féline et majestueuse, Peter à ses côtés, sourit chaleureusement. Cette fois, la femme s'approcha d'Eléanore, et la remarqua :

-Bonjour. Peter m'a expliquée qui tu étais, et j'ai déjà collé un mémo sur un mur de ma chambre pour que tu n'aies pas la corvée de tout me réexpliquer à chaque visite.

Elle lui caressa affectueusement la tignasse, et Eléanore frémit sous ses doigts maigres et anguleux. Elle rencontrait le contact d'une peau, d'une main de vieille femme malgré les apparences trompeuses.

-Je suis enchantée. Excuse-moi pour tout à l'heure, mon esprit s'est un peu égaré. Si tu le souhaites, je pourrais t'aider à contrôler un peu mieux tes pouvoirs, il te suffira de venir ici. Et ne t'en fais pas pour la fatigue, tout ce qui se déroule dans ce périmètre n'aura aucune influence sur ton métabolisme.

Miyu se rétracta un peu, très réticent et méfiant. Mais Salomée leva la tête vers lui et le fixa avec douceur.

-Ainsi…Tu as pu trouver une vie meilleure…Loin de ce laboratoire…je suis navrée d'avoir du en arriver à une telle extrémité pour te libérer de tes souffrances.

Elle reporta son attention sur Eléanore sidérée, et Salomée lui effleura la joue avec tendresse :

-Tu t'es trouvée une porteuse adorable qui plus est.

Le sarcasme naturel de Miyu outrepassa la crainte et la rancœur une seconde, et il lâcha acerbe : « C'est parce que vous la côtoyer pas 24h sur 24 que vous dites ça ! Cette fille est une plaie ! »

Eléanore se braqua, insurgée. Décidément, il ne restait pas longtemps fâché celui-là ! Elle ne savait pas si elle devait s'en réjouir ou non. Salomée, bien que distante spectatrice de la discussion, pouffa, amusée. Puis elle se tourna vers Cynthia et la salua discrètement avant d'expliquer à son tour :

-Vous êtes une femme intelligente. Vos théories sont presque toutes exactes. C'est bien ici que s'est trouvée la capitale de l'Empire de la reine Sahara Guardian. La seule survivante de la première famille de Gijinka, et la fondatrice de la famille Guardian. La famille ancestrale qui en offrant un de ses enfants tous les dix ans à Celebi, contribue à la protection des époques, selon le dernier vœu.

Son regard se ferma et elle murmura :

-La personne que j'étais avant, celle que je nommerai Holly, faisait partie des élues appelés à ce rôle mais l'a refusé. Ce qui l'a conduite à se marier sur un coup de tête à quinze à Giovanni et d'avoir deux enfants. Qui ont tous deux péris, l'une lors d'une explosion sur le centre Pokémon de Jadielle suite à un ordre des Rocket, l'autre sous les coups d'Opale…Et c'est aussi suite à cet acte stupide de confiance qu'elle a livré l'emplacement de ce lieu de culte à son mari. Qui a profité de cette information pour lancer un raid ici et pour tuer les derniers membres du clan des Guardian qui pouvaient se retourner contre lui.

Le cœur d'Eléanore rata un battement. Silver n'avait donc, plus aucune famille ? Peter derrière les femmes, tiqua et plaqua une main sur son crâne, une pensée s'étant faufilé jusqu'à son cerveau, puis totalement évaporée dans la minute.

Salomée, montrant très peu de cas sur ce fait, soupira tout de même, et avança :

-A présent tout ce qu'il reste des Guardian, sont ces ruines maintenues en état par ma seule présence, et quelques GS ball éparpillées un peu partout dans l'ancien territoire Saharien.

Peter dépêtra d'une de ses nombreuses poches camouflées dans sa cape, une sphère dorée et argentée, qu'Eléanore n'avait vue qu'encadrée chez le professeur Chen à de rares occasions. Etant tombée inconsciente lorsqu'elle avait essayée de soigner Silver, et qu'elle n'avait eut droit à son réveil qu'à un bref résumé, elle ignorait les circonstances qui avaient amenées un tel trésor dans les mains du maître dragon.

-Mais…Balbutia Eléa, de plus en plus déboussolée.

Salomée reporta son attention sur elle et lui jeta une œillade compatissante :

-Tu portes un nom magnifique. Nous les Guardian, nommons nos enfants avec un prénom débutant par un « S » pour honorer la reine Sahara. Je suis heureuse que certaines personnes rendent hommage à La princesse Eléanora également.

Eléa rougit, déstabilisée. Oui, enfin elle n'avait pas choisi à la place de ses parents, elle ne jouait aucun rôle là-dedans.
Cynthia pourtant, parut se réveiller et elle s'exclama brusquement, ses prunelles étincelantes de désir de savoir.

-Mais alors, si la légende est véritable, ce temple devrait contenir les ossements de la Princesse Eléanora, de son Fiancé déchu Ion, et de la reine Sahara !

Salomée oscilla, puis elle pencha la tête sur le côté et lança innocemment :

-Vous vous trouvez dans le temple qui leur est dédié, juste en dessous de la chapelle. Ici, vous êtes dans la mausolée. Ils sont juste devant vous, vous vous trouvez dans leur tombeau après tout, là où Eléanora chante à jamais sa dernière mélopée pour prier Arcéus de sauver son peuple. Vous ne la remarquez donc pas ?

Devant les airs ahuris des spectateurs, elle pointa simplement les statues ciselées dans le cristal qui décoraient la salle. Ils comprirent alors tous, que les mains des sculptures convergeaient toutes vers le centre de la pièce, et les diverses écritures luminescentes s'enroulaient dans une danse, dans des déliés complexes pour venir encercler une sorte de mosaïque colorées parsemée de vitrail, située juste sous leurs pieds.

Eléanore plissa les yeux, et tâta le terrain du bout de l'orteil, puis, petit à petit, sa vision perça l'opacité du sol. Son souffle se coupa.

Si elles partageaient le même prénom, tout les séparait. Dans un linceul emplis de fleurs immaculées, fraîches comme au premier jour, entourée par des ossements comme pris dans l'éternel beauté glacée du verre, se trouvait un corps humain en parfait état.

Cette femme devait être à peine âgée d'une quinzaine d'années, et pourtant il émanait de son corps inerte une prestance presque divine. Ses longs cheveux blonds et soyeux auréolaient sa dernière couche, comme un soleil aurait illuminé cette prairie pure. Vêtue d'une robe blanche, seulement agrémentée de noir et de fils d'or, son teint pâle prenait l'allure du marbre. Son regard mi-clos laissait percevoir d'étranges iris aux reflets envoûtants : d'un bleu profond, outremer, pailleté d'argent, telle un océan étoilé. Autour de ses rétines un cercle luminescent, telle une lune, trônait dans ce condensé des cieux. Une En position de prière, ses lèvres vermeilles encore entrouvertes, d'où la mélodie sans nom s'élevait, cette femme semblait incarner l'allégorie d'un ange.

Eléa passa une main honteuse dans sa propre tignasse absolument intraitable et Miyu, loin de la rassurer lança :

« Essaye même pas Eléanore, ça sert à rien tu es un cas désespéré. »

Cynthia poussa une exclamation surprise et relança un de ses « fascinant ! » ébloui.

-Ce sont les ossements de Sahara là ? Et ici ce crâne, celui de Ion ? Et là, ceux de l'aimé de Sahara ? Mon dieu, si vous êtes une descendantes de la famille Guardian, donc de Sahara, alors vous êtes également parent à la princesse Eléanora, n'est-ce pas Salomée ? Assomma Cynthia, partie dans un autre monde.

La femme hocha la tête simplement, son esprit commençant déjà à dériver ailleurs.

-Oh Arcéus, Souffla Cynthia, émerveillée. –Elle chante véritablement ? je ne parviens pas à entendre…La légende veut que seul les agonisants peuvent saisir la mélodie, on dit même que parfois Eléanora leur révèle l'exacte date de leur décès…C'est plutôt une bonne nouvelle que je ne l'entende pas…Mais, ô bon sang, comme j'adorerai entendre la mélodie capable d'amener Arcéus jusqu'à notre monde ! Nous n'avons à Sinnoh que la flute temporelle, et des morceaux de partitions émiéttés…

Le manège ne dura pas longtemps, elle sursauta, et aussi vivement qu'elle s'était interessée au cadavre, elle trouva une autre cible :

-Il faut que j'aille voir la chapelle principale ! Peut être y-a-t-il les morceaux manquants de la mélodie !

La tignasse blonde s'évapora en un éclair, et la main de Peter se referma sur du vide. Dépassé, il constata :

-Elle va être déçue, la chapelle est magnifique mais ne contient rien d'intéressant, tous les ouvrages qu'elle contenait ont été transféré dans notre bâtiment bibliothèque…

Il soupira et tourna la tête vers les deux femmes restantes, mais chacune semblait prise dans ses propres songes, Salomée disparut encore derrière le voile translucide de la folie, et Eléanore derrière la stupéfaction. Les marques de l'effroi déformaient son teint blafard.

Qu'avait-elle dit ? Juste là à l'instant ? Que seuls les mourants percevaient la mélopée qu'elle percevait depuis son entrée en ce lieu de culte ?

Miyu se crispa, et d'une voix aigre, il intima mélancoliquement :

« C'est pas comme si tu t'y attendais pas, non plus… »

Eléanore trembla imperceptiblement. Un ricanement nerveux lui échappa.
Evidemment, elle aurait pu s'y attendre pourquoi était-elle si surprise ? Cela coulait de source après tout.
Elle passa sa main sur les tâches infectes qui dévoraient son bras et les comprima amèrement, les lèvres pincées. Eléa ne saisissait pas même son propre tourment, après tout, elle savait, en quoi, l'entendre à voix haute, en avoir la preuve formelle l'affectait ? C'était illogique de s'en faire pour ça.

-Eléanore, ça va ? S'inquiéta Peter de la trouver si calme.

La jeune fille hocha faiblement du chef, et elle voulut le rassurer en racontant une bêtise, par habitude, mais un murmure spectral lui fila la chaire de poule. Lentement, elle jeta une œillade terrifiée en contrebas, elle perçut presque les craquements apeurés de son corps pendant cette manœuvre.

Le cadavre sous ses pieds tressaillit, ses iris d'or et d'émeraude effleurèrent les lèvres à jamais entrouvertes et le regard vide de son homologue. La mélodie envoûtante, cette litanie basse, solennelle tel un éloge funèbre paraissait l'entourer, tourbillonner autour d'elle, l'enfermer. Cette sensation glacée la saisit tout entière, l'air se figea dans ses poumons, une bise sèche sembla s'élever, elle lécha ses membres, remontant vers elle et secoua sa chevelures empaquetés, raidissant les mèches de la nuque d'Eléanore, survivantes de cette bourrasque. D'un seul coup, malgré les étincelants ornements de la pièce, tout devint sombre, se teintait du pourpre sanguin ces étranges cristaux de puretés, les ténèbres violacées brûlèrent comme le reflet d'un autre monde mesquin, perfide, regorgeant des suppliciés dont les cris n'atteignaient plus personne.

De plus en plus harassée, perturbée, Eléanore se mit à haleter, le souffle lui manquant peu à peu. A chaque inspiration, elle croyait s'imbiber un peu plus de cette atmosphère viciée, chaque parcelle d'oxygène que son corps appelait dans une détresse confuse, elle l'accueillait comme une tempête, un cyclone venant détruire son propre corps, la faisant ployer, faiblir, l'emportant, la plaquant dans son tombeau.

Le cri paniqué de Miyu, unis à celui de Peter lui parvint derrière cette cacophonie harmonique et magnifique qui emplissait son être et la meurtrissait.

« Eléa ! Eléa ! Qu'est-ce qui t'arrive ? »
« Eléanore ! Ca ne va pas ? Salomée, Salomée aide-moi je crois qu'elle fait une crise d'hyperventilation ! Salomée ! »

Mais la mère de Silver resta stoïque, déjà partie.

L'écho des pas affolés du maître dragon lui apparurent comme le grondement de la terre elle-même, les mouvements vifs de ses membres secouaient son monde et sa vision. Le regard indifférent de Salomée, ces prunelles bleues argentées si semblables à celle de Samantha, lui apparurent comme ceux d'un rapace cruel, patientant jusqu'à son heure pour se délecter de l'échec de sa proie.

Tout se déformait, se disproportionnait, les murs autour d'elle se rapprochaient inexorablement comme un étau crissant, l'happant dans une coque cauchemardesque d'où elle ne pourrait jamais sortir.

Le timbre de Peter devint sourd et lointain, sa présence s'évaporait de son esprit confus.

« Eléanore calme-toi ! Normalement ta maladie ne devrait pas t'atteindre ici, tu es en sécurité, calme-toi, essaye de reprendre une respiration normale et ça devrait passer ! »

Prise de vertige, Eléa céda, ses genoux flanchèrent et elle se retrouva agenouillée, respirant par à-coup. Pourtant en elle, pas de support, elle continuait de chuter dans les abysses, ballotées dans une spirale insupportables, les sons et les sensations s'entrechoquant les unes contre les autres.

Elle croisa alors son regard. Celui morne de la princesse, son visage figé se décrispa de cette malédiction éternelle, et le cadavre bougea légèrement. Dans un murmure elle fixa Eléanore et lui souffla, chaque mot laissant glaçant un peu plus la gamine :

« Tu périras le 15 mai de tes 16 ans »

Puis plus rien, la sensation étrange cessa aussi vite qu'elle était apparue, n'abandonnant derrière elle qu'une coquille vide, qu'une gamine aux yeux écarquillés, aux rêves et aux croyances piétinés.

Alors que Peter la soutenait légèrement, elle se redressa sur ses jambes et s'enfuit en courant. Elle se précipita dans le couloir, bouscula sans ménagement Salomée qui lui murmura avec une mine absente « A bientôt alors… », et elle s'extirpa de cette endroit sacré et maudit à la fois.

Peter à sa poursuite, la vit alors trébucher sur le chemin en pierre qui menait à la grotte, et elle s'étala de tout son long dans la boue. Il se précipita vers elle et l'aida à se relever, mais elle le repoussa vivement, malgré son bras en sang, méchamment égratigné. D'une voix enraillée elle balbutia :

-Je sais rentrer toute seule je suis pas une infirme !
-Mais je…
-Laisse-moi ! J'irai m'entraîner avec cette fille si c'est ça que tu veux savoir…Mais LAISSE-MOI tranquille ! S'époumona-t-elle.

