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» Auteur : fan-à-tics - Voir le profil
» Créé le 29/08/2008 à 00:48
» Dernière mise à jour le 05/02/2012 à 22:28

» Mots-clés :   Présence de personnages de l'animé   Présence de poké-humains   Présence de shippings

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Episode 9 : Plaies incurables
-chapitre 9-

Notre bande de Héros était enfin arrivée à Argenta. Le chemin avait été long et laborieux mais ils y étaient arrivé, plus déterminés, plus liés que jamais tous ne rêvaient plus que d'une chose :

-Ah je vais te tuer Eléa ! S'écria Samantha en essorant ses cheveux trempés avec force.

-Ah non au secours ! J'ai peur ! Plaisanta la gamine avec une moue insolente. Et comme pour l'énerver encore plus, elle s'ébroua tel un chien, imitée par son Pikachu Pilou.

Elle se toisèrent l'une l'autre avec tension, puis elles explosèrent de rire.
Eléanore ouvrit ses bras vers le ciel et reçu ses pokémons en les félicitant, Happy se fit particulièrement cajoler pour son évolution en papilusion.
Samantha reprit son poussifeu avec plaisir, Lucas lui tendit une serviette avec un sourire, elle lui répondit par la même et elle se sécha correctement les cheveux.

La nuit commençait à tomber, aussi le groupe, malgré les véhémences de Eléa qui désirait aller immédiatement à l'arène pokémon, décida d'aller au centre pokémon pour y dormir. Lucas dû donc traîner Eléa pour qu'elle les suive, ses petits pokémons regardaient ce manège avec une certaine honte, la jeune fille dû en avoir plus qu'assez car elle les fit revenir dans leurs pokéballs avec un « Pas besoin de faire cette tête j'ai compris ! ».

Le sourire de Samantha s'élargit de plus en plus, elle voyait le centre pokémon, sans s'en rendre compte elle se mit à courir, et elle entra dedans en criant :
-Tante Joëlle c'est moi !
L'infirmière se retourna surprise, et un soupir de soulagement lui échappa.
-Ah te voilà toi ! Je commençais à m'inquiéter !
-Je te raconterai tout ça plus tard, je vais appeler maman !
-Pardon ?
Cette fois c'est la surprise qui marqua le visage de la femme, c'était la première fois que la petite agissait ainsi, habituellement elle feignait l'indifférence et le faisait dans l'ombre, pour vérifier elle posa la main sur le front de sa nièce.
Non, même pas de fièvre.
Etonnée, Samantha fit volte face, et remarquant du coin de l'œil ses coéquipiers qui venaient d'arriver à leur tour, elle sourit :
-Tata, peux-tu préparer des chambres et un bon repas pour mes amis et moi ? –elle pointa le groupe pour affirmer ses dires, ceux à quoi Eléa répondit avec un grand « C'est pas poli ! » suivit d'un « Oh tais-toi ! » mi-figue, mi-raisin de la brune –
La pauvre médecin pokémon faillit faire un infarctus, encore une fois elle posa la main sur le front de Sam, mais rien, non elle n'avait rien, elle se portait même comme un charme. Sauf qu'elle l'appelait « Tata », qu'elle prévenait sa mère de son arrivée immédiatement, et qu'elle avait une bande d'amis...
...
Elle devait forcément avoir quelque chose...
-Ah, lâche moi Tata, je veux appeler maman, se plaignit la gamine quand sa tante lui mit les mains sur les yeux à la place de son front.

L'infirmière s'en alla donc sans un bruit, l'air songeuse. Elle s'approcha de la troupe et les salua gentiment. Elle leur demanda ce qu'ils désiraient manger et sous l'afflux de réponses, elle battit en retraite et sonna ses assistants.
Angélique et Christopher entrèrent essoufflés dans le hall et se mirent au garde à vous avec indifférence. Ils firent face à Eléa, Lucas et Daniel, s'inclinèrent humblement et lancèrent synchrone :
-Que peut-on faire pour vous jeunes gens ?

Vous vous demandez sûrement le pourquoi de leur réaction ? La raison est pourtant incroyablement simple, le cerveau humain est une machine complexe, certains le maîtrise mieux que d'autres, ce qui empêche l'égalité complète auquel les êtres aspirent. Angèle et Chris n'étaient malheureusement pas des élus qui possèdent une bonne mémoire, et si au début de leur périple ils avaient vaguement l'idée de ce à quoi ressemblait leur cible –ils en avaient même fait un dessin- au fil des jours, l'image s'était effacée de leurs esprits, même son nom, et impossible de compter sur le dessin de piètre qualité.
Tout simplement.

Eléanore en revanche possédait une excellente mémoire quand elle le voulait, par le même un cerveau très bien fait et maîtrisé, enfin seulement quand elle en voyait l'utilité. Aussi reconnut-elle immédiatement ses « bienfaiteurs » malgré leurs costumes d'infirmières.
Son visage s'illumina, et oubliant totalement les règles de prudence qu'elle s'était imposée, elle alla vers eux et s'inclina à son tour.

-Coucou ! Vous êtes plus stagiaires chez le prof ? Vous avez changé de métier ?
Haussement de sourcils de la part de l'assemblée. Eléanore sortit ses pokéball de sa poche et leur montra, toute fière.
-Je voulais vous remercier, grâce à Ash maintenant j'ai attrapé d'autres pokémons, je vais pouvoir réaliser mon rêve. Alors –elle leur offrit son plus beau sourire- Merci !
Puis elle suivit les autres vers leurs chambres pour y déposer leurs affaires.

Les deux voleurs restèrent un instant pétrifiés, comme foudroyés sur place, puis Chris se tourna vers sa camarade l'air soucieux et lança :
-Tu sais qui c'est toi ?
Angie eut une moue de réflexion profonde, et finalement elle sortit :
-Non pas du tout.
Puis ils repartirent à leurs occupations sans un remord. Sans leurs neurones également il faut croire.

Pendant ce temps, Samantha composait le numéro de sa mère sur le pokématos, assise sur le canapé du hall, un sourire jusqu'aux oreilles, elle essayait confusément de classer toutes ses aventures pour les raconter. Elle était tellement heureuse, elle avait retrouvé le confort moderne, le pokématos captait enfin du réseau, et elle pouvait pour la première fois raconter quelque chose à ses proches, elle en oublia même de frapper le téléphone pour ne pas avoir marché durant leurs semaines de recherches.

Elle enfila le petit casque et le micro intégré, et attendit patiemment que l'image de sa maman apparaisse à l'écran du pokématos. Quelle ne fut pas la surprise de sa mère quand elle la vit, et si cela ne l'acheva pas, quand Sam commença le récit des dernières semaines avec tant de joie et de rire, elle en eut largement le temps. Les paroles de sa fille s'embrouillaient les unes aux autres, elle ne savait même pas par où se lancer, quelle était la pensée la plus importante, à tel point qu'elle entamait une idée, une autre s'imposait à son esprit et la trouvant plus intéressante ou essentielle à la compréhension de la suite et Samantha abandonnait immédiatement l'ancienne à peine ébauchée ; à tel point que le tout n'avait presque ni queue ni tête pour l'infirmière Joëlle.

Néanmoins elle parvint tout de même à en saisir les grandes lignes, et la fierté la gagna quand Samantha lui raconta qu'elle avait soigné des pokémons mal en point comme salamèche et l'arcko d'un dénommé Lucas. Une touche de mélancolie la toucha également, elle n'avait jamais vu sa fille comme ça, et ce n'était pas grâce à elle que ce changement s'opérait en Samantha, comme elle aurait aimé pouvoir être à ses côtés pour la voir s'épanouir...

Samantha reprit difficilement son souffle, le rire clair de sa mère lui parvint, gênée, elle caressa la tête de poussifeu et Farfuret sur ses genoux. Soudain une main se posa sur son épaule, elle se tourna et vit qu'il s'agissait de Eléanore, le reste du groupe et leurs pokémons l'attendaient au bout de la pièce. Joëlle eut à peine le temps de voir le visage de la jeune fille qui avait obsédé le récit de sa fille que Samantha lui dit au revoir et l'embrassa de loin.
L'image se brouilla sur le communicateur, et l'infirmière de Jadielle retrouva le calme de sa grande maison vide.
La femme imagina sa petite Samantha partir rejoindre ses camarades. Elle posa son regard sur une photo d'elles, elle la prit et laissa échapper un « qu'est-ce que tu as grandi Samantha ».
La sonnerie du centre la fit sortir de sa rêverie, et elle alla faire son travail.

