Destins liés ~Crépuscule~ de fan-à-tics

Retrouvons nos deux héroïnes Eléanore et Samantha, sur le chemin d'Argenta, leur première escale sur la route de la ligue pokémon. Après bien des péripéties, où elles y trouvèrent deux camarades, Lucas et Daniel, ainsi qu'un but plus précis pour Sam : devenir championne d'arène ambulante. Nos deux adolescentes sentent l'entente du groupe de plus en plus présente. Plus de disputes inutiles, plus de bagarres entre elles, oui, l'amitié pointe sa lumière bienveillante sur elles alors qu'elles continuent toujours plus déterminées vers Argenta !

-A droite !
-NON A GAUCHE !
-A DROITE !
-A GAUCHE !

Hum, enfin, disons presque plus de disputes.

-Non de la purée !
-Non du poisson !
-PUREE !
-POISSON !!

Holà ! Calmez vous un peu, j'essaie de mentir à votre sujet !

-LA FERME !

...

Bon retrouvons donc notre groupe de joyeux lurons, plus précisément Lucas et Daniel qui parviennent à supporter ces deux filles.


Alors qu'ils avaient encore gaspillé deux autres jours dans cette maudite forêt dont ils ne voyaient plus le bout, ils décidèrent de s'arrêter une nouvelle fois afin de calmer les tensions une bonne fois pour toutes.

Bien sur, on ne pouvait pas dire que leur dernière aventure n'avait servi à rien, au contraire, Eléa faisait beaucoup plus attention à la santé de ses Pokémon et elle respectait Sam pour son don en médecine. Elles commençaient à s'entendre, mais la physique ; rien ne peut y changer, quand il y a de l'électricité dans l'air, généralement ça se transforme toujours en orage. Samantha était beaucoup plus proche de Lucas : celui-ci l'amusait énormément avec ses pitreries amoureuses ; Eléanore de Daniel qui restait toujours zen, et chacune ne pouvait tenir une conversation sans être en désaccord.

Les deux garçons soupiraient, exaspérés par la énième dispute des deux jeunes filles. Il faut dire que dans la matinée, il y en avait eu déjà six, et là ça commençait à faire beaucoup, surtout qu'elles avaient pour raison des broutilles. Samantha en avait marre que Eléa pose tout le temps des questions, trempe ses pieds dans la mare et s'amuse à asperger tout le monde, Eléa criait quand Samantha expliquait les bienfaits de telle plante en la traitant de miss je-la-ramène...

Lucas soupira et jeta un regard déçu à son assiette, pas qu'elle n'était pas bonne, non c'était lui et Daniel qui avaient fait le déjeuner alors forcément c'était délicieux, mais ce n'était pas comme ça qu'il voyait son voyage avec sa Samantha.

-QUOOOIII ?

Cette fois, comme la plupart du temps en vérité, les Pokémon prirent part à la bataille : Ash et Poussifeu lancèrent leurs flammèches, sauf que c'est Lucas qui se prit le tout et se retrouva avec les cheveux légèrement roussis et la tête dans la marmite.
Furieux, il regarda Danny qui lui fit un haussement d'épaule désolé – pour sa défense la dernière fois qu'il s'était interposé entre les deux filles, il se les était mises toutes les deux à dos, et avec son manque de répartie, il était vite reparti penaud.
La colère monta au nez de Lucas.

-CA SUFFIT ! S'écria-t il en se relevant, rouge – C'EST LE VASE QUI FAIT DEBORDER L'OCEAN !
-Heu Lucas, normalement on dit – DANNY TAIS TOI !

Décidément ce n'était pas son jour, au pauvre garçon aux yeux vairons...Mais Lucas se sentait trop énervé contre ses amies pour se rendre compte qu'il avait cassé son camarade.

-MAINTENANT VOUS ALLEZ ARRÊTER VOS DISPUTES PUERILES
-On ne se dispute pas. Répondit Sam.
-Bien sur que si on se dispute ! Rétorqua Eléanore.
-Non, on Débat.
-On se dispute.
-ON DEBAT.
-ON SE DISPUTE !
-VOUS VOUS DISPUTEZ POUR SAVOIR SI VOUS VOUS DISPUTEZ ?!!! Explosa Lucas.
-OH LA FERME ! Enchaînèrent Eléa et Sam synchro.
-NON ! JUSTEMENT VOUS VOUS LA FERMEZ ! ON EN A MARRE DE VOS CHAMAILLERIES !
-Et qu'est ce que tu comptes faire contre ça ? Hein ? Nous passer un savon ? Lança la dresseuse, tout en regardant Salamèche, insolente.

Lucas sursauta, pris au dépourvu ; il n'avait pas du tout pensé à la menace qu'il allait proférer...Mince elle le piégeait cette peste ! Vite, vite il fallait qu'il trouve, sinon elles allaient continuer leurs bagarres perpétuelles.

-Lucas, j'ai une idée, Vint à son secours Daniel, le sourire aux lèvres. –Tu te souviens de ce que l'on avait fait aux jumeaux ?
-Tes frères ? Marc et Frank ? Non pas vraiment.
- On leur avait fait changer de place l'un l'autre durant toute une journée. Chacun avait écrit son emploi du temps et le lendemain chacun devait suivre les indications de l'autre, comme s'il était lui.

Son assemblée écarquilla les yeux, deux paires de peur, le reste d'illumination soudaine. Lucas fit un immense sourire.

-Oui Excellente idée ! –Il se retourna d'un geste brusque vers les deux filles et les pointa du doigt avec un air sadique- C'est ce que nous allons faire ! Samantha, ma chérie à partir de demain tu seras Eléa ; Eléa demain toi tu seras Samantha Chérie !

Et c'est comme ça que tout commença.

Malheureusement les filles ne purent que répliquer un « QUOOOI ? » désabusé, et leur destin fût scellé. Elles ne pouvaient plus que pleurer.

*

Retrouvons notre petit Bourg Palette en effervescence depuis la fugue de la fille unique des Sarl, alias Eléa. Depuis plus d'une semaine et demie, la mère d'Eléanore ne cessait de pleurer, elle tenait fermement la photo de sa fille dans sa main, et occupait le laboratoire du professeur Chen. En effet, son mari était en voyage d'affaires à Sinnoh ; et ayant peur qu'elle ne fasse une bêtise seule dans sa grande maison vide, Délia avait humblement demandé au professeur de garder un œil sur elle.
Jacky arriva dans la chambre d'ami avec un plateau garni de nourriture, jeta un regard triste au lit dans lequel déprimait Marina, et poussa un soupir.