Rejeté, le maître des dragons, se redressa, mais il ne bougea pas de sa place. Il attendit, patiemment qu'elle se relève et que la silhouette de la gamine blessée disparaisse de son champ de vision. Le cœur gros.

Ce n'était pas du tout ça qu'il souhaitait. Il désirait simplement qu'elle puisse se contrôler pour éviter de finir comme Salomée, jamais il n'avait songé qu'elle puisse en être meurtrie…Certes il y avait Twilight, et l'appui d'une créature aussi puissante qu'une gijinka aurait aidé, mais jamais, jamais il ne forçait la main à une personne, surtout à un enfant. Il mettait tout en œuvre pour permettre le plus de liberté possible à ceux dont il était responsable.

Il baissa les yeux, honteux, et se demanda une seconde, s'il avait bien fait, finalement.

Eléanore, muette, sourdes aux suppliques de Miyu, avait cessé sa course, elle marchait maintenant d'un pas lent, la pluie battante continuant de souffler sa colère sur le Qg. Arrivée devant le chalet où elle résidait, elle leva la tête, et au bord d'une des fenêtres illuminées, elle croisa les silhouettes de Silver, Sam et Gold, probablement en pleine discussion, attendant son retour.

Un hoquet la secoua.

Elle ne savait pas si elle était assez forte pour cacher ça au regard de Silver, prenant un aspect bien plus terrifiant, paralysant depuis tout à coup.

Un sanglot fourbe remonta sinueusement le long de sa trachée. Ses poings se serrèrent dans une convulsion et ses phalanges en blêmirent.

A la mélodie tragique qui avait tourbillonné en elle à la manière d'un ouragan, se substitua les paroles du fantôme ombreux, inerte d'Eléanora.

Sans pouvoir y retenir quoique ce soit, la gamine tomba à genoux, se recroquevilla et pleura.

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Il pleuvait. Etrangement, tout de déroulait exactement comme il l'avait toujours imaginé : le ciel grumeleux, l'horizon brumeuse, la mélodie de l'averse camouflant les pleurs des spectateurs alentours, noyant leurs chagrins. A dix ans, quand il avait appris l'état critique de son amie, de sa mort proche, il avait immédiatement eut cette image là, en tête. Le monde entier devait être malheureux, tout devait cesser de tourner, parce que…ce n'était pas normal. Pas normal qu'une enfant comme Eléanore puisse mourir ainsi, vaincue par la maladie. Les cieux, résidence du dieu Arcéus, devait cacher toute lumière divine ironique, la brume, toute perspective d'avenir.

Régis avait réfléchi un nombre de fois incalculable à cette scène. Avec le temps, il avait compris que parfois, le soleil pouvait briller alors que des gens bien vivaient le pire jour de leur existence, il s'était fait une raison, il avait songé, que, si elle les quittait, le jour de son enterrement, il ne se soucierait plus vraiment de la pluie ou du beau temps.

Pourtant, aujourd'hui, c'était ça qu'il faisait. Il n'avait jamais réellement pensé, qu'un jour il assisterait à un mise en terre de son amie, la sachant en sécurité à des kilomètres de là. Comment aurait-il pu prévoir cela ? Aujourd'hui, il comprenait toute la cruauté de leur choix. A tel point qu'il n'osait même pas regarder en face ses connaissances, les parents d'Eléa, Jackie, son grand-père…Sacha.

Ce dernier, immobile dans la foule, soutenu par une Ondine plutôt résistante, lui jeta une œillade froide, emplie de reproches.

Sous la surprise, quelques jours plutôt, Régis lui avait balancé la vérité sur Eléa sans le ménager. La surprise, le soulagement de la savoir en vie pourtant, n'avait pas duré longtemps cependant. Il était furieux par la décision qu'avait prise Twilight ; et Régis comprenait enfin la raison.

Marina, Charles et Maximilien, la famille, se tenait un peu à l'écart, tout au fond, devant le prêtre. Devant le cercueil minuscule, où ils avaient entassé tous les restes qu'ils avaient pu récupérer de « l'accident » d'ambulance.

Les voisins chuchotaient autour de lui, honteusement, qu'ils s'en sortaient dignement au vu des circonstances. Peut-être était-ce un moyen de se soulager, mais cela sonnait plutôt comme des sarcasmes, des moqueries aux oreilles de Régis. Et surtout comme un immense mensonge. Ils ne supportaient pas ce drame, ils y survivaient, ils ployaient sous la douleur mais ne pouvaient juste pas descendre plus bas que terre.

Dans leur esprit, c'était juste fini.
Il n'y avait juste plus rien à faire.
« Juste », Même dis comme ça, cela résonnait mal, en lui.
Il était strictement incapable de mesurer tout le mal qu'il leur faisait subir.
Personne ne le pouvait.

L'heure de répéter les condoléances de coutumes à la famille fut un calvaire, il aurait aimé abréger cet instant, mais la poigne de Charles, ferme, le maintint au beau milieu de la tempête. Le Sarl enserrait la taille de son épouse, dont la tenue sombre accentuait le teint maladif.

-Je sais que je ne me suis pas montré…Toujours correct avec toi…Et je sais qu'Eléanore t'aimait beaucoup, avec Sacha.

Régis grimaça douloureusement, l'amertume le prenant. Il s'était montré, lors de la prise de décision de Twilight, particulièrement rancunier envers lui. Peut-être injuste, même s'il avait tenté de lui faire porter le chapeau de la disparition de sa fille en partie.

Marina posa une main sur son ventre, et prit la relève de son mari, la voix tremblante :

-J'aimerais, que tu sois le parrain de l'enfant que j'attends.

La surprise le cloua sur place, mais plus que l'étonnement ou la pluie tombant à drue ; ce fut la culpabilité qui glaça tout son être. Une envie de vomir s'empara de lui, et il ne sut pas lui-même comment il parvint à articuler dans un semblant de sourire :

-Bien sûr, j'en serai ravi.

Il comprit que Sacha avait entendu car celui-ci le bouscula ostensiblement en allant à son tour présenter ses condoléances, pikachu menaça même de le foudroyer de ses joues crépitantes, puisque de toute évidence, Arcéus, malgré le temps orageux, ne se décidait pas à le faire.

Par bonheur, ou son contraire, cela restait à prouver, Sacha n'avoua rien –volontairement ou non-, il se contenta d'accepter de veiller sur l'enfant à venir lui aussi. En revanche, l'expression qu'il afficha en direction de Régis montrait le fond de sa pensée, et celle d'Ondine, au courant, déjà redoutable, s'en trouvait exacerbée.

Ils firent quelques pas côte à côte, pour préserver les apparences, surtout devant Délia, Jackie et Chen particulièrement secoués par la cérémonie. Mais une fois hors de vue, la couverture fut jetée et abandonnée sans autre forme de procès, et les mots sortirent, âpres :

-Comment peux-tu avoir songé, une seule seconde, à cette solution !

Il avait rarement entendu Sacha si furieux.

-Sur le coup…Ca semblait être l'unique choix à faire…Concéda Régis, mal à l'aise.
-IL Y A TOUJOURS PLUSIEURS CHOIX ! TU VAS PAS ME DIRE QUE CELUI-LA RENDAIT TOUT LE MONDE PLUS HEUREUX QUAND MÊME ! Explosa le maître de la ligue, rouge.

Le ton incisif de son ami et rival d'enfance le mit hors de lui, qu'en savait-il après tout ! Il avait été injoignable tout le long du problème ! IL n'avait jamais été là pour Eléanore, et ça continuait.

-Quand nous l'avons récupérée, elle se laissait mourir de toute manière, la laisser plus longtemps avec eux, aurait fini au même résultat, une cérémonie, mais avec un vrai corps dans le cercueil cette fois !
-Tu as pensé une seule seconde à SES PARENTS !
-ET SES PARENTS EUX ? ONT-ILS PENSES UNE SEULE FOIS A LEUR FILLE ?
-PARCE QUE TU VAS ME DIRE QU'ILS ETAIENT EGOISTES EN PLUS ?
-TU PEUX COMPRENDRE MIEUX QUE PERSONNE LE DESIR DE LIBERTE D'ELEANORE !

Sacha vacilla, puis il secoua la tête, et lança froidement :

-Et bien non, je ne le comprends plus du tout. La liberté, ce n'est pas ça.

Il serra des poings convulsivement. Eléanore se retrouvait plutôt dans une autre cage à présent, incapable de voir sa famille, son futur frère, ou sa future sœur. Personne ne souhaitait vivre ça. Il ne parvenait pas à y croire. Amer, il siffla :

-Je ne comprends d'ailleurs plus du tout Twilight également si elle soutient ce genre de méthode.

Régis plissa les yeux et rétorqua :

-C'est pourtant toi qui nous a tous mené vers elle ! Assume un peu tes actes !

Et pour la première fois Ondine ouvrit la bouche, cassante, exaspérée :

-Ne lui demande pas d'assumer les actes d'une organisation pareille.

Elle fit un pas en avant et toisa le savant avec gravité :

-Nous sommes tous entrés à Twilight par idéal, parce que sa justice nous parlait, mais, si ce que je vois là, sont les méthodes qu'elle désire employer pour parvenir à ses fins, et bien Twilight devra se passer de moi.

Régis sursauta, de même Sacha. La rousse observa son petit ami, comme pour lui confirmer ses propos. Puis elle lança simplement au brun :

-IL n'y a rien à ajouter, Sacha, cette organisation est dangereuse. Elle n'a pas encore assez d'influence pour provoquer un réel renversement politique, et tout ce qu'elle attire au stade où elle est, ce sont des ennemis. Que feras-tu si un jour, au nom de ta protection, Peter décide de te faire subir le même sort que celui d'Eléanore ? Moi je préfère partir avant que ça ne tourne dramatiquement.

Sacha resta coi, véritablement sonné par la révélation, visiblement, cela n'avait même pas traversé son esprit.

-J'ai donné ma parole, balbutia-t-il doucement. –Je…Je veux dire, Twilight peut encore rectifier le tir, c'est juste…

Ondine poussa un soupir las, visiblement bien déçue.

-Mais tu as vu ce qu'elle a fait à nos amis ? Flora et Drew ont participé à cette mission ! Tu te rends compte de ça ? Vous vous rendez compte tous les deux que Twilight est en train de vous changer tous les deux ?

Les rivaux baissèrent la tête, mis devant l'évidence, et pikachu gémit de honte.

-Pensez ce que vous voulez, mais je vais en parler à nos amis, pour les faire réfléchir. Moi on moins, je ne devrais pas consoler Eléanore quand vous lui direz qu'elle va avoir un petit frère ou une petite sœur, qu'elle ne verra jamais.

Elle tourna les talons, et se dirigea vers Délia, pour la consoler, Sacha esquissa un mouvement pour la rejoindre, mais Ondine avant même qu'il ne fasse un pas, murmura :

-Réfléchis-bien Sacha, est-ce que tu veux vraiment porter ce secret, le cacher à ta mère ? Tu es prêt à essuyer ses larmes tout en sachant que la raison de son chagrin est une illusion ?

Les mots semblèrent résonner éternellement sous la pluie battante, martelant les cœurs déjà lourds des deux jeunes hommes. Et plus que la question stagnant à jamais dans l'air, la réponse les torturait.
Il ne savait pas.
Et L'incertitude les tuait.

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Les terres de Jotho, contrée berceau de la magie, lieu où modernité et monde ancien, traditionnel, se rencontraient et s'harmonisaient. Il avait entendu beaucoup de propos élogieux au sujet de cet autre versant, situé derrière la chaîne du mont Argenté. Frédérique, une de ses grandes sœurs, était particulièrement férue de littérature issu de cette région, et elle économisait pour s'y rendre, tout en citant il ne savait combien de fois par jour ses passages favoris. Bien évidemment avec sa mémoire phénoménale, il se remémorait chacune d'elle et elles lui trottaient dans la tête à la moindre occasion.

« Acajou, belle rive enchanteresse où se partage la chaleur de la fougue jeunesse et la froideur maladive du vieillard ».

Il se massa le crâne en espérant faire fuir le reste du texte, mais rien à faire, il entendait presque la voix enjouée de son aînée réciter. Si seulement ils avaient pu faire une pause, autre part que derrière le foutue panneau « Bienvenu à Acajou ! » On parlait d'une blague. Gabriel soupira, excédé.

Pourtant, ses yeux dérivèrent vers la gamine située juste à sa droite, presque naturellement. Il s'auto-flagella pour ce geste, et malheureusement, le panneau de retour dans son champ de vision, les souvenirs eux aussi rappliquèrent. C'était un cercle vicieux ! Il en avait marre, marre, marre !

-Daniel, tu n'as toujours pas fait évoluer ton ramoloss ?

Marre surtout de son foutu père.

-Mais…si je le fais évoluer, il va changer, pour toujours non… ? Ce sera plus jamais ramoloss…Répondit timidement Daniel, le regard rivé vers le sol.

Gabriel ne reconnaissait même plus son propre frère, il le voyait à peine, ce matin, lui et Nathaniel étaient partis avant l'aube pour essayer de capturer des Shiney. Apparemment ils s'étaient séparés en route, pour se rejoindre ici avant le déjeuner et s'entraîner.

Effectivement, le traitement avait fonctionné, puisqu'en deux mois déjà, Daniel avait capturé pas moins de 4 shiney, directement envoyés au Qg sans même lui laisser le temps de les caresser. Pourtant, même si Daniel gardait une certain distance avec ses Pokémons, Gabriel savait que son frère prenait très à cœur ce premier contact, dit primordial…Cela le peinait de contempler son aîné changer à ce point. Ce type, ce type était en train de profiter de son épuisement pour le remodeler à son image !

Devant lui, Daniel subissait une engueulade dans les règles, de manière assez indifférente, si on oubliait le fait qu'il tentait de trouver un appui sur lequel s'asseoir une seconde. Il dérapa lamentablement entre le « Tu n'arriveras jamais à rien avec des Pokémons de base ! » et le « Et qu'est-ce que t'as contre le changement au juste ? » hargneux de son père. Mais de toute évidence il trouva que le sol faisait un bon coussin car il resta là. De toute façon, il ne pouvait pas tomber plus bas, non ? Autant métaphoriquement que physiquement.

Barbara essaya de tempérer Nathaniel puis, ne pouvant rien y faire, abandonna. Cette femme, la nouvelle compagne de son père, uen grande blonde avec une blouse se savante, il se forçait à la détester. Maintenant qu'il la connaissait, cela se révélait plus dur, mais il lui suffisait de se concentrer sur son incompétence à se faire obéir pour qu'il conserve une hargne constante envers elle. Elle qui Laissait Daniel se faire relever, et tirer jusqu'au terrain d'entraînement.

