Introduction de l’interviewée
Bonjour à tous ! Tout d'abord, un immense merci à Soundlowan pour cette interview, et à ceux qui la liront. Je suis Cyrlight et beaucoup parmi vous me connaissent sûrement, ne serait-ce qu'en tant que Présidente du Comité de lecture de Pokébip. Je suis également auteur de fanfictions et romancière de profession, plus connue sous le nom de plume de Mary Elise.
J'ai découvert ce site il y a maintenant plusieurs années, alors que je cherchais un endroit où poster une histoire pokémon qui commençait à germer dans mon esprit (et qui est par la suite devenue La loi de la nature). Je n'avais jamais écrit de fanfictions avant ça (pas en tant que telles, du moins) et je ne prévoyais pas de continuer dans cette voie une fois l'écriture de cette fic terminée, mais de fil en aiguille, je me suis lancée dans des OS et d'autres aventures pokémon.
J'étais une très grande fan de l'animé quand j'étais plus jeune, mais j'ai cessé de suivre à l'arrivée de la seconde génération. Quand je me suis replongée dans l'univers, j'avais un sacré retard à combler. Mon premier jeu a été Diamant, et je ne me serais peut-être jamais lancée si je ne l'avais pas trouvé par hasard, d'occasion. Je l'ai tout de suite adoré, mais j'ai moins accroché aux générations suivantes, raison pour laquelle mes fics les prennent rarement en compte. Ce n'est cependant pas un problème, car il y a une infinité d'histoires à créer, même en s'arrêtant à la 4G. C'est là toute la beauté de l'imagination !
Parle-nous de lecture !
Que cherches-tu, qu’aimes-tu trouver dans une fanfiction que tu lis ?
Déjà, les bases : une fanfic bien écrite, un bon équilibre entre dialogues et narration, un scénario assez original... Tout ce qui rend la lecture un minimum agréable et confortable. Et, bien sûr, si le thème abordé me plaît, c'est encore mieux.
Et à l'inverse, que n'aimes-tu pas trouver dans une fanfiction ?
Beaucoup de fautes d'orthographe, de grammaire et surtout de syntaxe. En dépit de ma réputation de Grammar Nazi, je sais faire preuve de tolérance envers les fautes quand elles ne sont pas nombreuses, parce que je suis la première à laisser échapper des erreurs d'inattention, mais trop, c'est trop !
En revanche, et c'est regrettable parce que je croise de plus en plus d'histoire dans ce style, je ne suis pas, mais alors vraiment pas fan des écritures précieuses et ampoulées. J'entends par là ces histoires où l'on croise plus d'adjectifs que de déterminants, des métaphores et des hypallages à la pelle... Au début, c'est très joli, très poétique, mais ça devient vite très lourd pour quelqu'un comme moi qui aime la concision et la sobriété.
Quel type d'intrigue apprécies-tu le plus ?
J'adore les parodies, mais je suis très exigeante à ce niveau. Cela mis à part, je suis plus portée sur les drames.
J'aime beaucoup les histoires qui s'étendent sur une durée assez longue, où l'on voit les personnages grandir et évoluer, et ensuite revenir au début pour constater le chemin parcouru. Le côté nostalgique fait souvent son petit effet sur moi.
Je ne suis pas fan de romance, mais j'ai un faible pour les histoires d'amour non conventionnelles ou torturées. Et quand je dis « torturée », je pèse mes mots (du sang, de la violence, de l'inceste...). Bref, dans ce goût-là.
Et, évidemment, plus les histoires finissent mal, plus ça me plaît. Je n'ai jamais apprécié les happy end, probablement parce que je suis une grande pessimiste et une dépressive notoire.
Après, tout dépend bien sûr de la façon dont les histoires sont racontées, de leur richesse, de la qualité des personnages... Ça influe beaucoup sur l'intérêt que je peux porter à l'intrigue.
Quel type de personnage apprécies-tu le plus ?
