Ancient Stones de Zorua&Zoroark

La ville de Nénucrique était construite en surplomb de la mer. On ne pouvait pas rater le grand centre commercial de plusieurs étages. Ils passèrent les double-portes automatiques, ouvrant sur un hall d'entrée gigantesque mais affreusement vide. Il n'y avait que des fauteuils pour se reposer, un comptoir pour l'accueil et un distributeur de boissons. Pierre l'informa qu'ils devaient prendre l'ascenseur pour accéder aux étages commerciaux, car l'accueil ne servait que d'informateur des différents étages, or il connaissait déjà le centre par cœur.

- Le rayon des capsules techniques est au troisième étage, dit-il.

Ils attendirent l'ascenseur qui transportait toujours autant de monde. En effet, il n'y avait qu'un seul ascenseur pour tout le centre commercial, et des escaliers pour les plus sportifs. Les portes s'ouvrirent, laissant sortir une dizaine de personnes. Pierre et Yaen attendirent que tout le monde sorte avant d'entrer, et il appuya sur le bouton du troisième étage. Il y avait un grand miroir couvert de traces de doigts, probablement l'œuvre d'enfants ennuyés par autant de shopping. Les étages défilaient et bientôt ils seraient au troisième. Lorsque les portes métalliques s'écartèrent, ils atterrirent immédiatement dans le magasin des capsules. Il y en avait dans tous les rayons, pour tous les goûts. Par chance, elles étaient classées par type et par numéro. On pouvait aussi demander aux vendeuses de trouver les capsules désirées pour aller plus vite, puisqu'elles connaissaient les rayons comme leur poche. Pierre ne sembla pas perdu et entraîna Yaen vers un rayon particulier. Il piocha les capsules dont ils avaient besoin et se rendit dans un autre rayon. Heureusement qu'il connaissait bien le magasin, ainsi ils n'auraient pas à chercher pendant des heures. Yaen flâna et regarda ce que le magasin avait à proposer.

- C'est bon, j'ai tout ce qu'il faut !

Yaen sortit de sa rêverie et se tourna vers lui, il tenait sept sachets dans ses mains. Ils se rendirent enfin à la caisse, la caissière ne manqua pas de s'exclamer.

- Monsieur Rochard ! Quel plaisir de vous voir ici !

Sa voisine se joignit à elle. Sans ce raffut, elle n'aurait jamais remarqué que Pierre était là. Yaen se sentit honteuse. Tout le monde le connaissait, et elle avait longtemps ignoré son identité.

- J'ai vu aux infos ce que vous avez subi, j'espère que vous allez mieux !

Elle sentit que Pierre devenait gêné et tentait de changer de conversation. Les deux bavardes ignoraient totalement Yaen, mais elle n'en fit rien. Le Maître régla les achats et attrapa Yaen par la main pour l'entraîner le plus loin possible, jusqu'à l'ascenseur. Elle les entendait encore glousser.

- C'est vrai qu'il est craquant.

- Et quelle classe !

- Tu crois que c'est sa cousine, ou sa sœur qui est avec lui ?

La dresseuse secoua la tête. Etait-ce de la jalousie qu'elle ressentait à ce moment-là ? L'ascenseur arriva et ils y entrèrent sans rien dire.

- Tu as du succès auprès des femmes, c'est étonnant que tu sois encore célibataire avec toutes ces groupies à tes pieds.

- C'est qu'il n'y en a encore eu aucune qui soit digne de… Comment dire ? D'intérêt ?

Yaen s'indigna, il se rattrapa.

- Celles-ci sont des commères, d'autres ne sont intéressées que par l'argent.

- Je vois, rien de vraiment concret. Mais comment sauras-tu laquelle est la bonne, si tu te méfies de tout le monde ?

Il ne répondit pas, l'ascenseur était arrivé. Au sortir du centre, elle lui barra la route.

- Pierre, réponds-moi ! Tu ne vas pas rester seul toute ta vie ?

- J'ai bien réussi jusqu'à maintenant, et puis j'ai une vie bien trop dangereuse.