Misère.

En contemplant son aîné se faire « kidnapper » il avait retrouvé la fille dans son paysage, et ses entrailles s'étaient à nouveau distordues.

Elza jouait avec les Pokémons du groupe, tous libres pendant leur temps libres. Elle jouait avec son balignon, le shiney que Gabriel avait récupéré. Elle arborait une coupe au carré, de beaux cheveux châtains, aujourd'hui, exceptionnellement, elle avait délaissé son chapeau pour mettre une broche en guise d'ornement, cela ne servait à rien, gracieusement, elle remettait une mèche derrière son oreille toutes les trente secondes. Elle n'avait pas de très beaux yeux, communs, marrons, mais incroyablement, dès qu'ils s'illuminaient, secoués par l'émotion, ou qu'ils se posaient sur lui, Gabriel se sentait tout chamboulé.

Il allait se baffer.

Balignon sauta des genoux de la jeune fille et trottina jusqu'à lui, Gabriel le récompensa en lui flattant le dos, mais il lui ordonna immédiatement de retourner jouer avec Elza. Le champignon se frotta contre sa jambe une dernière fois, puis retourna retrouver sa compagne de loisir, en sautillant.

Malheureusement, le moment était passé.

Matthew, le camarade de voyage d'Elza, un garçon aux cheveux brun bouclés, légèrement enrobé, délaissa son carnet de croquis –dont il se servait comme un pokédex- pour demander à Barbara :

-On peut assister à l'entraînement ?

La savante blonde parut hésiter, puis opina du chef avec anxiété, acceptant de surveiller les Pokémons pour eux quelques heures de plus, tout en préparant le déjeuner.

Gabriel n'aimait pas vraiment laisser ses Pokémons seuls avec elle, il ne savait pas pourquoi, mais il avait peur de les retrouver disséqués à son retour. Cependant quand Elza se tourna vers lui pour lancer un « Tu viens ? » par réflexe, son corps répondit oui.

Mais mince alors, pourquoi son propre organisme le trahissait-il si aisément ! Il n'avait pourtant pas l'âge de voir sa conduite influencée par un surplus d'hormones.

Derrière les buissons, Daniel s'était relevé, il ne savait pas par quel miracle d'ailleurs. Son aîné n'avait guère l'habitude de vivre à un tel rythme, et encore moins sans repère précis dans le temps. Quitter le foyer familial pour traverser Kanto avait déjà du être une épreuve au début, mais au moins, avec le groupe, ils mangeaient toujours à heures fixes, et prévoyaient souvent les lendemains. Mais avec Nathaniel ça ne marchait pas comme ça.

Danny déglutit. Nathaniel sortit deux épées en bois d'un immense sac qu'il traînait avec lui, et sans préavis les envoya à son fils. Celui-ci manqua de les laisser tomber, mais il les rattrapa tant bien que mal. Cependant s'il arriva à accrocher les « fourreaux de fortune » à sa ceinture, quand il fallut dégainer, ce ne fut pas aussi simple. La première, à cause d'un mouvement trop ample, emporta son emballage et finit par l'envoyer dans le public. La seconde, et bien, elle ne sortit pas de l'emballage et Daniel bloqué en plein élan s'écrasa au sol, déséquilibré. Vidé.

C'était pathétique, et le pire, c'était que ce manège se répétait à chaque séance, donc matin, midi et soir.

-Fais un effort Fiston ! L'encouragea platement Nathaniel. –Allez, tu vas voir, c'est dur d'apprendre à manier deux épées, mais au moins tu pourrais réellement te défendre !

« Fiston », c'était son nouveau truc pour éviter d'avoir à prononcer les prénoms, il lui arrivait toujours de confondre, Barbara excusait ça, en disant qu'il était juste inattentif. Une vraie mascarade tout ça !

Gabriel soupira à nouveau.

Les Pokémons arrivèrent finalement auprès d'eux, décidément, Barbara n'était pas fiable en tant que gardienne. Balignon se posa sur les genoux de son maître, mais comme il capta le regard d'Elza sur lui –enfin sur la créature-, Gabriel rougit. Il pensa une seconde qu'il devait avoir l'air fin, avec un nosferapti vert sur son crâne, un carapuce à sa droite, un stalgamin à sa gauche, et un baligon au milieu…

« ARGH ! »
-Daniel PROTEGE TA MAUDITE CHEVILLE AVEC TA GARDE !

Le cri de son frère le fit sursauter. Elza elle, bondit littéralement sur ses pieds pour s'exclamer :

-C'est de la triche ça !

Nathaniel en plein milieu d'un échange de coups difficiles, avait fait intervenir son Gallame qui avait sans une once de remord, fauché le gamin en visant son pied anciennement blessé. Bien évidemment, Daniel avait fait un beau vol plané. L'adulte haussa les épaules et sourit négligemment :

-Oui et alors ?

Elza plissa les yeux et toisa Daniel pour lancer, déterminée :

-Utilise-toi aussi tes Pokémons ! Allez y-a pas de raison !

Le rire tonitruant de Nathaniel l'interrompit, celui-ci remit son fils sur ses jambes –qui tangua un peu-, et lui argua :

-Tu vois, elle, elle a compris le truc ! Il faut que tu entraînes tes Pokémons à intervenir en cas de danger, sans que tu ne leur donnes d'ordre. Ces bêtes là peuvent te sauver la vie ! Laisse-les toujours en dehors de leurs pokéballs, apprend-leur à se camoufler dans la nature, et à se battre dès qu'ils pensent qu'il le faut ! Vous voulez faire parti de Twilight, bien ! Mais mettez toutes vos chances de votre côté pour survivre !

Gabriel siffla d'agacement. Il détestait toujours autant recevoir des conseils de sa part. Pourtant ; Matthew parut subjugué par le conseil et Elza, elle, abasourdie. Daniel paraissait plus assommé que quoi que ce soit d'autre, il allait soit tourner de l'œil, soit avoir un beau cocard d'après ce que son frère pouvait en juger.

-Allez, on reprend Daniel ! Tu ne mangeras pas tant que tu n'auras pas compris la technique ! Et je veux que tu fasses évoluer tes Pokémons également !

Daniel tituba, reprenant la garde de ses épées de bois, hésitants. Cette fois Gabriel ne retint pas sa réplique, de toute manière, Nathaniel commençait à s'habituer à son insolence :

-Tu vas arrêter quand au juste ? Daniel a sa propre méthode de combat ! S'il ne veut pas faire évoluer ses Pokémons, accepte son choix ! Il n'est pas toi, merde à la fin !

Nathaniel se redressa, et il contempla sa progéniture, avec une froideur exaspérante. Daniel quant à lui, derrière tout ça, chercha à s'allonger dans l'herbe pour profiter de l'accalmie, mais Gallame ne lui en laissa pas la joie.

- Fiston, je n'ai pas besoin de ton avis ou de tes conseils en matière d'éducation, ton frère a besoin de soins spéciaux. Laisse-moi faire comme je l'entends.

Cette réplique mit Gabriel hors de lui, pour le manque de tact, de pudeur, de respect dont Nathaniel faisait preuve envers Daniel. Il parlait de lui comme d'un monstre ! Il ne parvenait pas à croire qu'on puisse se montrer aussi borné.

-Ah ouais, parce que tu t'es montré comme un exemple paternel toi, c'est bien connu ! Cracha-t-il sans vergogne.

Son géniteur n'eut même pas à lui dire d'aller au « coin », Gabriel tourna des talons et se retira. Il manqua la vision particulièrement attrayante, d'Un Nathaniel heurté de plein fouet par un Pistolet à Eau du Goboue de son fils. Il ne capta que le « Très bien ! Tu vois que tu peux y arriver » de son père.

Furieux, il s'assit près du campement, et saisit son ordinateur de poche pour travailler. Ses Pokémons le rejoignirent rapidement et se blottirent contre lui comme à l'habitude. Nosferapti après quelques compliments, accepta de jouer à nouveau les antennes pour que son maître capte internet.

Gabriel ne sut dire combien de temps il s'écoula, plongé dans ses recherches. Il continuait de traquer le signal qui avait débuté son aventure familiale, mais depuis qu'il avait quitté Eléanore, plus rien. Il cherchait aussi également quelques informations diverses sur la toile, notamment sur les légendaires, actuellement ce qui l'étonnait le plus, c'était les diverses témoignages contradictoires. Plusieurs civils affirmaient avoir entraperçus quelques légendaires, et parfois aux mêmes dates, mais à des lieux de distance, en même temps. Il arrivait souvent que ce soit des fausses alertes, avec des photos truquées, mais le génie avait vérifié tout ça, et il ne flairait pas le « coup monté. ».

-Hey !

Gabriel frissonna, s'attendant à voir Barbara lui proposant un peu de chocolat chaud, mais il n'en fut rien. C'était Elza, celle-ci caressa Balignon en rigolant, et lança simplement :

-Tu fais quoi ?

Curieuse, elle se pencha par-dessus son épaule, mais le gamin éteignit aussitôt, ne sachant même pas s'il avait pris la peine de sauvegarder. Il détestait ça, qu'on fouine dans son travail. En plus de cela, quand elle s'approchait trop près de lui, il avait du mal à respirer.

-Rien qui te regarde ! Lâcha-t-il abrupte.

C'était plus fort que lui, en sa présence, il ne pouvait s'empêcher de répondre sèchement, ou méchamment, quand il n'acquiesçait pas à tous ses propos. Il était trop intelligent pour ignorer les symptômes de son mal, et connaitre donc le diagnostic. Cela le sciait, mais c'était l'évidence même.

-Pff : Toujours aussi aimable toi ! Souffla Elza, les sourcils froncés, les mains sur les hanches.

Irritée, elle s'éloigna un peu, et alla verser un bol de croquettes de Twilight à tous les Pokémons présents. Gabriel pourtant, sachant ce que contenait le sac pour avoir aidé –un tout petit peu- à la conception, empêcha ses Pokémons et ceux de son frère, de prendre part au festin. Il préférait éviter une surveillance de ce genre.

-C'est intelligent, comme système, je veux dire, habituer les Pokémons à toujours voler au secours de son dresseur. Constata simplement la fillette de dix ans.

Encore une fois, il aurait aimé éviter un ton condescendant, mais il échoua lamentablement :

-C'est pas intelligent, c'est logique, c'est l'instinct, n'importe quel crétin dans notre situation apprend ça à ses Pokémons.

Elza ne réagit pas, encaissant probablement la pique avec exaspération, mais en silence. Puis elle lança joyeusement, en caressant le museau de son aligatueur.

-Oui, Mon Dizzy a déjà fait ça.

Elle sourit et enchaîna mesquinement, presque taquine :

-Dis donc, je te croyais sans cœur, mais en fait…Tu aimes beaucoup ton frère non ?

Gabriel rougit imperceptiblement et détourna le regard. Ce qui fit rire Elza.

-Il a de la chance d'avoir un petit frère aussi protecteur…
-Ca c'est certain, il ne me mérite pas !
-Quoique…

Gabriel tiqua, et malgré ses efforts, il n'arriva pas à renvoyer la balle. Quelle honte, pensa-t-il.

-Vous êtes une drôle de famille en fait. Analysa Elza au bout d'un moment. –Ca fait de vous, une sorte de famille de super héros ? C'est vrai quoi, vous vous engagez de père en fils c'est ça ? Tous pour défendre le droit des Pokémons !
-Ce n'est pas mon père.

Le regard d'Elza s'assombrit.

-Tu devrais vraiment lui parler mieux, l'insolence résout rien avec les adultes, si tu lui en veux, explique lui calmement, au lieu de réagir comme ça. Modéra-t-elle avec gravité.

Les gargouillis qui secouaient son ventre s'évaporèrent soudainement, remplacés par une douleur aigre, et une colère sourde, Gabriel se redressa sur ses jambes et foudroya la jeune fille du regard.

-Dis, tu te prends pour qui là au juste ? Espèce de mère la morale de mes deux ? On se connait depuis quoi ? Deux semaines, deux et demie ? Tu crois quoi ? Que tu peux t'incruster ici et nous faire la leçon sous prétexte de je ne sais quelle moralité ?

Elza blêmit, et Barbara qui surveillait la conversation de loin telle une mère bienveillante s'empourpra, lançant un « Gabriel ! » courroucé qui n'atteignit jamais sa cible.

-Tu sais même pas ce que notre famille a vécu à cause de ce type ! Alors vient pas me dire de le respecter !

Elza pourtant se redressa, et Matthew apparut, accompagné de Nathaniel dans les fourrés.

-Oh c'est bon, arrête de jouer tout le temps les victimes ou les surdoués ! Ca saoule à la fin ! Explosa-t-elle.
-Quoi ? Moi ? Mais je suis un surdoué ! Et je suis une victime ! J'en ai ras le bol ! Sous prétexte qu'on est des gosses, on a pas le choix, on doit suivre ce type ! C'est insupportable ! Daniel déteste ça ! Et moi je déteste ça !
-Je suis ton père que tu le veuilles ou non ! Intervint Nathaniel doucement.

Daniel reporta toute sa rancœur sur le concerné et il souffla :

-Ca, Daniel comme moi, on est obligé de se le dire à chaque fois qu'on se regarde dans la glace, alors pas besoin d'en rajouter !
-Mais qu'est-ce que j'ai bien pu te faire au juste pour que tu m'en veuilles à ce point ? Hein ?
-JE NE VOULAIS PAS TE REVOIR ! Vociféra le petit, rouge.

Un silence suivit cette déclaration. Gabriel passa une main dans sa tignasse, ruinant la coiffure qu'il prenait tant de soin à entretenir chaque matin. Tous furent surpris de constater une telle ressemblance entre les Nathaniel, Daniel et lui. Les épis, et même la petite mèche rebelle se cachaient sous la tonne de gel qu'il utilisait pour sa coupe d'enfant sage.

-Merde, quand t'es parti de la maison j'avais 6 ans ! Tu nous avais déjà oublié dans la forêt, tu nous avais laissé à la piscine une fois où j'ai failli me noyer, et encore un nombre incalculables de coups que mon cerveau a préféré effacer, dont je connais l'existence qu'à cause des récits de mes frères ! Alors que j'étais présent à chaque fois !

Il haussa les épaules en signe d'impuissance.