En accord avec mes goûts et ma personnalité, je répondrais les personnages sombres et malsains. Ceux qui font du mal volontairement, qui assument leur part d'ombre... Vous avez déjà vu une hystérique faire le tour de sa chambre en sautant de joie à 4h du matin parce que Cersei Lannister est montée sur le Trône de fer après avoir fait exploser ses ennemis ? Eh bien c'était moi.
J'aime aussi les personnages plus nuancés, comme Scarlett O'Hara (Autant en emporte le vent est l'une des oeuvres qui ont marqué ma vie). Ce que j'apprécie chez elle, c'est son côté égoïste et dur qui est nécessaire à sa survie. Tout le monde la méprise, la blâme pour son attitude, alors qu'ils adorent Melly et ne comprennent pas qu'elle puisse aimer à ce point Scarlett. Sauf que sans Scarlett, il n'y aurait plus de Melly depuis longtemps.
Pour moi, un personnage ne doit pas être manichéen. Encore que... Quand les méchants sont réellement méchants, ça passe plutôt bien (coucou Ramsay !), mais je ne supporte pas les personnages trop gentils, et pire encore, ceux qui restent gentils alors que tous les malheurs du monde leur tombent dessus. On ne peut pas être foncièrement bon, pas à mes yeux, du moins. Je pense que tout le monde possède une part de ténèbres plus ou moins enfouie et qu'il est justement intéressant d'explorer cette facette de l'être humain.
Aurais-tu un auteur ou une fanfiction à nous recommander ?
Ce cher Malak, naturellement, même si je me demande parfois comment il peut écrire de bonnes fictions tout en étant un adepte de la chocolatine.
Il faut savoir que je ne lis pas beaucoup de fics en dehors de mon rôle au sein du Comité de lecture (et lorsque je le fais, ce sont généralement des fics non-pokémon), mais j'ai beaucoup apprécié celle-ci, même si je ne me souviens plus comment je l'ai découverte : Près de toi, loin de moi.
Une autre fic qui m'a beaucoup touchée, c'est Assassins de Poivressel ! Assassins de la plus belle !, de mon collègue/esclave M@xime1086. Son thème, assez original pour une fic pokémon, m'a interpellée, parce qu'à l'époque, je militais moi-même pour la préservation des serres d'Auteuil (bien que ça n'ait finalement pas servi à grand-chose).
Question-Fantominus : Est-ce que la franchise Pokémon te fait toujours rêver comme lorsque tu l’as découverte ?
Oh que non. J'ai déjà eu du mal à accrocher à Noir et Blanc à leur sortie, même si je reconnais volontiers que la Team Plasma s'en sort avec les honneurs, comparées à celles qui ont suivi. J'ai joué tardivement à X et Y, n'ayant pas eu de 3DS avant la sortie de ROSA, mais là encore, j'ai été moyennement emballée. Avec un pokémon comme Yveltal, je m'attendais à quelque chose d'assez mature, mais j'ai été très déçue du résultat. Avec la Team Flare, on est bien loin du charisme d'Hélio et de sa Team Galaxie. Quant à SL, je crois que je n'ai plus touché le jeu après avoir fini la trame principale. Il y avait pourtant de bonnes idées pour apporter un vent de nouveautés, avec l'absence d'Arènes et autres, mais finalement, ça reste quand même trop basé sur le même modèle. Des personnages comme Elsa-Mina, Apocyne et surtout Gladio (bon, je mentirais en prétendant que je ne l'ai pas adoré, lui) auraient pu remonter un peu le niveau, mais ils sont trop peu développés à côté de personnages dont on se passerait volontiers, comme l'agaçant Tili qu'on a vite envie de noyer, Lilie qui passe son temps à répéter qu'elle déteste les combats, mais qu'elle va faire une exception pour regarder ou encore le pervers professeur Euphorbe qui aime exhiber son torse. USUL, ce sera sans moi !
Parle-nous d'écriture !
Quels ont été tes débuts en écriture ? N'as-tu écrit que des fanfictions Pokémon ?
