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» Auteur : fan-à-tics - Voir le profil
» Créé le 26/07/2009 à 22:31
» Dernière mise à jour le 26/07/2009 à 23:37

» Mots-clés :   Présence de personnages de l'animé   Présence de poké-humains   Présence de shippings

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Episode 30 : Un choix de vie.
-chapitre 30-

L'aube éclaira lentement l'horizon, ses doux rayons pourpres colorèrent la mer infinie, la lumière auréola la silhouette floue du port au loin. Une faible odeur rance, salée, encombrait les rues, piquant les yeux.

La citée balnéaire dormait encore paisiblement, seuls quelques bateaux rentraient paresseusement sur les quais, ou quelques voitures aux taules écaillées, usées par l'air marin, crachotaient en se hissant difficilement le long de l'avenue principale.

Christopher et Angèle, suivis de Silver, marchaient, hésitants. Dans leurs sacs reposaient sereinement les pokéball du roux, la blonde tenait celui qui les avait sauvés par les poignets, sans trop de vigueur ou de volonté. Ils jetaient souvent des coups d'œil en arrière, en direction du centre Pokémon qu'ils venaient de quitter. Là-bas, Gold sommeillaient encore, épuisé, Samantha, Eléanore et Akira de même très certainement. Ils ignoraient encore tout de leur départ, ils allaient probablement trouver un simple mot sur le lit du roux, n'ayant du sens que pour le membre de twilight.

-Vous êtes sûr de ne pas vouloir de l'aide de monsieur Gold ? Ni de vos Pokémons ? Balbutia le jeune homme, bizarrement, toute sa foi, son admiration pour Opale était occulté sous la force de son inquiétude.
-Certain. Répéta froidement le roux, une énième fois. – ce n'est pas avec vos petits Pokémons de compagnie que vous réussirez à survivre dans cette Team, vous me les rendrez lors de mon évasion si jamais vous décidez d'intégrer cette organisation définitivement, mais dans ce cas, attendez vous à la voir démantelée dans quelques années.

Les deux bandits baissèrent leurs têtes, penauds. Ils avaient conscience de cela, mais en même temps, que pouvaient-ils bien faire d'autre ? Ils n'avaient pas les capacités pour s'imposer dans le monde Pokémon, et se ranger du côté du bien n'avait réussi ni à leurs parents, ni à leurs amis d'enfance. Avaient-ils réellement le choix ? Christopher disait souvent que la fortune les attendait chez ces voleurs, alors, s'ils pouvaient amasser assez pour subsister, et ensuite s'enfuir avant que tout ne s'effondre…Malheureusement, le jeune homme lui-même ne semblait plus y croire, et Angie désespérait de devoir livrer le roux à ces monstres.

-Dans le cas contraire…Et si je m'en sors vivant….continua doucement Silver sans les regarder.

Les deux brigands grimacèrent à cette simple idée, mais ils fixèrent leurs « boss », avec curiosité.

-Oui, si je m'en sors vivant, alors je demanderai à ce qu'on vous intègre dans Twilight, vos compétences ne seront qu'appréciées…Même si l'organisation n'a pas les moyens de payer tout le monde, j'essaierai de convaincre Peter de vous verser un salaire suffisant.

Les pupilles s'écarquillèrent puis s'illuminèrent de reconnaissance, de joie. Christopher voulut étreindre le roux pour montrer l'étendu de sa gratitude mais celui-ci le repoussa avec son pied, n'appréciant guère ce genre de marque d'affection.
Une fois les deux calmés à coups de pics aiguisées du fils du boss, ils reprirent doucement leur route. Ils débouchèrent aisément sur une clairière isolée, le vent engorgée d'eau avait donné aux arbres environnants une vigueur peu commune, les feuillages crépitaient sous sa bise au dessus de leurs crânes, les branches se heurtaient dans un va et vient languissant contre un mur de ciment imposant. L'air du large laissait ses traces un peu partout, pourtant le bâtiment devant eux, aussi décrépi qu'il fût par le sel et les assauts répétés du bosquet derrière lui, dégageait une certaine puissance. Un écriteau large, se dressait sur une façade longue et grande, rectiligne, parsemées par de rares fenêtres, on pouvait y lire : «Industries Opale ».

Bien entendu il s'agissait d'une couverture, toute le monde savait cela, même le gouvernement, mais l'ampleur de l'organisation, sa place même dans le marché noire, empêchait quelconque offensive d'anéantissement. La police de la ville devait se mordre la langue à chaque fois qu'elle contemplait cette bâtisse qui la narguait.

Un homme se tenait déjà devant une entrée dissimulée par les buissons, tout en acier, elle paraissait indestructible. Aux pieds de l'homme, une grille basse laissait entrevoir la cave du Qg, froide, une odeur putride de mort qui s'en échappait. Plus que la brise de cette mer proche qui s'engouffrait dans les sous-bassement du bâtiment, ce fut cela, qui fit frissonner Christopher et Angèle. Une voix venue d'outre-tombe les ébranla, mais un coup vif de la tête de Silver les calma plus ou moins. Le sbire d'opale, un grand brun barbu, aux allures orgueilleuses, les accueillit indifférent.

-C'est vous qui avez, des soi-disant infos à nous remettre ?

Il contempla de haut en bas les personnes devant lui, leur accordant visiblement très peu de crédit. Ses yeux s'attardèrent cependant une brève seconde sur les voleurs, il fronça les sourcils, se demandant brièvement où il avait pu les voir auparavant.
Bien sûr, il ne sut jamais qu'il avait devant lui les contacts du Bourg Palette qui l'avaient laissé tomber, avertissant même la police plus ou moins volontairement. Les deux concernés, eux, rappelons le, n'avaient aucune mémoire visuelle, et ils ne le surent jamais non plus.
Angèle trembla comme une feuille, cédant comme de coutume sous la pression, Christopher contint un mélange de peur et d'excitation, pour lancer :

-Nous avons bien mieux que ça. Voici le fils du boss de la Team Rocket.

Il jeta sans ménagement Silver devant le sbire, s'excusant mentalement de son acte, mais le roux joua très bien son rôle et il tenta de répondre par un regard intimidé, vaincu, à ses « kidnappeurs » –ce qui n'était pas son fort. L'homme eut un rictus, d'abord, un pouffement : « encore une fausse alerte » devait-il penser. Néanmoins, quand il observa le visage de Silver de plus prêt, qu'il soupesa lentement le pour et le contre, il recula et appuya sur un interphone caché par une fausse paroi. Il discuta quelques minutes à voix basse avec un interlocuteur invisible, puis tapa du pied jusqu'à ce qu'un clic sinistre venant de la porte ne résonne. Un autre sbire arriva à son tour, encadrés par toute une tripotée de subordonnés arrogants. Vieux, les cheveux grisonnants, les lèvres retroussées, il aboya hargneusement à ce qu'on lui montre ce « gamin ».

On attrapa Silver par le bras, Angie gémit quand elle du le lâcher, et elle retint un sursaut quand on tira si fort sur son épaule que le roux décolla de terre. Le vieil homme saisit le visage de Silver entre ses mains, et ses yeux se plissèrent méchamment, lançant des éclairs.

Il y eut un blanc, un silence tendu et insoutenable. Christopher et Angèle se retinrent de crier de frustration. Arcéus, que ça pouvait être long ! Ces types tenaient dans leurs paumes leurs avenirs à tous, et ils prenaient leurs aises, comme devant une tasse de thé et des gâteaux secs !

Puis doucement, presque sournoisement, un sourire s'étira sur la face du juge, il susurra avec délectation :

-Tu as les mêmes yeux que ta mère toi, même ton expression est la même…Ne fait pas le fier, on te cassera comme on l'a fait avec elle.

Les prunelles de Silver étincelèrent imperceptiblement. Le sbire se tourna vers ses collègue et émit un sifflement exaspéré en lâchant : « Embarquez-le ». Il contempla ensuite Angie et Chris avec dégoût. Enfin, le moment était arrivé, ils allaient être intégrés dans Opale, et ensuite ils n'avaient plus qu'à leur voler leurs données et à créer une ouverture au roux pour pouvoir s'échapper. Les adultes frémirent, impatients, leurs poitrines s'engorgèrent de fierté malgré eux. Tout marchait comme sur des roulettes. Le vieil homme ouvrit la bouche, et lança indifférent :

-Tuez-les.

Ils avaient oubliés qu'ils n'avaient jamais su tenir sur ces machins à roulettes. L'ordre fatal avait à peine atteint leurs oreilles, à peine retentit, que la voix de Silver, paniquée, le rattrapa, plus impitoyable encore, ne supportant aucune réplique, une injonction pressée par le temps, par la logique :

-Angie, Chris, fuyez !