*

-Alors tu as bien discuté avec ta mère ? demanda Eléanore tout guillerette à Samantha. La concernée rougit, pensant probablement que cela n'était pas un comportement très adulte de sa part.
-Elle a l'air très gentille ! Tu lui parlais de quoi pour rire autant ? Continua-t elle curieuse.
Samantha écarquille des yeux, ne s'attendant pas à une telle réaction. Elle se faisait des idées alors, ce n'était pas pour se moquer qu'elle avait dit ça, juste par pure sympathie, juste pour mieux la connaître.
Samantha eut un sourire, et lança :
-Je lui parlais de toi ! On riait face à toutes tes bêtises !
Eléa pila, elle feignit la colère.
-Hein ! Et tu lui as raconté quoi, que je suis tombée d'une falaise et que je suis restée des heures accrochée à une branche ! Ce n'était pas drôle je te l'assure !
A l'annonce de ce souvenir, Ash ne put retenir un pouffement avec Pikachu, ce qui leur valut un regard noir de leur dresseuse.
Samantha parut déstabilisée, mais en voyant le sourire en coin de Eléa, elle comprit qu'il ne s'agissait que d'une blague, et rit à son tour.
-Allez viens ! Enchaîna la gamine au bob. –On va manger, ta tante nous a préparé un festin ! En plus c'est un leveinard qui sert les assiettes, tu le crois ça ? Un leveinard ! Régis en a attrapé un une fois, il n'a jamais servi le repas pour autant...
-Hé, attends, je dois voir si monsieur Yuki est là, après tout c'est mon prof ! Protesta la brune.
-Tu le feras après le repas ! Contesta Eléa en essayant de tirer sa camarade vers le mess.
Soudain une main se posa sur son épaule. La gamine en fut tellement surprise qu'elle lâcha sa prise et s'écroula à terre, elle eut à peine le temps de reprendre ses esprits qu'elle perçut nettement le « Yuki sensei ! » amoureusement soupiré par Samantha.
Elle leva la tête, et effectivement reconnut le professeur de l'académie Pokémon, toujours avec ses longs cheveux noirs attachés en queue de cheval.
-Bonjour Samantha ! Coucou Eléa ! Et bien vous en avez mis du temps ! Constata-t il.
Samantha vira immédiatement au carmin, et plus encore si s'était possible quand il lui caressa paternellement les cheveux. Il la détailla de haut en bas, s'attardant légèrement sur ses courbes, puis lança innocemment : « Mais c'est que tu as grandi Samantha ! Tu as pris de la poitrine non ? »
Il ne lui laissa pas le temps de se remettre de ses émotions qu'il lui envoya :
-Je t'emprunte Eléa quelques secondes, en attendant pars manger, on te rejoindra plus tard.

Eléanore sentit immédiatement quelque chose lui enserrer le cou, et elle se fit « kidnapper » avec ses pokémons, sous le regard absent de sa coéquipière. Celle-ci partit vers le mess et s'installa à une table, le sourire béat, quand Lucas et Daniel la trouvèrent, ils durent s'y mettre à plusieurs et pendant une dizaine de minutes pour qu'elle redescende enfin de son petit nuage.

Pendant ce temps, la fille unique des Sarl se retrouva assise dans le couloir, ses pokémons dans les bras, devant un monsieur Yuki furieux.
Il se tenait droit comme un « i », tapotant du pied sur le sol, attendant sûrement des explications qui devait valoir le regard furibond qu'il lui jetait.
La gamine haussa un sourcil d'incompréhension, se souvenant vaguement du « deal » avec lui, elle ouvrit la bouche pour conter les péripéties qu'ils avaient traversé dans la forêt de Jade, mais le ton brut du professeur la pétrifia :
-Qu'est ce que cela signifie ! Gronda-t il en mettant le journal de la semaine dernière sous le nez de la petite.
Eléanore lut en diagonale la première page, remarqua qu'on parlait d'elle, et qu'un article lui était consacré un peu plus loin. Elle se doutait d'ores et déjà de la raison du professeur, mais décida de continuer sa comédie.
-Bah, que vous lisez le journal. Répondit-elle doucement.
Mr Yuki passa au rouge, il serra les dents, se mordit le poing pour se calmer, respira un grand coup et se détendit.
Du calme, du calme, si ça se trouve elle n'en a elle-même aucune idée, après tout les parents cherchent souvent à cacher ce genre de chose...
Il se répétait cela en boucle, pour camoufler la maudite pensée qui le tourmentait depuis une semaine, à savoir qu'il avait mis son travail en péril.

Le professeur changea alors radicalement de comportement, à la plus grande stupéfaction de la gamine, celui-ci s'accroupit pour être à son niveau, posa une main salvatrice sur son épaule et commença d'une voix douce :
-Peux tu me dire pourquoi tu t'es enfuie de chez toi ?
Immédiatement Eléa se renfrogna, elle resserra ses bras autour de son Salamèche, pour être sur qu'on ne lui prenne pas.
-Pourquoi cela vous intéresse maintenant ? Ce ne sont pas vos oignons ! Cracha l'adolescente, sur la défensive.
Mr Yuki prit sur lui afin de passer outre cette réplique insolente.
-Je m'inquiète, voilà tout, peut être peut-on arranger cela, comme ça tu feras ton voyage initiatique comme tous les autres enfants.
Bien sûr, il ne croyait lui-même pas un traître mot de ce qu'il déballait, Eléa elle-même voyait clair dans son jeu, il voulait juste la mettre dans le premier train direction chez elle.
-Menteur. Souffla-t elle entre ses dents. Mais elle était bien décidée à le faire changer d'avis, et elle savait qu'elle possédait avec elle le moyen le plus efficace face à l'être humain : la pitié.
-Avez-vous déjà été enfermé monsieur Yuki ? –Commença-t elle.
-Je n'ai jamais eu ce privilège, répondit le professeur méfiant.
-Moi si, dans une prison dorée comme on dit. Au début cela ne me dérangeait pas, à vrai dire je pouvais faire beaucoup de choses, à tel point que j'ignorais même l'existence de ma cage. Mais au fur et à mesure, les barreaux se sont resserrés, les gens que j'aimais en sont partis un à un. Je pensais pouvoir y survivre quand même, car cela n'était pas l'enfer, je pouvais obtenir presque tout ce que je désirais, mais encore une fois cela ne marchait pas, tout devenait de plus en plus petit, je suis partie avant d'oublier ce qu'était le goût de la liberté, avant d'oublier ce qu'était l'extérieur.
Akira baissa les yeux, cela s'annonçait plus dur qu'il ne le pensait, même lui qui, pendant une semaine avait pris sa décision sans sourciller, commençait à songer à un autre moyen de procéder.
-Sais-tu au moins pourquoi cette cage se resserre ? Demanda-t il doucement.
-Bien sûr que je le sais. Annonça fermement Eléa.
Le sensei tressaillit.
-Tu sais donc que tu es gravement malade ? Bredouilla-t il.
La prise de Eléanore sur ses pokémons se resserra.
-Evidemment...Je ne suis pas stupide non plus, j'ai bien vu que mes parents ne souriaient plus, j'ai bien vu que des médecins venaient jour et nuit à la maison pour discuter de mon cas, dès mes 4 ans j'ai su, il m'a suffit de venir écouter aux portes la nuit.
-Mais alors pourquoi as-tu fuit ! Tu ne sais donc pas ce que les médecins pensent de ton état ?
L'étonnement, la peur, l'incompréhension se mêlaient à sa voix vibrante.
-Ils pensent, pour les plus optimistes, que je tiendrai jusqu'à mes 20 ans, pour les plus pessimistes jusqu'à mes 16 ans. Et alors ?
Elle avait prononcé ça avec une telle indifférence, que le professeur eut un frisson d'effroi.
-Et...Alors ??! Répéta-t il incrédule.
-Je vais mourir, c'est tout.
-Mais...
-Mr Yuki, comprenez moi. Je sais depuis enfant que je vais mourir, je sais cela et je sais également qu'il n'y a rien à y faire. Un jour je vais fermer les yeux, une crise plus forte que d'habitude va me frapper, je ne vais plus réussir à respirer et je vais mourir. Ce ne sera qu'un mauvais moment à passer.
-Mais enfin comment peux-tu dire des choses pareilles ! Tu es encore enfant, tu as du temps, ne soit pas si pessimiste, la science progresse de jour en jour, un moyen pour te sauver arrivera peut être à temps, mais pour ça tu dois retourner chez toi et attendre patiemment, te plier à la volonté des médecins pour économiser du temps, et encore du temps ! S'emporta le brun.
Lui qui désirait protéger la jeunesse, voir la nouvelle génération grandir et s'épanouir, il ne pouvait pas supporter de voir une si jeune pousse se laisser dépérir.

Eléanore ferma les yeux, puis calmement elle attendit, elle attendit la fin de la tirade qu'elle connaissait par cœur. Une fois celle-ci terminée, elle fixa l'adulte devant elle et reprit indifférente :

-Monsieur, je souffre d'une maladie unique, mon père engage peut-être des savants pour trouver un remède, mais croyez vous sincèrement qu'ils trouveront cela pour sauver une enfant alors que des milliers d'autres pourraient l'être s'ils se concentraient sur une maladie plus commune ?

Mr Yuki fit un pas en arrière face aux arguments de la petite. C'est vrai, pourquoi, devrait-elle être sauvée alors que d'autres non ? Parce que sa famille était plus riche, devait-on hiérarchiser les vies sous ce prétexte, l'une était-elle plus importante que l'autre ?
Avec cet état d'esprit, avec ces circonstances, aucun médecin ne travaillerait sérieusement sur son cas. Eléanore l'avait très bien compris.
-Mais, enfin, tu ne veux donc pas vivre plus longtemps ? Lança le professeur en dernier recours.
Eléanore soupira.
-Si je retournais à la maison, peut être que je vivrais plus longtemps, mais cela signifie que je retournerais dans cette cage qui diminue de jour en jour. Je ne pourrais plus faire de sport, je ne pourrais plus jouer dehors, plus voir mes amis, je finirais ma vie dans un hôpital, sans connaître le bonheur du voyage initiatique...-Elle caressa doucement la tête de son Salamèche puis jeta son regard d'émeraude déterminé dans celui de saphir du professeur
– Je préfère goûter aux vraies joies de la vie, même si cela signifie que le bonheur sera plus court.
Elle baissa ensuite la tête.
-Néanmoins, je comprendrais que vous me dénonciez, après tout votre travail est en jeu. Sachez juste que si tel est le cas je partirai avant. Je ne retournerai pas là-bas.