-Madame Sarl, Tenta-t il.

Il eut juste quelques sanglots étouffés en réponse.
Il posa le plateau avec lassitude et secoua légèrement l'amas de chair qui se cachait sous la couverture.

Marina se dégagea le visage défait. Elle possédait des cheveux noirs jais bouclés, formant de magnifiques anglaises, sûrement ceux qu'aurait eu Eléa si elle en prenait soin un tant soit peu ; le visage rond de sa fille, les joues roses, les lèvres vermeil, le teint pâle et les yeux aussi verts que ceux de son enfant. Autrefois, on vantait sa beauté, et tout le monde comprenait pourquoi l'héritier de la fortune Sarl s'en était épris, mais aujourd'hui les longues heures qu'elle avait passé dans l'obscurité à pleurer la disparition de sa progéniture l'avait rendue laide.

-Madame Sarl, vous avez de la visite. Lança gentiment Jacky.

Le visage de la mère s'illumina, retrouvant son semblant de beauté un instant, d'une voix suppliante elle balbutia : « Pilou ? Ma petite Eléanore, ma Pilou est revenue ? »
Jacky avala sa salive de honte, il aurait mieux fait de se taire.

-No-non madame Sarl, il y a Le professeur Chen, Délia, Régis, et l'agent Caillou, mais pas Eléanore...

Le visage de sa femme se décomposa à nouveau, et les larmes revinrent inonder ses yeux.

-Ils doivent vous parler, pour pouvoir retrouver Eléanore...

Marina baissa la tête, acquiesça difficilement, puis reprit la contemplation de la photo de sa fille avec sa dernière lettre, celle qu'elle avait laissé avant de s'enfuir de la maison. Jacky fit un signe aux personnes à la porte, et Régis se précipita vers Marina.

-On nous a appris la nouvelle. Lui annonça-t il d'une traite, ce qui fit fondre en larme la femme sous ses yeux inquiets.

Délia, compatissante s'approcha de son amie et lui tapota l'épaule pour lui remonter un peu le moral. Elle savait que cela ne servait pas à grand-chose, qu'elle voulait juste sa fille, mais un contact physique, lui montrer que quelqu'un la soutenait ne pouvait que lui faire du bien ?
Elle avait raison, car à peine l'avait elle effleurée que Marina se jeta dans les bras de son amie. Si elle était la femme d'un riche propriétaire, Marina avait toujours été simple, jamais elle n'avait pris la grosse tête ou été orgueilleuse, elle avait d'ailleurs tenté d'enseigner la modestie à sa fille pour qu'elle ne devienne pas une riche héritière arrogante comme toutes les enfants plein aux as qu'elle connaissait.

-Chut...Chut...calmez vous Marina...murmura doucement Délia.
-Co...Comment pourrais je me calmer alors que ces deux monstres qui s'en sont pris au professeur ont pu enlever ma fille !
-Enfin, Marina, je vous ai déjà dit qu'ils lui avaient juste remis un Pokémon, ils ne lui ont fait aucun mal, d'ailleurs à moi non plus si on oublie le ligotage...
-C'est vrai madame. Et puis nous avons les preuves d'une fugue avec sa lettre d'adieu, nous avons envoyé un avis de recherche dans toutes les villes par lesquelles passent les dresseurs et tous nos policiers sont sur le qui vive, nous allons la retrouver – Tenta l'agent Caillou.
-C'est vrai, enchaîna Régis –J'ai même suspendu mes recherches momentanément pour aider. Je vais faire le tour des villages pour la retrouver, et quand on aura réussi à joindre Sacha, il viendra probablement lui aussi.
-M...Merci...balbutia Marina.
-Ne vous en faites pas madame, bon c'est vrai que Sacha n'a pas pu venir, mais c'est normal il vient tout juste d'être nommé maître Pokémon, il a beaucoup à faire... Quand il sera là je suis sûr qu'on va lui mettre le grappin dessus !
Marina hocha faiblement de la tête.
-Maintenant, il faut nous raconter ce qui s'est passé la veille de sa fugue madame...Expliqua l'agent, -Vous comprenez, ça pourrait nous renseigner sur le lieu où elle s'est rendue. Nous ne vous avons pas brusquée au début, mais il est temps maintenant ? Non ?

La mère de Eléanore opina du chef, elle porta la main à sa bouche, comme pour chasser les derniers sanglots qui coinçaient sa gorge et commença son récit.

Elle se souvenait parfaitement de cette journée, mais elle ne s'était jamais doutée que sa fille fuguerait le lendemain. Elle était montée à l'étage pour voir Eléanore dans la soirée. Elle était là, à la fenêtre de sa chambre, en train d'observer les enfants qui jouaient devant la maison près de la rivière. Elle faisait souvent cela, elle avait ouvert la fenêtre pour les entendre, Marina imaginait que c'était pour ne serait-ce que percevoir leur amusement et y participer de loin. La plupart des gamins du village se refusaient à venir vers elle à cause de son nom, ou bien de ses nombreux jours d'absence à l'école ; de nombreuses rumeurs couraient à son sujet, et même si elle le niait, Marina savait qu'elles faisaient mal à sa fille.

Quand elle pénétra dans la chambre de Eléanore, elle commença nonchalamment à ranger les divers jouets qui jonchaient le sol, elle remarqua la T.V allumée diffusant en boucle une émission sur le combat qui avait permis à Sacha de devenir maître de sa 5 ème ligue. Elle fronça les sourcils, au même instant elle perçut distinctement les cris des enfants en dehors lancer « Hein ? C'est la fille des Sarl ? –Ouais ! Vous imaginez ce qui se passerait si elle se blessait pendant notre jeu ? Elle irait se plaindre et on serait tous punis ! – Ah je ne veux pas jouer avec elle ! Vite allons nous en ! »
Comme les gamins pouvaient se monter cruels parfois.

Marina se rapprocha de sa fille et demanda d'une voix douce et peinée : Ca va ma Pilou ?
Le surnom affectif qu'elle lui donnait depuis sa naissance à cause de son énergie débordante, à tel point que Eléanore avait cru petite qu'il s'agissait de son 2ème prénom, et l'avait souvent marqué sur ses contrôles.