Et les deux voleurs obéirent, ils s'encoururent dans la forêt sans un regard en arrière, et ils disparurent avec leurs poursuivants.

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-Banzaiiiiii !

Un cri strident perça les airs, immédiatement suivi d'un plouf, et d'une gerbe d'eau éclatante.
Les gouttelettes aspergèrent sans pitié les pauvres vacanciers sur leurs pédalos. Une tête émergea du liquide avec délectation, aspirant une bouffé d'air salvateur, riant à moitié, encore piquée par cette sensation de flotter dans le vide.

« C'est génial ! On recommence ? »

Eléanore, en maillot de bain, nageant avec plaisir, leva les yeux vers Miyu. Celui-ci souriait de toutes ses dents, ses yeux d'ors pétillants d'enthousiasme. Il pointait avec envie le pic rocheux, l'espèce de falaise haute, découpée au couteau par l'érosion millénaire, de laquelle la jeune fille venait de plonger. Evoli et Feurisson la regardaient d'ailleurs avec inquiétude, se remettant à peine du choc de voir leur dresseuse risquer si aisément la mort en sautant comme ça d'un plongeoir naturel d'une dizaine de mètres.

La gamine eut un hoquet de contentement, elle avala la tasse et la recracha immédiatement. Son Pokémon feu se pencha un peu plus en avant, tâtant la terre, pour être sûr qu'elle ne céderait pas sous ses pattes. Héricendre avait évolué le veille même, lors du match de l'arène contre le magneti, il était encore peu à l'aise avec sa nouvelle forme, pourtant si craquante aux yeux de l'enfant, après tout, grâce à lui et à Evoli, elle avait un nouveau badge en poche.

-Eléa ! Tu pourrais faire attention quand même ! Je suis trempée !

La voix agacée de Samantha sonna avec dureté à ses oreilles, un sourire orna son visage, elle fit demi-tour et contempla son œuvre fièrement.
Sur une sorte de planche flottante aux couleurs criardes, ornée d'un toboggan minuscule et de deux sièges affublés de pédales, Sam les mains sur les hanches, fulminait vêtue dans sa robe légère, suintante d'eau de mer. A ses côtés, un sur la seule attraction du pédalo, Gold tripotait son pokématos, en short, et Yuki faisait la sieste dans l'ombre des enfants. Devant la face rouge de colère de son amie, la jeune fille ne put s'empêcher de lancer :

-Hé patate, la mer c'est fait pour se baigner, pas pour bronzer !
-C'est fait pour les deux, andouille, sinon les usines de crèmes solaires feraient faillite, réfléchit bon sang ! Comment as-tu pu avoir ton maudit badge avec un cerveau pareil ?! Répliqua Sam.

Elle disait cela sur le ton de la plaisanterie, sans rancune, elle l'avait eut du deuxième coup, son badge. Elle avait voulu jouer avec le feu, et tenter son premier match avec Wattouat et Galifeu, elle s'était donc brûlée. La défaite ne l'avait pourtant pas découragée, et le lendemain, répétant en boucle la technique du champion Bob, elle lui avait mis une raclée bien méritée avec son Kraknoix, son starter, et son farfuret. D'ailleurs, les Pokémons fêtaient leurs victoires sur la plage, dans la crique où les dresseurs venaient de faire une halte, non loin de la plage publique.

Le Capumain de Gold monta sur la tête de Sam et émit un rire moqueur avant de la pousser à l'eau sans ménagement. Celle-ci poussa un hurlement strident qui réveilla Akira en sursaut. Il vit tout éberlué son élève se disputer avec un singe, et se demanda s'il ne rêvait pas encore.

-Bien joué Macaque ! Rit pleinement Eléanore, en coulant davantage son amie par taquinerie.

« Et…Et ? Qui lui a donné cet ordre, hein ? » Insista Miyu en volant au dessus du pédalo, mais l'adolescente l'ignora royalement, et aida à Sam à reprendre son souffle, paniquée.

-Tu pourrais pas tenir ton Pokémon ! Brailla l'élève à l'adresse du brun.
-Hn.

Ce fut tout qu'elle put obtenir d'un Gold, décidément peu loquace. Sa dépression s'était accentuée sévèrement depuis que Silver, Christopher et Angèle étaient partis de leurs côtés pour remplir quelques obligations. Le groupe ne les avait plus revus depuis deux jours, le premier matin, alors qu'ils se levaient en sentant le délicieux fumet que préparait une des tantes de Samantha, ils avaient trouvés un mot rapide sur le lit du roux. Si au début, le brun délaissé avait piqué une colère digne d'un ursaring, son état s'était lentement dégradé, et depuis la victoire de Sam, il ne prononçait plus une phrase concrète, triturant sans cesse son pokématos oméga avec anxiété.

Les filles l'ignoraient, mais il passait et repassait sa dispute avec le roux et priait de toute la force de ses remords, pour que cela ne soit pas la dernière.

Eléanore et Samantha, beaucoup moins inquiètes, et informées également, ne se souciaient que peu de leurs disparitions. Ils reviendraient forcément. En attendant, elles fêtaient leurs victoires en s'offrant de belles vacances à la plage, et en faisant du tourisme. Avant de louer un pédalo et d'aller s'isoler dans ce coin, le groupe avait d'ailleurs visité le fan club Pokémon et le musée de la pêche.

Akira s'étira longuement, puis il se leva avec précaution, ayant très peu envie de tomber à l'eau, même si son staross rodait prêt de l'embarcation. Avec douceur, il enleva des mains du brun l'appareil électrique, et murmura :

-Ne t'en fait pas, ils finiront par appeler, profite toi aussi de la plage.

Et il le poussa mine de rien, le garçon glissa sur le toboggan et fit un vol plané pour le moins artistique, son Pokémon se fit un plaisir de laisser la tête de Sam tranquille pour venir chercher des poux à son vrai dresseur au bord de l'hydrocution.

Pendant que Gold sortait de son mutisme pour crier au meurtre, Eléa elle, sortait simplement de l'eau pour faire quelques pas dans le sable fin. Elle n'aimait vraiment pas le sable, ça collait et ça s'infiltrait partout, en revanche ses Pokémons eux adoraient. Sa camarade en fut même abasourdie. Reptincel s'était creusé un tunnel peu profond, et il dormait avec sous cette couveuse éparse, extrêmement chaude. Eléa lui avait ordonné de remonter sa queue pour éviter tout danger, et elle se tenait droite comme un « i » alors que le lézard rouge rêvait. Caninos s'amusait d'ailleurs à la titiller, pour qu'elle exécute le mouvement répétitif des pendules, effrayé il bondissait en arrière dès que le membre s'approchait, et revenait à la charge curieux, dès qu'il s'éloignait.

Les Pokémons de Sam, eux aussi, s'occupaient entre eux, de toutes évidences, ils essayaient de construire des châteaux de sables, mais si Farfuret et Galifeu montraient un réel talent, wattouat ne parvenait qu'à faire frémir les grains, secoués par l'électricité Statique, et léviator balayait ses édifices plus qu'il ne…les édifiait. Kirlia et Kranoix observaient ce désastre qui menaçait de tourner en une bataille générale avec un œil avisé.

Pilou, Evoli, et feurisson se ruèrent vers leur dresseuse, et elle passa l'heure suivante à jouer avec eux, et même si ses Pokémons feu refusèrent de sauter avec elle du haut du pic rocheux, elle parvint tout de même à entraîner Sam, et ses autres créatures. Pendant toute l'après-midi, Sam ne pensa pas une seconde à l'état de santé de son amie, elle se contenta de jouer pour la première fois avec elle, se surprenant à apprécier cela, à même préférer ces activités au travail perpétuel qu'elle s'imposait.

Quand ils reprirent leurs routes, rendirent le pédalo à la boutique et entamèrent le chemin du retour vers le centre Pokémon, le crépuscule teintait déjà le ciel d'un couleur écarlate, la mer sembla s'empourprer, une étendue sanguine s'étendait sous leurs pieds. Les enfants apprécièrent le spectacle innocemment, naïvement. Seul Gold eut un sursaut de dégoût anticipant les évènements à venir, voyant cela comme un mauvais présage.