J'ai commencé à écrire en CE1. Je m'amusais à romancer des histoires basées sur les BD Tom-Tom et Nana, donc techniquement, on peut dire que je me suis lancée avec la fanfiction, même si je n'en avais pas conscience, à l'époque.
À partir du CM2-6ème, je me suis tournée vers des histoires originales. À l'époque, elles parlaient toutes de magie, d'héroïnes dotées de pouvoirs en lien avec les éléments... (voilà où ça mène de lire Witch mag !)
Je crois que j'ai toujours su que je me destinais à une carrière de romancière. Oh, bien sûr, j'avais en parallèle d'autres projets professionnels. J'ai longtemps voulu devenir styliste (et encore aujourd'hui, j'ai gardé un goût prononcé pour la mode), puis je me suis tournée vers le monde des courses de chevaux, mais ça n'a pas collé, parce que ça me prenait trop de temps et je n'en avais plus assez pour écrire.
À une époque, pour des raisons que je préfère ne pas évoquer, j'ai dû abandonner les romans pendant environ un an. Plus le temps passait et plus j'avais peur d'être incapable de reprendre un jour, de ne plus être à la hauteur... Et pourtant, j'éprouvais toujours le besoin d'écrire, donc je me suis lancée dans ma première fiction pokémon, La loi de la nature, née d'un rêve que j'avais fait avec Mewtwo, la Team Rocket et les Oiseaux. J'ai toujours considéré mes rêves comme une inépuisable source d'inspiration.
Ensuite, j'ai repris progressivement ma carrière de romancière en mains et j'ai publié mes premiers ebooks, tout en continuant en parallèle à travailler sur mes fanfictions. J'avais dit que j'arrêterais à la fin d'Entre infini et au-delà, mais non contente de me lancer dans une suite et dans une nouvelle fic (Fer de Lance), je me suis en plus tournée vers d'autres fandoms. J'ai deux fics hors pokémon en cours : Un combat de tous les instants (Tortues Ninja 2012) et Cycle III : Le cycle de Nourasie ( Oban Star-Racers). J'ai aussi rédigé un court OS sur Souvenirs de Marnie.
Qu'est-ce qui te donne l'envie et te motive pour écrire ?
J'ai une imagination débordante. Je peux inventer des histoires à partir de tout et n'importe quoi, et lorsque je ne le fais pas, ce sont mes rêves qui m'en soufflent, comme mentionné ci-dessus.
J'aime écrire sur des thèmes qui me plaisent et qu'on retrouve souvent dans mes écrits, fanfics aussi bien que romans : la mort, les soeurs ennemies (ça marche aussi avec un frère, coucou Cassy et Éric...), le passé, l'inceste... Pourquoi l'inceste ? Parce qu'un jour, en cours d'éducation civique, j'ai évoqué le fait que les mariages entre cousins s'étaient raréfiés à notre époque. Et là, toute ma classe m'a regardée avec une grimace de dégoût, comme si j'étais une pestiférée, en répliquant que c'était aussi répugnant qu'immoral. Euh... Ok. Elisabeth de Bavière et François-Joseph d'Autriche, on en parle ? Et tous les autres ? Fut un temps où c'était monnaie courante, alors pourquoi les moeurs auraient-elles à ce point évolué négativement de ce côté-là ?
C'est aussi à ça que me serve mes histoires, à exprimer mon point de vue sur des sujets qui me tiennent à coeur. Non, l'inceste ne me choque pas à partir du moment où il est consenti. Ce n'est pas pour rien que j'adore Cersei Lannister, que je compte désormais parmi mes muses !
Voilà une autre source d'envie et d'inspiration. J'essaye de rendre hommage à celles qui me servent de modèles à travers mes écrits, notamment Lilith, la première femme d'Adam, et Goldie O'Gilt, la « fiancée du grand nord » de Balthazar Picsou, pour ne citer que les plus importantes à mes yeux.