-Et tu sais quoi le pire ? C'est que tu venais qu'un week-end par mois à la maison ! Tu restais à la maison qu'un foutu week-end par mois ! Et moi…Moi je garde quand même le souvenir d'un papa rieur, sympa, que j'étais toujours ravi de voir ! Un papa qui jouait avec moi, qui essayait de comprendre ce que je faisais, et qui m'encourageait. Alors que tu n'écoutais probablement même pas un mot de ce que je te disais. Ne me ment pas, j'ai construit mon premier ordinateur à six ans, et quand je te l'ai montré, tu as dit « ouah, tu es un grand garçon maintenant ! ». Alors ne me ment pas. Je sais que tu t'en foutais !

Nathaniel resta muet. Elza parut brusquement mal à l'aise.

-Quand t'es parti, après avoir pleuré un bon coup et avoir compris pourquoi…J'ai vu Maman tomber dans la dépression, et j'ai vu Daniel changer à un point inimaginable, alors qu'il refusait parfois seulement qu'on change les fleurs dans les vases ! Et j'me suis dit une chose, j'me suis promis une seule et unique chose !

Il trembla légèrement, et murmura :

-J'me suis promis de plus jamais te revoir. Pas parce que je t'en voulais. Mais parce que je souhaitais conserver le souvenir de mon Papa, quand il était encore heureux avec nous, qu'il jouait, quand il se souciait de ma maman. J'voulais juste pas voir ce que t'étais devenu sans nous, parce que je SAVAIS que ça me ferait du mal.

Puis il lança une œillade meurtrière à l'assemblée et acheva rancunier :

-Mais vous les adultes, vous nous laissez jamais le choix.

Sur ce, il alla récupérer son matériel électronique. Quand il passa devant Elza celle-ci voulut lui dire un mot mais il la remit à sa place d'un « J'veux pas t'entendre toi », le cœur gros. Il passa devant son géniteur, toujours indifférent, qui cogitait, et s'en alla rejoindre son aîné.

Celui-ci, sur le sol, essoufflé, ne broncha pas quand il vint s'asseoir près de lui. En revanche, il capta son regard déçu, émoustillé. Doucement, il lui caressa le dos, et Gabriel murmura d'une voix brisée :

-J'veux rentrer…

Daniel mit plusieurs minutes, le souffle saccadé, pour demander, mal assuré :

-Tu veux rentrer à la maison ?

Mais Gabriel secoua la tête vivement, négativement, et il serra son stalgamin dans ses bras. Daniel ferma les yeux, et les rouvrit, un peu perdu. Il ne pouvait pas promettre à son frère de partir sur le champ ; et il ne pouvait pas non plus le renvoyer au Qg de Twilight seul. Cela l'exaspérait lui aussi, mais ils n'avaient pas le choix, l'un comme l'autre.

Après un moment tendu, il finit par ajouter, camouflant un rougissement léger :

-Tu veux qu'on appelle Eléa, Lucas et les autres ce soir ? Avec un peu de chance, il nous demanderons de rentrer…

Cette fois Gabriel opina du chef, tout en se blottissant contre son frère, d'humeur mélancolique. Encore une fois, pas un son ne les atteignit pendant des secondes interminables, puis enfin, Gabriel, calmé, bafouilla, embarrassé :

-Dis…Tu pourras me taper pour m'empêcher de parler mal à Elza, à partir de maintenant ?

La tête de Gabriel, posé sur son torse, entravait sa respiration, déjà laborieuse, et la tête de Daniel, douloureuse, commençait à tourner, mais cela ne l'empêcha pas de ricaner :

-Avec plaisir.
-Le son de ta voix me laisse croire que ça te démangeait…Maugréa Gabriel, morose.

Daniel lui enfila une pichenette sur le front aussitôt et il émit un « aie ! » indigné.

-Mais pourquoi t'as fait ça ?
-Parce que tu parlais mal.
-Je t'ai dit de le faire seulement quand je faisais ça en présence d'Elza !
-Oh.

Daniel sourit.
Puis il ferma les yeux, épuisé.
Lui aussi, il voulait partir d'ici.
Il désirait pouvoir au moins caresser les créatures qu'il mettait tant de temps à capturer.
Il souhaitait pouvoir dormir plus de trois heures par nuit, manger à sa faim et prendre plus de repos entre les entraînements.
Il voulait conserver son style de combat, ses Pokémons…
Il espérait revoir Eléa et la serrer dans ses bras.

Mais ces rêves ne lui avaient jamais parus si lointains.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

Cela faisait presque quatre mois, qu'ils avaient intégrés Twilight. Quatre longs mois, Avril entamait déjà sa course, et depuis le 1er janvier, Lucas n'avait pas revu Daniel ou Gabriel, à part via une conversation téléphonique. Son meilleur ami lui manquait cruellement.

Le brun soupira, las, et il ajusta son uniforme. Une belle veste à double rangée de boutons argentés, aux couleurs bleues, or et argent. Un pantalon assorti, et des bottes spécifiques, avec en plus, un justaucorps marron rayon, renforcé en protection en cas de coup. Christopher et Angèle cousaient un à un les habits officiels des membres de Twilight avec un ravissement complet. Il se réjouissait cependant, qu'ils n'aient pas ajouté de Dentelles un peu partout, Peter y avait veillé. Yoann, le seul qui avait vu le costume de THEODD le chef virtuel, et il lui avait dit, que les uniformes avaient été assortis. Lucas se montrait assez indifférent face à cela. A vrai dire il s'en fichait complètement, il reconnaissait qu'ils étaient assez agréables, mais après, un simple blouson lui aurait amplement suffit.

Cristal à côté de lui sautait joyeusement, s'amusant à donner des coups dans le vide avec un entrain étonnant. Elle était visiblement comblée d'avoir eut une mission à Mauville, Jotho.

Cela tuait Lucas de se trouver dans la même région que son ami sans pouvoir le voir.

-Allez Louka, c'est super ce que tu as découvert ! On va clouer sur place Peter avec ça ! S'enthousiasma la brune.

Lucas soupira. Il ne savait pas vraiment si on pouvait classer sa découverte dans les « bonnes nouvelles ».

Il était venu dans la cité, à la suite d'une demande de la police. Lui et Cristal avaient aidés à l'enquête de vol de Pokémon. Ils avaient découverts que des bandits avaient trouvés le moyen de détourner les transferts via téléporteur du centre. Plus étrange encore, Lucas avait étendu la recherche sur tous les services publics de ce genre dans la ville. Et là, « bingo » comme on le disait, tous les appareils, alternaient la tâche. Au printemps, c'était celui du centre qui avalait une pokéball sur 20, En été, c'était celui de la troisième rue…et ainsi de suite…Le plus étrange, était que l'ID du receveur des pokéball détournées changeait à chaque fois. Donc les réparateurs qui venaient chaque année régler ce « problème » croyaient à un simple dérèglement. Un véritable trafic, voilà ce que c'était. Sous le nez des forces de l'ordre qui avaient cru pendant des années que la société produisant les transporteurs étaient juste des « capitalistes manipulateurs qui veulent qu'on achète trois fois l'an ».

Maintenant, ils devaient rentrer au Qg pour comparer les ID qu'ils avaient notés, à la base de données de Twilight, en espérant qu'il en ressorte un nom. La police entre temps, avait prévu de faire une vérification complète de tout le système du pays. Mais ça, il n'y croyait qu'à moitié.

-Louka, ça y est, je crois que personne ne nous verra ici.

Le brun sursauta, et Cristal derrière le bosquet, sortit Suicune de sa pokéball. Sans réfléchir outre mesure, plus du tout impressionné par le Pokémon légendaire depuis le temps, il bondit sur le dos de la créature mystique.
L'impression étrange de juste traverser un ouragan pendant plusieurs minutes lui revint, et cessa tout aussi rapidement qu'elle avait commencé. Il n'aimait décidément pas voyager sur Suicune. Même si en un instant ils pouvaient faire des kilomètres, franchir des montagnes en un simple saut, cela lui apparaissait toujours comme surréaliste.

-Lucas ?

Le cœur du garçon dit un looping. En plus, à chaque fois, la créature pour une raison mystérieuse, s'arrêtait toujours non loin de Samantha.

La jeune fille devant lui caressa la crinière du légendaire avec un rire simple, Cristal pouffa, amusée de les voir si proches et elles échangèrent quelques banalités sur la beauté du chien gracieux.

-Alors, quoi de neuf ? Interrogea Lucas vivement.

Samantha haussa les épaules et ricana, dépétrant de sa poche un nouveau badge reluisant, l'insigne plaine.

-Aujourd'hui, Sandra et Blanche étaient présentes au Qg, j'en ai profité, ça me fait exactement, 8 badges, alors je vais pouvoir participer à mon tournoi de fin d'année ! J'ai eu chaud, ça commence dans une semaine, sans eux, je n'avais pas mon diplôme.

Elle avait enfin fini le parcours. Cela avait été ardu, mais le fait de voir aller et venir des champions de toutes les régions l'avait énormément aidé, même si Lucas savait que jamais elle ne l'avouerait à voix haute. Pour la forme, il lança un « c'est génial » à quoi Cristal ajouta un « C'était évident que tu allais y arriver ! ».

-J'suis heureuse de vous voir, ça faisait vraiment un bout de temps, en plus, Shagi, Makanie et Aaron aussi sont en mission, donc je me sentais un peu seule. Avoua la brune après un moment.
-Et Akira, Silver, Gold, Eléanore et Régis ? S'étonna le brun.

Le regard de Samantha s'assombrit.

-Akira c'est mon professeur, évidemment je le vois, mais c'est pas pareil. Gold et Silver sont sympas, mais ce sont des mecs quoi…Régis travaille tout le temps, il ne vient que pour voir Eléanore. Et Eléanore…

Elle jeta une œillade triste à la montagne ornée d'une cascade, qui surplombait le quartier général. A son sommet, au dessus d'une vague esquisse de ruines anciennes, un point noir volait, évitant des éclairs et volés de flammes. Elle soupira :

-Je sais pas ce qui se passe, ses Pokémons s'entraînent tout seuls soit là-haut, soit avec moi, et elle, elle disparait là-dedans pendant des heures, faire je ne sais quoi.

Elle parut inquiète t murmura dans un souffle presque inaudible :

-Je n'aime pas ça, en plus, des fois, elle part avec Peter.
-Tu n'as toujours pas confiance en lui…Soupira Lucas.

La jeune femme secoua la tête et son ami haussa des épaules avec résignation. Cristal elle, fronça les sourcils :

-Oh, ne t'en fais pas, elle ne risque rien, après tout, Gold et Silver n'ont que ça à faire, veiller sur elle et toi. Avec leur mise à pied.

Lucas frissonna, se remémorant trop aisément sa séance d'interrogatoire avec les deux garçons. Ceux-là pouvaient se montrer terrifiants quand ils voulaient protéger quelqu'un, et tout ça, parce qu'il avait eu le malheur de « draguer » un peu Sam. Non vraiment, il plaignait le fout qui oserait faire la moindre avance face à l'une des filles en leur présence, lui avait retenu la leçon. Il faisait ça quand ils avaient le dos tournés.

-Ah, il faut qu'on aille demander une recherche à Christopher et Angèle…Avoua-t-il.

Devant la bouille esseulée de Sam, il se pressa d'ajouter :

-Ce soir, si tu veux, on essayera de parler à Eléanore. Mais tu la connais, elle est bornée.
-Je sais. Maugréa Sam.

Lucas grimaça, mal à l'aise de la voir ainsi, et il lança comme encouragement :

-Allez, je suis certain que si tu lui dis que tu veux passer la voir plus souvent, elle en sera heureuse. C'est juste une période difficile, avec Régis qui lui dit qu'elle va avoir un petit frère y-a un mois, et Sacha qui l'engueule dès qu'il la croise au Qg…
-Elle ne pourra pas venir me voir la semaine prochaine quand je participerai au tournoi de fin d'année scolaire.

La remarque sonna plutôt comme une question désespérée aux oreilles dans adolescents, Lucas demanda une aide muette à Cristal, qui se mordit la phalange d'un doigt, avant de répondre simplement :

-Non. Effectivement.

Samantha soupira, et tritura une de ses mèches, nerveusement, puis le cœur gros, elle bafouilla :

-Bon…je présenterai Toi, Lucas, Silver et Gold à ma mère alors…Je survivrai.

Elle fit volte-face, prétextant un entraînement avec Akira, mais alors que Lucas et Cristal partaient vers le bâtiment informatisé du Qg, ils perçurent distinctement le commentaire aigre de la jeune fille, le « je hais cette foutue Twilight. ». Lucas essaya cependant de ne pas y prêter attention. Chacun avait droit à ses propres opinions après tout.

Dans les années à venir, il repensa maintes et maintes fois à cette scène avec amertume. Si seulement, seulement il avait écouté cette simple remarque…

Mais à la place, il continua son chemin, et patienta des heures devant un ordinateur, en compagnie de Cristal, Chris et Angèle, le résultat d'une foutue recherche. Tout ça pour apprendre au final, un fait pour le moins étrange. L'ID changeait, effectivement, chaque transfert était destiné à une autre personne, mais cela ne se révélait pas être plusieurs facettes d'un même groupe, mais véritablement différentes organisations. Il arrivait qu'un Pokémon soit envoyé à La team Magma d'Hoenn, puis à l'Aqua, ou à la Galaxy, l'ordinateur montra même qu'un appareil en question réservait ses « cadeaux » qu'à la TEAM OPALE ou ROCKET, selon les ID collectés. Il n'y avait pas de doutes, tous les numéros étaient clairement cités dans les bases de donnés qu'ils avaient soit volés, soit récupérés des dossiers de la police fédérale.

Une idée épouvantable s'esquissa alors en Lucas.

Jusqu'à présent, ils avaient pensés combattre des ennemis divisés, des petits groupes luttant déjà entre eux, mais…

Et si ce n'était pas le cas ?

Après tout des compagnies ennemies pouvaient très bien partagées les mêmes parts d'un marché dans certains circonstances, dans une stratégie de pouvoir, chacune collaborant avec l'autre espérant un jour prendre le dessus sur son opposant et remporter la mise.

Il secoua la tête vivement, horrifié.

C'était impossible.

Tout le monde savait que la Team Aqua et Magma se détestaient. De même pour la Rocket et L'Opale…
Cela devait être une erreur, ou alors, les mêmes bandits avaient piratés les mêmes systèmes et continuaient la guerre sur un champ de bataille virtuelle.

Oui cela devait être ça.

Pourtant, pourtant, Lucas ne put s'empêcher de songer à cette minuscule possibilité.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

Eléanore soupira, allongée sur le canapé, les pieds sur la table basse, Silver à côté d'elle, lisant un livre sur les stratégies en combat, jeta un coup d'œil dans sa direction et constata :

-On t'a connue plus joyeuse.