Elle eut un pincement à l'estomac. Etait-ce le même Pierre qui avait partagé son lit et pris sa main alors qu'elle dormait ? Elle se fourvoyait sûrement, il n'était pas intéressé par les femmes, ni par l'amour, ni par une vie de couple. Son avenir, il l'avait tracé, il était le Maître et vivrait dangereusement, jusqu'à la mort.

- Yaen, ça ne va pas ? Tu as l'air perdue dans tes pensées.

Elle l'ignora et descendit les marches qui menaient au centre-ville. La jeune femme voulait se rendre plus près de la mer pour profiter du décor. A Lavandia, ils ne la voyaient jamais, elle rattrapait donc toutes ces années sans toute cette eau bleue. Dans sa promenade, elle atteignit une petite falaise sur laquelle les vagues s'écrasaient et étalaient leur écume. Au loin, sur la plage, des pêcheurs attendaient qu'un Pokémon morde à la ligne. Pierre était toujours là, derrière elle, mais il ne disait rien, la laissant savourer le moment. Elle se retourna et lui demanda s'ils pouvaient rentrer, il accepta et demanda à son Airmure de les raccompagner.

Le reste de la journée, Yaen avait un nœud à l'estomac, ce qui la poussa à se remettre en question. Si elle était aussi mal, c'était à cause de ses sentiments, elle les avait mal évalués. Son attachement était devenu trop fort pour accepter la séparation, mais si elle ne voulait pas souffrir plus que cela, elle devait se résigner à partir, abandonner ses projets et oublier ses aventures avec Pierre. Si elle restait, elle se donnerait de faux espoirs. Mais il était clair que les sentiments du Maître n'étaient pas réciproques. Yaen rangea donc ses affaires et se prépara au départ. Elle traversa le salon pendant que Pierre était en cuisine et sortit discrètement pour qu'il ne la retienne pas. Les larmes lui montaient aux yeux, elle eut l'impression de faire une énorme bêtise mais marchait toujours à pas vif en direction du petit port. Avec un peu de chance, elle aurait un bateau rapidement. La jeune femme rassembla tout son courage pour ne pas se retourner, pour ne pas changer d'avis. C'était pour son bien. Arrivée au port, elle apprit avec horreur que le prochain bateau n'arriverait que dans une heure. Elle se rendit donc à la plage pour se changer les idées, en attendant le prochain départ. Elle espérait seulement que Pierre ne partirait pas à sa recherche, cela la gênerait au plus haut point. Lui n'avait pas à s'attacher à elle, elle ne valait rien, voilà ce que Yaen en pensait. C'était une moins que rien qui devait retourner faire de l'élevage avec ses parents jusqu'à la fin de ses jours. Elle ne méritait pas de fréquenter le Maître d'aussi près, elle ne méritait pas son attention.

Alors qu'elle broyait du noir, quelque chose lui serra le poignet.

- Laisse-moi Pierre, je ne reviend… Commença-t-elle en se retournant.

Mais ce n'était pas lui, c'était un sbire de la Team Magma !

- T'es la copine de Rochard, hein ? Tu vas me suivre bien gentiment.

Elle retira son bras brusquement et lui asséna un coup de genou entre les deux jambes.

- Vous, ne commencez pas ! Je ne suis pas sa copine ! Foutez-moi la paix !!!

Le sbire se releva non sans difficulté et envoya son Grahyena le venger. Yaen envoya Roucoups, aussi furieux qu'elle.

- Pour m'emmener où que ce soit, il faudra d'abord demander à mes Pokémons, hurla-t-elle, les larmes aux yeux. Roucoups, Ouragan !

Elle était bien décidée à dérouiller ce sbire à tel point que même ses descendants s'en souviendront. L'ouragan chargé de violence emporta le sbire et son Pokémon. Après quelques secondes de tourbillon, elle ordonna à son Roucoups de les laisser tomber. Le sable amortit le choc, mais les deux n'arrivèrent pas à se relever. Yaen plaqua le sbire au sol d'un coup de talon sur le crâne.

- Tu diras à ton chef… Que le tort qu'il a fait à monsieur Rochard lui sera rendu au centuple. S'il te demande qui je suis, dis-lui que je suis Yaen, tout simplement.

Elle souleva son talon et repartit en direction du port. Elle ne s'était jamais sentie aussi puissante. Mais en chemin, Pierre la retrouva.