Eléanore sursauta et sécha rapidement les larmes qui commençaient à perler.
D'un bond elle se mit face à sa mère avec un grand sourire :

-Bah oui bien sur que ça va ! Je m'en fiche des autres enfants ! J'ai pas non plus le temps de jouer avec eux de toute façon, c'est vrai avec plus de 8 h de sport hors cours, même si je voulais, je ne pourrais pas !

Marina grimaça. Sa fille continuait sa tirade mensongère, exagérant chacune de ses paroles avec de grands mouvements et un sourire lumineux. Elle avait hérité des belles dents de son père et donc ne cessait de les montrer à tout va.

-Maman ? S'inquiéta Eléanore en remarquant l'absence de réaction de sa mère.

Marina sursauta, son visage se crispa à nouveau, elle détourna les yeux, tritura une des peluches Pokémon qu'elle avait ramassé et lança d'une voix tremblante :

-D'ailleurs en parlant de sport ma Pilou... On a reçu les résultats du médecin et, il faudrait que tu arrêtes.... Définitivement.

Eléanore écarquilla les yeux.

- 1) Il vaut mieux que tu restes à la maison maintenant, nous t'avons d'ores et déjà inscrit à l'école à la maison, tu n'iras plus en cours.

Son visage se décomposa.

-2) Un nutritionniste viendra aussi pour surveiller ton alimentation tous les repas. Et un médecin sera installé à côté de ta chambre pour veiller à ce que tu prennes ton traitement et des soins complémentaires toutes les heures.

Cette fois Eléanore n'essaya même pas de cacher ses larmes, et elle explosa.

Elle retourna sur le bord de sa fenêtre et se roula en boule.

Le cœur de Marina se serra devant ce spectacle, et gentiment elle voulut lui remonter le moral.
-Ma Pilou, je suis désolée...

-MAIS T'ES TOUJOURS DESOLEE ! Hurla Eléanore. –SORS DE MA CHAMBRE !

Comme il était dur d'être parent ; si elle ne savait pas que cela entraînerait son enfant à un autre niveau de désespoir, elle aussi aurait fondu en larmes.

-SORS DE MA CHAMBRE ! Cria à nouveau Eléanore en lui envoyant en même temps une peluche Pikachu qui gisait à ses côtés.

Marina battit en retraite, mais juste avant de partir, elle jeta un dernier regard à la télévision qui chantonnait « Nouveaux dresseurs, venez choisir votre starter dès demain ! ».
Elle fit une dernière grimace et lança en fermant la porte : « Eteins cette télé, chérie. Tu te fais du mal »

Elle avait entendu un grand choc heurter la porte, puis plus rien...

-VOUS AVEZ FAIT QUOI ? S'écria Régis.
-Régis ! S'indigna son grand père.
-Vous vous rendez compte de ce que vous avez fait ! Continua son petit fils sans s'en soucier. –Vous lui avez interdit tout ce qui faisait le plaisir de sa vie en quelques minutes ! Je sais bien qu'Eléanore voit toujours le bon côté des choses, mais elle ne peut pas en inventer non plus !

Marina cacha son visage dans ses mains sous les critiques du savant.

-Régis ça suffit, calme toi ! S'emporta Chen.

Le garçon sursauta et reprit son calme avec mal.

-Que vouliez vous que je fasse ? Lança faiblement Marina. –Je n'avais pas le choix...Sinon, sinon elle...Et dire qu'elle se trouve toute seule dans la nature...Qui sait ce qui va lui arriver...Ma pilou...

Mais elle ne put continuer sa phrase, celle-ci fut emportée par ses pleurs.
Régis grinça des dents et sortit de la salle en claquant la porte, son grand père le poursuivit en s'excusant. L'agent Caillou, Délia et Marina restèrent seules.

Jacky fut surpris de revoir Régis et Chen revenir si vite, et il le fut encore plus quand Régis donna un violent coup de poing au mur.

Qu'est ce qui lui prenait ? Habituellement, Sacha réagissait ainsi, le petit fils du professeur conservait toujours son calme.

-ET CET IMBECILE QUI N'EST PAS LA ! Rugit-il.

Sacha et Régis se ressemblaient plus qu'ils ne voulaient se l'avouer en vérité.

-Régis qu'est ce qui te prend de traiter Marina comme ça ?! L'enguirlanda Chen. Il comprenait parfaitement les raisons de son petit fils, mais il ne pouvait pas non plus laisser passer ce comportement envers la pauvre Marina qui souffrait déjà assez.

Mais il s'arrêta, car son petit fils était déjà loin, loin du labo, loin dans ses souvenirs. Il revoyait un des ses derniers souvenirs d'elle, il datait déjà de pas mal d'années, il venait d'arrêter son voyage Pokémon, il avait enfin trouvé sa voie : la recherche Pokémon. Régis était resté plusieurs semaines chez son grand père pour se préparer à son futur travail. Elle était entrée, la mine triste, dans la salle où il étudiait les caractéristiques d'un Pokémon d'Hoenn : Morphéo.

-Eléanore ? Qu'est ce qu'il y a ? Demanda-t il inquiet, peu habitué à la voir déprimée.
La gamine s'approcha de lui lentement et s'installa sur une chaise à ses côtés sans un bruit, puis brusquement sortie de sa léthargie mélancolique, elle leva le nez, vexée :
-Oui ça va mal ! Non seulement mes deux amis reviennent mais l'un part sans venir me voir et l'autre ne me dit même pas bonjour !
Régis prit un air surpris, puis il se rendit soudain compte qu'effectivement il ne lui avait même pas dit bonjour.
-Excuse moi Eléanore ! Bonjour ! Alors comme ça Sacha n'est même pas venu te voir ?
Elle ne répondit pas et se contenta de faire une moue significative.
Régis retint un rire.
-Tu fais quoi ? C'est intéressant ? Tu m'expliques ? Enchaîna la gamine en remarquant ce que faisait le petit fils de Chen.

Régis se mit alors expliquer avec grand intérêt le résultat de ses recherches devant le regard dubitatif de son amie. Elle ne devait pas comprendre grand-chose à ce qu'il lui racontait, mais elle souriait de toutes ses dents. Régis l'observa un instant alors qu'elle contemplait le petit Pokémon derrière la vitre avec un air tendre et mélancolique.