Eléa soupira et relança sans vigueur :

-On t'a connu moins bavard.

Il y eut un silence tendu, Gold, qui soignait son pauvre capumain –utilisé régulièrement comme balle de bowling- soupira, nerveux. Décidément, il n'aimait pas l'ambiance qui régnait entre ces deux là, cette complicité naissante, cet échange de répliques cinglantes emplie de moquerie ou de tendresse par moment. Non ça lui hérissait le poil. Il avait essayé de s'immiscer entre eux, de participer un peu à la conversation, mais il avait du mal à renvoyer l'ascenseur aussi vite qu'eux.

-Tu attends l'appel de ton copain, là, celui de Jotho ? Plaça subtilement le roux avec un rictus aiguisé.

Cette fois la gamine tiqua. Elle se redressa, et Gold remarqua la longueur de ses cheveux, dont les bouts de mèches lui touchaient maintenant les épaules, les bouclettes rebelles donnaient un petit air mutin, électrique à son visage rond.

-Evidemment, la dernière fois, il avait un œil au beurre noir…Vous êtes tous impossible, je vous quitte des yeux une seconde et vous vous cassez tous les os. Je veux pas qu'il se retrouve dans ton état.

Cette fois ce fut à Silver d'être déstabilisé, même si ses blessures étaient presque toutes soignées, les cicatrices demeuraient, mais il se remit en selle presque aussitôt :

-C'est la malade de service qui dit ça ?

Cette fois par contre, la pique atteignit bel et bien un point sensible, la frimousse d'Eléanore se crispa, puis elle ferma les yeux douloureusement et murmura :

-Je vais dans ma chambre, dormir.

Gold sursauta :

-Mais il est à peine 16 h !
-Je suis fatiguée, ça dérange quelqu'un, après tout, je suis la « malade de service » ? Lâcha durement Eléa.

Silver la dévisagea longuement, cherchant une trace de mensonge, rapidement découverte. Cependant, il ne pouvait guère allez droit au but, et lui dire « D'accord, c'est quoi ton problème ? » c'était le rôle de Samantha ou Régis, des personnes véritablement proches d'elle.

-Si tu pars maintenant, tu vas louper le départ de Sam pour son tournoi. Et tu ne nous diras pas au revoir. Se contenta-t-il de lancer en désespoir de cause.

Malheureusement il toucha encore un point sensible, et Eléanore se ferma complètement.

-Bien, je ne vous dirai pas au revoir alors.

Sur ce elle se rua dans le couloir et claqua la porte si vivement qu'un tableau du couloir s'en décrocha.

Les deux adolescents soupirèrent, mal à l'aise. Elle se montrait extrèmement étrange ces derniers temps, entre ses entraînements secrets, et ses sautes d'humeurs…Ils n'entrevoyaient la véritable Eléanore qu'en présence de Samantha.

Gold pouvait comprendre la déception, de ne pas pouvoir accompagner son amie pour un des plus grands moments de son existence, la consécration de ses efforts. Il était normal, de se sentir exilé, elle avait débuté cette quête avec Sam, et se retrouvait incapable de la finir, voire même de s'afficher en public.

Mais, L'évènement était filmé, elle ne pouvait décemment pas se rendre là-bas.

Gold craignait que la jeune fille ne désobéisse et ne les suive en secret pour assister au tournoi, aussi avait-il demandé à sa sœur de rester là pour veiller sur elle. Cristal avait fait une drôle de tête, mais avait fini par dire oui, bon gré, malgré.

Silver soupira, bruyamment, et il se dirigea vers la porte de la chambre, toqua, et lui demanda si elle était sûre de sa décision.

Là encore la poitrine de Gold se compressa, Il ne le voyait rarement si concerné pour une personne, outre Samantha. Bien évidemment, la brune leur avait révélé les moindres détails de sa vision, pour qu'ils la protègent quand elle ne pouvait pas le faire, mais ça ne changeait rien au fait que Silver se montrait réellement soucieux du bien être de la petite. Les picotements de la jalousie, de l'anxiété, il commençait à les connaître par cœur.

Yoann, Sunny et Blake pénétrèrent dans le chalet, revenant du terrain d'entraînement, rigolants et quand ils sentirent l'ambiance plus que lourde de la pièce, Sunny lança, âpre :

-Elle fait encore un caprice ?

La réponse fusa : un « ouaip » las. La shiney hunter persifla, et se dirigeant vers la cuisine elle murmura :

-Foutue gosse.

Dans le refuge de sa chambre, Eléanore entendait les échos d'une conversation sur elle et son « caractère de princesse. » Le cœur gros, elle se blottit dans l'édredon, et sortit Hope, son Caninos, pour le nourrir au biberon. La tête ailleurs alors qu'elle l'allaitait, Miyu penché vers elle, lui souffla :

« Ca va aller Eléa ? »

Mais elle fit comme si elle ne l'entendait pas, elle se contenta d'essuyer prestement ses joues sèches. Ce qui inquiéta encore davantage le spectre.

« Tu es sûre, que tu ne pourras pas partir avec Sam ce soir ? »

Oui, ça il lisait dans ses souvenirs, Peter s'était montré parfaitement clair, et Régis particulièrement furieux qu'elle ose même y songer. Déjà, c'était un miracle qu'Akira puisse s'y rendre, si Samantha n'avait pas risqué d'être recalée d'office sans sa présence, il aurait probablement subi le même sort qu'elle pour ces foutues raisons de « protection ».

« Heu…Tu veux quelque chose en particulier ? » Tenta-t-il complètement déboussolé.

Etre une enfant normale, évidemment, il voyait ça aussi, ce désir furieux, caché en elle. Elle désirait accompagner son amie dans cette épreuve, pouvoir hurler à plein poumons dans le stade, participer elle aussi un jour à un match de cette envergure. Elle ressentait le contre coup du choix de Twilight, se rendait compte qu'elle se situait à nouveau derrière des barreaux dorés. Exactement comme Sacha lui avait prédit.

Il sentait aussi que les pensées de sa porteuse dérivaient vers le petit frère qui allait naître. Régis avait beau lui apporter continuellement des nouvelles de l'état de ses parents, du fœtus, cela créait plus de souffrances que le contraire.

Miyu paniqua, chercha à trouver un autre sujet de conversation, pour éviter la crise de larmes. Il ne savait pas ce qu'elle avait, mais dès qu'elle se retrouvait seule en ce moment, à l'abri des regards, Eléanore pleurait. Même dans son sommeil, cela lui arrivait. Cet état d'esprit inquiétait davantage le fantôme, qu'elle arborait en présence de Sam, un sourire large, un rictus de façade.

« Salomée…Elle me fait pitié. »

Eléanore ouvrit enfin la bouche, ses lèvres sèches frémirent légèrement :

-Je croyais que tu la haïssais parce qu'elle t'avait ôté la vie ?

Miyu s'étala de tout son long, et haussa simplement des épaules :

« Oui, mais en même temps, maintenant, même si je lui en veux, c'est fait, comme tu me l'as dit. Puis elle me fait quand même pitié. »

Eléanore resta silencieuse. Fixant un point vide dans l'air alors que caninos dans ses bras avalait goulument la moindre goutte de lait. Puis doucement, dans un murmure, elle prononça :

-Est-ce que, moi aussi je te fais pitié ?

Miyu sursauta, il remercia le ciel de n'être plus une créature de chair, sinon quoi, il se serait fait mal en rentrant dans le mur. Il secoua la tête vivement, et lança violemment :

« Bien sûr que non enfin ! »

Eléa le regarda de biais, et il remarqua son teint pâle et ses cernes qui grandissaient de jour en jour, de même que les marques sur son corps. Elle sourit difficilement et déglutit aussitôt, comme rouillée.

-Je sais que….Tu penses que je devrais être d'autant plus joyeuse, pleine de vie…avec ce qu'elle m'a dit. Ce que j'ai vu…

Miyu s'assombrit, et s'affaissa. Elle contrôlait de mieux en mieux ses pouvoirs grâce à Salomée, et la fusion entre leurs deux êtres se montrait d'autant plus vraies, des deux côtés, ils ne pouvaient pratiquement plus rien se cacher, ils lisaient en l'autre comme en eux même.

« C'est juste que je…ne comprends pas ce que ça change, de savoir que tu mourras précisément le 15 mai de tes 16 ans. Tu savais déjà que tu n'en avais pas pour longtemps alors… » Bredouilla-t-il.

Eléanore s'étala et posa son visage entre ses mains. Fatiguée. Caninos gémit, se voyant privé de sa nourriture, il jappa mais sa dresseuse n'entendait plus ses plaintes.

-Je sais…mais C'est juste que…C'est pas…C'est pas naturelle de savoir quel jour je vais mourir…Bafouilla-t-elle.

Ses épaules tressautèrent, et une larme roula sur sa joue et elle céda :

-C'est juste que les jours passent si vite… Je les vois à peine passer ! Je pensais, je pensais qu'en me battant de toutes mes forces je pourrais déjouer un peu la maladie, avoir un sursis…Je pensais que je pourrais passer plus de temps avec Sam, Daniel et Lucas, en étant ici…Je pensais pouvoir participer à Twilight donner au moins un but digne à ma mort…Je pensais…

Elle tourna la tête vers Miyu et la voix engorgée, elle hoqueta :

-Je pensais avoir plus de temps…

Miyu se recroquevilla, touché indirectement par la tristesse qui s'emparait de sa porteuse. Et en dernier recours, il lui murmura :

« Et si tu essayais de méditer, ça te changerait les idées…Oui, et ça t'entraînerait en plus, comme Salomée nous l'a appris, comme ça, tu pourras encore entraîner Ash et les autres à distance…Je… »

Mais les mots n'eurent que peu d'impact sur Eléa, celle-ci, le teint blafard, les membres flasques, dépourvus de déterminations, refoula un spasme douloureux. Et elle ferma les yeux, plissa les paupières jusqu'à en avoir mal, jusqu'à ce que les larmes qui menaçaient de s'écouler repartent. Elle s'enferma dans son monde imaginaire, comme Daniel le lui avait montré, et se coupa du reste du monde, seule en face à face avec ses secrets qui la dévoraient.

Miyu contempla en spectateur impuissant et invisible. La peine l'étreignant.

S'enfoncer dans son propre chagrin, empêchait peut-être les sanglots de couler, mais désespérait, rongeait plus encore sa victime.

Il préférait encore quand elle fondait en larmes.
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-Bon je crois que c'est un au revoir.

Les paroles de Samantha se répercutèrent sans vraiment d'impact dans la salle. Entourée de Yuki, Lucas, Gold et Silver, la jeune adolescente, avec ses paquets, se tenait sur le seuil, face à ses colocataires.

-Ouais, ramène-nous une médaille ! Hein ! S'enthousiasma Cristal, enjouée. –Louka je compte sur toi pour hurler pour deux dans les tribunes en l'encourageant !

Les deux concernés rirent de bon cœur.

-Vu ton niveau, tu ne devrais pas rencontrer de problème. Analysa simplement Yoann, timidement.
-Oh, le stress peut faire beaucoup de dégâts aussi. Planta sans compassion Sunny devant son ami catastrophé.
-Elle a raison, mais bon tant que tu vomis pas, c'est que c'est pas encore à un stade trop grave, enchaîna Blake.

Samantha vacilla, les entrailles distordues. Livide, elle se tourna vers Eléanore, encadré par Régis, muet, qui se contentait de lui faire le signe de la victoire en guise d'encouragement.

La brune s'avança vers son amie et la dévisagea quelques secondes, celle-ci lui afficha un rictus de circonstance. Samantha elle-même émit un ricanement jaune très peu convaincant.

-Bon ! S'exclama Eléa, en apparence guillerette. –T'as intérêt à gagner sinon j'te jure que j'te fous une raclée à ton retour !
-Je ne doute pas une seconde de ma victoire contre toi dans ce cas là ! Se moqua gentiment Sam.
-Je t'ai battue la dernière fois !
-Mais je me suis entraînée entre temps !
-Moi aussi d'abord !
-Très bien la question est réglée vous ferez encore un match nul !! S'interposa Lucas en urgence.

Les deux filles reculèrent, avec une moue boudeuse, puis elles affichèrent des sourires sincères en approuvant :

-Ca me va.

Elles se serrèrent la main rapidement, et alors que Samantha s'en retournait, non sans avoir lancé une œillade sérieuse à Cristal pour lui rappeler son devoir de protéger Eléa, la concernée lança une dernière fois :

-Hey, j'organise une fête pour ton retour t'es prévenue ! Et un combat contre moi tant que j'y suis !


Samantha sursauta, et Silver traduisit bien le fond de sa pensée :

-Si ça tourne comme la dernière fois, je ne vais pas rentrer.

Akira prévint les adolescents de leur départ, en sortant Kaorine, et alors qu'il ordonnait la téléportation à Jadielle, le poids sur l'estomac de Samantha s'allégea. Elle ferma les yeux, rassurée. Tout allait bien se passer, après tout, dans sa vision, Lucas, Daniel et Gabriel étaient présents, donc avec les protagonistes si éloignés d'elle, rien de mal ne pouvait se produire.

Lucas percevant son malaise, lui souffla gentiment :

-Allez tout va bien se passer !

Il parlait certainement du tournoi, mais ses propos réconfortants lui firent un bien fou. En revanche, Silver et Gold envoyèrent des regards noirs au brun en retour et celui-ci abandonna toute idée de lancer les pétales de roses qu'il cachait dans sa poche pour un autre sketch. L'un comme l'autre étant prêt à défendre les intérêts de leurs sœurs respectives. Akira admira la joute des regards et soupira :

Le séjour n'allait pas être de tout repos.

Il ignorait à quel point il avait raison.

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L'infirmière Joëlle travaillait à la réception, le petit Claude assis sur le comptoir, triturait son tout neuf aspicot, tout en tâtant un peu la carapace de son Chrysacier. Depuis qu'il avait appris le retour prochain de Samantha, il ne quittait plus son poste, tout excité à l'idée de montrer le résultat de son attention pour ses amis créatures. La mère adoptive de Samantha en profitait un peu, au moins grâce à lui, elle pouvait s'absenter de son poste quelques minutes, il prenait avec application la moindre demande des dresseurs paniqués qui arrivait au centre et était même capable de placer les pokéball tout seul dans la machine.

Elle perçut la sonnette de l'entrée retentir une énième fois, et soupira : encore un étudiant de l'école, qui avant le tournoi, désirait un check-up complet de son équipe…

Pourtant quand le cri du petit Claude contredit totalement sa première hypothèse.