- Où étais-tu passée ? Je me suis inquiété ! S'emporta-t-il.

Elle pointa du menton en direction du sbire à moitié KO, mais ne dit rien de plus, continuant son chemin.

- C'est toi qui as fait ça… ?

Il la rejoignit en courant et tenta de la retenir. Mais elle était encore furieuse, Roucoups l'écarta de sa dresseuse.

- Yaen !

Sa supplication était telle qu'elle ne pouvait l'ignorer. Elle s'arrêta, les poings serrés, et lui fit comprendre d'un regard qu'elle était prête à l'écouter.

- Pourquoi tu es partie ? J'ai l'impression que quelque chose ne va pas, depuis Nénucrique.

- En effet ! Mais ça ne te regarde pas, laisse-moi partir maintenant.

- Même si ça ne me regarde pas, je veux savoir. Parce que… Parce que…

- Quoi ?

- Je tiens à toi, voilà pourquoi ! Je ne veux pas passer une journée sans toi !

Elle se tourna d'un coup, choquée, les yeux pleins de larmes.

- Cette chose unique que j'ai décelée en toi, c'est cette différence que tu as par rapport aux autres qui fait que je suis intéressé par toi… Mais je n'ai jamais trouvé le courage de te le dire.

- Et ta vie dangereuse, alors ?

Il regarda en direction du sbire, toujours à terre.

- Tu es encore plus dangereuse…

Il s'approcha prudemment, Roucoups le laissa faire. Elle recula d'un pas, désemparée. Pierre la fixait de ses beaux yeux gris, et approchait désormais avec assurance. Elle serra les poings tellement fort qu'ils craquèrent, mais Pierre ignora la menace et la prit dans ses bras. Il murmura à son oreille, assez bas pour la calmer.

- J'aurais dû t'en parler plus tôt, mais tu es tellement imprévisible. J'avais peur que tu me rejettes.

Elle comprit son embarras, reconnaissant qu'elle était peu bavarde. Ils rentrèrent en silence, la tension était retombée mais Yaen aurait besoin de temps pour digérer les évènements. Elle était assise sur le canapé et Pierre la rejoignit avec un verre d'eau.

- Je te savais imprévisible, mais pas aussi violente. Qu'est-il arrivé ?

Elle lui expliqua l'agression et sa colère montante. Jamais elle n'aurait soupçonné une telle violence en elle et le courage de frapper quelqu'un. Son unique pensée lorsqu'elle s'était défendue, c'était de protéger Pierre et de faire en sorte qu'il ne soit plus importuné. Mais elle avait pris de gros risques en menaçant le chef de la Team Magma et en donnant son nom. Désormais elle serait autant en danger que Pierre.

- Dans ce cas, il va falloir tenir ta promesse et botter les fesses de Max, leur chef. Mais tu devras d'abord entraîner ton équipe, sinon je ne t'emmène pas en mission avec moi !

Chacun de ses Pokémons bénéficièrent de leur capsule technique et apprirent de nouvelles attaques grâce à cela. Pierre lui présenta le reste de son équipe, il y avait Métalosse, Airmure, Galeking, Ptera, Kaorine et Strassie. Armaldo n'en faisait pas partie car il préférait les entraînements aux combats réels. Yaen trouva cela dommage car il était très fort. S'ensuivirent des entraînements plus violents, à six Pokémons contre trois, pour que les Pokémons de Yaen soient confrontés à des difficultés plus grandes. Elle perdait tous ses matchs, mais à force de persévérance, Massko finit par évoluer en un gracieux Jungko. Il avait laissé tomber son attaque Taillade pour privilégier Lame-Feuille. Ainsi, il put mettre en déroute Ptera et Strassie. Les autres résistaient encore trop à ses assauts.

Le soir, ils prirent le temps de faire un compte rendu des matchs pendant le dîner. Yaen ayant libéré ses émotions, Roucoups semblait s'être calmé et suivait les ordres de sa dresseuse à la lettre. Jungko était devenu très prometteur et il n'y avait plus aucun reproche à lui faire, son intelligence en combat s'était fortement développée et il avait des réflexes incroyables. Ténéfix était le petit retardataire, il développait encore son potentiel d'attaque en dépit de ses défenses. Il fallait qu'il apprenne à assaillir de front plutôt qu'attaquer par derrière. Mais cela n'était pas son fort, et Pierre réfléchirait à un changement de stratégie pour lui.
Ils s'installèrent ensuite dans le salon, sans pour autant allumer la télévision, Yaen ne savait plus quoi dire.