-Que se passe-t-il, Eléanore ? Demanda Régis.
-Je...j'étais déçue que tu arrêtes ton voyage initiatique, mais finalement, tu as l'air tellement content de ce que tu fais, je n'arrive pas à t'en vouloir.
-Alors c'est ça...Constata le petit fils du prof Chen.
-Tu sais, quand je suis rentrée de l'hôpital et que l'on m'a dit que Sacha était déjà parti et que toi tu abandonnais ton voyage, j'étais furieuse. Mais maintenant ça va mieux, parce que ce que tu fais te plaît, et que en plus on va pouvoir plus de temps ensemble comme avant...
-Tu sais Eléanore, je ne reste pas longtemps ici non plus....Je vais bientôt partir faire des recherches sur le terrain. Avoua Régis.

Le visage de la gamine se ferma.

-Je m'en doutais...
-Hé, ne t'en fais pas ! Je reste quand même un peu, et ce temps là on le passera rien que tous les deux ! Je ferai mes recherches et toi tu m'assisteras, ok ?

Le visage s'illumina. Régis sourit face à son petit effet. Il lui en fallait peu pour la rendre heureuse.

-Et puis, tu vas bientôt partir en voyage Pokémon toi aussi ? Si tu veux, tu pourras me rejoindre pour le faire ton voyage !

Et alors qu'elle avait enfin retrouvé un peu de joie, son joli petit minois redevint grave. Elle se retourna vers le petit Pokémon et l'observa mélancoliquement.

-Non, je...Je pourrai pas...Balbutia-t elle.
-Quoi ?

Une larme s'écrasa sur la vitre, elle se dépêcha d'essuyer son visage pour les camoufler, mais elle n'y parvint pas.

-Eléanore ? Qu'est ce qui se passe ? S'inquiéta Régis, mal à l'aise.

Il la voyait rarement pleurer, du moins jamais pour des broutilles, elle s'arrangeait toujours pour voir le verre à moitié plein. Elle se cassait le bras : eh bien comme ça on pouvait lui écrire sur le plâtre, Sacha partait sans lui dire au revoir, et bien il était juste trop occupé, la prochaine fois elle viendrait jusqu'à lui !

-Je hais ce foutu médecin ! Je déteste l'hôpital !

Régis baissa les yeux, ça y était, il le voyait le problème.

-Ils ne veulent pas que je fasse mon voyage Pokémon...lâcha Eléanore dans un sanglot.
-Je comprends.
-Ils disent que c'est trop dangereux pour ma santé ! –Elle se retourna brusquement vers son ami et hurla –Mais c'est ma vie, c'est moi qui décide ! C'est pas juste...

Et sans préavis elle se jeta dans les bras du jeune chercheur et y pleura tout son sâoul. Ils avaient passés tant de temps ensemble, malgré la différence d'âge qui les séparaient, elle les avaient toujours suivi, lui et Sacha, dans leurs aventures, peu importe les difficultés, elle était un peu le médiateur entre eux. Toujours là, toujours à sourire, toujours à arrêter les disputes, ne faiblissant jamais, ne leur en voulant jamais, lançant à tût tête qu'ils étaient ses meilleurs amis. Même le jour où elle était tombée dans un nid de Abo par leurs fautes –Sacha et lui- et qu'ils avaient mis plus d'une heure à la sortir de là, et que sa vie avait été entièrement détruite à cause de cette erreur, elle à l'hôpital elle leur avait sourit et lancé : « Hey, dès que je sors on repart jouer ! ».

Non, vraiment ce n'était pas juste.

Régis lui avait caressé les cheveux doucement, ne sachant pas quoi dire.
Non ce n'était pas juste...

Et la semaine s'était écoulée lentement sur cette pensée.

Régis, devant Jacky et son grand père, fronça les sourcils, en proie à une cascade de petits souvenirs d'elle, en train de s'émerveiller de chaque petit rien, de l'encourager, de rire devant ses histoires, en train de lui dire au revoir.

Non, il ne voulait pas que ce soient ses derniers souvenirs d'Eléanore...

D'un geste il sortit du laboratoire avec sa cape de voyage et ses pokéballs.

*

Le professeur Yuki de son côté, à Argenta, avait élu domicile au centre Pokémon.
Arrivé depuis plus d'une semaine en ville, il était résolu à attendre son élève et à choper Eléanore pour s'expliquer dès qu'elles sortiraient de la forêt de Jade.

Malheureusement, elles mettaient plus de temps que prévu, à tel point que le professeur Pokémon, alors qu'il n'était pas d'un naturel très soucieux, commençait à s'inquiéter. C'est vrai quoi, il ne fallait pas des décennies pour traverser un simple bois !

Il avait bien essayé d'appeler Samantha sur son pokématos oméga – et même Eléa- mais il avait appris par hasard qu'un violent orage avait endommagé tout le réseau un mois auparavant, il était donc impossible de joindre les personnes se trouvant dans des endroits difficiles d'accès, comme les régions montagneuses, ou boisées...
Il n'avait pas de chance.

Mr Yuki soupira, agacé par l'attente interminable. Pour couronner le tout, il avait déjà visité tout ce qui l'intéressait à Argenta, les seuls sites qui restaient étaient ceux qu'il voulait montrer à Samantha.

La pension Pokémon du dresseur Pierre, l'arène évidemment, le musée Pokémon, la championne extrême...Bref tout ce qui pouvait aider une dresseuse débutante qui aimait apprendre comme Samantha.

Le professeur s'étira et s'allongea sur un des canapés du centre. Il regarda le journal datant de la semaine dernière, plus précisément un article sur une gamine fugueuse du nom d'Eléanore Sarl.

Il s'était vraiment mis dans la mouise jusqu'au cou.

Derrière le comptoir du centre Pokémon, L'infirmière Joëlle profitait d'un de ses rares moments de repos pour recevoir un appel de sa petite sœur, l'infirmière de Jadielle.
Celle-ci, les traits légèrement tirés à cause du surmenage la salua et voulut directement aborder le sujet qui la préoccupait, mais sa cadette la coupa :

-Non je n'ai toujours pas vu Samantha. Je suis désolée.

Le médecin Pokémon, coupée dans son élan eut un bref sursaut de surprise, puis soupira, le regard ailleurs.

-Ne t'en fais pas, Samantha est débrouillarde, elle a juste dû se perdre en route, tu la connais, avec une carte dans les mains elle serait capable de ne même pas trouver le chemin de la maison. A croire que les plans lui font perdre ses moyens.
-Je sais bien...Mais...

Les consolations rationnelles qu'on lui fournissait ne rassuraient pas pour autant son instinct maternel.