-SAMANTHA !

Le petit blond bondit sur ses jambes et se rua vers l'adolescente, brandissant fièrement ses Pokémons. La brune l'accueillit avec un sourire et se laissa assommer de questions sans vraiment y faire attention.
La mère et la fille se jetèrent une œillade complice, pleine de sens, et pour une des rares fois, l'infirmière sentit vivement le lien complexe les unir. Sans prononcer de mot, elles savaient ce que l'une pensait, et pourtant, le gouffre de l'habitude entre elles, les empêchaient de s'étreindre, de se parler.

Non, ce fut juste un regard de retrouvailles. Mais il signifiait tout, et valait plus que n'importe quelle phrase bidon. Elles se retrouvaient en pleine forme, juste heureuses de se revoir.

Samantha tapota la tête de Claude pour le féliciter d'elle-ne-savait-quoi, et avisa des présentations. Doucement, elle attrapa les bras de Gold, Lucas et Silver et s'approcha de sa tutrice.

-Maman, je te présente mes amis. Déclara-t-elle avec fierté. –Lucas, c'est le grand, je lui ai offert le ptiravi que tu m'as donnée.

Le concerné balbutia quelques présentations, intimidé. Mais la Joëlle n'en prit pas mouche, elle savait que sa fille ne pouvait accepter un Pokémon si emblématique des infirmières, de peur de croire accepter de ce fait ce futur métier irrémédiablement. Elle fut pourtant déstabilisée par la grande taille du gamin, qui le dépassait de quelques centimètres. Elle ignorait comment sa fille si petite, et si complexée à ce propos, ait pu se lier si fortement à un adolescent pareil, au point de lui confier un si bon Pokémon.

-Voici Gold, c'est le petit brun.
-Hey ! S'offusqua celui-ci.

C'est vrai quoi, il n'était pas si petit, il atteignait presque les 1m70 ! C'était une taille normale pour un homme en devenir. Puis Silver mesurait exactement la même chose –en vérité il le dépassait d'un centimètre et demi, mais ça, pour l'orgueil de Gold, il vaut mieux le taire.

L'infirmière ricana et salua l'adolescent avec plaisir. Puis son attention se porta sur le rouquin –Silver l'informa sa fille- qui restait.
Celui-ci, les yeux rivés vers une des baies vitrées du hall, qui donnait sur l'arène de la ville, paraissait très peu concerné par cette scène. Pourtant une évidence frappa alors la mère adoptive de Samantha, et cette constatation lui serra les entrailles :

-Ca alors, toi et Sam, vous avez le même regard…

Le roux, comme brûlé au fer, sursauta. Il pâlit si vite que l'infirmière sentit l'assurance renforcer le poids pesant sur son diaphragme. Ainsi donc, elle venait à peine de construire en semblant de lien familial avec sa fille, qu'on la lui volait, que ses vraies origines l'éloignaient irrémédiablement d'elle.

-Hein ? Tu trouves ? S'étonna Sam –J'ai vraiment un air si renfrogné ?

Gold ne put retenir un éclat de rire, tandis que Silver grimaçait. L'infirmière, la surprise passée, rigola de sa propre bêtise. Elle se faisait des idées décidément. La crainte continuelle de voir un étranger venir et enlever son rayon de soleil, sous prétexte qu'ils possédaient des gênes en commun l'horrifiait. Une colère et rancœur muettes existaient en elle, lui murmurant que personne ne pouvait réclamer ce droit. Après tout, elle s'était occupée de Sam, elle l'avait élevée, et aimée. Aucun inconnu n'était en mesure d'en dire autant.

Samantha passa rapidement outre cette remarque sans importance de la part de sa mère et lança fière :

-J'ai reçu un courrier après avoir prévenue l'école de la fin de ma quête des badges. Je vais faire le match d'ouverture !
-C'est génial ma chérie, je n'en attendais pas moins de toi. Tu vas donc te battre en double avec ton prof contre l'autre élève qui a obtenu les meilleures notes, c'est ça ?
-Oui. Répondirent aussitôt Yuki et Sam, mais sur des tons bien différents l'un de l'autre, le premier totalement blasée, le deuxième un peu tendu.

L'infirmière soupira.

-Sam, tu ne veux pas montrer ta chambre à tes amis ? Je vais préparer de quoi manger et parler un peu avec ton professeur en attendant.

La jeune fille hésita, puis après un moment de silence, elle finit par accepter, décidant que tant qu'à faire, elle allait en profiter pour montrer les autres chambres où ils allaient se reposer eux aussi. Alors que les adolescents disparaissaient dans le couloir, bordé de portes coulissantes en papier de riz, ils perçurent le commentaire indifférent presque anodin d'Akira :

-Au fait, votre fille est devenue une femme pendant le voyage.

Samantha piqua un fard monstrueux et une exclamation horrifiée, stridente se répercuta entre les murs :

-QU'AVEZ-VOUS FAIT A MA FILLE ?!

La jeune adolescente ne sut plus où se cacher, dire qu'il parlait simplement de ses règles...Akira avait décidément le don pour mal choisir ses mots dès qu'il faisait face à sa mère. Elle se croyait au fond du gouffre, tentant de mettre le plus de distance possible entre le hall et elle, quand Silver lui souffla :

-Ta mère est sympa.

Elle ne nota pas le son triste de son timbre, et répliqua instantanément, s'étonnant elle-même du naturel avec lequel elle prononça sa réponse après toutes les tares dont elle avait infligé l'infirmière :

-Oui, c'est la meilleure.

Sur ce, elle ouvrit la porte et les invita à entrer chez elle.

Sa chambre était assez petite en elle-même, carrée, elle contenait un bureau simple, bas de gamme, et un coin détente, avec pouf et petite Tv sur le point de rendre l'âme, branchée à un lecteur dvd tout aussi ancien. Les murs recouverts de papier peint unis, aux teintes saumon et jaunes, lui conférait pourtant un aspect chaleureux, renforcée par le tapis rouge qui camouflait la moquette délavée. Le lit semblait avoir été placé dans ce qui avait été autrefois une gigantesque cheminée, un rideau avait été placé pour permettre un peu d'intimité à l'alcôve, et ils purent discerner un semblant de petite armoire à vêtement dans le fond de l'âtre. Bien entendu des dizaines de livres et dvd de stratégies étaient entreposés sur le dessus du renfoncement, pour l'improviser en étagère. A part les notes de cours qui constellaient les parois hasardeusement, seule une affiche du dresseur masqué montrait la jeunesse du propriétaire des lieux.

Samantha rougit brutalement et se rua jusqu'à son bureau pour décoller le papier représentant en vérité son professeur, et elle jeta le bien dans un des tiroirs branlants avec honte. Puis elle se dirigea vers la fenêtre, près de la télévision, l'ouvrit et déplia les volets. Dans ce même geste, elle alluma l'engin antique qui commença à diffuser les nouvelles du village.

-Tu as une jolie chambre ! Se moqua gentiment Lucas.
-Une vraie chambre de rat de labo. Accusa Gold aussitôt en plaisantant.

Silver resta muet, mais il compressa son coude avec amertume. Il pouvait encore voir l'arène de Jadielle, à travers l'unique ouverture de la pièce. Ils avaient été si proches sans le savoir, et pourtant, ils constataient de plus en plus la différence de niveau de vie qui les séparait.
Pourquoi…Pourquoi avait-elle été la seule à bénéficier de cette chance ?

Il grimaça douloureusement, et Gold lui envoya une œillade compatissante. Tandis que Lucas confiait que sa mère, bien qu'un peu coincée, se montrait vraiment protectrice à son égard, le roux lui recula, et chercha à poser son esprit sur un sujet superficiel, pour éviter de sentir l'âpreté de la rancœur.

Dans le coin de la pièce, le présentateur t.v décrivait le tournoi de l'école de Jadielle, la photo de Samantha, et Akira s'afficha, avec en dessous, le nom des Pokémons qu'ils avaient déclaré utiliser à l'occasion, sûrement un moyen pour forcer les étudiants à préparer une stratégie. A sa suite, il vit une femme d'âge mur brune, avec la chevelure ornée de nattes, ainsi qu'un gamin au bandana. Armand et Lily.

Tous ignoraient à quel point ces photos anodines transmise sur l'émission locale allait bouleverser leurs existences.

A des lieux bien différents, deux personnes se redressèrent en contemplant la nouvelle, venant de reconnaitre les personnes qu'ils traquaient depuis si longtemps.

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Armand battait des pieds, dans la salle d'attente, plus que tendu, il ne savait pas où se mettre, et encore moins à quoi penser. Chacune de ses réflexions le ramenait au combat à venir, donc à la stratégie, donc à son opposant, donc à Sam et au sentiment d'invincibilité de leur dernier match. Victime d'un tract monstre, il percevait à peine le remue-ménage provenant du stade de l'école. Encore heureux, car savoir que plus de milles personnes s'installaient dans les gradins n'auraient rien arrangé à son stress.

Le jour-J arrivait enfin, cette fois, le dernier examen pointait le bout de son nez, s'ils réussissaient, ils pouvaient aller à la ligue Pokémon, avec un diplôme et faire leurs preuves en tant que futurs maîtres d'arènes.

Son professeur, Lily, qui boitait encore un peu, mais n'avait plus besoin de ses béquilles, le rejoignit. Elle bouscula des hommes vêtus de noir, s'excusa une seconde, puis s'assit sur le banc à ses côtés, soupirant bruyamment.

-Je n'ai pas réussi à trouver Akira et Samantha.

Alors, là, si elle savait comme il s'en fichait, voire il s'en réjouissait, rencontrer Samantha alors qu'il s'apprêtait à l'affronter ne pouvait que le mettre mal à l'aise. Quelle différence depuis l'école, dire qu'avant il inspirait la crainte à la gamine, maintenant, ils vivaient plutôt le contraire, il appréhendait le croisement de leurs regards.

-En revanche, devine qui j'ai trouvé ? S'enthousiasma son institutrice.
-Qui ? Bredouilla Armand.
-Tes parents ! Ils m'ont dit de te féliciter pour ta réussite, ils n'en attendaient pas moins de toi. Je leur ai dit que Sam t'avait battue d'un demi-point et que donc, tu étais deuxième, mais ils ignoraient jusqu'au nom de cette fille. Tu vois, tu te faisais des idées… !

Armand se figea, le souffle coupé. Comment ses géniteurs avaient-ils put oublier Samantha, ils lui avaient même accroché sa photo sur son stand de fléchettes, dans sa chambre, pour renforcer son esprit de compétition. Elle se moquait de lui !

Le directeur de m'école venait de finir son discours sur l'estrade du stade, annonçant le déroulement des activités, et il invitait les heureux élus livrer le match d'inauguration. Lily se dressa sur ses jambes et donna un petit coup de karaté dans les airs, avant d'inspirer profondément et de murmurer :

-Akira va prendre la raclé qu'il mérite depuis longtemps !

Puis elle se retourna enchantée, et lança :

-Allez Armand c'est à nous ! Et ne t'en fais pas, je combats avec toi en duo, tu ne risques rien.

L'adolescent en bandana se sentit encore plus mal à la suite de cette déclaration, et il eut l'envie soudaine de prendre ses jambes à son cou. Malheureusement ; son professeur lui saisit le poignet et l'entraîna avec lui. La lumière d'Avril l'aveugla et la bulle d'air qui bloquait sa respiration tripla de volume.

De l'autre côté Samantha n'était pas au mieux de sa forme elle non plus.

-JE VEUX PAS Y ALLER ! Hurla-t-elle en s'accrochant au bras de son professeur.
-MOI NON PLUS ! Enchaîna Akira, n'attendant que ça.

Gold et Lucas faisaient de leur mieux pour les pousser vers le terrain utilisant et usant tous leurs arguments. Silver bien plus pragmatique, avec ses cheveux attachés, caché sous une casquette, et une capuche en prime, les fixa longuement, atterré, son regard bleu argenté camouflé par ses lunettes de soleil.

-C'est votre moment de gloire ! Répéta Lucas en essayant de convaincre Sam.
-Vous allez pas me faire croire que vous avez le trac alors que vous osez faire des tounois dans une tenue aussi ridicule ! S'insurgea Gold envers Yuki.
-Ma tenue est très bien comme elle est !
-Je m'en fiche de mon moment de gloire, je ne veux pas me planter devant tous ce monde ! Balbutia Sam. –Et personne ne me fera changer d'avis !
-Moi non plus !
-Vous n'êtes qu'un flemmard ! Un maître de la glande ! S'offusquèrent les deux bruns.
-Bah vous voyez, pour ce prix là, je pourrais faire cet effort, mais là franchement, un combat en duo en 3vs3 qui va prendre la journée à cause des entractes entre les manches…Ca me saoule ! Expliqua le prof, bougon.
-Vous dites ça seulement parce que c'est aussi votre examen final pour devenir enseignant !
-Aussi.

Agacé, Silver consentit à ôter son casque de walkman de ses oreilles –de toutes manières ils criaient tellement fort ces deux là qu'il ne parvenait même pas à entendre la musique- et il lâcha :

-Faites comme vous voulez après tout.

Les yeux des protagonistes s'illuminèrent, trouvant en lui un nouvel allié. Evidemment, cette phrase n'était qu'une feinte pour mieux les faucher.

-Mais je sens qu'Eléanore va être furieuse en apprenant ça.

Les deux concernés blêmirent, et la seconde d'après, ils étaient en place dans le stade. Gold et Lucas n'en revenant pas. Mais après tout, pour avoir subi le visage diabolique de la gamine dans ses pires jours, ils pouvaient comprendre cette appréhension. Elle dévoilait par moment un côté pire que Silver.

Le roux, fut d'ailleurs un peu frustré que ce soit par trouille d'Eléa, et non de lui, qu'il était parvenu à les pousser jusqu'au terrain. Mais enfin, on ne pouvait pas tout avoir. Avec lassitude, il remit en place ses écouteurs, et s'installa sur le seuil de la porte, dans un angle mort de la Caméra. Gold assis à côté de lui, hésita, puis lui fila une petite tape encourageante sur l'épaule sortant :

-Allez, tu n'as rien à craindre, on a pris toutes les précautions possibles, Giovanni ne se montra pas.

Samantha avait demandé la permission au proviseur –qui l'avait à peine reconnue- pour qu'ils puissent tous s'installer là. Elle lui avait même passé la casquette et le chouchou pour sa tignasse. Elle et Gold avaient vraiment tout mis en œuvre pour qu'il ne se fasse pas repérer. Car, de retour dans sa ville natale, celle de son père, le danger atteignait son point culminant.