Sans un mot elle se leva, salua l'adulte et partit.
Mr Yuki resta un moment pétrifié, encore tremblant, pantelant de cette joute verbale. Cette gamine, sous ses airs enfantins se révélait bien plus mature que bien de ses camarades. Elle acceptait son destin malgré sa sévérité.
Comment, comment une si petite fille pouvait-elle se montrer ainsi ? Analyser, trouver, comprendre, accepter, et être encore capable d'avancer, de choisir la vie qui lui plaisait même si elle se dévoilait plus ardue encore ?
Le sensei saisit son journal et lu un passage de l'article, pour être sur que tout cela était bien réel et non un cauchemar.

"Eléanore Sarl reste notre priorité, en effet la petite a subi dans son enfance un grave traumatisme. Depuis son plus jeune âge, Eléanore Sarl souffre d'une maladie malheureusement incurable. Le repos se révèle être sa seule chance de vivre jusqu'à ses 20 ans au centre de soins intensifs de l'hôpital du Bourg Palette.
Il est donc indispensable de la retrouver le plus rapidement possible, la fugue pourrait lui être fatale, nous demandons donc à tous les civils de participer aux recherches et dévoiler la moindre information utile aux forces de polices."


Mais non, tout cela était vrai. Y compris l'analyse de la gamine.
D'un côté, une vie courte l'attendait dans un hôpital triste et morne, d'un autre une existence plus brève encore mais remplie de couleur, de joie, d'aventures...
La mâchoire de Mr Yuki se crispa. D'un geste rageur il froissa le papier et le jeta dans une corbeille. Il rattrapa la gamine, celle-ci dans sa chambre préparait lentement ses affaires, prête à fuir dans l'heure. Le professeur s'approcha, la gamine lui jeta un regard par-dessus son épaule, le visage défait de quitter ses nouveaux amis si brusquement.
L'adulte l'observa un instant, il se gratta la joue, grogna pour chasser la dernière trace de sa conscience en lui et lança avec peine :
-Je ne te dénoncerai pas. Tu peux rester avec Samantha et les autres.
Les yeux d'Eléanore se mirent à briller d'un soulagement sans nom, d'un bond elle se jeta dans les bras du professeur et balbutia des merci à tout va.
Akira se dégagea de cette étreinte, puis n'osant pas la regarder en face, elle qui personnifiait son erreur, tout ce qui mettait sa vie en jeu en l'instant présent, il déclara :
-En revanche maintenant je vous suivrai, pour te surveiller jeune fille !
-Oui, oui !
-Tu prendras tes médicaments et tu feras attention à toi ?
-Promis, promis ! Merci beaucoup monsieur !

Le professeur la vit déballer à nouveau ses affaires, danser avec ses pokémons une seconde, puis courir vers le mess pour rejoindre ses amis.
Une question se posa alors, devait-il révéler le tout à ses amis ?
Non. La pitié ne fait que chasser l'amitié, si jamais la vérité devait éclater, ce serait à Eléanore de la dévoiler, et non lui.
Il soupira, et enchaîna le pas pour rejoindre son élève, la gamine et leurs coéquipiers. Une des dernières particules de conscience qui lui restait lui murmura alors : "Dans quelle mouise t'es tu encore fourré ?"
Mais cette fois il savait parfaitement la réponse.

Ce que Eléa et Yuki ignoraient, c'est que deux autres personnes avaient assisté au débat qui les avait opposés. Angèle et Christopher.
Ils avaient vu déambuler le salamèche de Eléanore dans les couloirs, suivant d'un bon pas celle-ci, l'évidence les avait alors frappé si fort que l'infirmière était accouru à leurs rires pour voir si tout allait bien. Ils avaient bien sûr nié tout en bloc et suivit la dresseuse dans le but de le lui reprendre, et ils avaient surpris leur conversation. Inutile de décrire leur étonnement tout du long du discours.
Ils se hâtèrent de se cacher quand Eléa partit, suivie de monsieur Yuki, et là, derrière une plante verte, ils assimilaient la nouvelle.
-Chris...Qu'est-ce qu'on va faire maintenant ? Bafouilla Angèle.
Aucune réponse, juste un reniflement.
-Chris ? S'inquiéta la jeune femme. Elle se retourna et vit son compagnon, en larmes.
-Angieeee....Pleura-t-il lamentablement. –On peut pas lui voler son pokémon ! Ce serait trop triste de les séparer ! Angie...
-Quoi ?
-Tu as vu comme elle le serrait fort dans ses bras ? Tu as vu comme elle est fière de lui, elle en a besoin pour son voyage....On peut pas faire ça...
-Je sais, moi aussi je comprends...Mais...
-Tu imagines si on nous volait nos pokémons ? Ton Mystherbe ? Et mon Ptitard ? Tu imagines comme on serait tristes alors qu'on a même pas le quart du passé de cette fille !?
-Je sais, mais...
-Mais... ? Bredouilla l'homme dans un reniflement.
-TU AURAIS DU Y PENSER AVANT DE METTRE NOS VIES EN JEU ! Qu'est-ce qui t'as pris de devenir voleur avec un mentalité pareille ! ALORS ECOUTE-MOI BIEN, ON EST PEUT ETRE DES BONNIES AND CLIDE DE PACOTILLE MAIS ON VA LE FAIRE ! PARCE QUE SINON ON EST MORTS ! C'EST CLAIR ?

Christopher opina douloureusement du crâne, et Angèle lâcha son cou.
Elle aussi ne voulait pas en arriver à cette extrémité, mais avec la team Opale et Rocket qui voudraient sûrement se venger d'eux, ils n'avaient guère plus le choix que cette fille.

*

-ELEA ! S'écria Daniel en la voyant arriver. Il lui fit un signe pour qu'elle les remarque et lui montra une place à la table. La jeune fille accourut, elle installa les gamelles de ses pokémons à terre pour qu'ils puissent se goinfrer tranquillement et s'assit à côté de Samantha.
-Alors qu'est qu'il te voulait, Mr. Yuki ? Fit l'adolescente, sa voix trahissant une touche de jalousie.
Eléanore eut un sourire hypocrite ; surtout en voyant le visage de Lucas derrière, celui-ci fulminait.
-Il m'a demandé ce qui s'était passé durant le voyage, pour savoir pourquoi on avait mis tant de temps à venir. Tu sais, il m'avait demandé de te surveiller à sa place pour pouvoir te noter.
-Ah ? Et...Qu'est-ce que tu lui as répondu ? Balbutia Sam, mal à l'aise.
-Que tu ne savais pas quelle tenue mettre pour le retrouver et que donc on avait été retardés ! Sourit Eléa.
-QUOOOIIIII ?
Daniel se jeta sur Sam pour l'empêcher d'attaquer, tandis que Lucas enrageait et demandait furieusement à Eléa « Maintenant dis-moi qui c'est, ce Mr. Yuki, quels sont ses rapports avec ma Samantha Chérie ? ».
Heureusement, le responsable de la dispute arriva innocemment à la tablée, et s'assit à son tour, ce qui calma instantanément son élève. Lucas put alors voir à quoi ressemblait précisément son rival. A peine un coup d'œil vers lui, puis un sur Samantha lui suffit, son visage se crispa, il se pencha vers le poussifeu de Sam qui mangeait sous la table et lança :
-Ecoute, toi et moi, je sais qu'on est pas très amis, mais là il faut savoir voir qui est l'ennemi, alors je te propose un marché, on élimine d'abord cette menace, ensuite on se bagarrera : ok ?
Le poussifeu l'observa, cherchant un possible piège, puis lui serra la patte pour tenir le marché.

Quand Lucas revint, la conversation était revenue, l'intrus se révélait tellement silencieux, qu'on finissait par l'oublier –excepté pour Samantha et Lucas-

-Eléa, tu n'appelles pas ta mère ? L'interrogea Daniel avec intérêt, celui-ci avait d'ailleurs appelé la sienne via la cabine téléphonique du centre avec Lucas –même si lui n'avait pas réussi à joindre ses parents-.
La pauvre Eléa avala de travers sa bouchée. Sous le regard ébahi de ses amis, elle toussota, bafouilla, chercha une réponse mais elle ouvrit la bouche sans qu'aucun son n'en sorte. Honteuse, elle baissa le regard et commença à jouer avec la nourriture de son assiette. Pour lui venir en aide, Mr Yuki fit froidement : « Elle les a appelés avec moi. » Ce qui jeta un froid.
Samantha remarquant alors le drôle d'air de la jeune fille et pour détendre l'atmosphère lança :
-Alors qu'est ce qu'on fait demain ?
-On visite la pension de Pierre d'Argenta ! Proposa Lucas.
-L'arènne ! S'écria Eléa.
-Le musée. Fit Mr. Yuki.
-L'arèneuh !
-La salle de bal, il parait qu'on y donne des concerts tous les jours ! ! Lança Samantha.
-NON L'ARENE !! Hurla la brune.
Tout le groupe se tourna vers Danny, qui n'avait encore rien dit, celui-ci resta un instant, la cuillère dans la bouche, l'air ahuri, puis semblant comprendre ce qu'on attendait de lui il balbutia :
-V-Vous savez moi ça m'est égal !