-Tu veux que l'on envoie quelqu'un la retrouver ? Hasarda sa sœur.
-No-Non ! Surtout pas ! Cela dérangerait beaucoup de monde pour probablement pas grand-chose, et puis...Je ne veux pas qu'elle croie que je n'ai pas confiance en elle.
-Je te comprends, Samantha se prend parfois pour plus grande qu'elle ne l'est : elle a un sacré amour propre, cela la blesserait de recevoir de l'aide.
-Oui...bon et bien je vais te laisser...Appelle moi dès que tu la voies surtout...

L'image de la mère adoptive de Sam se brouilla dans un clic, laissant à nouveau place au fond d'écran de l'ordinateur.

Une jolie photo de groupe des infirmières de Kanto. Elle avait déjà pas mal d'années.
La femme eut un sourire en voyant les visages presque tous similaires de la grande famille. Même les enfants ressemblaient trait pour trait à leurs mères, le gène « infirmière Joëlle » devait être incroyablement puissant pour surpasser ceux de leurs maris. Et là, au milieu de cette foule aux cheveux roses, une petite tignasse noire se démarquait, le sourire faible, son Poussifeu dans les bras. Un peu comme un tâche d'encre. Sans s'en rendre compte, Joëlle murmura avec un sourire :

-Il en fallait bien de l'orgueil avec une famille pareille...

Oui plus elle y repensait, si Samantha n'avait pas eu cet amour propre, jamais elle n'aurait pu surmonter sa position de vilain petit canard.

-Bon, au travail, Angèle, Chris ! Je compte sur vous, nous avons du pain sur la planche aujourd'hui. S'écria-t elle en se tournant vers ses tous nouveaux assistants.

Les deux membres de la Team Rocket eurent un immense sourire confiant et enchaînèrent le pas.
S'ils avaient l'air enthousiaste en apparence, ce n'était pas réellement le cas, car à peine leur patron de la semaine eut elle le dos tourné que Angèle prit violemment son partenaire par le col et le secoua comme un prunier :

-Quand je pense qu'on aurait pu TOUT faire, même MEDECIN POKEMON ! Mais nooon, nooon monsieur a voulu entrer dans la Team Rocket ! Nooon monsieur a voulu trahir la Rocket pour entrer à la Team OPALE !
-Calme toi Angie, respire, respire ! Balbutia le jeune homme, terrifié.
-NON JE ME CALMERAI PAS !
-Chuut, je suis désolé, désolé, désolé !
-JE M'EN FICHE DE TES EXCUSES ! CA FAIT UNE SEMAINE QU'ON L'ATTEND CETTE SALE PESTE !

En, effet dès l'arrivée du train en gare, ils avaient pris leurs marques à Argenta, espérant y croiser Eléa pour récupérer le Salamèche, mais rien, pas de gamine, et les vivres venant à manquer, ils avaient proposé leurs services à l'infirmière Joëlle. Au début, Angèle n'avait pas vraiment protesté, se contentant de bouder, mais après tout ce temps elle voulait bien faire comprendre à Christopher qu'elle ne lui avait toujours pas pardonné.

-E...Ecoute, elle a dû dépasser Argenta sans qu'on ne s'en rende compte ! Dès demain on partira vers Azuria, elle finira bien par y passer n-non ?
-Y-a intérêt....

Et là conversation s'arrêta sur cette menace.

Oui, ils avaient vraiment intérêt à la retrouver, parce que sinon, que ce soit de la main de la Team Opale, de la Team Rocket, ou même de celle de Angie, il allait le payer...

Il aurait mieux dû contrôler sa folie des grandeurs.

*

Samantha fut tirée du monde des rêves le lendemain par l'alarme incessante de son pokématos Omega. A tâtons, elle chercha l'origine du bruit, et le prit les yeux encore tout ensommeillés.
Elle se sentait toute comateuse, sans comprendre le pourquoi, en plus d'une migraine qui pointait, elle avait comme un mauvais pressentiment.

Lucas entra justement dans sa tente avec un grand sourire, il lut quelques lignes sur une feuille qui lui apparut étrangement familière et déclara : « Alors prête pour l'entraînement matinal ? »

Le temps que l'information monte à son cerveau, Samantha jeta un regard à l'heure qu'indiquait son engin Pokémon.

5 : 00 a.m.

*silence*

BAM ! Lucas se prit le réveil en pleine poire et Samantha retourna se lover dans son sac de couchage avec un sourire aux lèvres.

Et puis quoi encore ? Courir à cinq heures du matin, celui qui arriverait à lui faire subir cette torture n'était pas encore né.

Mais voilà, Lucas était peut être gentil, voire bonne poire, mais sûrement pas assez pour la laisser dormir et supporter encore toutes ces disputes. D'un geste, il attrapa le pied de Samantha et la tira hors de la tente : la jeune fille eut beau se cramponner à son Poussifeu, celui-ci ne se révéla pas être un bon soutien puisqu'il se fit happer lui aussi dans l'action.
Alors que Samantha criait à Lucas qu'il arrête son délire, celui-ci prit une casserole d'eau glacée et déversa tout son contenu sur la tête de la dresseuse ébahie.

Profitant de la surprise de la gamine, il lut d'une voix forte ce qui était écrit sur le papier qu'il tenait :

-5 : 00am -> 7 :00am Jogging avec les Pokémon. Allez, debout, Samantha Chérie, ou devrais-je dire Eléa chérie ?

Ca y était, ça lui revenait, elles avaient toutes deux rempli la veille un papier pour donner leur emploi du temps. Aujourd'hui elle devait jouer le rôle de Eléanore.
Lucas reçut pour seule réponse un grognement furieux.

Mais il était déjà trop tard.

Eléanore dans sa tente –montée avec l'aide de Daniel- fulminait, Daniel l'observait avec un grand sourire également, bien que le sien ne supportait pas aussi facilement que celui de son ami l'heure matinale.

Qu'est ce qu'elle aurait aimé se lever et faire son jogging ! Elle se tourna avec un regard brillant d'espoir vers son ami mais celui-ci lut à haute voix le document :

-Réveil à 9h.

Puis il lui fit une mine désolée et l'obligea à retourner se coucher. Eléanore prit ses Pokémon dans ses bras et s'allongea en faisant la grimace.

Elle voulait courir...

Samantha n'en pouvait plus, pourquoi fallait-elle qu'elle coure elle aussi, hein ? Farfuret et Poussifeu iraient beaucoup plus vite sans elle...

-Allez Samantha Chérie ! Ca fait 10 minutes ! Allez, allez, plus que 1 h et 40 minutes !