Pour ce qui est de la motivation, je n'avais jamais eu de problème jusqu'ici, mais actuellement, elle n'est pas au beau fixe, et je dois reconnaître que je me force un peu, parce que c'est mon travail et que je suis bien obligée de le faire. Il faut dire que l'absence globale de commentaires sur mes fics (j'en reçois quelques-uns, mais très peu), couplé au flop de mon dernier roman, m'ont assez démoralisée, au point que j'en arrive à me remettre totalement en question.
L'autre problème vient dudit roman, car je considère son histoire comme la meilleure que j'ai écrite à ce jour. L'ennui, c'est que tout ce que je fais depuis lors me paraît mauvais, fade, nettement en-dessous... Je n'arrive pas à retrouver cette perfection que j'avais l'impression d'avoir au bout des doigts en le rédigeant. Je ne dis pas qu'il est parfait, car ce n'est pas le cas, mais c'est le sentiment qu'il m'a inspiré, et qu'il m'inspire encore aujourd'hui, alors que je tente désespérément de sortir de cette mauvaise passe.
Quelle serait ta plus grande qualité en écriture, de quoi es-tu la plus fière ?
De mes dialogues, sans hésitation. Surtout pour les scènes de colère. Je trouve qu'ils sont beaucoup plus parlants, voire beaucoup plus criants que toute la narration. J'imagine que c'est parce que moi-même, j'ai le défaut de m'énerver pour un oui ou pour un non, donc c'est le sentiment que j'ai le plus d'aisance à exprimer.
On m'a dit un jour, en commentaire de l'un de mes romans, que l'histoire était digne d'un scénario tant elle était forte, et aussi qu'elle ne se lisait pas, mais qu'elle se vivait. Je crois que je n'aurais pas pu espérer meilleur compliment. Je suis loin d'être un auteur irréprochable, mais je suis heureuse quand j'arrive à transmettre de telles émotions aux lecteurs.
Et quel serait ton plus grand défaut ?
La cohérence globale et émotionnelle. Globale, je pense qu'il n'est pas très utile de développer. Même quand j'essaye de scénariser mes histoires (sachant que je ne le fais jamais pour mes fics), j'ai toujours tendance à partir dans une direction différente au bout d'un moment, si bien que tout est à refaire et que, souvent, la suite ne colle pas forcément avec le début.
Émotionnelle, c'est plus en rapport avec les personnages. J'ai parfois du mal à leur faire prendre des décisions logiques, en accord avec leur caractère, ou à les amener correctement dans l'intrigue. J'ai du mal à provoquer une action ou une réflexion sans qu'elle donne l'impression de tomber comme un cheveu sur la soupe. Je suppose que ça vient du fait que je suis d'une nature plutôt téméraire. J'ai tendance à agir d'abord et à réfléchir après, donc j'ai du mal à concevoir que l'on puisse tergiverser ou hésiter au moment de faire un choix.
La définition de ton style d'écriture personnel ?
Spontané et naturel. Comme je l'ai dit plus haut, je n'aime pas tout ce qui est ampoulé, surfait ou plus alambiqué que nécessaire. Je me plais à employer les mots qui vont à l'essentiel et je fais en sorte que mes récits soient accessibles à tous les lecteurs (quoique, je pourrais traumatiser les plus jeunes avec leur contenu...).
Quand j'étais en Première, mon professeur d'Histoire, une personne admirable, a un jour montré l'une de mes copies et celle d'une autre élève à toute la classe. Nous avions toutes les deux eu 18/20, la seule différence étant qu'elle avait rendu une copie double, alors que je n'avais même pas utilisé tout le verso de ma feuille simple. Le professeur a dit que j'avais l'avantage d'exprimer en quelques lignes ce que les autres avaient besoin de développer trois fois plus longuement, et que mon devoir était par conséquent plus pratique et surtout plus rapide à corriger.
Bon, après, tout le monde n'était pas de cet avis. En philo, on me reprochait énormément ma concision, mais j'ai tout de même réussi à avoir la moyenne au bac, en dépit de mes trois pages et de mon absence totale de révision.
Parle-nous de ton travail (aussi nommé la partie cachée des fictions)
As-tu des manies, des habitudes, des préférences au moment d'écrire ?