Il n'arrivait pas à oublier cette fameuse dispute, et il s'en voulait. Autant parce qu'il savait, que c'était trop tard, que rien ne changerait les choses, que de toute façon le roux ne méritait pas tant de considération de sa part, que ce n'était pas normal de s'inquiéter à ce point pour lui….Autant, autant il sentait qu'il aurait du insister, qu'il aurait du empêcher son ami de partir dans cet état, drogué, et il ne savait quoi d'autre…

Le brun posa son regard sur les filles, inséparables, elles discutaient tactique pour leurs prochains match, elles avaient déjà combattu une dizaine de dresseurs chacune dans la journée, quelques fois victorieuses ou perdantes, et elles espéraient déjà une nouvelle confrontation. Elle devait se réjouir de refaire équipe ensemble.

Gold se renfrogna. Pourquoi, pourquoi toutes ses pensées le guidaient vers Silver et leur dispute ? Il tenta de s'excuser lui-même. Il s'en fichait éperdument que le roux ne soit pas son ami, ils restaient coéquipiers, ils devaient se soutenir l'un l'autre ! Il secoua la tête, non ce n'était pas ça. Il sentit le mal de crâne poindre. Il respira une grande bouffée et utilisa la méthode de sa sœur pour éviter ce maux.

« Imagine que ton mal de crâne est un écrémeuh qui broute paisiblement dans les prés d'Oliville. Tu la vois ? Elle, cette vision sereine dans le crépuscule. Bien. Maintenant tue cette maudite vache à coup de hache découpe la en morceau et monte une chaîne d'entreprise spécialisée dans la viande d'écrémeuh ! Maintenant t'a toujours mal au crâne mais au moins t'es riche ! ».

Il grimaça. Il avait oublié la chute de la méthode qui découlait de l'aversion de Cristal pour ce Pokémon vache…Simplement parce qu'elle avait gaspillé tout son stock de baies pour soigner un de ces spécimens dans un ranch, tout ça pour juste rien, même pas un merci de la part des gérants. Le monde devenait bien rustre.
Comme Silver.

AAHH ! Il en avait assez de penser à ce type ingrat !

Il entra dans le centre Pokémon d'un pas lourd et la tête comme une enclume. Il ne comprit pas immédiatement ce qu'il vit. D'abord il remarqua que la tante de Samantha se précipitait vers elle, blanche comme un linge, et l'adolescente blêmit, ses yeux s'écarquillèrent et elle balbutia :

-Q-qui ?

L'infirmière Joëlle passa une main sur sa coiffe, paniquée et répondit peu sûre d'elle :

-La personne consciente a dit qu'il s'appelait Christopher…Et l'autre, Angèle je crois.

Le temps que l'information parvienne jusqu'à son cerveau meurtri, Samantha se ruait déjà dans les couloirs du centre, l'anxiété le gagna soudainement, comme un choc électrique, et ses jambes bougèrent d'elles-mêmes. Ses pensées furent comme laissées sur place, loin derrière lui, pendant quelques secondes il n'intégra réellement que les couleurs criardes du centre qui s'étrécissaient, disparaissaient dans sa course. Le bruit de la porte claquant derrière lui résonna encore longtemps dans un coin de son crâne.

Il avait tellement pris l'habitude de voir les deux voleurs propres comme des sous neufs, dans leurs habits de dentelles à la mode des années 60 qu'il ne les reconnut pas de suite. Couverts de boue, de plaies, Christopher tremblait comme une feuille, sa tenue si…euh, élégante- pendait en lambeaux, ses cheveux en batailles, lâches, et même raccourcis de quelques centimètres, avaient pris la teinte bourbeuse, poreuse de la terre en forêt. Sa face blême et les cernes sous ses yeux gonflés indiquaient qu'il n'avait certainement pas dormi depuis son départ.

Angie, allongée sur le sofa de la salle de repos, dans le même état que lui, gémissait dans son sommeil, une blessure purulente à son épaule battait un rythme incertain, le sang coagulé ne dissimulait pas encore les traces de brûlures dont le pourtour de la chair à vif. Samantha aux côtés de l'infirmière, examinait avec inquiétude la meurtrissure. Ses doigts n'osaient pas la palper, de peur d'aggraver encore la santé de l'ex bandit. Eléanore, droite, pétrifiée par ce spectacle, fixait avec stupéfaction la blessée.
La poitrine de Gold se compressa, l'image devant lui se substitua à celle de ses pires cauchemars, il imagina Silver à leur place. Il sentit ses jambes se dérober sous son poids. Sa respiration s'arrêta, et son cœur fit une embardée dès que la voix d'Akira Yuki, vibrante, lança gravement :

-Mais qu'est-ce qui vous est arrivé ?

Christopher se redressa dans un sursaut terrifié, son regard se posa alternativement sur Gold à terre et sur le professeur autoritaire, mais ses mots moururent dans sa gorge avant même qu'il ne puisse proférer un son. Le monde se voila devant lui. Le soulagement d'être enfin parvenu ici, d'avoir ramené son amie d'enfance en sécurité, avait fait tomber l'adrénaline, et la fatigue venait de le frapper, l'enfermant dans son emprise impitoyable. Akira rattrapa l'adulte juste à temps avant que sa tête ne heurte le sol. Un frisson lui remonta le long de la colonne, Eléanore vit même ses cheveux se dresser sur sa nuque sous la pression.

-Eléa dépêche toi d'appeler l'hôpital ! Cria-t il.
-Hein ? Bafouilla la concernée prise de court.
-L'hôpital tu attends quoi qu'ils meurent tous les deux ? Hurla le professeur.

Cette menace percuta l'adolescente avec une telle force, qu'elle ne parvint même pas à répondre par un hochement affirmatif, sa bouche se tordit, ses yeux désespérés quittèrent ses compagnons de route, et elle s'encourut dans le couloir pour trouver un téléphone.

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A quelques lieux de là, l'instigateur du drame, un homme imposant, à la carrure carrée, aux épaules larges et puissantes, se tenait assis dans un fauteuil haute gamme. Les pieds sur son bureau d'olivier, une main caressant son début de barbe blonde, se délectant de cette surface rugueuse entourant son menton droit, l'inconnu arborait des cheveux clairs plaqués en arrière sur son crâne bosselé, quelques mèches éparses tombaient devant ses pupilles noires, et l'arête de son nez, une cicatrice indiquait à quiconque qu'il avait déjà été cassé à plusieurs reprises. Son costume chic laissait croire qu'il s'agissait là d'un homme d'affaire prestigieux, et son embonpoint léger encourageait cette théorie. Mais il n'en était rien.

Des doigts potelés enclenchèrent son ordinateur dernier cri, l'écran devant lui s'illumina, puis fut découpé en plusieurs fenêtres distinctes. L'homme pianota sur son clavier quelques minutes, et il jeta un coup d'œil à une des vignettes qui montrait une ombre immobile, étalée dans un coin poisseux d'une prison sordide.

Ses cheveux roux se confondaient avec le liquide incrusté dans le béton, on lui avait retiré ses vêtements et il ne portait plus qu'un pyjama sale déchiré, devenu compact, imbibé le sang séché. Grand bien les avait pris, car dans les coutures de la veste, une tige de métal avait été placé, idéale pour crocheter la serrure de sa cellule. Un de ses bras avait déjà été réduit en miette, pour lui faire passer l'envie de fuir, gonflé, il pendait lamentablement sur l'asphalte. Cela ne l'avait pas empêché de profiter d'un moment d'inadvertance de ses geôliers pour filer, heureusement, les sbires l'avaient rattrapé quelques mètres plus loin, alors qu'il fouillait une par une les salles du cachot, comme punition cette fois, on l'avait directement emmené dans la salle de torture.

L'homme monta le son de son engin pour percevoir le son rauque de sa respiration. Il sourit, de toute évidence il vivait encore. Une sonnerie le détourna de son divertissement du jour, et il se tourna vers une nouvelle fenêtre qui apparaissait.

Le visage sévère de Giovanni s'afficha, propre, il ne semblait pas le moins du monde paniqué. Au contraire, il eut un rictus fier et lâcha avec orgueil :

-Alors Méphisto ? Mon fils ne parle pas comme tu le souhaiterais ? Ou alors tu as compris qu'il ne savait pas grand-chose de compromettant ?

Le visage du maître chanteur se ferma, son poing s'abattit sur la table avec force et rage.

-Nous tenons ton fils Giovanni, abandonne cet air victorieux ! Ce n'est qu'une question de temps avant que la Team Rocket ne soit colonisée par Opale. Que cela soit toi ou lui qui cède le premier.

Un rire sinistre lui répondit.

-Moi ? Rigola le boss des Rocket, comme si c'était la chose la plus stupide qu'il eut jamais entendu. –Et pourquoi céderai-je ? Pourquoi je vous livrerai mes secrets ?
-Parce que sinon tu ne reverras pas ton fils ! S'offusqua Méphisto. –Tu as perdu ta femme de la même façon, tu tiens sincèrement à ce qu'il subisse le même sort qu'elle ?