Si Lucas continuait, elle allait lui faire bouffer son foutu pokématos.
La gorge commençait déjà lui brûler, ses jambes se faisaient lourdes, ses côtes lui ordonnaient de stopper ce supplice, son souffle lui manquait.

-Allez, Plus que 1h et 35 minutes.

Il avait de la chance qu'elle soit crevée, sinon elle l'aurait déjà tué sans l'once d'un remord.

Poussifeu suivait tant bien que mal Lucas sur son skateboard, Farfuret sautait d'arbre en arbre avec agilité, la seule qui traînait c'était elle.

Mince, dire qu'Eléa parcourait tous ces kilomètres le matin, et se levait aux aurores juste pour ne pas les retarder...

Samantha déglutit, et elle tenta de se concentrer sur autre chose que sa course pour oublier la douleur.

Pas question qu'elle lâche alors qu'Eléanore y parvenait !

-STOPP ! S'écria Lucas.

Samantha s'étala de tout son long sur le sol. La sueur imbibait ses vêtements, elle n'arrivait plus à respirer et la tête lui tournait.

Poussifeu et Farfuret s'effondrèrent à leur tour sur le dos de leur dresseuse.

Lucas observa le groupe, lui-même était fatigué, mais en voyant le résultat, il se disait qu'il avait bien fait d'être gentil et d'arrêter une heure avant. Sinon, il aurait pu les ramasser à la petite cuillère.

-Bon, eh bien passons à la suite – Déclara-t il sous un gémissement de douleur de son assemblée.

Dans la tente, Daniel soupira. Eléa tremblait de tout son long, incapable de trouver le sommeil, elle gardait même difficilement le silence.

-Bon, allez, je te fais une remise de peine...Conclut le garçon avec son Gobou sur la tête. –Passons à l'activité suivante.

Eléanore sauta de joie en entendant cela.

Samantha plongea dans l'eau de la rivière avec délice, elle oublia totalement de surveiller Lucas, elle était trop exténuée pour ça. Heureusement pour elle, son camarade n'osait pas jeter un coup d'œil vers Sam pendant sa baignade, sinon le rouge lui monterait aussitôt aux joues en même temps que la honte.

Eléanore sortit de sa prison de toile dans un rire cristallin, pour se dégourdir les jambes elle fit même une roue pour alla s'écraser un peu plus loin. Ses amis et Pokémon assistèrent à son manège, légèrement gênés, mais ils ne purent s'empêcher d'exploser de rire à leur tour.
-Bon maintenant, récita Daniel, tu dois prendre soin de tes Pokémon, faire leurs toilettes – et la tienne- murmura-t il en virant au pourpre.

-Super ! Viens Ash, on va commencer par toi ! Lança Eléa.

Elle s'approcha d'une bassine d'eau et prit un chiffon, mais Danny s'écria :

-Mais qu'est ce que tu fais ?
-Bah...je le lave avec un chiffon humide !
-Ce n'est pas du tout comme ça qu'on le fait !
-Ah bon, et comment fait on autrement alors ? Se renfrogna la jeune dresseuse.
-Attends, justement Samantha m'a donné son carnet de dressage, celui qu'elle a écrit, tiens.

Il sortit de sa poche un lourd cahier menaçant d'exploser tellement il semblait chargé de post-it, de feuilles complémentaires et de schémas en annexe.

-Ouah ! Elle a écrit tout ça ? S'étonna Eléanore.
-Eh ben, elle m'a dit qu'elle avait résumé ses cours et les avait complétés avec des recherches personnelles pendant l'année, puis elle a emmené ses notes pour son voyage.
-Ouah !

La dresseuse au Salamèche ne put retenir cette exclamation impressionnée, doucement, comme si elle avait peur de briser toutes les informations que contenait le manuel, elle le prit et l'ouvrit avec précaution.

A l'intérieur, elle lut attentivement le sommaire et trouva une note indiquant « toilettes et soins de Pokémon feu ».

Elle se rendit à la page indiquée, et fut à nouveau ébahie par le contenu. Tout y était décrit, expliqué en détail, les schémas rendaient la compréhension simple et complète, la seule chose qui gênait un tant soit peu étaient les diverses abréviations et l'écriture fine de la jeune fille.

Eléanore n'en revenait pas, et elle lâcha un nouveau « ouah » béa. Daniel fut confondu de voir son amie se plonger si facilement dans la lecture du carnet, les yeux étincelants, et ne plus bouger pendant des heures.

Ainsi, Eléanore apprit enfin les rudiments du dressage qui lui faisaient cruellement défaut. Elle apprit également que pour laver son Salamèche sans l'affaiblir il fallait prendre un peu de cendre et la frotter tendrement sur la peau du lézard, ce qui se révéla être un jeu très amusant.

Et à mesure qu'elle tournait les pages, qu'elle y rencontrait des anecdotes étonnantes, des méthodes de dressage, la gamine sentait monter en elle un sentiment admiratif envers Samantha.
De l'admiration, et aussi une certaine rivalité, car, plus que jamais, Eléa sentait en Samantha et en son savoir incroyable, une adversaire de choix qu'elle devrait tôt ou tard affronter pour progresser.

Samantha et Lucas, eux s'entraînaient depuis tout ce temps à la méthode d'Eléa, c'est à dire avec les rondins de bois qu'elle et ses Pokémon devaient éviter les yeux bandés. La jeune fille s'en était souvent moquée, elle avait même jusqu'à la traiter d'inutile, mais elle devait bien l'avouer aujourd'hui : c'était plus dur qu'il n'y paraissait.

Elle avait perdu le compte du nombre de fois, où en voulant esquiver un obstacle, elle avait marché sur une patte de Poussifeu ou de Farfuret et que ceux-ci lui avaient rendu la douleur au centuple.

Elle perçut le sifflement du bois fraîchement lancé par Lucas, immédiatement elle ordonna à Poussifeu de le brûler et à Farfuret de le briser avec son combo-griffe.
Elle entendit la réponse de son Pokémon, mais elle reçut tout de même le morceau de bois en pleine figure, pire elle se prit aussi les attaques de ses Pokémon.

A terre, Sam soupira. Elle avait du chemin à faire. Non, ils avaient du chemin à faire.
Elle avait totalement négligé l'entraînement de ses Pokémon, préférant les dorloter.
Si dans un combat, Poussifeu se retrouvait aveuglé, il se ferait totalement éliminer. Elle avait été idiote, un Pokémon aussi heureux ne peut pas vaincre un Pokémon bien entraîné. Elle aurait dû trouver un juste milieu.