- La dernière fois, j'ai remarqué que tu avais emprunté mes livres.

- Oui, comment l'as-tu su ? Je les ai pourtant bien rangés.

- Je le sais, c'est tout. Les légendaires t'intéressent ?

- En réalité… C'était la raison pour laquelle je voulais battre la Ligue. Devenir forte pour pouvoir les rencontrer.

- Hm… Il ne faut pas forcément être fort pour voir un Légendaire. Tout dépend de toi, de ton amour pour les Pokémons.

A vrai dire, elle ne trouvait pas qu'elle était la plus attentionnée des dresseuses. Mais elle n'avait pas non plus envie d'aller jusqu'à la Ligue, maintenant qu'elle pouvait bénéficier d'un entraînement de haut niveau. Il alla chercher un des livres et les posa sur ses genoux, pour lui expliquer certains fondements. Il avait l'air de beaucoup s'y connaitre en la matière. Comme quoi, il ne s'intéressait pas seulement aux pierres -quoique la Rosée Âme faisait naître des étoiles dans ses yeux.

Pierre prenait grand soin à lui expliquer les zones d'ombre de certains chapitres, car il avait complété ses connaissances durant ses voyages et en connaissait désormais un peu plus que ce que ses ouvrages dévoilaient. Yaen put ainsi connaitre un peu mieux les histoires des Légendaires et leur rôle dans ce monde. Mais la fatigue se manifesta. La journée avait été très longue, et en repensant à leur entraînement du matin, Yaen eut l'impression qu'ils s'étaient déroulés la veille. Elle ne savait pas si elle voulait dormir seule, tout ce qu'elle voulait, c'était rester en sa compagnie, peu importe la fatigue. Le lit pouvait bien attendre. Elle appréciait ces moments sereins où elle ne se prenait pas la tête et pouvait entendre Pierre parler à voix basse, comme un enfant racontant un secret. Elle aurait pu l'écouter des heures durant, si la fatigue n'avait pas pris le dessus.

- Yaen, tu devrais aller te coucher. On ne se lèvera pas aussi tôt demain, mais nous aurons des choses à régler vis-à-vis des missions. Il faut que tu sois en forme au cas où nous irions sur le terrain.

Elle refusa d'aller se coucher tout de suite, mais n'eut pas la force de le dire, elle se contenta juste de secouer la tête. Il insista, et elle se blottit contre lui. N'ayant pas de couverture, elle commençait à avoir froid. Pierre ne dit pas son dernier mot et la porta jusqu'à la chambre, où il la posa sur le lit et étala la couverture sur elle. Il lui souhaita bonne nuit et alla dormir dans le salon. Yaen ne put se lever ni l'appeler, trop épuisée pour faire quoi que ce soit, elle s'écroula de sommeil.

Le réveil ne pouvait être plus agréable. Pierre se tenait assis sur le bord du lit, caressant les cheveux de la jeune femme pour la réveiller en douceur. Mais elle fit mine de dormir encore, pour voir ce qu'il était capable de faire pour la réveiller sans la brusquer. Il continua de jouer avec ses cheveux, puis s'approcha pour lui susurrer à l'oreille : « Le petit déjeuner est prêt »
Elle ouvrit les yeux d'un coup et demanda, sans dire bonjour :

- On mange quoi ?

- Bonjour, marmotte ! Tu n'as qu'à te lever pour le savoir !

Elle s'assit sur le lit et s'étira. Le soleil était déjà bien levé, preuve que Pierre avait tenu parole : pas de réveil à sept heures ce matin. Elle lui souhaita bonjour et le suivit jusqu'à la cuisine. Il y avait du pain encore chaud, du beurre, de la confiture, du miel… Ils devaient prendre des forces pour la journée, car ils n'étaient pas sûrs de manger le midi.

- J'aurai quelque chose à te montrer, annonça-t-il.