Giovanni de l'autre côté de l'écran se renfrogna, son interlocuteur poussa un soupir digne. Cependant le retrait du chef des Rockets ne fut qu'une feinte, un rictus orna de nouveau sa face narcissique et il déclara, presque sur un ton revanchard, comme un gamin qui veut faire éclater la vérité :

-Si tu as pu capturer Holly c'est seulement parce que je l'ai bien voulu. Et puis, si c'est pour que tu termines le travail de la même manière, c'est vrai que je devrai m'inquiéter, je n'ai pas envie de retrouver son gosse désobéissant sur mon chemin.
-Qu'est-ce que cela signifie ? S'emporta le maître d'Opale, écarlate.
-Cela signifie que notre conversation est terminée. Fait ce que tu veux de lui ça m'est égal, tue-le si ça te chante, tu n'en tiras aucune gloire.
-Quoi ?! Hurla Méphisto.

Mais l'homme ne l'écoutait déjà plus, il se pencha vers l'interrupteur pour mettre fin à cette conversation, quand une lueur passa dans son regard, il stoppa son geste, et lança avec dédain à son rival :

-Je vais te donner un conseil entre amis, Méphisto, -dit-il avec ironie- Silver ne cédera pas sous la torture, il est entraîné pour ça, et même la drogue n'a aucun effet. Je le sais, il a réussi à échapper au contrôle de notre toute nouvelle invention dans ce domaine, alors que nous n'avions même pas trouvé de remède. Maintenant excuse moi, mais je dois lancer un avis de recherche.

Il lança un regard de conquérant à son ennemi et la communication s'interrompit. Son interlocuteur resta pantelant, la bouche encore ouverte, prête à lâcher une réplique cinglante. Puis brusquement, il se laissa tomber dans son fauteuil et éclata de rire, un rire machiavélique.
Alors entre deux sursauts, il maugréa :

-Ah, Tu veux jouer à ça Giovanni ? Mais je vais gagner la partie cette fois !

Il posa avec empressement son doigts sur une sonnette, et deux hommes entrèrent dans la pièce, obéissants. Leur chef se calma, une main sur ses yeux, le crâne posé négligemment sur le repose-tête de son support, il pointa une armoire dans un coin de la salle.

-Là-dedans, il y a une caisse avec des poisons et leurs antidotes, administrez les tour-à-tour au gamin. Faites tout ce que vous jugez nécessaire, mais Faites le parler !

Un des sbires arqua un sourcil tandis que son compagnon allait chercher la fameuse valise aussi large qu'un matériel à couture, doucement, et hésitant il balbutia :

-Vraiment tout ?

Méphisto souleva légèrement sa paume et le foudroya sur place, ses pupilles glacées firent frissonner son serviteur et il bondit quand son chef frappa le bureau de toutes ses forces en hurlant :

-JE VIENS DE LE DIRE ! FAITES N'IMPORTE QUOI ! TROUVEZ MOI-MEME UN PEDOPHILE HOMOSEXUEL SI CA VOUS CHANTE MAIS JE VEUX QU'IL PARLE !

La porte claqua avec précipitation à la suite d'un « à vos ordres » peureux, et l'homme se retrouva de nouveau plonger dans l'obscurité. Il se rassit, reprit ses aises dans son fauteuil et s'autorisa un cigare, qu'il jugea, bien mérité.

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Le médecin envoyé en urgence était arrivé une dizaine de minutes après l'appel confus d'Eléanore, et pourtant ce ne fut que vers les 8 heures qu'il quitta le chevet de Christopher et Angèle. Il n'y avait pas d'hôpital à Carmin sur mer, uniquement des spécialistes qui s'enrichissaient sur le dos des autres.

L'homme bedonnant ferma doucement la porte derrière lui, et s'approcha des adultes qui patientaient dans le couloir. Indifférents face aux regards inquiets, il déclara :

-Ce sont surtout des blessures superficielles, mais la fatigue accumulée est importante, c'est sûrement pour ça que le garçon a fait un malaise. La femme a une sale plaie au dessus du cœur, j'ai fait mon maximum, après, ce serait mieux qu'elle se rende dans un établissement spécialisé.

La nouvelle imposa le silence sur le groupe, Gold tomba des nues, et il s'affaissa, glissant lentement contre le mur, son teint était encore plus blanc que les murs du centre.
Le médecin se retira sans rien ajouter, la tante de Sam paya son travail et il les abandonna dans le noir.

A peine sa silhouette grasse fut-elle aspirée par les ténèbres, que Sam porta la main à ses lèvres et retint un cri. Les poings d'Eléanore se serrèrent, et Akira siffla, en pleine confusion :

-Mais bon sang qu'est-ce qui a bien pu se passer ?
-Angie avait une morsure dû à une attaque crocs de feu, j'en suis certaine…Une attaque pareille si près du cœur…Ca aurait pu être fatal…Constata son élève d'une voix brisée.
-Mais qu'est ce qu'ils ont pu faire pour mériter un coup pareil ? Ils ne combattent même pas avec leurs Pokémons ! S'exclama Eléa furieuse. –Puis, où était l'autre roux grincheux, il aurait pu les protéger !
-Ils se sont aventurés près du Qg d'Opale. Expliqua simplement Gold sans lever les yeux.

Si toutes les têtes obliquèrent dans sa direction, une seule et unique se peignit de frayeur. Celle de Yuki. Il contempla le jeune brun, sa bouche se tordit, puis finalement s'ouvrit pour vomir une question, appréhendant déjà la réponse :

-Vous n'avez pas voulu jouer aux héros ?

Gold lui lança une œillade désolée, et sa frimousse se décomposa, un sanglot remonta le long de sa gorge et il émit une plainte douloureuse en étalant leur plan :

-Silver ne voulait rien entendre, normalement, il devait se faire passer pour le fils du chef des Rockets et Angie et Chris devaient se faire intégrer ; ils auraient du voler les données et s'enfuir ni vu ni connu dans la soirée…

Ses poings se crispèrent sur son pantalon.

-Comment j'ai pu les laisser partir comme ça ! Comment va réagir la Team Opale en se rendant compte que Silver n'a rien à voir avec les Rockets !

Son timbre s'étrangla. Il plaqua sa tête dans ses mains et la pressa de toutes ses forces, espérant que la douleur de ses tempes atténuerait celle de son cœur, mais en vain, il avait l'impression que son diaphragme passait sous la pointe vrillant d'une perceuse.
Les filles blanchirent à la suite de ses révélations et Akira, rouge de colère s'emporta :

-Mais enfin, vous êtes totalement stupides ou quoi ? Vous avez à peine dix-sept ans, comment pouvez vous ne serait-ce qu'imaginer pouvoir arrêter des types pareils ! La police n'y parvient pas ! Vous vous croyez supérieurs à la police peut être !

Gold se recroquevilla sur lui-même alors qu'Akira continuait à hausser le ton, même Samantha recula, effrayée par la fureur qui imprégnait ses traits. Eléanore serra fortement Ash dans ses bras. Yuki s'arrêta peu à peu à bout de souffle, les joues encore empourprées, ses sourcils se froncèrent et il poussa un juron devant le mutisme du gamin. Il passa une main agacée dans ses cheveux et les ébouriffa pour se défouler.

-Tu as déjà de la chance d'avoir échappé à ce massacre, estime toi heureux.
-Comment ça m'estimer heureux ?! ET Silver ALORS ? JE PEUX PAS LE LAISSER LA-BAS !

Gold venait de bondir sur ses pieds, ses jambes flageolaient, et pourtant il hurlait ça avec une telle puissance, une telle détermination, que Sam et Eléa en restèrent coites. Akira se ferma tout entier, il fit un pas vers l'adolescent et se planta devant lui avec une sévérité que Sam ne lui avait jamais vue.

-Ton copain est peut être déjà mort à l'heure qu'il est, tu crois sincèrement que ça vaut le coup de risquer ta vie pour peut être rien ?