Samantha sentit une bouffée d'orgueil la saisir ; sur ce point Eléa s'était montré plus maligne qu'elle, et elle devait bien concéder qu'elle avait un programme complet et équilibré pour ses Pokémon.

Qu'est ce qui se passait en elle tout d'un coup ? Pourquoi se mettait-elle à respecter cette gamine braillarde ?
Samantha fronça les sourcils.

Non, Eléa n'était pas braillarde, juste hyperactive, et elle avait eu tort de la prendre de haut depuis le début.

Le respect pourtant n'est il pas la premier pas vers l'amitié ? Vers la paix ?

Les deux gamines sourirent sous les regards bienveillants de leurs camardes respectifs.
La première étape était franchie.

Les deux groupes se retrouvèrent au campement avec un soulagement non dissimulé.
Danny et Lucas voulaient encore continuer le programme, histoire de ne pas faire les choses à moitié, mais devant les résultats surprenants de cette matinée, ils durent se rendre à l'évidence, il n'y avait plus rien à faire.

Ils n'allaient pas non plus les torturer, Samantha s'était déjà abaissée à supplier Lucas de ne pas recommencer un jogging et Eléa avait fui en haut d'un arbre en hurlant « VADE RETRO SATANAS ! » pour éviter le brossage de cheveux.

Aussi fut il décidé de reprendre la route pour arriver le plus vite possible à Argenta, ils avaient déjà assez tardé !

Durant le voyage, ils purent constater plus fortement encore les effets de cette matinée très spéciale. Samantha et Eléanore voyagèrent côte à côte et échangèrent des avis différents sur le dressage de leur Pokémon sans se disputer !

Calmement, elles expliquaient leurs points de vue, leurs techniques, leurs idées, et s'envoyaient l'une l'autre des compliments sur tel ou tel point. Eléanore s'émerveillait devant le savoir qui lui paraissait inépuisable de Sam, et ne cessait d'en demander encore et encore. Samantha elle, l'interrogeait plus facilement sur ses nouvelles idées pour entraîner, et essayait de marchander sa possible participation.

-Hep...Danny...Chuchota Lucas, au bout d'un temps.
-hm ? Répondit l'intéressé, perdu dans ses pensées.
-T'es sur qu'elles jouent pas la comédie ? Je veux dire...
-C'est radical comme changement, pour sûr, ça fait exactement pareil avec mes frères.

Et sur ces dernières paroles, il rejoignit le groupe de tête en entamant une chanson.
Lucas sourit, et l'imita, bientôt le groupe se mit à chanter en cœur.

Les Pokémon battaient la mesure avec leurs petits cris, Eléanore menait littéralement parlant la danse avec sa voix cristalline, Samantha arrivait à faire un chœur des plus mélodieux avec la voix grave de Lucas, Daniel en duo avec Eléa et son ton légèrement enfantin soulignait les intonations de chacun, cachant les fausses notes grâce à son sens du rythme.

Et c'est sous la musique « Un jour je serai le meilleur dresseur » qu'ils parcourent sans s'en rendre compte le chemin qui les menaient jusqu'à Argenta.

*

A plusieurs kilomètres de là, dans les restes du QG de la team Rocket abandonnés par la police, un homme vêtu d'un costume orange hideux, le regard froid, la carrure dure et à l'allure stricte marchait à travers les décombres suivit d' un Persian. Un hélicoptère patientait non loin de là, et à son bord, un jeune adolescent. Ses longs cheveux rouges lui arrivaient aux épaules de manière rebelle, son visage carré et fermé, il attendait sans l'ombre d'un sourire, les bras croisés sur sa poitrine, les jambes sur le tableau de bord.

-Silver !

A l'entente de son prénom déclaré si hargneusement, le concerné ouvrit les yeux, de couleur bleu outremer, qui contredisait totalement l'aura de dureté qu'il dégageait. Il portait un survêtement violet criard avec un grand R teint en rouge dans le dos en guise de logo.

-Oui père ? Souffla-t il entre ses dents.
-J'ai une mission pour toi. Tu vas retrouver ceux qui ont fait ça, et les châtier comme je te l'ai appris ; si tu peux récupère aussi le prototype.
- Le Prototype ?
-Le Pokémon qu'ils ont volé, c'était le résultat d'une nouvelle expérience, nous l'avons créé à partir des recherches du professeur mirage ; s'il est en pleine forme nous pourrons construire toute une armée de Pokémon consistants à partir de mirages.

Il y eut un blanc, puis Silver murmura un « Bien » agacé. Il prit la photo des traîtres que lui tendait Giovanni, car c'était bien lui, le chef de la Team Rocket en personne.
Silver se retourna prêt à partir sur le champ, mais son père lui lança une dernière pique avant qu'il ne disparaisse :

-Et tu n'as pas intérêt à t'enfuir comme la dernière fois si tu ne veux pas subir le même sort qu'eux.

Impassiblement, il hocha de la tête et s'en alla sous le regard menaçant de Giovanni.
Une fois Silver parti, il retourna à son hélicoptère qui s'envola pour son QG principal.


*

-JE VOIS ARGENTA ! JE VOIS ARGENTA ! S'écria Eléanore.

La petite troupe accéléra le pas, les arbres se firent de plus en plus rares, le soleil du couchant inondait le chemin d'une lueur chatoyante.
Samantha reprit son souffle, ses enjambées se firent plus grandes, et elle rattrapa Eléanore en un bond. La lumière l'aveugla, elle ferma les yeux, et la forêt disparut complètement de son champ de vision, laissant place à une immensité verte.

La vallée entourant la ville d'Argenta.

Ils étaient enfin sortis, enfin sortis de ce foutu bois ! Ils retrouvaient enfin la civilisation ! Samantha ne put réprimer sa joie, elle abandonna toute dignité et elle sauta dans les bras de Eléanore participant à sa danse.

Plus d'insectes ! Plus de poussière ! Plus de boue ! PLUS DE CAMPING !

-Ah, on y arrivera demain. Analysa Daniel.

PLUS DE...QUOI ?

-Oui tu as raison, on a encore une bonne journée de marche. Confirma Lucas dans un haussement d'épaule.

PARDON ?

-Pourquoi ça ? Demanda Eléa. La ville semble si proche pourtant !