Elle continua de manger mais hocha la tête pour lui faire savoir qu'elle avait entendu. Elle prit ensuite une douche rapide et s'habilla à la va-vite. Pierre, lui, était prêt depuis longtemps. Yaen se demanda à quelle heure il s'était levé. Mais il était déjà dans le jardin, à attendre qu'elle le rejoigne. Il était accompagné de son Métalosse.

- Bien, je pense que tu es prête à découvrir un des mystères de ce monde.

Puis il entama un discours sur l'amour qui relie dresseur et Pokémon, la manifestation de cet amour par les actes du même Pokémon. Il parla d'une ville, Flusselles, située dans une région lointaine, qui était l'origine d'une manifestation de l'amour bien différente mais tout aussi puissante. Il montra à Yaen que son Métalosse tenait une pierre, bien ronde et bien lisse, colorée comme le sont les billes avec lesquelles jouent les enfants. Pierre, lui, avait accroché un pin's à sa veste. Lui et son Pokémon se regardèrent, et une alchimie œuvra. Le pin's et la pierre se mirent à briller à l'unisson. Métalosse se retrouva emprisonné dans une sorte de boule lumineuse, qui s'évapora pour dévoiler un Métalosse un peu différent, avec plus de pattes et une taille plus imposante.

- Voici la méga-évolution !

Yaen n'en revenait pas, elle n'avait aucune connaissance de ce genre d'évolution. Elle s'approcha de Métalosse et jaugea les changements.

- C'est… Impressionnant !

- On ne peut utiliser qu'une méga-évolution par combat, même si nous avons plusieurs Pokémons tenant une méga-gemme.

- Parce que les autres Pokémons peuvent méga-évoluer eux aussi ?!

Il confirma et expliqua qu'un certain nombre de Pokémon pouvait méga-évoluer à condition d'avoir sa propre méga-gemme et l'amour de son dresseur. Le dresseur devait aussi posséder un méga-anneau ou méga-pin's, comme Pierre, pour que le lien se fasse et que la méga-évolution opère. La jeune femme était toujours autant impressionnée, et s'impatientait de pouvoir faire la même chose. Malheureusement, ces objets étaient très rares à trouver.

Ensuite, ils se préparèrent et partirent pour Eternara, le quartier général de la Ligue Pokémon. Là-bas, il s'informerait des missions à effectuer. Il n'avait pas prévenu ses confrères de la présence de Yaen, mais expliqua rapidement qu'elle était son « disciple » au cas où il aurait besoin d'une relève plus tard. Les champions de la Ligue restèrent sceptiques, mais acceptèrent tout de même sa présence. Il en allait des désirs du Maître, et personne n'irait à son encontre. On lui expliqua qu'une mission d'infiltration au sein de la Team Aqua serait nécessaire pour connaître leurs intentions, car leurs récentes actions étaient floues, on ne connaissait par leur but. Un uniforme de sbire était à sa disposition, mais il n'y en avait pas de prévu pour Yaen.

- Mince, comment on va faire du coup ? Questionna Damien.

- Je ferai l'otage, proposa Yaen. La Team Magma est à ma recherche, le disciple de Pierre Rochard peut faire une rançon parfaite.

Tous apprécièrent l'idée, sauf Pierre.

- C'est une mission d'infiltration, personne ne doit être mis en danger !

- Si je reste ton otage, il ne devrait pas y avoir de problème. On cachera mes pokéballs en leur faisant croire que tu me les as volées.

Il n'était toujours pas convaincu, mais se résigna devant la cacophonie des champions, insistant pour que cette mission se déroule ainsi. Aragon, le plus ancien d'entre eux, prit la parole :

- Tu nous parlais sans cesse d'une femme avec un potentiel énorme et un courage digne des grands dragons Légendaires, si c'est bien elle, elle fera un aussi bon boulot que toi. En plus, elle a l'air d'avoir du répondant, si on en croit ce que disent les journaux locaux.

