Jérome sursauta soudain. Il était dans sa chambre, en train de jouer à Super Mario sur sa GameCube. Debout. La télévision était en plein milieu de la pièce, mais il n’avait même pas pensé à prendre une chaise ou quelque chose. Il cligna des yeux. Tout cela lui paraissait si irréel...
Il posa la manette et éteignit la télé. Il ne pensa pas éteindre la console. Autant qu’il s’en souvienne, il y jouait tous les jours ; et pourtant aujourd’hui elle lui semblait comme étrangère, il avait l’impression de tenir cette manette pour la première fois de sa vie.
Et puis, surtout, il avait l’air d’un andouille, là, debout.
Il alla s’asseoir sur son lit. La couverture bleue était parfaitement bordée, le drap blanc replié par dessus. Mais il n’avait pas le souvenir de l’avoir fait aujourd’hui. Il était encore tôt ; le soleil illuminait sa chambre à travers la fenêtre dont les volets étaient ouverts. Il se leva et voulut contempler la ville endormie.
De l’autre côté de la fenêtre on pouvait voir le ciel, les nuages, et le soleil dans sa lente course vers le zénith.
Mais pas la ville.
Il se mit sur la pointe des pieds, loucha désespérément dans une vaine tentative d’apercevoir le sol, ou au moins les toits. Mais la fenêtre s’obstinait à montrer le ciel.
Jérome soupira, retourna vers son lit.
A mi-chemin il se retourna brusquement, s’arqua pour regarder le paysage. Mais il ne réussit pas à prendre la fenêtre par surprise. Elle semblait bien décidée à lui montrer les nuages.
Il resta un moment immobile, indécis. Puis il eut une idée de génie. Il allait l’ouvrir ! Il allait ouvrir cette foutue fenêtre et lui montrer de quel bois il se chauffait. Ce n’était tout de même pas une fenêtre qui allait dicter la loi dans
sa chambre !
Il posa sa main droite sur la poignée, et la tourna résolument vers la gauche.
La poignée résista.
Il réessaya, força, y joignit les efforts de sa main gauche, réessaya, força encore. Mais rien n’y fit. La fenêtre était bien décidée à ne lui montrer que le ciel, et s’il n’était pas satisfait, il n’avait qu’à aller se faire voir par la porte.
Jérome fronça les sourcils. Mais il ne se découragea pas. La journée ne faisait que commencer, et ce n’était pas une vulgaire fenêtre qui allait l’obscurcir.
Comme pour le contredire, des nuages allèrent se poster devant le soleil. Il jura et alluma la lumière.
Bon. Il ne contemplerait pas la ville endormie. Et alors ? Qu’est-ce que ça pouvait lui faire ? Il y avait plein de choses bien mieux qu’une ville endormie pour occuper son champ de vision. A commencer par son ordinateur. Il l’alluma. Il n’avait pas encore pris son petit déjeuner mais il décida de surfer un peu sur Internet avant de descendre.
Jérome n’était pas le genre de personne à passer sa vie derrière un ordinateur, mais l’ordinateur en question semblait tout disposé à passer la sienne devant le jeune homme. Tout un tas d’applications se lancèrent dès le démarrage, lui proposant d’accéder à différentes activités comme le système de stockage de Pokémon en ligne de Léo, la synchronisation de l’horloge interne d’un Pokédex avec l’horloge parlante de Safrania, la création d’une page FaceBook Dresseur et un tas d’autres trucs qu’il ne prit pas la peine de lire en détail, quoique l’ordinateur se montra très enthousiaste.
Il lança plutôt une recherche d’images.
Essayez avec cette orthographe : petit déjeuner
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Il grogna. Ou bien la ville avait soudainement décidé de ne plus exister, ou bien quelqu’un se payait sa tête. Qu’à cela ne tienne ! Mais elle lui coûterait cher...