-Et même s'il le fait, il me passera sur le corps avant de te toucher. Acheva Gold, sûr de lui.

Silver grimaça.

Oui c'était bien ça qui l'inquiétait le plus.
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Christopher et Angèle se trouvaient en proie à un dilemme, grave, quasi existentiel. Un détail ne leur était jamais venu à l'esprit auparavant, mais là, ils se rendaient compte de leur erreur.

Il ne pouvait pas taper sur leurs ordinateurs portables tout étant assis à l'envers sur un sofa.

C'était ennuyeux tout de même, eux qui avaient envisagé de regarder le match dans cette position tout en travaillant. Non vraiment, ce détail bouleversait leurs plans de manière drastique.

-Vous avez raison, j'ai pleines d'idées bizarres qui me viennent à l'esprit assise comme ça ! S'étonna Cristal, elle, dans la même position, mais sur un fauteuil, des étoiles émerveillées dansant sur sa rétine.
Quoique les tâches opaques qui encombraient son regard devait sûrement être un appel au secours de son cerveau qui se noyait sous l'afflux de sang, songea Régis, assistant au spectacle.

-Je trouve que ça fait mal à la têêêteee ! Gémit Eléanore, gigotant à côté, de plus en plus distordue.

Yoann pouffa, tandis que Sunny et Blake camouflaient leurs rictus.
Soudain, le médium se dressa et pointa du doigt le téléviseur en ordonnant :

« Chut, écoutez ce sont les interviews des profs avant la bataille ! »

Une femme brune assez commune si on oubliait ses prunelles profondément dense, à la beauté complexe, tenait un micro, assez embarrassée et expliquait en balbutiant :

« Heu, je crois que mon élève a toutes ses chances, après tout, peu le sépare de sa rival et il a fini sa quête des badges avant elle !
-Et vous, quelles sont vos sentiments concernant la bataille à venir ? Demanda le journaliste.
-Moi ?
-Oui, vous allez affronter un de vos collègues en duo, pour un examen également, après tout.

Le regard de Lily car c'était bien elle, changea du tout au tout, un brasier de détermination illuminant son visage, elle serra le poing et lança avec défi :

-Akira va comprendre que sa vie est en jeu dans ce match ! »

Un rire amusé provenant du commentateur retentit, en revanche toutes les personnes réunis ayant rencontré un jour Lily comprirent évidemment qu'elle ne plaisantait pas du tout.

A Azuria, Shinobu eut d'un seul coup, très peur pour son frère et il songea : « Qu'a-t-il encore fait pour l'énerver à ce point ? ».

Le tour d'Akira fut bien plus rapide, le professeur, moins bavard, se contenta d'annoncer qu'il savait que Samantha était la meilleure étudiante de sa promotion, et quand on lui parla de son combat à venir, il afficha un rictus tendu, saisit par des sueurs froides.

« Je crois que je vais m'en prendre plein la face…Bredouilla-t-il –Lily est probablement aussi forte que moi, et là, elle a l'occasion de remettre le compteur à zéro… »

Eléa, pragmatique, ne put réfréner sa remarque, et elle siffla :

-Faux-cul.

Cela ne faisait aucun doute là-dessus.

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Il ne percevait plus aucun bruit, aucun son à l'extérieur de la tente. Dans son refuge sombre, feignant de dormir, il avait enfin obtenu un peu d'intimité. Lentement, essayant de ne pas émettre un seul son, il se redressa de sa couche.

Malheureusement, il s'appuya sur sa cheville, qui à force d'être frappée, avait recommencé à lui faire mal. Il grimaça, et se résigna à se rasseoir. Epuisé, le corps tout endoloris. Il reconnaissait les valeurs d'un entraînement aussi intensif, et même, voyait quelques améliorations, cependant…

D'une main distraite, il caressa le bout de sa chevelure, coupée au carré, maintenant, il ressemblait à son père trait pour trait, à son plus grand désarroi. Son géniteur avait beau lui expliquer que son ancienne coupe l'aurait gêné en situation critique, il n'arrivait pas à accepter ça. Il n'osait même plus se regarder dans un miroir.

Il ferma les yeux et inspira profondément.
Au moins, l'enfer s'achevait aujourd'hui, Peter leur avait enfin dit de revenir, il voulait demander un peu d'aide à Gabriel, pour vérifier une histoire d'ID dans leurs bases de données…Bref, l'importance restait que cela se finissait bientôt. Il en avait plus qu'assez.

Il allait bientôt revoir Eléa.

Il souffla profondément, simplement enjoué à cette simple idée. Puis il se figea.

Il allait bientôt revoir Eléa !

A nouveau son cœur se remit à battre la chamade, comme lors de ses grandes crises de trac.

A l'extérieur, la petite brunette surnommée Elza, entendit alors du bruit provenir d'une des tentes où Daniel était censé dormir à poings fermés selon la femme de Nathaniel, Barbara. Curieuse, elle passa la tête à travers la toile, et elle sourit devant le spectacle.

Le brun se grattait la joue, tout en fixant son Goboue, assis comme un roi sur l'amoncellement de sacs. Puis, hagard, il balbutia :

-Eléa…Eléa, je crois que…Enfin, je sais pas mais je crois que je t'aime.

Le Pokémon poisson envoya un pistolet à haut à la tête de son dresseur, et celui-ci geignit, trempé :

-Je saiis ! C'est nul.

Le poisson, très peu compatissant approuva vivement avec une exclamation bruyante.

-Je te remercie de ta sollicitude Goboue…Souffla Daniel, en s'ébrouant comme un chien, au plus bas.

Elza pouffa, ce qui trahit sa présence. Le brun fit volte-face vers elle, et s'empourpra. Elle le voyait rarement rougir ou être gêné, et elle le trouvait assez mignon dans ces circonstances. Elle regrettait juste que cela n'arrive pas plus souvent, il montrait une telle distance dans la vie réelle, elle en arrivait à croire, par moment, que tout lui était égal.

-Tu as entendu alors…Bredouilla Daniel.

Son regard vairon habituellement terne arborait le même éclat que lorsqu'il dessinait, ou qu'il entendait parler de l'histoire des arts et des Pokémons. Elza s'émerveillait de voir un adolescent au caractère si contrasté. Elle ne parvenait pas à croire Nathaniel quand il le traitait de Sociopathe, son ami Matthew en revanche, buvait chacune de paroles de l'adulte. Pour elle, c'était juste une personne lunaire, et perdu dans ses propres sentiments et dans le tourbillon d'aventures qui les emportait tous. Mais qui ne l'était pas ?

-Tu faisais de bruit, et je suis curieuse, s'excusa-t-elle. C'est qui, Eléa ? Demanda-t-elle, amusée.

Le brun soupira, et s'assit avec lassitude, très peu enclin à répondre. Mais Elza ne se laissa pas abattre, elle relança l'offensive aussitôt.

-Dis-moi ! Elle est jolie ? Gentille ? Douce ?
-Je ne crois pas non…Maugréa Daniel, dépité.

La gamine de dix ans sursauta et resta interdite.

-A vrai dire…Je ne sais même pas si je l'aime vraiment comme il faut.

Elza arqua un sourcil et le commentaire sortit, innocent :

-Parce que y-a une manière conseillée pour aimer les gens ?

La question parut chambouler l'artiste en herbe, qui se contracta, il leva les yeux vers elle et se rattrapa en se grattant la joue, embarrassé :

-Non…Enfin je sais pas…j'y connais strictement rien en fait.
-Alors pourquoi tu veux lui dire que tu l'aimes si t'es pas sûr ? Se renfrogna la brunette. –Tu sais que tu vas lui faire de la peine si tu te trompes !

Les lèvres de Daniel se pincèrent douloureusement et il murmura :

-Je sais. C'est bien ce qui me fait peur…Mais elle m'a embrassé avant que je parte, je peux pas ne rien dire là-dessus, non ?

Les yeux d'Elza s'illuminèrent.

-Tu t'es fait embrasser ?

Puis s'assombrirent aussitôt tandis qu'elle s'exclamait horrifiée :

-Et ça fait quatre mois qu'elle attend une réponse ?!

Daniel s'affaissa et Goboue secoua la tête, désespéré lui aussi par l'attitude lâche de son dresseur. Elza quant à elle, souffla, abrupte :

- Tu abuses ! Franchement à sa place, je te laisserai tomber ! C'est grossier de faire ça, la politesse c'est pas pour les caninos !

L'artiste leva la tête vers elle, étonné. Elle croisa les bras, et devant sa mine égarée, elle soupira et lança :

- Tu devrais lui dire ce que tu ressens vraiment. Je pense que c'est toujours mieux de jouer la carte de la sincérité.

Daniel se redressa. Elza soupira :

-Je sais pas, mais je trouve que c'est plus respectueux envers elle, non ? Moi, si un garçon était amoureux de moi –elle rougit brusquement et continua d'une toute petite voix, triturant une de ses mèches de cheveux- Je préfèrerai qu'il me dise la vérité sur ses sentiments… Hum.

Un silence s'abattit sur eux, durant lequel aucun des deux protagonistes n'osèrent se regarder dans les yeux. Puis brusquement un cri les ramena à la réalité, Gabriel appelait son frère pour qu'ils partent, enfin.
L'adolescent se remit sur ses jambes et attrapa ses biens, tout en accueillant Goboue sur son épaule. Il passa devant Elza pour sortir, et là enfin, il murmura :

-Merci.

La fillette sourit de toutes ses dents, puis emboîta le pas, annonçant : «N'espérez pas partir sans me dire au revoir ! ». Elle trottina jusqu'au rassemblement et vit Gabriel, avec son sac à dos et son balignon sur la tête. Le Pokémon champignon lui sauta quasiment dans les bras, pressentant les adieux, et le cœur d'Elza se serra un peu.

-Tu vas trop me manquer, petit chou ! Murmura-t-elle en lui caressant le bulbe.
-Tu peux le garder si tu veux.

La fillette sursauta. Elle observa le gamin à peine plus jeune qu'elle avec surprise. Celui-ci le regard rivé sur ses pieds, les joues rouges dénonçant la superficialité de son air buté, continua, embarrassé :

-Il t'aime bien, et tu le traiteras bien…

Elza rougit légèrement, et balbutia :

-Mais, je… C'est le tien, je ne peux pas !
-Maintenant c'est le tien !
-…

La brunette ne répondit pas. Elle se contenta de sourire tendrement, le visage enfoui sur son nouveau compagnon particulier. Elle avait du mal à croire qu'on puisse se séparer si aisément d'un de ses camarades. Elle rien que d'envisager pareille possibilité, ça lui brisait le cœur. Sa prise se resserra sur le Pokémon plante et elle savoura cette étreinte avec reconnaissance.

Gabriel en face d'elle, piqua un fard monstrueux et bredouilla avec une hargne faible :

-Ne…ne crois pas que je fais ça pour toi ! hein ! C'est juste que…C'est juste qu'il est bien avec toi…Et…Et Papa m'a collé son Gallame sur les bras pour me protéger donc je…Je…

Le Pokémon psy se mit au garde à vous et posa ses deux pattes sur les épaules des Kazamatsuri, dont les teints virèrent au bleu, très peu rassurés d'avoir ce Pokémon auprès d'eux. Nathaniel au loin se félicitait d'avoir confié la garde de ses précieux enfants à son Pokémon favori. Barbara plus soucieuse, se demandait sûrement comment les enfants allaient gérer cette intrusion forcée de leur père dans leur univers, mais comme à son habitude, elle se tût.

-B-Bon…On va y aller alors… ! J-je…Bredouilla Gabriel, regrettant son ancienne flegme. –J'espère ne jamais te revoir ! Lâcha-t-il dans un souffle.

Aussitôt, Daniel lui fila une pichenette sur le crâne et il gémit.

Elza ne put retenir un éclat de rire. Matthew son camarade derrière elle, l'imita, amusé et cela la poussa à lâcher, déterminée :

-Alors là, t'es fichu ! Tu vas voir, je vais participer à la ligue et devenir une championne ! Tu seras obligé de voir mon visage partout où tu iras ! Se moqua-t-elle.
-je crois que tu es coincé Gabby ! S'attendrit Barbara au loin, ravie d'assister à une scène pareille. –Tu vas être forcé de revoir Elza.

Le gamin émit un petit bruit, mis au pied du mur, plus encore parce que sa belle-mère était l'artilleuse qui le clouait sur place sur ce coup.

-B-Bon bien à bientôt alors ! Souffla-t-il.

En deux pas il se planta devant la petite Elza, celle-ci le fixa dans les yeux, assez surprise de sa proximité. Rapidement, Gabriel lui ficha une bise sur chaque joue et s'en retourna aussitôt auprès de son frère. L'information mit plusieurs secondes à faire son chemin ; et Daniel leva le doigt en soufflant un « Oh ! » étonné. Gabriel devint écarlate et il siffla un :

-Oh tais-toi, toi ! J'suis juste…Juste poli !

De son côté, Elza se figea un instant. Interdite, elle porta la main à sa joue et caressa brièvement l'endroit où Gabriel l'avait effleuré. Elle rougit légèrement et lui sourit.

-Fais bonne route, Gabriel. J'espère quand même qu'on se reverra.

Le petit génie sursauta, puis il détourna les yeux, empourpré, et balaya l'air de la main. Gallame prit ça comme un ordre et après un flash lumineux, il ne restait plus rien d'eux dans la plaine.

L'absence soudaine des enfants apporta un vide bien plus grand qu'à l'accoutumé, et Elza enlaça son nouveau Pokémon avec mélancolie, prise dans le souvenir de leurs aventures communes. Puis, le cœur ravivé, elle s'exclama :

-Et Matthew, devine-quoi ! Daniel est amoureux !

Non seulement le garçon de son âge sursauta, mais Nathaniel lâcha un « Ah bon ? » étonné alors que Barbara se plaquait la main sur son front, exaspéré qu'une telle évidence échappe ainsi à son amant.

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«Mesdames et Messieurs, c'est incroyable quel TALENT ! Ce match est absolument incroyable, la dextérité des dresseurs est vraiment époustouflante, quel match mes amis, quel match ! »

-Mais ta gueuuule ! Grogna Eléa harassée, plus qu'insupportée par les commentaires du présentateur dont la voix forte couvrait celles d'Akira et de Sam dans la mêlée.
Les autres spectateurs soupirèrent.

Entre elle et Cristal qui poussait des exclamations époustouflée à chaque moment clef de la rencontre, l'ambiance devenait palpable.