Et le « débat » recommença, il dura même tout le dîner, même si au final Eléa remporta la victoire puisqu'elle cria tellement fort que la tante de Samantha dû intervenir. Et puis, après tout n'étaient-ils pas tous de futurs dresseurs pokémon ?

Quand ils eurent fini, chacun prit ses pokémons, à moitié assoupis dans leurs bras, et ils partirent en prévision de trouver leur chambre. Ils dormaient tous dans la même, mais elle avait deux salles de bains pour prévenir l'intimité. Seul Mr. Yuki avait le privilège d'en avoir une rien qu'à lui.
Dans le hall d'entrée pourtant, ils rencontrèrent une femme, grande, svelte, une longue chevelure de jais lui descendait jusqu'au genoux, une mèche pourpre lui faisait office de frange, et deux yeux bridés de couleur rubis regardaient timidement l'accueil vide du centre.
Elle portait une tenue étrange rappelant la peau d'un Sévipère, d'après Samantha. Elle tenait un bébé endormi dans ses bras, nul doute que c'était le sien, au vu de la mèche rouge similaire à celle de sa mère qui parcourait sa chevelure châtain. Tout potelé, il suçait son pouce en même temps qu'une drôle de couverture sur laquelle était dessinée un racaillou et cousu un nom : Lalie.
Daniel, intrigué, s'approcha de la femme.
-Bonjour madame, vous avez un problème ? Fit-il gentiment.
La concernée sursauta, et visiblement gênée, répondit :
-Et bien, je viens pour déposer mes pokémons, il faut les soigner pour demain, mais l'infirmière n'est pas là...
Samantha arriva à son tour.
-Vous n'avez qu'à l'appeler avec la sonnette juste ici, c'est comme ça dans tous les centres pokémon, expliqua-t elle.
-Oui, oui je sais, mais je ne veux pas déranger, je vais attendre !
-C'est vrai que ta tante doit débarrasser toutes les tables du dîner et faire la vaisselle avec pour seule aide leveinard et ses deux assistants...Constata Lucas.
-Vous risquez d'attendre longtemps alors ! Et puis il y a des chances pour qu'elle parte dormir juste après ça, lança Samantha à la femme.
-Bon, et bien dans ce cas je reviendrais plus tôt demain...Je ne vais pas déranger.

Ils haussèrent un sourcil, était-il possible d'être si timide ?
Eléanore fit un signe à Samantha, celle-ci soupira.
-Attendez, -La femme se retourna- Je peux soigner vos pokémons, je suis la fille de l'infirmière de Jadielle, cela ne prendra pas longtemps, un tour sur la machine et ce sera réglé, demain ils seront en plein forme.
-C'est vrai, c'est gentil à vous....Merci.
Elle fouilla dans son sac, mais son chargement l'empêchait de se mouvoir correctement, Daniel sourit, Eléa se proposa alors pour tenir le bébé le temps que sa mère trouve les pokéball, mais au moment où elle allait le prendre, Sam le récupéra et le déposa dans ceux de Daniel.
-Eh ! Qu'est-ce qui te prends ?! S'emporta la gamine.
-Tu es tellement maladroite que tu pourrais le faire tomber.
-Hein ! C'est faux je suis pas maladroite !

Un regard de l'assemblée suffit à lui faire comprendre l'énormité qu'elle venait de proférer. Sur ce dernier mot, Eléanore se contenta alors de grommeler tout en observant le bébé dormir dans les bras de Danny.
Il était, ou plutôt, elle était adorable.
Sa mère sortit tout un sac de pokéball et le tendit à une Samantha abasourdie.
-Tous sont à vous ? S'inquiéta l'adolescente.
-Non, bien sur que non, seulement la moitié, les autres sont à mon mari, c'est le champion de l'arène d'Argenta.
-HEIIIN ? Vous êtes la femme du champion ? De Pierre d'Argenta ?
Eléanore n'avait pas put s'en empêcher, elle avait dit ça tellement fort que cela réveilla le poupon qui ouvrit grand les yeux, révélant des pupilles semblables à celles de sa mère et se mit à pleurer à chaudes larmes.
-Maladroite ! Grognèrent ses amis, mais alors que la mère allait reprendre son enfant pour le calmer, Daniel berça la petite et parvint à la faire rire avec des grimaces.
La femme parut décontenancée une seconde, puis elle esquissa elle-même un rire doux face aux mimiques de l'adolescent.
-Mais tu sais bien t'y prendre avec les enfants...Constata-t elle.
-J'ai plein de frères et sœurs, en plus nous vivons dans une ferme où les bébés pokémons, animaux ou humains sont toujours présents...
-Ah oui ? Tu dois être un bon éleveur alors, tu devrais passer à la pension dont s'occupe mon mari, je suis sûre qu'elle te plairait...
-Le champion est aussi un éleveur ? S'étonna Lucas.
Samantha, vit le regard d'Eléanore briller, elle soupira et alla poser les pokéball sur la machine régénératrice, où elles y resteraient toute la nuit, elle configura patiemment l'ordinateur et vérifia qu'aucune des créatures ne nécessitait de soins spécifiques. Pendant ce temps, Eléanore faisait un véritable cours sur Sacha Ketchum et sur ses amis au pauvre Lucas.

Elle lui expliqua que le champion Pierre d'Argenta avait parcouru le monde avec son idole durant des années dans le but de se perfectionner pour devenir le meilleur éleveur pokémon de l'univers, il avait appris de ce fait des dizaines de techniques, aidé des milliers de pokémons en détresse, et bien sûr avait soutenu son ami Sacha ! Après que celui-ci ait remporté sa 1ère ligue d'ailleurs –elle parlait de Sacha évidemment-, Pierre avait décidé de revenir dans sa ville natale pour y établir un logement réservé aux soins des pokémons, donc une pension à la disposition des dresseurs. Peu après son mariage avec la championne d'arène extrême Charline, (la concernée piqua un fard devant le regard ahuri du brun à la suite de cette révélation), Pierre avait été de nouveau nommé champion de l'arène, car son père et sa mère en avaient assez et que ses frères et sœurs restaient trop jeunes pour la reprendre.

La dénommée Charline écouta attentivement l'exposé de la jeune fille, légèrement gênée qu'une enfant en sache aussi long sur sa vie et celle de son mari.
-Mais j'ignorais que Pierre et sa femme avaient eu un enfant, ils ont dû annoncer sa naissance dans un numéro que j'ai loupé...Elle est trop mignonne !
-Oui, c'est un petit ange....Avoua sa mère. –J'y pense, vous êtes des dresseurs, non ? Dans ce cas, venez nous voir demain à l'arène, je vous présenterai Pierre, et je vous ferai visiter la pension et vous pourrez participer au challenge de la ligue si vous y êtes inscrits.
-AH OUI ! Mince il faut s'inscrire pour pouvoir participer à la ligue ! Sam, tu peux le faire s'il te plait.... ?
Devant la bouille larmoyante et les yeux de chien battu d'Eléanore, la brune ne trouva pas la force de refuser, elle se contenta de répliquer un « Toi alors, tu es impossible», elle pianota sur l'ordinateur de sa tante et entra dans le dossier de la ligue pour noter leurs noms.
Charline récupéra son bébé et leur donna rendez vous devant l'arène le lendemain matin.
Le groupe regarda l'horloge du hall, il était tard, aussi ils allèrent se coucher directement, même s'ils n'avaient pas du tout sommeil.

*
L'énorme pokémon chien bondit, sa fourrure rousse tigrée frémit lorsqu'il toucha terre, un homme sur son dos lui fit signe de s'arrêter brièvement, le pokémon pila, il laissa son dresseur sauter à terre puis il s'effondra le souffle coupé, tentant de reprendre un peu de force avant le prochain départ.

Un homme proche de la vingtaine, aux cheveux châtain clair, des yeux d'onyx, lui caressa l'encolure avec compassion. Il se leva, prit une pokéball et en fit sortir un Noctali au pelage luisant. Le garçon à la cape aussi noire que son compagnon s'agenouilla pour être à son niveau, sortit une photo de sa poche et la lui montra.

-Encore une fois, utilise ta capacité spéciale pour essayer de la retrouver, s'il te plait.
L'animal renifla doucement la photo, un bout de tissu des vêtements de la gamine du cliché et la main de son dresseur en guise de réponse, et obéit.

Les rayures jaunes qui couvraient son corps se mirent à luire, de même que ses yeux. Lentement, la tête du petit pokémon parcourut la plaine dans laquelle ils se trouvaient.
Brusquement le Noctali se redressa et se mit à courir dans la direction de la forêt.
Le dresseur eut un sursaut de surprise, rapidement il remercia son Arcanin, le fit revenir dans sa pokéball pour qu'il puisse s'y reposer, et suivit son autre ami.

A mesure que l'animal s'enfonçait dans la forêt, le garçon sentait la peur le gagner, il traversait en courant une partie de la forêt de Jade qui n'était généralement pas le chemin des dresseurs débutants. Régis, car c'était bien lui, imaginait facilement que Eléanore s'y était perdue, cette gamine ne savait pas lire une carte, dès qu'elle en prenait une, elle se mettait à stresser et était capable de confondre le trait signalant une rivière avec celui d'une route...