Il faut que je sois toute seule, dans le silence le plus complet et dans une pièce entièrement close, volets inclus. J'ai beaucoup de mal à me concentrer, car le moindre petit bruit suffit à m'énerver, et comme j'ai une hypersensibilité auditive, ça ne m'aide pas.
Puisqu'il y a toujours des sons contre lequel je ne peux rien faire (passage des voitures, parquet qui grince...), je me passe toujours "Le lac des cygnes" quand j'écris, au volume minimum, de manière à ce que la musique noie les bruits extérieurs. C'est assez paradoxal avec la notion de silence complet, je l'admets.
Je préfère écrire sur Ipad plutôt que sur ordinateur, même si au bout de cinq ans et quelques milliers de pages, j'ai fini par user l'écran tactile...
Quelle place accordes-tu à la documentation lorsque tu écris ?
Je n'hésite pas à faire des recherches, si besoin est. Pour les pokémon, les personnages et autres... Poképédia est mon meilleur ami. C'est essentiellement sur lui que je m'appuie, et sur le Pokédex de Pokébip.
De manière plus général, j'ouvre souvent un onglet Google quand il faut que je me renseigne sur un sujet ou sur un autre. Le problème, c'est que me connaissant, ça finit toujours par me prendre des heures, car je suis très curieuse de nature. L'autre jour, je faisais une recherche sur les félins d'Amérique de Sud et vingt minutes plus tard, j'étais toujours en train d'étudier la faune locale, avant de me tourner vers celle de l'Australie, d'Indonésie... Une fois lancée, je ne décroche plus.
Quelle place accordes-tu au canon de l'univers Pokémon dans tes fics ?
Le canon occupe une place majeure dans mes histoires, ce qui ne m'empêche pas de « l'arranger » à l'occasion. Déjà, je n'ai pas un univers fixe pour écrire. Je m'inspire tantôt des jeux, tantôt de l'animé, et tantôt ni de l'un ni de l'autre, mais tout en conservant les bases de l'univers.
J'essaye aussi de le rendre plus réaliste, dans la mesure du possible. Les attaques, par exemple, causent de véritables dégâts physiques, en particulier face à des pokémon sauvages ou ennemis.
Dans Fer de Lance, si les enfants reçoivent leur premier pokémon à dix ans, vous ne les verrez pas pour autant partir sur les routes. J'ai préféré m'épargner le concept de Dora l'Exploratrice, où un enfant part de chez lui avec un sac à dos, une carte et des créatures bizarres. Sérieusement, quel parent laisse partir son enfant seul à dix ans, dans un environnement hostile, peuplé de bêtes sauvages et de Team inamicales ?
Quelle est la chose qu'il ne faut surtout pas oublier lorsqu'on écrit ?
Surprendre. Il faut de l'inattendu, des retournements de situation, désemparer le lecteur... Je me souviens qu'à l'époque où j'entamais la publication des bonus d'Entre infini et au-delà, j'avais promis à ceux qui me lisaient une révélation majeure sur l'un des personnages qui serait telle qu'ils auraient probablement besoin d'avoir un défibrillateur sous la main. Sans aller jusque-là, je pense qu'ils n'ont pas été déçus.
Récemment, j'ai lu la trilogie Divergente, et j'ai été surprise de constater, parmi les critiques, que certains félicitaient l'auteur pour avoir eu le cran de faire mourir son héroïne, parce que c'était plutôt rare, selon eux. En ce qui me concerne, c'est lorsque je laisse mes personnages principaux en vie que les gens n'en reviennent pas. Au grand dam de ma mère, d'ailleurs, qui a décidé de lever une collecte de fond pour me soudoyer afin que j'épargne l'un de ses chouchous. Hélas pour elle, il figure en tête de liste de mes prochaines victimes. Je ne vous apprends rien en précisant que je suis un auteur sadique, j'aime tuer, torturer et voir souffrir les personnages que je crée.