C'était vrai ça, ils se trouvaient sur le bord d'une falaise abrupte, et à son pied elle voyait une mare et les premières maisons colorées de la cité. Pourquoi cela ? Pourquoi encore attendre une journée dans la saleté ?

-On s'est perdus et on a pris le mauvais chemin encore une fois. Il va falloir longer la falaise ; tu vois c'est par là bas qu'il faut entrer ! Expliqua calmement Danny à ses amis.
Il pointa un tout petit pylône au bout de l'horizon orangée.

Samantha lâcha un « nooon » désespéré, imité par les Pokémon, épuisés.

Maudit soit leur sens de l'orientation !

Eléanore assista au manège de la brune avec peine, elle regarda Lucas avec étonnement et enchaîna :

-Mais, on est obligé d'entrer par là bas ? On ne peut pas tout simplement descendre la falaise ?
-Hein ? Tu es folle, la pente est trop abrupte, on va se faire mal ! S'emporta le garçon.

Eléanore eut un sourire qui n'annonçait rien de bon.

-Dooonc, constata-t elle, si on arrive à descendre la falaise sans se blesser on pourra dormir dans un vrai lit ce soir ?

A ces mots Sam se redressa et prit les mains d'Eléanore, les yeux brillants de reconnaissance :

-Peu importe quelle idée tordue tu vas nous sortir, je t'en serai éternellement reconnaissante si tu fais ça !

Ce fut comme un signal de départ, Immédiatement la jeune dresseuse disparut en leur disant de préparer leurs affaires et de rentrer leurs Pokémon dans leurs pokéball.

Lucas sentit instantanément que ça n'allait pas lui plaire, il ordonna à Mentali, Noctali et Arcko qui mangeaient de revenir et rangea précieusement les balles à l'abri dans son sac. Samantha, bien trop occupée à s'imaginer dans un lit douillet cette nuit ne suivit pas ce conseil et prit Farfuret et Poussifeu dans ses bras avec un large sourire.

Daniel, plus prudent imita son meilleur ami et protégea ses Pokémon.

Eléanore revint quelques secondes plus tard, portant deux immenses feuilles aussi grandes qu'elle.

Elle les installa sur le sol, et s'assit dessus comme s'il s'agissait de luge. Elle fit signe à ses Pokémon de venir la rejoindre ainsi qu'à Samantha. Elle laissa l'autre aux garçons.

D'un seul coup, Samantha se sentit beaucoup moins rassurée. Surtout quand ses pieds furent suspendus dans le vide à l'attente de l'impulsion qui propulserait le reste de son corps à leur suite.

-Prêts ? Lança Eléanore.

Samantha paralysée, ne put sortir le non qui lui entravait la gorge, et Eléa se pencha en avant.

Les deux jeunes filles eurent l'impression de se faire aspirer vers le bas, la vitesse du vent leur picotait les yeux, étirait la bouche et emportait les cris paniqués de Sam trop loin d'elle et trop rapidement pour qu'elles puissent les entendre.
Le sol se rapprochait dangereusement, vite, vite, trop vite.

Samantha se voyait finir en carpette.

Soudain, un remous les fit basculer, et alors qu'elle s'inquiétait pour le sol, bientôt Samantha ne s'en soucia plus du tout, puisqu'il avait disparu.

Une bosse sur leur chemin les avait envoyés défier la pesanteur.

Elle hurla, ses membres se glacèrent, son sang vrombit, et elle ne perçut plus que les battements incessants de son cœur.

Eléa semblait figée à quelques mètres au dessus de l'eau de la mare qui les attendait, elle riait aux éclats dans une position de bombe tout en tenant Ash, Pikachu et Chrysacier du bout des bras. Lucas et Daniel s'accrochaient tant bien mal à leurs sacs, leurs visages mêlant la peur et l'amusement en une seule expression. Et elle, elle, elle tenait fermement Poussifeu et Farfuret dans ses bras, crispés, les jambes serrées.

Le temps reprit son cours, La douloureuse sensation de se faire aspirer vers le bas alors qu'on ne veut qu'une chose, retourner tout en haut s'attaqua à eux.

Un cri strident lui perça les tympans, elle tourna rapidement la tête et vit Lucas la main tendue vers elle lui hurlant, toujours dans une de ses poses mélodramatiques :

-JE VAIS TE SAUVER SAM !!

Ce n'est qu'à ce moment précis que Samantha se souvint de ses Pokémons feu et de Ash qui allaient atterrir dans de l'eau froide.

La peur de voir Poussifeu blessé prit le dessus sur la sienne et elle lui lança en l'air son starter avant de heurter l'eau froide.

Le petit Poussifeu, vexé de se faire éjecter des bras de sa « maman » pour se retrouver dans ceux de Lucas ne fut pas de cet avis et il piqua si fort la tête de son sauveur que celui-ci le lâcha avant de couler à son tour dans la mare.


Une lumière aveuglante l'obligea à fermer les yeux.

Eléanore vint la rejoindre dans un hurlement strident, bientôt sous l'eau, Elles virent deux jets de bulles : Lucas et Danny apparurent à leur tours sous les flots.

Ils nagèrent rapidement vers la surface, et reprirent leur souffle. Samantha inquiète chercha son Pokémon et Ash, mais ne les trouva pas, elle voyait Pikachu sur le chapeau de Eléa, Farfuret qui s'accrochait à son sac, mais aucun de leurs starters.

-HAPPY ! S'écria Eléa.

Sam leva la tête, ses yeux s'écarquillèrent de stupeur.

Un magnifique Papilusion voletait au dessus d'eux portant Ash et Poussifeu sur son dos ou du bout de ses pattes. Le Pokémon insecte poussa un cri semblable à un rire qui fut vite suivit par celui d'Eléa ravie, et ceux nerveux de ses camarades.

Samantha faillit boire la tasse, mais elle observa circulairement l'endroit où ils se trouvaient : juste dans une petite mare au bord de la ville d'Argenta. Elle observa l'endroit d'où ils venaient : le haut d'une bonne côte pentue se finissant en tremplin à au moins vingt mètres au dessus.

La voix de Daniel la sortit de ses idées noires –elle imaginait toutes les façons dont cela aurait put se finir-

-Bon et bien au moins nous sommes arrivés ici sains et saufs !

Oui, c'était le mot...Par miracle, ils étaient arrivés sains et saufs.

Mais rien que pour le plaisir de se venger, Samantha sauta sur Eléanore pour la couler, elle et ses idées débiles.