Mais la forêt de Jade était ancienne, les arbres géants de cette région pouvaient s'avérer dangereux, ils camouflaient parfois d'immenses précipices, de véritables torrents...
Le Noctali stoppa sa course près d'un grand gouffre qui était caché derrière un buisson. Le sang de Régis se glaça.
Il n'osait pas regarder, de peur d'y découvrir Eléanore, gisant sur le sol. Il serra les poings, qu'est ce que dirait Sacha s'il le voyait ainsi ! Dire qu'il l'avait traité de trouillard, perdant, de minable un bon nombre de fois et que lui il restait là sans bouger alors que Sacha se serait déjà jeté au secours de la gamine.
Allez bouge toi de là...Bouge...
Le Noctali observa son dresseur avec étonnement, puis impatient, il tira sur sa cape pour le faire avancer.
Régis fit un pas, puis deux, le précipice se rapprochait, finalement il arriva au bord et resta quelques minutes inerte.
Merci, il n'y avait rien...

Il ferma les yeux et poussa un immense soupir qui lui ôta le poids oppressant sa poitrine.
Il profita pleinement de ces secondes pendant lesquelles il put respirer librement, puis une fois que son cerveau fut mieux oxygéné et paralysé par la peur, il se demanda pourquoi son Noctali l'avait conduit jusqu'ici alors qu'Eléa ne s'y trouvait pas....
Grâce à ses capacités spéciales, son pokémon pouvait trouver dans les ténèbres presque n'importe quoi dans un rayon d'un kilomètre, de plus avec son odorat elle sentait les effluves de tout aussi loin.
Il devait donc y avoir quelque chose qui appartenait à Eléanore ici, Régis se pencha légèrement, mais au premier abord il ne vit rien susceptible d'appâter son Noctali.
Il fit un bref signe de tête à son pokémon et celui-ci bondit, il se posa légèrement sur une corniche et attrapa un bout de tissu qui était suspendu à une grande racine se détachant vigoureusement de la falaise.
L'animal remonta gracieusement et vint se frotter au mollet de son dresseur, le petit fils du prof Chen prit l'objet de la gueule de son ami et l'examina.
Si Noctali l'avait repéré, il devait appartenir à Eléanore, mais puisque le pokémon ténèbres n'avait pas pu repérer celle-ci, alors cela signifiait aussi que la gamine avait quitté la forêt de Jade.
Cela l'étonna quelque peu, son imagination créait une Eléanore soit perdue pendant des mois dans un même endroit, soit une Eléanore blessée voire pire...
Mais finalement, elle devait s'en sortir mieux qu'il ne le pensait.

« Fais confiance en d'autres personne que toi-même ! » Lui avait elle justement hurlé alors qu'il se la jouait la première année de son voyage initiatique. C'est vrai qu'à l'époque son fan club lui était monté à la tête. Il se souvenait encore de la tête de la petite devant le groupe de pompom. Atterrée...
Bref, il reporta son attention sur la bretelle que Noctali avait rapportée, car il s'agissait bien d'une bretelle, une bretelle de quoi, il l'ignorait, mais ça n'avait pas vraiment d'importance, maintenant ce qui comptait c'est qu'il possédait une odeur plus ou moins récente d'Eléanore, ses recherches n'en seraient que plus facilitées...
Il regarda sa montre puis à nouveau la falaise, son pokémon l'imita, il haussa un sourcil, et lâcha malgré lui :
-Comment ce bout de tissu est arrivé là....Elle n'est quand même pas assez maladroite pour tomber d'ici...
Il marqua une pause.
-Si bien sur que tu l'es (qu'elle l'est) ...
Il soupira d'exaspération.
Il était tard, il ne pouvait pas demander à Arcanin de le conduire jusqu'à Argenta, il n'avait plus qu'à camper ici cette nuit.
Il fit sortir ses autres pokémons, vu qu'il n'avait pas de tente –il était parti trop précipitamment- ils allaient dormir regroupés pour se tenir chaud. Régis sortit son ordinateur portable et analysa brièvement le relief de la forêt de Jade, ça allait prendre la journée sur le dos d'Arcanin pour la parcourir entièrement, mais peu importe il devait être sûr qu'Eléanore ne s'y trouvait plus avant de partir pour la prochaine étape Argenta.
Son Noctali vint se frotter à lui pour le réconforter. Régis lui caressa le haut du crâne distraitement.

Il repensait à sa journée, quand il avait montré la photo d'Eléanore –certes datant de quelques années car la petite peste avait pris soin de détruire toutes les récentes-, la plupart des gens lui avaient dit ouvertement qu'ils en avaient assez d'en entendre parler, de cette gamine.
Mais il n'avait pas le choix, c'était leur seul indice, Eléanore avait été assez intelligente pour tout effacer derrière elle, même son ordinateur elle l'avait volontairement contaminé avec un virus virulent pour qu'il soit entièrement «out».
Le seul moyen pour la retrouver semblait être le porte-à-porte...Et encore...
Mais avait-il vraiment envie de la retrouver ?
A peine cette pensée lui avait-elle effleuré l'esprit qu'il la chassa d'un revers de main. Evidemment qu'il voulait ! C'était son amie, il ne pouvait pas la laisser dans cet état.
Mais quel état ?
Elle devait s'amuser plus que jamais, elle pouvait enfin faire le voyage initiatique qu'elle avait tant désiré. Avait-il le droit de l'y arracher, pour qui plus est la ramener dans un hôpital ?
Surtout que si elle était malade tout était entièrement de sa faute, de la sienne et de celle de Sacha.

Il se souvenait parfaitement de cette affreuse journée.
Les deux garçons devaient partir dans 2 mois en voyage initiatique, ils étaient donc particulièrement impatients, surtout Sacha.
Il faisait beau au Bourg Palette, un grand soleil brillait, prêt à filer une insolation à quiconque sortirait sans chapeau. Eléanore, une petite fille de trois ans et qui allait vers les quatre, ne cessait de les suivre, au début les deux garçons déjà pas très amis entre eux, l'avaient trouvé collante et agaçante, mais petit à petit, la gamine les avait conquis.
Elle ne parlait pas énormément, vu que sa prononciation n'était pas excellente ; mais elle était vive et ne se plaignait jamais. Il lui suffisait d'un sourire pour régler les différents, et ses gaffes détendaient l'atmosphère tendue du trio n'importe quand.
Cet étrange Trio avait fait parler de lui, il est vrai qu'on ne voit pas souvent deux garçons de 10 ans jouer avec des fillettes à peine sorties de leurs couches. Mais, au fur et à mesure on avait trouvé le groupe mignon, la petite touche naïve de Eléanore semblait être la clef de voûte de l'amitié explosive entre Sacha et Régis.
Les parents de chacun avaient fait connaissance grâce à eux, et ainsi la mère d'Eléanore confiait sa fille aux deux garçons sans l'once d'une hésitation, elle savait que jamais les gamins ne laisseraient quelque chose arriver à son trésor.
Elle n'avait pas tort, mais parfois on ne peut tout simplement pas lutter.

Ce jour là, Eléanore avait rejoint Régis et Sacha malgré le début d'une petite angine, elle avait échappé à la surveillance de sa mère en sautant du balcon. –La fillette avait le sang chaud, et pas froid aux yeux-
Malheureusement elle ne portait alors qu'une fine robe de dentelle, et les garçons avaient l'intention de partir en exploration dans la réserve naturelle du prof Chen, histoire de voir des pokémons de plus près. Le style vestimentaire ne convenait donc pas.
-Hey, j'ai une vieille Salopette, elle devrait être à ta taille, ainsi qu'un t-shirt, essaye ! S'exclama Régis en fouillant dans les tiroirs de sa commode.
La petite se changea rapidement, le tout était vraiment trop grand pour elle, les bretelles de la salopette flottaient au lieu de soutenir.
-Je suis revenu ! Eléanore, j'ai ramené une ceinture, et un chapeau ! S'écria Sacha en rentrant en trombe dans la chambre de son rival.
-Hein ! Je t'avais demandé de ramener une écharpe aussi, t'as encore oublié espèce d'idiot ! S'énerva le petit fils du prof Chen avec fureur.
-Oh c'est bon, elle va pas en mourir non plus ! Puis vu comment elle flotte dans ses vêtements elle n'a pas besoin d'écharpe !
Sur ce il lui fit une grimace de défi et aida Eléanore à s'habiller, la ceinture dû être mise au niveau des aisselles mais au moins la salopette ne tombait plus par terre en la laissant en culotte.
Alors que Sacha allait lui mettre un chapeau de paille sur la tête, Régis l'arrêta et lança agacé :
-Un chapeau de paille ? Non mais t'as vu sa taille, il est aussi grand qu'elle !
-Roh c'est bon ! Lâche moi, qu'est ce que ça fait qu'il soit grand ?
-Il va pas tenir andouille !
-Suffit de l'attacher alors !
-Et avec quoi ? Avec un foulard ? Oh mais tu l'as oublié pauvre minable !
-Minable toi-même !! T'es même pas capable de lui trouver des fringues à sa taille !
La querelle empirait, le volume ne cessait de grimper, et bientôt ils allaient en venir aux mains, à coup sûr.
Soudain, Eléa s'avança vers Sacha et lui prit le chapeau pour le poser sur sa tête, il était immense, ses longs cheveux bouclés s'emberlificotaient dans ses mailles, mais la petite n'y prêta pas attention, avec un grand sourire elle lança un rayonnant « Merci ». Celui-ci suffit à calmer les rivaux, Eléanore continua sur sa lancée :
-Comme ça je porte les affaires de Régis et de Sacha !
Eléanore ne s'en rendait probablement pas compte, mais elle était parvenue, par cette simple phrase, à les réconcilier, en apparence, parce que Régis trouvait toujours que Sacha exagérait avec son chapeau, mais Eléanore avait l'air si contente avec qu'il ne pouvait plus lui reprendre maintenant....

