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Minuit, l'heure du cringe
de Nicéphore

                   



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[Texte] Irréfléchi
Parce que Gestalt s'est mis dans l'idée de nous imposer un texte en une heure pour développer un personnage random, Vocalume et moi. Et qu'on l'a fait en rush total, et que c'était très stressant et amusant. Et que ça se refera, parce que c'est selon lui un excellent remède à la procrastination — et c'est vrai. Se dire juste qu'on va écrire, juste comme ça, sans autre pression que celle de finir à temps, sans questionnement sur le pourquoi du comment, et plop ! Je suis finalement assez contente du résultat, même si ça prend place dans un contexte, bah, complètement indéfini mais qui fait semblant d'être travaillé.

Bonne lecture !



Ici, le cadre est rectangulaire, arrondi sur le haut en un joli demi-cercle sculpté. En bois poli sur le pourtour, il se pare de fleurettes pastel du côté intérieur, entre des volutes nervurées taillées avec grand soin. Les petits points à cinq pétales, rose, bleu, jaune, enfantins, s’agglomèrent au bord d’une surface lisse et froide, voire, par un petit effet esthétique, y dépassent comme prises dans le lac givré.

Cette glace s’accorde assez bien avec la forme longue de la face qui s’y reflète, sa symétrie biaisée par le florilège de plantes exprime un visage droit bien qu’un peu imparfait (un sourcil gauche trop haut, une texture pas très lisse), l’aspect un peu fané, la peau trop pâle et les cheveux trop ternes, et une mélancolie sur des lèvres trop fines. Le visage se tourne, revient, jette un œil à droite juste comme ça, et une main surgie du hors-champ retire l’image cadrée du mur.

Ce miroir n’est pas mal !

Bien accordé, dans une bonne esthétique, qui met bien en valeur, donc ; un peu cher, mais ça va, ça vaut le coup. Alors, après les politesses d’usage à la vendeuse, un sac rouge et un au revoir, l’homme sort de la boutique en prenant garde à raccompagner la porte au mur.

Le soir est frisquet comme d’un début d’hiver, il remet une écharpe ôtée un peu plus tôt ; mais sinon, le froid ne le dérange pas tant, pas comme ses baskets claquant dans les flaques que le trottoir accumule. Si ça reflète les lampadaires d’une assez jolie façon, c’est plutôt agaçant de devoir vérifier où est-ce qu’on met les pieds, et ce, du haut de deux bons mètres avec un sac à charge. Et il ne faudrait pas qu’il se remette à pleuvoir, pour le miroir… et il ne faudrait pas de heurts d’inattention. Le bras qui tient le sac se colle près de son corps. Il entreprend d’éviter au mieux la trajectoire des passants, mais sans que ses écarts paraissent superstitieux...

Enfin, on ne lui demandera pas ce qu’il protège ainsi.

Il ralentit le pas. Finalement, c’est agréable, les rues, le soir, quand il n’y a pas trop de monde et qu’il fait assez sombre pour que toutes ces lumières puissent trouver leur image dans les taches d’eau par terre. Quand il est seul avec le froid et du vent aux oreilles, à retracer son trajet mentalement, même à faire attention d’éviter les obstacles, c’est agréable. Parce que passé l’enthousiasme de l’achat, l’inquiétude de ramener l’objet intact, il a moins envie de rentrer…

À la maison, on le lui demandera. Comme toujours, comme chaque fois, et que dira-t-il, hein ?

Il fait presque une glissade sur le pavé trempé pour contourner un banc. Là, à angle droit, c’est sa rue, et sa porte juste ici. Ses doigts croisent dans ses poches quelques trucs métalliques et sortent deux trombones avant son trousseau de clés. Hall, escaliers, palier, escaliers, porte, hall, il referme derrière lui… Et comme s’il pouvait passer inaperçu, il prend garde de ne faire qu’effleurer la moquette en direction du salon ; il sait où il va mettre son nouvel achat, il n’appréhende que les inévitables pas qui tardent à résonner derrière lui.

« Le petit vingt-deuxième ? »

Sursaut. Il prépare toujours mentalement la place parfaite pour le miroir, jamais l’explication à sa colocataire. Mais qu’il y a-t-il à expliquer, enfin, on collectionne ce que l’on veut, si l’on aime les miroirs, et se répercuter à l’infini dans chaque pièce où l’on entre, c’est notre affaire, non ? C’est super intéressant d’étudier quel cadre conviendrait le mieux à tel visage, en fonction des traits certes, mais de la texture, l’émotion, la personnalité, et c’est toute une introspection qui passe par la recherche du miroir parfait, une quête de l’esthétique, une odyssée intérieure, une volonté d’identité !

« Euh, haha, oui. »

Il entrepose, un peu piteux, son butin lustré avec la vingtaine d’autres, aux murs, au plafond, sur des commodes, des armoires, sur le sol, sous les lampes, et attend le soupir exaspéré pour retourner vaquer à ses occupations.
Article ajouté le Jeudi 01 Novembre 2018 à 16h03 | |

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