Le problème, c'est qu'au bout de deux ou trois histoires, bah... On repassera pour la surprise, parce que les lecteurs finissent par bien me connaître et ils s'attendent au pire.
Et quelle est la chose qu'il ne faut surtout pas faire lorsqu'on écrit ?
Renoncer. Je vois beaucoup de gens qui débutent et qui demandent des conseils à des auteurs plus expérimentés pour se lancer. Pour ma part, je n'en ai jamais demandé et je n'en donne quasiment jamais (sauf dans le cadre des évaluations, parce que c'est quand même à ça que je suis censée servir). Ce n'est pas par prétention, par orgueil ou par mépris, mais simplement parce que le meilleur moyen de s'améliorer, il ne vient pas des autres, mais de nous-mêmes. L'astuce, c'est de toujours recommencer, encore et encore. Vous pourrez réécrire une histoire cinq, dix fois, elle sera toujours meilleure.
En fait, c'est ça, le seul conseil que j'ai à donner. De ne jamais arrêter d'écrire, mais de toujours recommencer. Certains diront qu'on n'a pas forcément le recul nécessaire pour voir ses défauts, mais je ne suis pas d'accord. On a tous un jour relu une vieille histoire avec honte et horreur, preuve qu'il y a eu une réelle évolution entre-temps, sans quoi elle nous inspirerait la même fierté qu'à l'époque.
A quelle chose accordes-tu une importance particulière lorsque tu écris tes fictions (décors, intrigue globale, personnages, relations entre ces derniers...) ?
Aux décors. J'aime beaucoup les histoires qui sont rattachées à un lieu, ou celles où le lieu est omniprésent, au point d'en faire presque un « personnage » à part entière. Je n'en suis encore qu'au tout début de Fer de Lance, mais l'Arène d'Ébènelle tient en quelque sorte ce rôle. Elle est le symbole de l'enfance de Peter et Sandra, de leur famille, mais aussi de leur avenir. C'est plus qu'un simple bâtiment.
Je publie actuellement sur un autre site une fiction originale qui s'intitule Retour à Saint-Cyrien et qui narre la vie d'une fillette dans un pensionnat, pendant la première guerre mondiale. Cette histoire fait plus de quatre cents pages, et j'ai mis presque deux ans à l'écrire. Au fil du temps, je me suis attachée à ce lieu que j'ai créé (aussi inhospitalier soit-il), au point d'avoir l'impression d'arpenter les couloirs, les salles, la cour... avec mon héroïne. Et quand je l'ai terminée, j'ai ressenti de la nostalgie à l'idée de laisser cet endroit derrière moi. Je ne sais pas si mes lecteurs éprouvent la même chose, mais j'aimerais beaucoup que ça se produise un jour.
Parle-nous de tes écrits !
Parmi tes fanfics, un certain nombre a été écrit dans le cadre d’un concours. Es-tu attirée par les contraintes particulières que cela entraîne, est-ce un moteur pour ta créativité ?
Pas vraiment. En fait, je ne sais même plus pourquoi je me suis lancée dans ces concours, d'autant que je les fuis, généralement. Je n'aime pas trop la compétition et je suis plutôt orgueilleuse de nature, donc j'assume assez mal les défaites.
Maintenant, si je continue, c'est parce que je me suis liée avec les organisateurs, et qu'ils manquent souvent de participants. Et puis, je dois reconnaître que ces concours m'ont permis d'essayer de nouveaux genres dans lesquels je ne me serais sans doute pas lancée de mon propre chef. J'ai écrit pour l'occasion mon premier thriller psychologique (L'ombre d'une soeur) et mes deux seules fics humoristiques (Nous voulions simplement être des héros... et Chaos à Kanto). Je ne le regrette pas, car ce furent des expériences très enrichissantes.
T’attendais-tu à ce que ta fic L’ombre d’une sœur remporte le concours pour lequel tu l’as rédigé ? Pourquoi avoir choisi de travailler sur le personnage de Morgane en particulier ?