Ils étaient donc partis à la conquête imaginaire de pokémons, aucun d'entre eux n'avaient le droit de rentrer dans la réserve du prof Chen, pas même son petit-fils. Tout le Bourg Palette savait que des dizaines de gamins désobéissaient à cette règle, même Samuel Chen, mais celui-ci ne s'en formalisait pas, après tout la présence de jeunes enfants était bénéfique aux pokémons, elle les rendait doux et joueurs, l'interdit n'était pas respecté et alors ? Au contraire le fait de briser cette règle rendait le jeu encore plus attrayant.
Régis, Sacha, et Eléanore, après avoir marché pendant une bonne heure, s'étaient cachés derrière un buisson et contemplaient un troupeau de Ponyta qui broutait paisiblement dans le pré. Ils n'osaient pas approcher plus que cela au début et restaient camouflés (pour eux, car les animaux sentaient parfaitement leur présence).
-Qui sont ces pokémons ? Demanda doucement Sacha.
-Des Ponyta, et des Galopa. Répondit avec agacement Régis.
-C'est quoi la différence entre les deux ? Continua le brun à la casquette.
-Les Galopa ont une corne et courent beaucoup plus vite.
-Ah ouais cool ! Tu crois qu'on pourrait en monter un ? S'enthousiasma Ketchum.
-Quoi ! Hors de question ! Ce sont ceux de mon grand père et des autres dresseurs du Bourg Palette !
-Allez, juste un peu, ça ne va pas leur faire de mal !
-Tu es impossible, et puis comment veux-tu monter un Galopa alors que tu es incapable de faire du vélo sans te ramasser !
-Hein ?! C'est faux je sais faire du vélo !
-Seulement depuis l'année dernière !
La bataille recommença, Régis empêchait Sacha de lui coller un poing, et Sacha mettait plus de volonté à protester qu'à cogner.
Mais par un coup du sort, Chen donna un petit coup à Eléa qui contemplait toujours émerveillée les Ponyta. Cela n'était pas bien violent, mais cela suffit à faire s'envoler le chapeau de la gamine. Celle-ci, voyant son précieux couvre-chef donné par Sacha partir, se mit à le poursuivre immédiatement. Celui-ci roula jusqu'aux sabots d'un Ponyta, la fillette sans se soucier du danger s'approcha du pokémon.
Le cheval, sentant la bonne paille se mit à le mâchonner, Eléanore écarquilla les yeux de surprise, elle se retourna vers les deux garçons toujours aux prises l'un de l'autre dans leur cachette et lança naïvement :
-Le pokémon, il mange le chapeau de Sacha !
Les rivaux se levèrent d'un bond, avec des regards ahuris ils observèrent la petite, le cheval, le chapeau. Sacha voyant la selle sur le dos du Ponyta éclata de rire et lui cria :
-Reprends-lui Eléanore, monte sur son dos et reprends-lui !
Ce qui fit réagir Régis au quart de tour.
-Eléanore non c'est dangereux !
Mais la gamine avait déjà décidé de reprendre son bien, mais elle était trop petite pour monter sur la selle, et en plus elle ne savait même pas à quoi cela servait, alors elle imagina.
Elle attrapa un bout de son chapeau, passa un bras dans ce qu'elle croyait être des poignées, (ce qui se révéla être en vérité un étrier) et tira.
Une des bretelles de sa salopette s'accrocha à l'équipement équestre sans qu'elle ne s'en rende compte.
Régis et Sacha, voyant déjà la bêtise venir se précipitèrent vers la gamine, mais c'était trop tard.
Le cheval lâcha docilement le couvre chef de la petite, Eléanore emportée dans son élan se cogna contre le Ponyta dans un cri. Le pokémon rua effrayé par ce soudain ordre et par le bruit qui lui vrilla les tympans sans raison.
D'un bond il partit au galop, Eléanore se fit happer elle aussi à cause de la bretelle coincée dans la selle.
La vitesse était si grande que ses pieds se soulevèrent, elle ne touchait plus terre ; une faible douleur à l'épaule la tirait en avant, elle lâcha le chapeau.
Régis et Sacha tressaillirent, le Ponyta passa entre eux et s'enfuit à vive allure vers la forêt.
Leur sang ne fit qu'un tour, ils se jetèrent à sa poursuite, mais le pokémon était trop rapide, ils arrivaient à peine à le garder dans leur champ de vision.
La peur leur tenaillait le ventre, ils craignaient que Eléanore ne se mette à pleurer sous la panique, qu'elle se blesse...
Ce qui n'était pas du tout le cas, la petite voyait le monde défiler à tel point qu'elle ne discernait que des tâches de couleur formant d'étranges formes, le vent sifflait dans ses oreilles, son cœur battait si fort, elle aperçut rapidement les silhouettes de ses amis, et elle rit aux éclat en leur criant : « Regardez je vole !! Je suis plus rapide que vous ! »
De toute évidence elle ne se rendait même pas compte que le Ponyta s'enfonçait de plus en plus dans le bois.
Soudain, Sacha bifurqua, il grimpa sur une colline le plus vite qu'il put et s'arrangea pour se retrouver au dessus du cheval, il sauta.
Le choc fit ruer le pokémon, Sacha lui hurla de se calmer, mais encore plus apeuré celui-ci redoubla l'allure distançant Régis de plus en plus.
-Oh bah non tu m'as rattrapé...fit Eléa avec une moue en remarquant le brun sur le dos de l'animal.
-Ouais, tu croyais quand même pas que tu allais t'amuser toute seule ! Rétorqua le futur dresseur.
D'une main tremblante, due à la force du vent, il défit la sangle de la selle. La gamine crut alors que son cœur avait été happé loin d'elle, elle crut aussi partir le rejoindre durant une seconde, mais Sacha la rattrapa et la ramena vers lui, la selle seule s'envola loin de la monture et percuta violemment un rocher.

Quand il vit le manège, Régis souffla de soulagement, il ralentit, et reprit sa respiration, maintenant Sacha n'avait plus qu'à arrêter le ponyta en tirant sur les rênes.
Même un minable en est capable, de ça....
Par malheur le minable n'eut pas le temps de le faire.
Leur monture sauta à nouveau pour éviter un tronc d'arbre qui encombrait la route, et il tomba pile dans un nid de Rafflésia, sous l'effet du spore que les pokémons fleurs vaporisaient, l'animal se cabra, envoyant faire leur baptême de l'air à ses cavaliers clandestins. La main de Sacha se prit dans le nœud des rênes et son poignet émit un crac sinistre, sous le coup de la douleur, il lâcha Eléanore.
La fillette disparut dans le tas de Rafflésia.
Quand Régis arriva, Sacha essayait de reprendre sa main à un Ponyta enragé, les pokémons plante faisaient vrombir leurs pétales en émettant leurs poudres spécifiques pour tenir les intrus éloignés.
Les deux garçons étaient à l'abri, le Ponyta, paniqué, augmentait la puissance de ses flammes dorsales pour qu'elles brûlent les spores, mais Eléa, où était Eléa ?
Le petit-fils du prof Chen accourut vers son ami à la casquette et défit les lanières qui le retenaient vivement. Le garçon tomba à genoux en serrant son articulation, les dents serrées pour ne pas crier.
Le Ponyta libéré, ne partit pas pour autant, il était paralysé, par sa propre peur ou par celle des enfants à ses côtés, personne ne le sut jamais.
Régis s'agenouilla pour examiner la blessure, il pensa d'abord que le garçon n'avait rien mais il se rendit alors compte que la main qui pendait lamentablement ne se trouvait pas dans une position normale.
-J'ai lâché Eléanore ! Bafouilla le brun. –Il faut la retrouver ! –Il voulut se relever mais Régis l'en empêcha en le retenant par le poignet blessé ce qui lui arracha un cri.
-Ne fais pas ça, les spores des Rafflésia sont extrêmement dangereux ! Je vais chercher mon grand père !
-Et Eléanore ? Eléanore ! Eléanore ! Hurla Sacha –Réponds Eléanore ! REPONDS MOI !
Un mince gémissement leur parvint ainsi que des hoquets.
-Elle est là ! Il faut aller l'aider !
-Je vais chercher mon grand-père ! Lui, il saura quoi faire, toi, tu t'arranges pour la repérer, et pour la garder éveillée, c'est clair ! Si elle s'endort à cause de spores c'est terminé, c'est clair ?
Sacha avait dégluti et avait opiné du chef.
Régis était alors reparti vers le laboratoire, en les laissant seuls.