Les prunelles d'or pétillèrent, ses tremblements s'estompèrent et il serra les poings à s'en blanchir les phalanges. Il repensa à leur dispute, aux derniers évènements qu'ils avaient vécus ensemble, à sa disparition il y avait quatre ans. Il ne voulait pas revivre ce calvaire, il ne voulait plus souffrir chaque jour en se regardant dans le miroir, il ne voulait pas contempler tous les matins le reflet d'un homme qui avait abandonné son ami, d'un homme qui aurait pu empêcher cette catastrophe. Et surtout, il ne pouvait pas imaginer la vie sans lui, sans ses piques, sans ses « modère-toi crétin ».
Si jamais le roux les quittait…

La voix de son père sur le palier de la porte, sur le point de partir, retentissait encore en lui. Il avait eut de la chance, son dernier souvenir de lui, se résumait à un sourire, à une embrassade, et à un « au revoir les enfants, promis à mon retour, je t'aide pour ton œuf Pokémon Gold. »

Là, là, le visage terrifié d'abord, puis impitoyable de Silver resterait à tout jamais imprimé sur sa rétine.

Il secoua la tête. Ce n'était pas encore trop tard ! Il devait essayer, il devait continuer pour lui ! Il n'avait déjà pas pu le retenir à temps, alors même qu'il savait qu'il n'était pas en état de se lancer dans une mission aussi périlleuse. S'il mourrait, ce serait entièrement de sa faute. Et cela, Gold ne pouvait pas le supporter.

Il leva la tête et supporta avec défi les pupilles bleues d'Akira Yuki.

-Même si j'y laisse ma vie, je ne l'abandonnerai pas. Lâcha-t il froidement. –Et même si j'y vais seul, même si c'est du suicide je le ferai quand même !

Samantha ne put réprimer un frisson à cette simple idée, elle baissa la tête, ce n'était vraiment pas à ça qu'elle pensait quand elle préparait son voyage initiatique. Certes elle avait souhaité vivre des aventures, pourquoi pas démanteler un groupe de méchants comme dans les jeux vidéos, mais, là, c'était la réalité, pas un rêve absurde. C'était leurs vies qu'ils jouaient, pas un amas de pixels. Elle jeta un regard en coin à Eléanore à côté d'elle, et elle sursauta. Les pupilles de la gamine brillaient de la même lueur que celles de Gold, emplies de détermination.

La gamine aux couettes s'avança vers le brun et posa une main sur son cœur pour déclarer :

-Je t'aiderai. Si je peux donner ma vie pour en sauver une autre, ce sera avec plaisir.

La réaction de Miyu et Sam ne se fit pas attendre :

« HEEIINNN ? PAS QUESTION ! »

Les yeux ronds, ils dévisageaient cette enfant abasourdis. Contrairement à Akira qui soupira, il devait s'attendre à ce genre de phrase venant d'elle.

Miyu lui-même, saisissait vaguement les sentiments qui animaient Eléa. Elle n'avait de toute façon pas longtemps devant elle, elle le savait pertinemment, alors, si elle pouvait trouver un quelconque sens, utilité à sa mort, elle n'hésitait pas. La mort lui semblait étrangement plus douce avec une raison humaine, à sa portée, elle prenait même un gout paradoxal, une saveur libératrice. Elle pouvait choisir à quoi serviraient ses derniers instants, elle ne craignait plus le joug impitoyable, imprévisible de sa maladie pendant une brève période. Le spectre se renfrogna et il maugréa :

« Mais moi je veux pas crever comme ça… »

Eléanore lui répondit simplement, s'adressant autant à Sam qu'à lui :

-De toute façon vous n'avez pas le choix, ma décision est prise.

Samantha frémit, les évènements la dépassaient de loin, de même que ses sentiments. Elle ne désirait pas finir comme ça, cette simple hypothèse de se jeter dans la gueule du loup la pétrifiait de peur. Elle avait tant de chose à vivre, elle voulait encore profiter de sa mère, découvrir ses origines pourquoi pas, elle ne demandait pas la lune, juste une petite place paisible dans ce monde. Si elle réalisait son rêve d'enfance, elle serait déjà comblée. Elle recula en titubant sous la force du regard qu'Eléanore lui lançait.

Elle ne voulait pas finir comme ça. Et qui préviendrait sa mère si elle disparaissait ? Qui serait là pour elle ? Elle avait tout sacrifié pour elle, elle ne pouvait pas jouer ainsi toute une vie d'épreuves comme ça, par simple caprice, pour un garçon qu'elle connaissait à peine. Certes il l'avait sauvée, techniquement elle lui devait la vie, mais…On ne voyait ça que dans les histoires stéréotypées, les intrigues de mauvais gout ! Elle détourna la tête et fixa le sol avec insistance pour s'empêcher de céder. Pour s'empêcher de jeter sa vie aux orties. Ses poings serraient de toutes ses forces les plis de sa jupe.

-Sam, Monsieur Yuki…Commença lentement Eléanore.

Le professeur se tourna vers elle, seul. Elle lui sourit gentiment.

-Je comprends que vous ne vouliez pas tout risquer, personnellement, sans ma maladie, je ne tenterai pas le coup. Mais…

Elle observa ses interlocuteurs du haut de son 1m50, de toute sa grandeur, sa fierté.

-Est-ce que vous serez encore capable de vous regarder en face, en sachant que vos amis sont morts pendant que vous restiez sciemment à l'abri du danger ?

Samantha pila net, tant choquée par les paroles sans détour de son amie, que par la vérité qui s'immisçait en elle, telle une flèche aiguisée lancée par un sniper. Sa poitrine se compressa. Elle vit alors Akira passer une main sur sa nuque en poussant un soupir à fendre l'âme.

-Tu as le don pour ne pas laisser le choix aux gens, toi…Murmura-t il.

Oui, en sortant cela, elle déterrait l'évidence que tout le monde connaissait mais s'efforçait de camoufler. Elle empêchait qu'on l'oublie, qu'on nie son existence et qu'on s'endorme sur sa conscience. Exactement comme le jour où il avait découvert son secret. Le professeur soupira de nouveau. De toutes les manières, il avait pris sa décision dès le début, il comptait le faire derrière leurs dos, en secret, mais apparemment, son plan tombait à l'eau.

Samantha sursauta, interloquée devant le « j'irai aussi » de son enseignant. Elle se retrouvait totalement acculée, ses épaules heurtèrent le mur du couloir, comme pour lui montrer qu'aucune issue de secours ne se camouflait derrière elle. Eléanore se dirigea vers elle et attendit sa réponse.

-Je…je…Bafouilla Sam.

Mais, pour qui se prenaient-ils, ils n'étaient pas des héros, loin de là, juste des enfants normaux, ils n'avaient strictement aucune chance contre des bandits pareils ! Une boule d'anxiété bloqua sa gorge et sa respiration. Ils n'étaient même pas des prodiges, certes ils gagnaient quelques combats, mais pas à ce point, il lui avait fallu deux tentatives pour obtenir son deuxième emblème ! Puis, en estimant que la blessure d'Angie venait d'un Démoloss, un des Pokémon apprenant le plus vite l'attaque croc de feu, ils affrontaient des créatures au minimum niveau 32, les meilleurs des leurs atteignaient à peine le 30 ! Ils avaient tous des familles, ne voulaient-ils pas continuer à vivre avec eux ? Ils avaient bien des regrets, des buts eux aussi, pourquoi les jetaient-ils comme ça sur le côté ?

-Je…Répéta Samantha, elle sentait les larmes monter en même temps que ce poison terrifiant le long de sa trachée.

La porte s'ouvrit brusquement, Christopher et Angèle apparurent dans l'encadrement, se soutenant l'un l'autre. Pire que tous les autres, plus fous que tous les autres, ils déclarèrent avec volonté :

-C'est grâce aux Pokémons de Monsieur Silver que nous avons pu échapper à Opale. Sans eux, nous serions morts dès le début. Nous ne l'abandonnerons pas, nous, on vient avec vous.

La blonde, le souffle rauque, retenait une grimace douloureuse, mais elle montra les pokéballs à sa ceinture en expliquant :

-Avec eux, nous ne serons pas un poids. Et puis vous aurez besoin de nos compétences en informatique pour vous en sortir vivants.
-Vous devriez faire attention, vous êtes encore en mauvais état ! Rétorqua Gold, soucieux.
-Monsieur Silver a un Absol, c'est en montant sur son dos que nous avons pu trouver une cachette et tenir nos positions pendant deux jours, pour éviter le gros des troupes, même si nous ne nous sommes pas sortis indemnes, nous avons pu survivre. Nous réutiliserons cette tactique. Affirma Christopher.

Après un débat de sourds, Eléanore et Gold accueillirent les nouveaux volontaires avec un sourire reconnaissant. Ils firent ensuite volt-face vers Samantha, toujours muette, patientant pour sa réponse.

-Je…

Ils étaient totalement fous.

-Je viens aussi…Abandonna-t elle.

Elle était encore pire.

-Mais, vous me protégerez aussi, hein ? Bafouilla-t-elle, essayant en vain de camoufler ses tremblements.