Comme dit plus haut, c'était mon premier thriller psychologique, donc non, absolument pas. Même si je la considère aujourd'hui comme l'une de mes meilleures fics, je n'avais pas le recul nécessaire à ce moment-là pour la juger.
S'il y a un concours que j'étais déterminée à gagner, c'était celui portant sur le thème de la mythologie, et pour lequel j'ai écrit Le cri des Cornèbre. Je me suis mise une pression monstre et je me suis même brouillée avec mon meilleur ami qui considérait ma soif de victoire comme de la prétention, alors que je ne voyais pas les choses ainsi. C'était surtout parce que je voulais en quelque sorte honorer un thème que j'adore et qui est celui de ma fanfiction principale, Entre infini et au-delà. C'était plus un devoir qu'un défi, à mes yeux.
Si j'ai choisi Morgane, c'est d'une part parce que j'avais déjà eu l'occasion d'écrire avec elle et que je connaissais un peu le personnage, puisqu'elle est le mentor d'Esméralda et une alliée de la Confrérie dans Entre infini et au-delà, mais surtout parce que son style me semblait en parfaite adéquation avec une histoire d'horreur. Morgane est assez ténébreuse (du moins jusqu'à ce que son apparence soit modifiée dans le jeu vidéo), mystérieuse et elle est spécialiste du type psy. Quoi de plus adapté pour un thriller psychologique ? Au final, elle est avec Cynthia, Sandra et Peter la Championne que j'ai le plus souvent mise en scène. Ça m'a d'ailleurs beaucoup amusé de la transformer en folle ésotérique dans Chaos à Kanto.
Plusieurs de tes écrits sont des poèmes. As-tu un rapport particulier à la poésie, et que pourrais-tu dire si tu devais comparer cette expérience à l’écriture en prose ?
La poésie a occupé une place prépondérante dans ma vie à un moment donné. C'est pour moi le plus puissant moyen d'expression, et si j'ai commencé à écrire très tôt des poèmes, je m'en suis surtout servi par la suite pour exprimer des émotions très vives, en particulier le deuil.
Quand j'ai arrêté d'écrire pendant un an, il ne se passait pas une semaine sans que je compose un sonnet. J'avais tellement pris l'habitude du rythme des vers que les alexandrins me venaient à l'esprit avec une facilité déconcertante. Comme mon pseudo l'indique, je suis passionnée par les courses d'obstacle, et j'ai écrit des poèmes pour chacun de mes chevaux favoris. Maintenant, je n'en rédige plus qu'un seul par an, à l'anniversaire de la mort de celui qui a bouleversé ma vie. C'est en quelque sorte à son souvenir que j'associe désormais la poésie.
Quel est selon toi l’élément principal de dissociation entre ta fanfic La loi de la nature et sa suite La nature de l’être, qui justifie d’en avoir fait deux œuvres bien distinctes ?
À l'origine, l'histoire devait se terminer en même temps que La loi de la nature. Une suite n'était pas au programme. En fait, je m'arrange toujours pour clore mes récits de manière à ne pas être forcée de les continuer. Je déteste me sentir obligée de poursuivre, je préfère être libre de ce que j'écris, or je pars du principe qu'à partir du moment où on commence à publier une histoire pour les lecteurs, un accord tacite contraint l'auteur à leur en livrer la fin.
Évidemment, si j'ai une idée intéressante, je ne vais pas la remiser au placard sous prétexte que ma boucle est bouclée. Ça a été le cas avec La loi de la nature, mais aussi avec Entre infini et au-delà.
Pour ce qui est de La nature de l'être, c'est en partie l'évaluation de Kydra et ses pertinentes remarques qui m'ont incitée à poursuivre l'aventure. Le côté Mary-Sue de Pandore, la trop grande quantité de légendaires, le manichéisme des personnages... J'ai essayé d'améliorer tout ça dans la suite et ça a fonctionné, puisque mon estimable évaluatrice a relevé un léger mieux, mais ce n'était pas encore assez, à son goût. Ce n'est qu'avec Entre infini et au-delà qu'elle a estimé que j'avais atteint cet objectif et m'a même glorifiée d'une entrée au Panthéon. Encore aujourd'hui, c'est une source inextinguible de fierté !