Il lui fallut une heure, une longue et interminable heure pour trouver son grand-père, pour prévenir les secours, l'ambulance, la mère de Eléanore et celle de Sacha.
Une heure où il n'avait vu que des visages terrifiés, des cris, pour la première fois de sa vie il avait vu son grand-père manquer de sang-froid, pour la première fois il avait vu une grande personne pleurer, pour la première fois il avait vu des pompiers, du remue-ménage dans le bourg perdu dans lequel ils se trouvaient, et durant une longue heure tout n'avait été que cris, que panique....
Une longue heure, beaucoup trop longue.
Quand ils étaient arrivés, Sacha n'était plus là, le Ponyta hennissait, ruait, il montrait un passage à travers les Rafflésia et leurs spores.
Sacha se trouvait étalé au sol, la main dans une sorte de terrier sous un talus. Les ténèbres se mouvaient en dedans, d'innombrables paires d'yeux mauvais, jaunes fixaient l'assemblée avec un sifflement sinistre.
-Vite, elle est dedans...Eléanore est dedans !
La voix faible de Sacha leur parvint, le gamin, paralysé par les spores tourna difficilement la tête dans leur direction et répéta sa phrase.
-Vite...Elle ne me répond plus...Je crois qu'elle s'est endormie....
Comme Sacha essayait de se relever, sa main bougea, ce qui provoqua un nouveau concert de sifflement, brusquement, un Abo, probablement apeuré par le mouvement, mordit vivement le bras du garçon.
L'assemblée d'adultes fut parcourue d'un cri étouffé.
Régis savait ce que cela signifiait, il avait passé trop de temps avec son grand-père pour l'ignorer.
Les pompiers arrivèrent, avec leurs casques, ils purent traverser le nuage de spores et ramener Sacha qui commençait à perdre conscience. Régis s'avança vers son ami, pendant que son grand-père, protégé lui aussi par un masque, partait aider les pompiers à sortir Eléanore de là. Le garçon observa son ami à la casquette, puis soudain, toute la peur, toutes les émotions qu'il tentait vainement de garder pour lui jusqu'alors sortirent en un souffle.
-Espèce d'idiot ! Je t'avais dit de rester près du Ponyta ! Je t'avais dit de m'attendre !
-J'ai demandé au Ponyta d'attaquer pour rejoindre Eléanore...Elle avait si peur...Elle pleurait....répondit faiblement l'idiot.
-Je t'avais dit de l'appeler ! Je t'avais dit de la garder éveillée ! T'est...t'es...T'es QU'UN MINABLE ! Même pas capable de la garder éveillée !
-Régis...Balbutia Sacha, alors que sa mère le tenait dans ses bras et qu'un médecin le prenait en charge.
-Maintenant elle va...tu vas...Elle...Elle va mourir....
-Régis...Tu pleures....
Le petit-fils de Chen sursauta, il tenta vainement d'essuyer ses larmes, mais de nouvelles apparaissaient encore et encore, toujours, un hoquet puis une nouvelle vague, et lui, lui il le regardait avec un sourire faible, alors qu'il commençait à s'endormir. Mais c'était lui le minable ! C'était lui qui ne pleurait pas ! Il ne comprenait donc pas cet idiot, qu'Eléanore allait mourir ! C'était lui le minable...lui...Seulement lui !
-On l'a ! Retentit une voix derrière son dos.
Régis fit volte face, mais sa mère le prit dans ses bras pour qu'il ne puisse pas tout voir, Délia faisait de même avec Sacha.

Tout le monde pensait qu'elle était morte à cet instant, pourtant, quand on dépêtra le petit corps frêle de cet amas de serpents endormis par les gaz des pompiers, quand Eléanore réapparut enfin de cette masse informe et visqueuse, elle brillait.
Ses yeux émeraude grands écarquillés, du sang s'écoulant de sa tempe, des traces de morsures partout, les cheveux poisseux de boue et de sang, le corps d'Eléanore pourtant brillait d'une lumière douce et apaisante. Les spores des rafflesias étaient comme repoussés par cette aura sacrée.
Le prof Chen se hâta de la ramener auprès de sa mère, A peine avait-elle quitté les bras du professeur que la lumière se dissipa, les pupilles dilatées de la fillette retrouvèrent un éclat et elle se mit à tousser violemment. Marina éclata en sanglot, elle serra sa fille contre elle, son mari prit à son tour sa petite dans ses bras et pleura à son tour :
-Pilou...Pilou, nous fait plus peur comme ça...Pilou....
Eléanore regarda son père puis sa mère, avec panique, elle ne comprenait plus, elle était perdue, sous le choc, elle avait l'air de ne même plus savoir qui était les gens qui la serraient dans leurs bras. Elle dut vouloir dire quelque chose, elle ouvrit la bouche, mais seul un son rauque en sorti ; elle réitéra la chose, mais encore une fois une quinte de toux la prit, un des pompiers s'écria alors : "Elle s'étouffe !"

Régis ne gardait que peu de souvenirs après cela, les détails s'étaient effacés de sa mémoire.
Il se rappelait vaguement une ambulance, des voix, des cris, le visage de Eléa sous ce masque à oxygène, Sacha perdant conscience à son tour, une baffe magistrale...
Les jours qui suivirent furent tous aussi confus les uns que les autres. Sacha se réveilla le lendemain ; lui aussi se prit une claque de la part de sa mère, il leur raconta brièvement ce qui était arrivé la veille : il avait entendu Eléanore hurler si fort qu'il n'avait pas pu se retenir, il avait attrapé le Ponyta et celui-ci avait lancé un lance-flamme, écartant les Rafflesia. Il avait ensuite vu le terrier et croyant les spores définitivement dissipées, il n'avait pas réfléchi....Bien sûr, il s'était ensuite fait surprendre par la paralysie, et Eléanore avait hurlé une dernière fois avant de ne plus répondre du tout....
Sacha avait une belle fracture, les morsures d'Abo avaient d'ailleurs failli infecter l'os brisé, surtout que l'action combinée des spores et du venin ne faisait pas bon ménage. Sans l'intervention des médecins il aurait pu perdre l'usage de son bras.

Depuis ce jour, Régis avait senti grandir en lui pas une répulsion, ni du dégoût mais plutôt de la pitié envers ce gamin qui avait agit inconsciemment, se mettant sciemment en danger en vain.
Eléanore qui avait perdu connaissance avant son arrivée à l'hôpital, resta endormie plus d'une semaine.
Le venin des Abo avait été impitoyable, il n'avait pas accentué le début d'angine de la gamine, il l'avait fait littéralement muter, les spores n'avaient fait qu'empirer encore plus le problème respiratoire. Son corps de gamine ne pouvait combattre de tels microbes, provoquant fièvre, toux, crachement sanguinolent....A vrai dire les médecins pensaient la voir partir dans la nuit.
Mais elle survécut.
A son réveil, elle paraissait même en pleine forme, plus que jamais. Elle les avait regardé, avait caressé les cheveux de sa mère, et murmuré : « j'ai fait un drôle de rêve.... ».
Par la suite, elle eut le droit à toutes sortes d'examens. On remarqua un étrange phénomène, une zone habituellement inactive du cerveau s'était brusquement mise à fonctionner, et apparemment c'était cette activation cérébrale qui la maintenait en vie avec un corps aussi catastrophique.
Une autre chose changea, à partir de ce jour, Eléanore leur apparut beaucoup plus mature, la Eléanore du passé et celle du présent étaient pratiquement identiques, sa personnalité, tout se stabilisa, et n'évolua plus. Outre sa peur bleue pour les serpents et les chevaux, elle devint aussi beaucoup plus proche des pokémons également, elle semblait comme en emphase avec eux par moment.
Elle n'en était pas moins toujours aussi adorable.
On pensait que l'affaire était close, on recommença à vivre.
Mais une crise la saisit à nouveau quelques semaines plus tard, plus terrible que la précédente, et après un nouveau séjour à l'hôpital, le verdict tomba.
Régis ferma les yeux, Noctali se lova contre son torse.
Contrairement à Sacha qui avait assimilé cet évènement à un accident, Régis lui, croyait sincèrement que tout cela était de sa faute.
On avait beau lui répéter le contraire, c'était de sa faute, il le savait, car s'était lui qui avait proposé ce jour-là de partir en expédition chez son grand-père.

*

Un homme roux accroché aux pattes d'un oiseau aux ailes sombres écoutait attentivement le « bip, bip » constant de la machine qu'il tenait.
L'écran semblable à celui d'un radar, indiquait deux points rouges non loin du centre.
Le clair de Lune baigna son visage d'une lueur d'argent, prêtant une seconde cette teinte à ses yeux.
L'instrument dans sa main droite se mit à vibrer. Les cibles se trouvaient juste sous ses pieds ; d'un geste il rangea la machine dans son sac, noir. La lune fut cachée par un nuage.
Il abaissa son regard sur le bâtiment en dessous de lui : le centre pokémon d'Argenta.
D'un murmure autoritaire, il ordonna à son pokémon de le déposer.
L'oiseau né des ténèbres atterrit sur le toit de l'établissement. Un rayon lunaire le frappa à nouveau, il s'agissait d'un adolescent de 17 ans nommé Silver, et d'un Cornèbre.
Le regard d'argent fit revenir son pokémon dans une balle métallique.
Un rictus déçu se forma sur sa figure.
-Les idiots...Ils n'ont même pas enlevé leurs uniformes de la team Rocket. Ils ne savent pas qu'il y a un émetteur dans chacun d'eux ?