Les concernés sourirent.

-Tu es ma meilleure amie, évidemment que je vais te protéger ! Rétorqua Eléa, radieuse.
-Tu es mon élève. S'expliqua Akira.
-Silver tient à toi, c'est une raison suffisante pour moi. Maugréa Gold.

Un sourire orna doucement la frimousse de Sam puis se déforma en une grimace, les larmes coulèrent involontairement sur ses joues et elle hoqueta :

-Bon…Allons nous faire tuer alors…

Comment avait-elle pu se laisser entraîner là-dedans, dans un plan pareil, une pleurnicheuse comme elle, jouant les héros ?

Samantha ne pouvait évidemment pas savoir que ce rôle lui incomberait un jour ou l'autre dans un avenir proche.

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L'atmosphère autour d'eux était d'une lourdeur peu commune, électrisant, c'était le mot. Chaque inspiration semblait leur envoyer un choc, ils en avaient encore la chaire de poule, et les poils hérissés.

Devant eux, une immense bâtisse se dressait, composée d'une enceinte principale et de quatre colonnes gigantesques qui en ornaient les coins. Des paratonnerres vrombissaient sur le toit en taule. La végétation autour d'eux semblait avoir été carbonisée purement et simplement. Et tous craignaient absurdement de subir le même sort.

Daniel passa la bouteille d'eau à son petit frère qui pianotait sur le clavier de son ordinateur. Lucas à ses côtés, scrutait l'écran, intimidé. Régis quant à lui lâchait ça et là des instructions, une paire de jumelles à la main.

-Je n'arrive pas à voir leurs uniformes d'ici. Gabriel, ordonne à ton nosferapti de virer de 30° vers le sud-ouest.

Le génie approcha un micro de ses lèvres et murmura ses ordres, aussitôt une vidéo défila sur le portable du garçon.

La centrale électrique, juste devant l'entrée principale, s'appuyant nonchalamment sur le panneau, un homme étrange se reposait. Si les garçons avaient jetés leurs dévolus et leurs suspicions sur lui un peu plus tôt, ce n'était pas à cause de son air louche, mais parce que jusqu'à il y avait quelques minutes, une trentaine de camarades habillés comme lui l'entouraient.

Lucas plissa les yeux pour mieux cerner les contours des lettres sur le t-shirt de l'étranger, puis il ouvrit la bouche et susurra :

-C'est un R…C'est probablement la Team Rocket. Déclara-t il.
-Sacha avait donc raison, ils risquaient d'attaquer La centrale électrique. Analysa le savant.
-Mais pourquoi ? S'étonna Daniel.
-En raison du fort taux d'électricité Statique, de nombreux Pokémons de la région viennent recharger leurs batteries ici, y compris Elekthor, il est arrivé qu'un dresseur chanceux le voie s'envoler d'ici. Expliqua brièvement Gabriel à son frère, comme si c'était la chose la plus évidente du monde.
-Ca a donc un rapport avec Twilight ?

La question de Lucas était destinée à Régis, et celui-ci ne s'en étonna pas. Il leur avait révélé la vérité dès le premier jour de leur voyage. Il savait qu'il ne pourrait pas garder ce secret bien longtemps en les côtoyant tous les jours, et ainsi, ils s'étaient fait quelques alliés de plus. Daniel avait intégré l'organisation pour les mêmes raisons que le savant, et comme l'exprimait la théorie des domino, ceux-ci entraînant cela, Lucas et Gabriel avaient du suivre.

Même si le brun avait failli faire une crise cardiaque et donner sa démission dès le premier rapport pour Sacha, via conversation téléphonique. Il avait vu dans le communicateur sa cousine Marion et une dispute avait occupée la plus grande partie de la conversation, surtout quand Ondine s'était ruée sur l'engin pour exiger le nom des coupables qui avaient osés livrer des photos de son couple à la presse.

Bref, ils s'en étaient sortis indemnes, terrorisés mais indemnes, du moins tant qu'ils ne croisaient pas les deux filles sur leurs routes, vu que celles-ci avaient juré de les tuer dès qu'elles les reverraient. Et même si Gabriel était parvenu à rejeter la faute sur son aîné, sa sœur Alice lui avait promis la raclée du siècle « parce que ça fait 9 ans que tu la cherches » avait-elle répondu pour se justifier.

-J'en ai peur…Répondit Régis simplement.

Daniel soupira en sortant son pokédex. Son cadet l'avait réparé quelques jours plus tôt, il avait même, grâce aux renseignements de Régis, réussi à l'améliorer pour qu'il fasse pokéradar ; il lui manquait des outils pour affirmer son efficacité, mais le résultat était là.

-Moi qui pensais que l'occasion de capturer un shiney se présentait…
-Ne t'en fais pas, l'occasion se présentera forcément un jour. Le rassura Lucas.
-Moi, j'ai tout mon temps, mais pas Eléa…Bafouilla le garçon aux yeux vairons.
-De toute façon, tu as bien vu sur le programme que j'ai installé sur ton pokénav en même temps que l'option téléphone…Il y avait à peine 1% de chance pour qu'une shiney de l'espèce électrique puisse la soigner. La meilleure option reste dans les types plantes ou poison…Voire même Feu puisque d'après Régis, il est possible que le souffre qu'émettait le ponyta présent dans l'accident ait pu influencer son état.

Le cadet des Kazamatsuri but une gorgée d'eau devant les regards ébahis des autres, même Régis gardait quelques restes d'émerveillement devant cet enfant tout juste sorti des couches et pourvu de telles capacités de déduction.

Le premier jour, il l'avait d'ailleurs totalement cloué sur place, dès qu'il avait su pour Twilight il avait enchaîné les déductions, Régis avait fini par cracher que les champions d'arènes de ralliaient peu à peu à la cause. Twilight avait quatre ans d'après Sacha, L'ordre des champions ambulants également, il en avait tout simplement conclut que son père, et tous les autres champion ambulants étaient membres de Crépuscule eux aussi.

Daniel avait préféré ne rien répliquer à cela. Membre d'une organisation de héros ou non, il restait le même, c'était toujours le même type qui le jour de ses sept ans l'avait oublié lui et ses petits frères et sœurs, à minuit, en pleine forêt, à la fête du village.

-Qu'est-ce qu'on fait alors ? Demanda Lucas doucement. –On peut quand même pas les laisser capturer Elekthor !
-Que veux-tu qu'on fasse d'autre ? Ironisa Régis. –Je vais prévenir Sacha, qui enverra des hommes et c'est tout. Gabriel tu penses qu'on peut créer un serveur clone sur internet pour avoir le double des vidéos de surveillances ? Cela permettrait de les espionner discrètement.
-C'est compliqué, mais faisable, j'ai juste besoin de bras.
-Très bien j'appelle Sacha de suite. Acheva le savant en se levant.

Soudain, Goboue s'approcha de son maître, tenant dans sa gueule le pokénav du gamin, le marqueur clignotait, indiquant qu'il avait reçu un message. Daniel le prit délicatement en le remerciant gentiment, il ouvrit le boitier et sourit.

-C'est un message d'Eléa et Sam.

Ses pupilles asymétriques parcoururent les quelques lignes du message électronique sous les visages curieux de ses camarades, ses sourcils se froncèrent.

-Elle dit qu'elle a cassé son pokématos en jouant sur la plage avec Ash, elle essaiera de le remplacer rapidement, mais vu qu'ils repartent ce soir, elle ne pourra pas appeler tous les soirs comme convenus avant quelques jours. Elle nous embrasse tous très fort et dit que Ash s'excuse de sa bêtise.

Régis persifla contre la mauvaise fortune mais ne répliqua pas. Il partit chercher son portable pour contacter Sacha avec Gabriel, abandonnant les deux adolescents dans leurs planques.
Lucas reprit les jumelles et observa les sbires Rockets au travers, puis au bout d'un moment silencieux il déclara :

-Mais Sam n'en a pas un à elle, de pokématos ?
-Si.
-Foutu Eléa, toujours à se débarrasser des corvées qui l'embête ! Tu te souviens, comme pour la corvée de cuisine, quoi que valait mieux pas qu'elle touche aux plats si on voulait survivre ! Rigola le brun.
-Ouais…Murmura Daniel, ailleurs

Il porta la main à sa joue et se la gratta distraitement, un mauvais pressentiment enserra son cœur. Il espéra qu'Eléa n'allait pas faire de bêtise en son absence, après tout, il pensait bien à la fille qu'il avait connu parce qu'elle était suspendue à une branche d'une falaise !