Comment travailles-tu avec ton partenaire sur votre fic collective Ici Illumis ? Verrons-nous de nouveaux chapitres s'y ajouter prochainement ?
À la base, ce n'était même pas une fic collective, mais deux fics rivales dans un concours. Comme on se « connaît » de longue date, Khlass et moi, je lui ai proposé de mettre en commun nos deux fics sur Pokébip, puisque le thème était de rédiger un article de journal, si mes souvenirs sont bons, et de faire une sorte de mini-magazine. On en a ensuite sorti deux autres, mais la publication est suspendue depuis un bon bout de temps. Elle reprendra peut-être quand, je cite, « Khlass retrouvera l'inspiration », si ce n'est pas moi qui la perds entre-temps. En attendant, je ne tiens pas à poursuivre cette fic seule alors que j'en ai déjà plusieurs autres à côté.
Une conclusion avant de se quitter ?
As-tu un projet d'écriture particulier dont tu voudrais nous parler ?
Récemment, on m'a suggéré d'écrire une fic sur le background de Cynthia de manière plus approfondie qu'avec Une autre étoile, mais même si l'idée est intéressante, ça ne m'emballe pas vraiment, sachant que je fais actuellement la même chose pour Peter et Sandra dans Fer de Lance.
J'ai plusieurs projets de fics, mais elles sont toutes hors-fandom. Celle qui me tient le plus à coeur, c'est une version romancée, humanisée et approfondie de La jeunesse de Picsou, période Klondike. J'ai aussi le scénario d'une fic Inspecteur Gadget 2.0 en tête, peut-être un OS ou une courte fic à chapitres Harry Potter et, puisque j'ai été très déçue par Alien : Covenant, je réfléchis à la potentielle histoire post-Prometheus que je pourrais écrire.
À côté de ça, je prépare actuellement la sortie de mon prochain ebook : Les ombres de Malévie : Le renégat et je suis en pleine écriture d'une double-préquelle de mon roman Corps et Esprit.
Quel conseil donnerais-tu aux fanfictionneurs débutants qui liront cette interview ?
Il ne faut pas avoir peur de se lancer. Vos débuts risquent d'être médiocres, ou même mauvais, mais ce n'est pas un drame. Comme je l'ai dit plus haut, c'est en écrivant et en recommençant que l'on progresse. N'hésitez pas à lire beaucoup, également. C'est un très bon moyen d'apprendre à construire une histoire, aussi bien sur le fond que sur la forme.
Veux-tu nous parler d'un dernier point en particulier ?
Je voudrais remercier mes lecteurs, en particulier ceux qui me laissent parfois des commentaires ou des MP, en dépit du fait que je morde fréquemment ! D'aucuns disent que l'on écrit avant tout pour soi, mais je n'ai jamais été d'accord avec cet adage, sans quoi mes histoires ne quitteraient pas le traitement de texte de mon Ipad.
Même si ce n'est qu'une fois de temps en temps, n'hésitez pas à dire à l'auteur que vous aimez sa fic, que vous appréciez certains passages, certains personnages... (bon, sauf si vous détestez tout, bien entendu, mais là encore, vous êtes libre de le dire, à condition bien sûr de rester courtois et pertinent dans vos remarques). Bref, ça fait toujours plaisir de savoir qu'on n'écrit pas pour rien. Parfois, quand je poste deux-trois chapitres d'affilée et que personne ne se manifeste, il m'arrive de me demander pourquoi je continue, mais je le fais quand même, car j'ai envie de croire qu'il y a quelques lecteurs fantômes qui passent par là.
Merci également à Soundlowan pour cette interview, ça me donne le sentiment d'être importante, et une occasion à mes chevilles d'enfler encore un peu plus. J'adore parler de mes histoires, au point de finir par casser les oreilles (ou les écrans) des gens...
Du coup, merci à tous !