Il lâcha un grognement agacé.
Dire que ces personnes incompétentes avaient réussi à voler le nouveau projet de la Team et à détruire le laboratoire de recherche où étaient réunies toutes ses données.
Soit ils sont brillants et préparent quelque chose, soit ce sont des demeurés qui ne comprennent même pas la portée de leurs actions....
Un visage s'imposa dans son esprit. Celui d'un jeune garçon qu'il avait connu autrefois et qui réagissait exactement comme ça. Et si c'était lui... ?
Il réfléchit une seconde, puis secoua la tête avec un sourire amusé, non bien sûr que non, il était bien trop bête pour faire une telle chose, même avec sa chance monstrueuse ! Et puis il lui manquerait une raison de faire ça....
Il sortit un dossier de son sac, là-dessus il y avait la longueur d'onde des uniformes des présumés voleurs, qu'il avait déjà entré dans sa pokémontre, une photo inutilisable envoyée par les caméras de surveillances avant qu'elles ne sautent, et l'explication brève sur le salamèche volé.
Rien de bien passionnant, apparemment un certain professeur Mirage avait inventé le moyen de créer des pokémons à partir de données informatiques, les animaux ainsi matérialisés pouvaient avoir une réelle consistance physique dans une zone délimitée. La team Rocket, à la mort du savant avait repris les recherches et les avaient améliorées afin de pouvoir réellement concevoir des pokémons à partir de simples documents informatiques. Apparemment ils avaient réussi, et ils avaient mis au monde ce salamèche comme prototype, non seulement il était plus fort que la moyenne mais il détenait ancrée dans son ADN la formule clef.
Silver crocheta habilement la serrure de la porte du centre pokémon et y pénétra discrètement. Des années de pratique avaient fait de lui un véritable professionnel, aussi indétectable qu'une tache d'encre dans une nuit ténébreuse. Pas que cela l'enchantait, mais c'était ce qu'il savait faire de mieux, et puis il avait un but, et pour l'atteindre tous les moyens étaient bons.
Il se glissa rapidement entre les machines de régénération du centre sans un seul coup d'œil vers les pokéballs entreposées ne demandant qu'à être prises.
Il observa silencieusement les couloirs déserts du centre, soudain un son étouffé lui parvint.
-Ahh...-bailla l'infirmière Joëlle-, je déteste faire des rondes la nuit, pas toi Leveinard ? La prochaine fois, je demanderai à Christopher et à Angèle de s'en occuper....
La femme en chemise de nuit passa comme si de rien n'était et continua son chemin pour voir si tout le monde respectait le couvre-feu.
Silver ressortit de sa cachette une fois que le bruit des pas de l'infirmière se fut atténué.
Christopher et Angèle ? Il croyait pourtant que les infirmières travaillaient seules, seulement soutenues par leur Leveinard ridicule. Pourtant, si elle pouvait se permettre de réveiller des gens pour qu'il fasse une ronde de nuit à sa place, c'est qu'ils devaient travailler pour elle.
Il eut un sourire, bah voilà ce n'était pas bien compliqué, en quelques heures, non seulement il avait découvert la cachette des traîtres, mais leurs noms aussi. Mais il ne fallait pas se reposer sur ses lauriers pour autant, il voulait vérifier son hypothèse et trouver les uniformes comme preuve. Doucement il fit sortir deux pokémons de leurs balles argentées et pourpres.
Le Cornèbre réapparut dans un éclair rouge, suivit de près par un Farfuret à l'air rusé.
-Vous savez ce que vous devez chercher. Expliqua brièvement Silver.
Les deux pokémons hochèrent docilement de la tête et se mirent en route aussi discrètement que possible.
Sans plus attendre, lui aussi partit, il se dissolut pratiquement dans les ténèbres, ne laissant voir par moment, quand un rayon lunaire le touchait, un regard argenté.

*

Chris et Angèle observaient craintivement la chambre de Eléanore et Samantha. Ils déglutirent, allez, c'était le moment, ils devaient la voler maintenant cette maudite pokéball contenant Salamèche....
-Vas-y....Souffla Chris à Angèle.
-Non vas-y Toi !
-Toi !
-Non toi !
-Allez !
-C'est de ta faute si on en est là, alors va chercher cette foutue pokéball !
L'homme aux cheveux blancs soupira face à l'argument de sa coéquipière et analysa la situation.
Distance le séparant de la cible, hum, environ 3 m...Difficulté probablement nulle...La seule épreuve à passer étant celle de la dresseuse qui dormait dans le lit juste à côté du sac contenant la cible.
Allez, il avait réussit à voler les Rocket, alors une gamine cela devait être du gâteau. Bon, ce n'était pas très fair-play, ni très gentil, surtout qu'il connaissait la situation de la gamine mais...
-Grouille ! Siffla Angie avec un regard furieux.
Parfois, cette fille lui faisait plus peur que les teams Rocket et Opale réunies.
Bon allez GO !
Tentative numéro 1 :
Christopher commença à ramper jusqu'au sac, mais à peine avait-il fait deux mètres qu'un crac retentissant se fit entendre. Angie avait encore son genou sur un pan de son pantalon....Ce qui a fait crac...c'est malheureusement ce qu'il croit.
Echec.
Tentative numéro 2 :
Après tout ce n'est pas bien sorcier, et il n'allait pas se laisser abattre pour autant ! Go, allez voilà il rampe, il rampe, tiens pourquoi ça tire tout d'un coup, bon c'est pas grave, il vaut mieux ignorer....
...il a vachement mal au crâne quand même, ça tire pas mal....
Bon pas grave, il tend la main vers le sac, il y est presque, presque....
Tiens pourquoi ça n'avance plus ! Sa main ne bouge plus !! Allez il reste deux centimètres à peine, allezzz ! Aiie ça fait mal au crâne....
Et si, et si soudainement son cerveau faisait une surchauffe ? Et s'il se détraquait, il allait perdre l'usage de ses membres au secours ! Vite à l'aide ! Il devait voir un médecin, un médecin !
-Chris, tes cheveux se sont coincés avec un écrou de l'échelle du lit superposé, je te l'ai déjà dit mille fois que tu les as beaucoup trop longs pour un garçon !
Echec, encore.
Tentative numéro 3 :
Bon, ce n'est pas parce qu'il a les cheveux très longs que ça fait de lui un mauvais voleur, juste une petite crise de panique que tous les grands doivent surmonter ! L'ennemi avait remporté une bataille mais pas la guerre ! Allez, il pouvait le faire ! On rampe, on rampe...oui il y est, il tend la main ! Il touche le sac, il touche le sac, il y est arrivé, il y est arrivé ! T'as vu Angie ? Hein, hein, Angie ? T'as vu, Pan dans les dents !
Et effectivement : Pan dans les dents.
Eléanore venait de rêver qu'elle remportait le badge de l'arène et que pour fêter ça elle faisait un beau coup de pied sauté, alors, le pauvre Chris qui se trouvait sur la trajectoire du dit pied se le prit de plein fouet.
C'est qu'elle avait le sommeil agité.
Enfin, bon Chris allait avoir besoin d'un bon dentiste, mais il touchait le sac, donc au but, hors de question d'abandonner, vite, vite...
Il fouille activement le sac, il voit enfin les pokéballs tant désirées, allez un dernier petit effort et...
PAN, re dedans.
Samantha venait de balancer son oreiller par-dessus bord pendant son sommeil, du haut de son lit, ça faisait mal, surtout quand un Poussifeu s'est emberlificoté dedans et que, de mauvaise humeur, il envoie des flammèches pour se venger de la première personne qu'il voit, c'est à dire, Chris, encore.
C'est bon, là il signait l'armistice, il avait perdu la guerre, hissez le drapeau blanc....
Echec et mat
-Roh, tu es impossible, grogna Angèle.
Furieuse, elle se leva, fit trois pas dans la chambre des gamines sous les regards terrifiés de Chris, elle attrapa le sac, fouilla dedans et en ressortit la pokéball triomphante.
Elle refit trois pas, frôlant la mort à chaque centimètre (du point de vue de son partenaire) ; et sortit de la chambre.
-Voilà la pokéball !
Elle ne put s'empêcher d'afficher une mine triomphante à la suite de sa victoire.
Allez, qui sait un jour peut-être deviendrait-elle la prochaine dictatrice de ce monde ! Ah, ah pour l'instant applaudissez-la, oui c'est ça glorifiez-la –
-Pathétique...
La jeune femme eut si peur en entendant cette voix froide qu'elle en lâcha sa prise et sauta dans les bras de son coéquipier pour s'y réfugier toute tremblante.
Pour la dictatrice, on repassera....
Un jeune homme beaucoup plus jeune qu'eux leur fit face, ses cheveux pourpres dans la pénombre et son regard bleu à l'éclat d'argent. Il ressemblait à un fantôme vengeur avec sa peau blafarde et son air spectral.
-Quand vous volez une pokéball, vérifiez d'abord si elle contient un pokémon....Déclara-t il en ouvrant le butin de Angèle qui se révéla être totalement vide.
Il remarqua alors les costumes camouflés derrière la blouse d'assistants infirmiers. L'uniforme de la team Rocket.
-Vraiment minable.... –Il soupira exaspéré- Je n'arrive pas à croire qu'il y a plus bête que lui....
Les deux voleurs tremblaient comme des feuilles secouées par le vent d'automne.
-Qui...Qui êtes vous ? balbutia Christopher en tentant de se relever –mais Silver lui jeta un regard tellement froid que celui-ci se rassit comme un enfant pris en faute.
-Suivez-moi, il va falloir qu'on parle....
Et sans attendre, il se retourna et montra une pièce vide, une chambre de 4 places réservée aux dresseurs de passage.
Les deux voleurs avaient bien trop peur pour oser désobéir, aussi s'y engouffrèrent-ils la tête basse, la mine défaite. Silver marqua une pause, remarqua la porte de la chambre de Samantha and co ouverte, et la referma lentement, sans daigner jeter le moindre coup d'œil à la cible que lui avait demandé de ramener son père.
Il avait d'autres plans.