Il eut un demi-sourire en se rappelant ce qui lui avait dit ce jour là. Il avait été sincère, dans la lumière du couchant, semblant flotter dans les airs, auréolée de lumière, elle lui était vraiment apparue comme un ange.

Et cette auréole ne l'avait jamais quittée.

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L'infirmière Joëlle de Jadielle s'occupait tranquillement du centre Pokémon de la ville.
Le petit Claude revenait souvent avec son Chenipan pour demander quand Sam reviendrait, mais elle devait bien évidemment lui annoncer à chaque fois que ce n'était pas encore le bon jour.

Elle eut un soupir en devant lui ordonner de rentrer chez lui une nouvelle fois, puis retourna à ses scalpels. Il y avait peu de cas graves dans cette ville, sauf quand le champion de l'arène décidait de latter lentement mais surement ses adversaires. Cependant, elle se devait d'être prête à intervenir 24h sur 24.

Même si son esprit accompagnait sa fille adoptive tout ce temps là.

Elle avait fait le ménage de la chambre de sa fille ce matin même, et encore une fois, elle avait réprimé son envie de lui envoyer un cadeau. Un œuf de ptiravi attendait patiemment dans une couveuse son retour depuis quelques jours déjà. Mais elle ne désirait en rien presser son enfant, ou encore l'acculer, la connaissant, elle risquait de prendre ça comme une promesse pour qu'elle devienne infirmière. Joëlle eut un rire clair. Elle savait pourtant que depuis qu'elle avait vu un combat du maître masqué, sa fille ne rêvait qu'à briller de la même façon, en tant que championne d'arène.

Alors qu'elle stérilisait l'écarteur, une sonnerie retentit. La femme d'âge mûr se déplaça lentement vers l'entrée, quittant le centre pour entrer dans sa demeure. Elle saisit le combiné du communicateur et le porta à son oreille, prête à recevoir une urgence.
Mais son visage s'illumina quand elle vit Samantha apparaître derrière l'écran. Elle était toujours aussi heureuse de recevoir de ses nouvelles en personne plutôt que par le biais de ses sœurs. Elle avait toujours eut peur que sa fille profite de son voyage pour creuser encore plus le fossé entre elle.

-Sam, ma chérie, comment vas-tu, ton voyage se passe bien ?

Elles discutèrent de tout et de rien pendant une dizaine de minutes, puis soudain, alors qu'elles parlaient de leurs amis garçons qui venaient de prendre des chemins différents, elle lâcha :

-Je t'aime maman.

Joëlle eut un sursaut de surprise, et lui envoya le plus beau de ses sourires en réponse, ravie de l'entendre encore une fois. Ce genre de phrase, on ne le disait jamais assez, et elle ne l'avait pas assez dit durant l'enfance de la petite, trop intimidée par son nouveau statut de mère, bien précoce il fallait l'avouer.

-Moi aussi Sam.

Elle avait toujours tâchée de s'occuper d'elle au mieux, mais elle connaissait ses limites comme ses erreurs. Elle avait préféré la sévérité de l'éducation, pour éviter l'insolence des enfants adoptés, même si elle s'était parfois montrée tendre, elle comprenait aujourd'hui, que peut être, elle aurait du l'être un peu plus.

-Je sais que je t'ai souvent déçue maman…Continua Samantha de l'autre côté de l'écran. –Je suis pas ta vraie fille, et tu as souvent sacrifiée ta vie personnelle pour m'élever…malgré ça je suis froide et pleurnicharde…

Joëlle fut décontenancée par la franchise soudaine de son enfant, elle avait toujours cru que son orgueil empêchait une telle sincérité de sa part. Elle surmonta tout de même sa surprise et souffla :

-Tu es ce que tu es Sam, et je t'aime comme ma vraie fille. Tu sais, si j'avais eu un enfant, rien ne dit qu'il aurait été meilleur que toi ! Je suis certaine même qu'il ne m'aurait jamais apporté autant de joie que tu l'as fait.

La brune lui lança un regard brillant de reconnaissance, et elle balbutia :

-Je…je voulais juste te dire, que, c'est ta chaleur que je connais, pas celle d'une inconnue, et pour moi tu resteras toujours ma maman.

La connexion s'interrompit là.

Et l'infirmière Joëlle resta seule dans sa grande maison, totalement éberluée.

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Dans la chambre que leur avait gracieusement prêtée la tante de Sam, le groupe organisait une réunion de crise. Utilisant un des lits en guise de table d'apoint, Akira menait la discussion d'une main de fer. Un papier brièvement griffonné en guise de tableau récapitulatif, il se forçait à être le plus clair et autoritaire possible, ce qui d'ordinaire, n'était vraiment pas son fort.

Dire qu'il préférait se laisser porter…Mais il n'avait le choix, la vie d'un adolescent était en jeu. Son esprit de professeur criait en lui.

-Bon, Chris récapitulons, si j'ai bien tout compris…Vous vous êtes rendus dans la forêt…Derrière le bâtiment, où il y avait une porte à la dérobée. Ensuite vous vous êtes enfuis, vous avez été blessés, et vous vous êtes réfugié dans une grotte un peu plus loin, jusqu'à ce que le chemin soit libre. ..
-Oui…Affirma Christopher.
-Nous avons remarqué qu'il pouvait y avoir trois entrées ou sorties probables, compléta Angie. –Quoi, j'aime avoir quelles sont les issues de secours, surtout avec toi comme coéquipier ! Se défendit-elle face à Christopher admiratif.

Elle prit un crayon, et traça un carré incertain au milieu de ce qui devait être des arbres. Elle fit une croix pour marquer la grotte et un rond pour indiquer la porte dérobée et l'entrée principale de l'autre côté. Elle fit ensuite un rond très peu rond à droite du carré.

-Ici, il y a la mer qui s'engouffre dans les fondements du Qg, je suis sûre qu'il y a une possibilité pour fuir par là. Avec un Pokémon eau, on atteint rapidement le large sans danger.
-Il y aussi le toit en terrasse, avec un Pokémon volant, on est vite hors de danger. Ajouta Gold, en pleine réflexion.
-Nous avons donc quatre possibilités pour fuir. Personnellement, je ne serai pas dans l'équipe sous marine pour les raisons que vous connaissez. Eléa, toi aussi évite, retenir ton souffle trop longtemps n'est pas une très bonne idée. Affirma Akira.

Les enfants opinèrent du chef. Cela signifiait donc que Sam resterait avec Gold.

Pendant l'heure qui suivit, Akira expliqua tranquillement son plan, insistant sur chaque détail, prudent à l'extrême. Sam l'aida à créer des plans de secours et ensembles ils décidèrent des étapes de leur mission de sauvetage qui se déroulerait demain soir, dès que les préparatifs seraient achevés. Gold avait un peu rechigné, mais il avait du se rendre à une évidence, ils faisaient certes souffrir plus longtemps Silver dans sa prison, s'il était encore en vie, mais ils avaient plus de chance de le sauver ainsi.

A la fin de la conversation, Akira se dirigea vers ses paquetages, et en dépêtra un paquet emballé au papier kraft. Il le confia à Angie et lui donna quelques ordres pour demain, avant de partir de coucher.

Il ne se réveilla que tard dans la matinée le lendemain matin, le zénith menaçait de ses rayons intenses le port de carmin-sur-mer, encore une journée étouffante de toute évidence.

Akira se dirigea d'un pas lent vers la pièce de la veille, où l'attendaient ses élèves. Sam portait une tenue de Rocket, celle qu'elle avait emprunté à Silver le jour de leur mésaventure au mont Sélénite, elle n'avait pas eut l'occasion de lui rendre, et à vrai dire, elle n'y avait pas vraiment songé, jugeant qu'elle ne lui servirait plus jamais. Angie et Christopher avaient cousu dans la nuit un « o » à la place du « r », espérant que cela suffirait à tromper l'ennemi. Gold était lui aussi vêtu d'une tenue d'Opale, bien plus noire, il avait laissé sa casquette dans son sac et ne gardait sur lui que ses lunettes protectrices orangée et sa ceinture de Pokémon.

Eléanore elle aussi s'était changée, avec une grimace, elle s'habilla d'une robe pleine de dentelle, seule vestige de sa maison et de sa famille riche. Elle avisa une jambière avec sa ceinture pour conserver ses Pokémons sur elle.
Christopher lui, portait un masque à l'effigie de Ptitard, une cape simple, tout en blanc. Il n'avait évidemment pas résisté et avait rajouté de la dentelle un peu partout.

Angie, la seule qui n'était pas différente de la veille, pour la simple et bonne raison qu'elle restait dans la grotte, cachée, supervisant les évènements, apporta le paquet à Akira et le lui tendit en le remerciant pour ce modèle.