Régis contempla son amie d'enfance, de mauvais poil, le cœur gros. Il voyait la jalousie au fond de ses prunelles, et sa grimace ne permettait pas le doute : elle enviait sa rivale qui participait à une telle bataille.

« OH ARCEUS ! Quelle attaque de Cradopaud ! » S'égosilla le présentateur.

-Et si tu avais fermé ta grande bouche on aurait pu savoir quelle capacité il a utilisé ! CRETIN ! Répliqua aussitôt Eléa.

Cristal, remise à l'endroit, les poings serrés, se fit un plaisir de répondre à cette supplique muette :

-Tu sais Brasergali de Sam a utilisé un Abri pour se protéger de l'attaque hydrocanon du Tortank du gamin ! Et bien elle vient de lancer une ruse pour mettre un terme à cette protection.

Soudain elle poussa une exclamation enthousiaste en même temps que la voix-off du téléviseur.

-Nom d'un arcanin !

Staross avait remplacé Brasergali pendant l'abri, l'attaque qui l'avait recouvert d'une coque vert avait été si lumineuse, éblouissante -certainement renforcée par le pouvoir « lumiattirance » du staross- que personne n'avait pu voir le tour de passe-passe.

Ou peut-être avait-il saupoudré le tout d'une attaque camouflage pour être sûr de ne pas être repéré.

Le Pokémon feu, sortit de sa cachette, lança alors un pied brûleur sur le crapaud de Lily qui voltigea à l'autre bout du terrain. La capacité peau sèche de cradopaud se retourna contre lui, alors qu'il se régénérait en subissant des offensives eaux, il subissait le double face aux attaques feux.

Tortank envoya un jet d'eau glacé pour lui éviter un choc trop important et le soutenir un peu en lui redonnant un peu de vitalité.

Leurs opposants profitèrent de cet instant d'inattention pour frapper : Staross doublé d'une armure protectrice se jeta dans le torrent et lança une attaque fatal-foudre qui fit mouche.

Brasergali quant à lui lança l'attaque rapace qui cloua ce qui restait de cradopaud. Le Pokémon poison ne se releva pas.

Seul Tortank, qui avait les pattes plantées dans le terrain pour ne pas subir un recul pendant son attaque hydrocanon, avait encore un peu de forces. L'offensive en plein dans sa faiblesse n'aidait pas, mais au moins, il sa prise avec le sol lui avait permis de subit le plus gros comme un paratonnerre.

Visiblement, c'était la dernière action de la première manche, mais au lieu de se défendre, Armand et son Pokémon optèrent pour l'attaque. La torture rentra la tête dans sa carapace et celle-ci se mit à vrombir en fonçant sur ses proies. Cependant Samantha avait du prévoir cette option car elle ne se laissa pas décontenancé, alors que la créature tournoyait sur elle-même en envoyant des cascades surpuissantes, elle ordonna :

-Stratopercut !

Le Pokémon feu s'élança. Staross lança une rafale de météore pour couvrir les points névralgiques de la course de son coéquipier, pour lui éviter de prendre une douche, et Brasergali bondit. Le poing terrassa l'ennemi.

« Ca alors ! » Rugit le présentateur, emballé. « C'est incroyable ! Leurs opposants n'ont rien pu faire ! Quel match ! mes amis…Quel match ! »

-Gngagnagna…Siffla Eléa. –Evidemment que Sam a mené le match, elle connait par cœur ce type ! Elle pourrait même lui prédire ce qu'il va bouffer au petit déjeuner de demain !

L'assemblée soupira, et le téléviseur annonça une pause bien méritée pour les combattants.

Les commentaires fusèrent alors dans la pièce.

« Vous avez vu ce coup de la part du gamin ? C'était intelligent de combiner Laser glace à coud'krane ! Et cette Lily, j'ai bien cru qu'elle allait avoir Samantha avec sa boue-bombe, et en plus dans ce tour elle a touché Staross avec feinte ! Heureusement que le paresseux a utilisé soin, sinon c'était foutu ! –Oui mais en même temps, Samantha a fini par comprendre comment elle fonctionnait, l'autre prof, et après ce coup, elle n'a plus rien pu faire ! –Peut-être, mais enfin, c'était un jeu risque leur stratégie, entièrement basée sur peau rèche de cradopaud ! – Ca dépend, il savait que leur adversaire lancerait son staross au premier tour, donc ils immunisaient avec ça, deux de leurs Pokémons contre les attaques de Staross. En plus cradopaud a un move-pool qui possède pas mal d'attaque ténèbres. Ils avaient de grandes chances de remporter la mise en théorie. –Oui mais Brasergali en est devenu deux fois plus puissant avec cette stratégie ! – je suppose qu'ils pensaient qu'aussi fort qu'il était, il ne pourrait rien contre le Tortank du gamin… »

Sunny et Yoann étaient partis trop loin pour Eléa avec cette discussion technique. Blake attendri, lançait par moment de petites moqueries du style « c'est qu'il a un gros cerveau le nain ! » et ainsi de suite.

Eléa quant à elle, observa le téléviseur, concentrée, muette, comme si par la seule force de son esprit, elle pouvait faire passer les pubs à la vitesse de l'éclair.

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Samantha inspira profondément, ses oreilles entendant encore les ovations du public et ses tempes palpitantes. Une main sur son cœur, elle s'assurait qu'il battait encore. Silver à ses côtés, lui souffla timidement :

-C'était un beau combat.

Elle sourit de toutes ses dents :

-J'ai eu une de ces trouilles ! Monsieur Yuki m'a dit qu'il craignait deux Pokémons dans l'équipe de Lily, son Cradopaud et son Carchakrok…Alors t'imagine.
-Et bien, sa collègue a fait mouche, à tous les coups, elle enverra l'autre pour la dernière manche, comme arme secrète. Devina Silver.
-Oui c'est ce que je pense aussi, mais je crois que j'ai compris comment elle fonctionnait, elle utilise ses Pokémons comme une coordinatrices, elle mise beaucoup sur l'esquive et sur la nature de leurs capacités, mais en même temps, elle le fait à des fins offensives. Elle et Armand se sont bien trouvés, de vrais bourrins.
-Mais est-ce un véritable avantage ? Ton professeur a un jeu bien plus prudent, il n'attaque qu'au bon moment, et le reste du temps il te couvre pour que tu puisses jouer à outrance. Des coéquipiers différents sont plus recommandés, c'est vrai qu'il est plus dur de coordonner les mouvements, mais au moins, vous comblez vos faiblesses respectives.

Gold et Lucas mis à l'écart de la conversation, grimacèrent, vexés. Le dresseur de capumain essaya bien de lancer un « Exactement c'est pour ça que Silver et moi formons une bonne équipe ! » mais il se prit un tel vent que cela en dissuada même Lucas. Ils se résignèrent donc à observer les frangins, qui sans le savoir, pensaient presque de la même manière sur le terrain.

-Hey !!

Lily accourut vers les enfants assis sur le banc de touche et leur sourit fièrement :

-Magnifique manche, mais tu vas voir, Armand est loin d'avoir dit son dernier mot.

Elle tourna la tête, scrutant la foule, et demanda, avec déception dans la voix :

-Akira n'est pas avec vous ?

Samantha sentit ses entrailles se tordre, et une pointe de jalousie la gagner. Que voulait-elle à son professeur alors qu'elle se montrait si peu aimable avec lui il y avait à peine quelques mois ?

-Il est parti aux toilettes, informa Lucas, indifférent.

Lily frappa son poing dans sa paume, comme si c'était l'évidence même, puis répliqua :

-Merci beaucoup, je vais le chercher alors. Bonne chance pour le prochain round, d'ailleurs.

Et elle repartit aussi sec.

-Quand elle dit qu'elle va le chercher, elle veut dire, qu'elle va le suivre, jusqu'au toilettes pour hommes ? Songea à voix honte le rouquin.

Un silence suivit cette réplique.
C'était fort probable.

D'ailleurs, Lily pensait bien à cela, très peu pudique là-dessus –pas après leur relation- et elle se dirigeait vers la salle d'eau publique, prête à tout pour parler un peu, mettre les choses au clair avec son ami, sans se douter de ce qu'elle y découvrirait.

Akira non plus d'ailleurs, ne s'y attendait pas, il se lavait les mains tranquillement, essayant de reprendre un peu de contenance sans son masque. Il devait bien avouer, qu'il était plus simple de se la jouer avec cette plaque de bois collé sur le visage. Il n'avait guère l'habitude de supporter cette pression sous sa véritable identité et il se rendait compte, avec une certaine dose de morosité, qu'il se sentait mal à l'aise face à une telle foule. Pourtant, il en avait fait du cirque pendant ses années de scolarité, et devant des enfants, il n'était pas du tout nerveux. Peut-être était-ce le fait de se retrouver confronté à des adultes…
Après tout, il n'atteignait que 22 ans.

Cette constatation le déprima. Il n'avait tapé qu'un quart de sa vie ! Il en avait déjà marre.

Lentement, il se dirigea vers la sortie des toilettes tout en secouant ses poignets pour se sécher, et alors qu'il s'apprêtait à pousser la porte, il buta contre un mur invisible et s'étala à terre. Il gémit et massa son pauvre dos, tâtant du bout du pied la paroi qui l'avait ainsi bloqué.

-Mais bon sang, qui est l'idiot qui a mis ça là ? S'insurgea-t-il, se tenant son nez douloureux.
-C'est moi un problème ?

Une des cabines des toilettes s'ouvrit dans un grincement, un homme gras et aux épaules carrées s'en extirpa. Des cheveux blonds plaqués en arrière sur un crâne bosselé, une barbiche au bout de son menton, des yeux noirs, perçants et méchants, Akira le reconnut aussitôt, même s'il avait maigri depuis leur dernière rencontre : Méfisto.

Hésitant, piégé, il lança :

-Vous êtes timide au point de condamner les toilettes pendant que vous faites votre petite affaire ? Le monde est peuplé de coincés décidément.

Le professeur se croyait sincèrement hors de danger, après tout, le bandit ne l'avait jamais vu sans son masque de dresseur masqué. Pourtant, le chef d'Opale sourit machiavéliquement, et moqueur, il répliqua :

-Magnifique Staross.

Un frisson remonta l'échine de Yuki, dos au mur et une certitude le gagna : Il savait.

Il n'eut pas le temps d'en savoir davantage, il croisa le regard du cizayox rouge de son adversaire et ressentit un impact en plein milieu du ventre.

Une explosion souffla une partie du stade, toutes les fenêtres de l'étage explosèrent sous le souffle et Lily en tomba à la renverse, trop proche de son origine. Elle glissait sur le parquet, emportée par l'onde de choc, avec pour seule protection ses bras plaqués sur son visage, quand elle percuta une paroi. Elle jeta un coup d'œil en arrière et vit un monsieur mime en pleine œuvre, bloquant totalement l'étage.

Une peur familière s'empara de l'enseignante, et avant même qu'elle ait pu analyser la situation dans sa globalité, elle choisit son coupable :

Si elle lui mettait la main dessus, elle se promit de tuer Akira.
Parce que ce genre de coup, c'était forcément de SA faute ou elle ne le connaissait pas.

Apparemment, d'autres personnes dans le bâtiment, une fois la panique passée, eurent le même pressentiment. Et si Armand partit à toute berzingue pour essayer de retrouver son institutrice dans ce capharnaüm, Silver Lucas et Gold s'entre regardèrent et se tournèrent vers Sam comme un seul homme.

-Sam, reste cachée ici, et si ça se gâte, utilise Libegon pour fuir par les airs ici !

La brune sursauta, genoux à terre, se remettant à peine de la secousse. Elle ne put même pas en placer une qu'ils s'encouraient déjà dans les couloirs sans elle. Furieuse, elle croisa les bras et bougonna.

Elle remarqua la cohue dans les gradins, la masse humaine convergent vers les sorties de secours désespérément. Des hurlements apeurés et de pleurs surgissaient de partout, et le grondement lointain continuait de secouer la foule comme encore présente sous leurs pieds instables. Samantha avala sa salive de travers et pria intérieurement pour que sa mère s'en sorte.

Elle contempla, du seuil de la porte, le ciel bleu de ce mois d'Avril, qui n'annonçait rien de cette catastrophe. Au loin, il lui sembla voir Armand se diriger vers elle en courant.

Soudain deux bras puissants passèrent autour de sa taille. Son cœur se gonfla et elle lança, rassurée de sentir une présence auprès d'elle :

-Monsieur Yuki vous êtes revenus !
-Oui je suis revenu Holly.

Son sang se glaça, on lui plaqua un mouchoir puant sur le visage, et sa respiration se coupa. De toutes ses forces elle se débattit frappa des pieds mais ses forces la quittèrent peu à peu. La prise de l'étranger se relâcha. Ses jambes fléchirent irrémédiablement, devenue aussi faible que des tiges de coton, pourtant si pesantes…Elle chût sur l'asphalte, et le choc se répercuta dans chaque parcelle de son être, tel le bronze d'un gong martelé de coup de marteau. Il lui sembla que tout son organisme brûlant fusionnait avec le sol sans en goûter la fraicheur. Elle essaya de se redresser, mais ce fut comme si toute sa force, sa volonté s'était dissoute, collée au sol. Elle ne put esquisser un geste. Les battements rapides de son cœur faisaient vibrer sa peau, se répercutant en elle, rapides et stressés, jusque dans ses orteils.

Les lieux se teintèrent d'une auréole verdâtre, comme lors de l'attaque du Qg d'Opale, Armand se stoppa en pleine course, figé. Pourtant elle perçut un ricanement dans son dos et la voix siffla :

-Inutile Holly, tes pouvoirs n'ont aucun effet sur moi, je m'y suis préparé.

Elle ferma les paupières et serra la mâchoire, contusionnée de toutes parts. Un vague de frustration s'empara d'elle, remontant sa trachée palpitante sous des convulsions intérieures invisibles. Mais qui était cette Holly au juste ? Pourquoi tout le monde les confondait ? Dans un dernier effort qui lui parut insurmontable, elle fixa son agresseur sans nom.

Un homme assez vieux, aux cheveux châtains plaqués sur son crâne, et au regard aussi dur que la glace. Sa peau basanée accentuait la noirceur de ses pupilles, une immense armoire à glace, voilà ce qu'il était, un colosse immense affublé d'un costume orange de mauvais goût.
Un homme dont le visage était placardé partout dans Jadielle, la ville dans laquelle elle avait passé son enfance : Giovanni.

La terreur s'éteignit en elle et sa vision se brouilla.
Tout s'assombrit.