Le professeur sourit, puis déchira le papier kraft.
Il n'avait jamais cru devoir sortir de nouveau cette tenue pendant le voyage initiatique encadré de Sam, mais la situation l'y obligeait.

Il déplia une longue cape noire et la passa sur ses épaules négligemment, il détacha ensuite ses cheveux, les laissant retomber impétueusement sur ses épaules, et sortit avec précaution un masque de Staross, qu'il plaça sur son nez.

Samantha ouvrit la bouche, ses yeux s'écarquillèrent, et elle pointa du doigt Akira en tremblant.

-Oh Sam regarde, on dirait vraiment le dresseur masqué ! S'exclama Eléanore en riant.

Mais la brune devint blanche comme un linge quand Yuki lança simplement :

-Parce que c'est moi. Tu croyais quoi, que j'étais juste un prof chiant et paresseux ?

Eléanore arqua un sourcil, et Miyu répondit à sa place, lisant dans ses pensées :

« Franchement, ouais… »

Samantha manqua de défaillir, mais Gold coupa court cette découverte déconcertante.

-Bon c'est pas que ça n'a pas d'importance, mais pendant qu'on cause, Silver risque sa vie, donc vous règlerez ça après !
-Je vous rejoins dans la grotte dans une heure, je dois encore faire quelque chose, partez devant. Expliqua Yuki.
Il les regarda s'en aller, Sam croisa sa tante, lui sortit une excuse bidon pour expliquer sa tenue –un pari perdu d'après elle- et elle lui fit ses adieux. Leurs silhouettes disparurent dans le couloir, et Yuki attendit une dizaine de minutes avant de sortir à son tour.

Il fit quelques pas dans le couloir, et s'en alla loin du centre en faisant un coucou distant à l'infirmière, plus ou moins interloquée. Arrivé derrière la demeure publique, il s'appuya contre le muret délimitant le parc de repos des Pokémons et alluma son appareil. Ses doigts restèrent longtemps inertes sur son clavier, hésitants, se demandant vraiment si ça valait la peine.
Mais le souvenir de Sam qui faisait ses adieux à sa mère, oubliant tout son orgueil, dévoilant le fond de sa pensée, le poussa à agir. Doucement il composa le numéro de Kain Lag.

Le timbre bourru du vieil homme résonna dans un grésillement. Akira le salua, lui fit des adieux implicites, et lui demanda de lui passer Lily. Comme il le pensait, elle était toujours là, à entraîner son élève. Il n'avait pas voulu l'appeler directement sur son portable de peur qu'elle ne décroche pas. Il patienta quelques minutes, puis après quelques bruits de fonds, il perçut enfin la voix de son amie d'enfance à l'autre bout du fil.

-Allo, qui est à l'appareil ? Demanda-t-elle naïvement.

Elle répondait toujours bêtement au téléphone, il adorait ça quand il était enfant, parce qu'il pouvait la casser facilement pour la taquiner, et à ce moment là, elle rougissait et se mettait à balbutier de manière adorable, criant pour qu'il lui passe Shinobu.

-C'est le pape. Lâcha-t il en rigolant.

Il y eut un silence tendu.

-Ah monsieur le pape vous tombez bien, je voulais annuler mon baptême, je refuse de suivre une église gouvernée par un con comme vous.

Akira se retint d'éclater de rire. Elle avait grandi, les cours de karaté lui avaient forgé le caractère pendant son adolescence, et peu à peu, elle avait appris à répliquer.

-Non sans blague, c'est qui ?
-Akira Yuki, tu sais ton ex que tu ne veux plus voir. Evidemment, qui d'autre sait où tu te trouves en ce moment ?
-Mes parents, ceux d'Armand, ainsi que toute l'équipe administrative de l'école, j'ai envoyé mon rapport moi, contrairement à toi.

Le professeur se dépêcha de rajouter quelque chose avant qu'elle ne lui raccroche au nez, ignorant la remarque sur ce foutu rapport qu'il devait envoyer au directeur tous les mois pour noter Sam.

-J'ai quelque chose à te dire.
-Pas moi.
-C'est important. Insista-t-il.
-Rien n'a d'importance avec toi.
-Toi tu en as. Shinobu aussi.
-NE PRONONCE PAS SON NOM !

Sa voix brisée lui fit comprendre que ce souvenir lui faisait toujours aussi mal. Akira se mordit la lèvre inférieure. Soit il trahissait son frère, soit il la trahissait elle. Il avait toujours tout dit à Shinobu, toujours laissé Lily pour compte, il était temps qu'il se passe l'inverse. Elle aussi elle avait le droit de savoir, après tout elle l'aimait, peut être plus qu'Akira aimait son frère même.

-Quand tu repasseras à Azuria, rends-toi à la demeure de l'artiste Yoite, c'est au 2 rue du Bosquet, près d'une immense ferme agricole, tu ne peux pas te tromper.
-Et qu'est ce que j'y trouverai ? Se méfia la brune, acide.
-Ton cadeau de saint Valentin, celui que tu n'as jamais ouvert.
-Si tu essayes de me reconquérir tu peux te le mettre où tu sais, ton foutu cadeau.
-Non, cela n'a rien à voir, j'ai fait un trait sur notre relation. Mais il m'a fallu 3 ans pour trouver un moyen pour la conclure de la bonne manière.
-Qu'est ce que cela signifie ?
-Tu iras ?
-Oui, promis j'irai, mais explique-toi.
-Non.

Il y eut un nouveau blanc, puis elle grogna.

-Toujours avec tes petits secrets.
-Toujours.
-Est-ce qu'un jour je serai dans la confidence moi aussi ? Demanda-t elle, exaspérée.
-Tu l'es déjà.
-J'en doute.

Akira avala sa salive de travers. C'était le moment de se jeter à l'eau.

-Lily ?
-Quoi ?
-Je te jure que je t'ai vraiment aimé pendant l'adolescence, et si Shinobu n'avait pas découvert le poteau rose, je n'aurais jamais eut le courage de te le dire et de sortir avec toi. Et même si aujourd'hui mes sentiments envers toi ne découlent que de l'amitié, je ne nie pas que je t'ai vraiment aimé.
-Alors pourquoi m'as-tu trompé ? Lâcha-t-elle sur un ton étranglée.
-je ne t'ai pas trompé ! je te le jure ! Se défendit Akira, avec une véhémence qui l'étonna lui-même. –Je…Tu veux la vérité ?
-Ca fait trois ans que je l'attends.
-Je…J'étais en tournoi ce jour là, on m'avait invité à un tournoi important qui commençait tôt le matin pour être retransmis dans la journée.
-Menteur, le seul tournoi qui est passé à la télé ce jour là, c'est celui du dresseur masqué ! Cria Lily.
-C'est moi.

Un silence étonné suivit cette remarque, puis à nouveau, il entendit :

-Tu mens.
- Non, tu sais, quand j'ai décidé d'être professeur, j'avais fait une croix sur les combats Pokémons, à vrai dire, je ne pensais jamais faire carrière, mais quand Peter m'a demandé si je comptais devenir un champion de la ligue à la fin de notre voyage initiatique, j'ai hésité. Je me suis toujours détendu de cette manière, en combattant, c'était vraiment un loisir que j'adorais, mais je voulais garder cela secret, pour moi seul, et pas en faire un moyen de gagner ma vie. Cela devait rester un divertissement pour moi…Et c'est comme ça que un an plus tard le dresseur masqué est né.

Il patienta encore une dizaine de minutes, attendant une réaction, un cri, mais rien ne vint. Déçu, il comprit qu'elle ne le croyait toujours pas alors qu'il venait de lui offrir ses deux plus grands secrets. Il poussa un soupir et murmura :

-Je…Va bien voir cet artiste n'oublie pas. Allez, à bientôt, j'espère que tu seras heureuse malgré tout.

Il allait raccrocher quand brusquement une question l'interrompit.

-Où es-tu ? A Carmin-sur-mer ? Ne bouge pas, je te rejoins, je veux que tu me dises la vérité en face, je veux voir si vraiment tu me dis la vérité. J'arrive, je prends Armand et le premier Tramway, je suis là dans trois heures, ne bouge surtout pas !

Akira sourit, et raccrocha.
Malheureusement, il n'était pas sûr de tenir cette promesse là.
Sans un mot de plus, il se dirigea vers la forêt de Carmin sur mer, résigné mais pour la première fois, l'esprit léger, les épaules débarrassées d'un poids énorme, tout simplement heureux.

Il contempla le ciel et souffla ironiquement :

-C'est une belle journée pour mourir.