En effet, son agression n'était pas tombée dans l'oreille d'un sourd et les journalistes parlaient d'un possible justicier qui réglait ses problèmes autrement que par combat Pokémon. Cette idée la gênait, car elle ne se trouvait pas violente. Toujours est-il qu'ils prirent la route pour Nénucrique. Leur base secrète s'y trouvait mais on ne pouvait y pénétrer si on n'était pas membre de la Team Aqua. Tout intrus serait attaqué par une centaine de sbires armés jusqu'aux dents. La police ne pouvait rien faire, car la Team menaçait d'engloutir la ville sous les eaux. Les habitants de Nénucrique, terrifiés, avaient signé une pétition pour une trêve, le temps que Pierre Rochard trouve une solution à ce problème. C'était une lourde responsabilité qui pesait sur ses épaules, et gérer deux teams en même temps devait être épuisant.

Pierre était une toute autre personne, dans cet accoutrement de pirate. Il avait à moitié attaché les mains de Yaen derrière son dos pour qu'elle puisse se libérer en forçant un peu. Il la poussait en direction du quartier général et s'adressa à un sbire, en prenant soin de garder ses cheveux argentés sous un bandana.

- J'apporte une petite surprise pour l'admin Arthur.

- Ah ouais ? Explique.

- Yaen.

- LA Yaen ?

- En chair et en os.

- J'espère qu'elle est bien attachée, faudrait pas qu'elle colle un bleu à l'admin. Vas-y entre.

Trop facile. Apparemment, Yaen était déjà connue dans la Team adverse. Sa réputation avait dû faire le tour d'Hoenn. C'était un otage en or pour demander à la Team Magma tout ce qu'ils désiraient. Le hall d'entrée ressemblait à celui d'une usine. Le sol était en métal, pas entretenu, et au centre il y avait un bassin donnant sur la mer. En face, il y avait des escaliers pour accéder aux bureaux des chefs. C'est là qu'ils se rendirent. Un homme de très grande taille, bronzé et musclé les attendait. Il était torse nu et arborait le logo de sa team sur le torse.

- Qu'est-ce que tu m'apportes là, sbire ?

- Une otage, Yaen.

Ses yeux s'écarquillèrent. Un sourire glorieux se dessina sur son visage.

- Bieeeen... Tu as fait mieux que ces imbéciles de la Team Magma. Tu sais à quel point elle est importante pour eux ?

- Elle nous servira à demander tout ce que nous voulons.

- EXACTEMENT ! Max paierait cher pour l'avoir morte ou vivante, vu l'état dans lequel elle a mis un de ses sbires. Moi non plus, je n'aurais pas apprécié.

Il s'approcha de Yaen pour la mettre en garde.

- Nous n'avons pas peur de toi ici, un seul faux pas et tu te retrouves au fond de l'océan.
Elle sentit Pierre se raidir derrière elle, elle espérait juste qu'il se tienne tranquille pour ne pas mettre à mal la mission qui leur avait été confiée. Un autre sbire entra à ce moment-là.

- Admin Matthieu, Arthur est sur le point d'arriver.

- Parfait ! Sbires, enfermez cette sauvageonne, qu'elle soit présentable devant notre chef. Et plus vite que ça !

Pierre insista auprès de l'autre sbire pour aller l'enfermer tout seul, mais il refusa, prétextant qu'elle était trop dangereuse et qu'il fallait bien deux hommes pour la neutraliser. Comme quoi, les rumeurs pouvaient aller loin. Yaen joua de cela.

- Deux hommes seulement ? Savez-vous d'où je tiens ma force ? Je me suis entraînée des années durant, à me battre au corps à corps contre des Galeking et des Tyranocif ! Deux simples hommes ne suffiront pas à m'arrêter !

Le sbire déglutit. Mais il ne céda pas. Au moins, elle avait nourri les rumeurs qui couraient à son sujet. Même si elle était enfermée, elle inspirait la peur. Arrivés dans les locaux des prisonniers, le sbire commença à ouvrir une des cellules. Yaen en profita, comme ils étaient seuls, pour défaire ses liens, attraper la tête du sbire entre ses deux mains et lui asséner un coup de genou assommant. Il tomba au sol, inerte.

- Tu vas finir par te luxer un genou, à force, dit Pierre tandis qu'il traînait le sbire au fond de la cellule.

Elle ignora et retira l'uniforme du sbire pour se déguiser. Puis ils refermèrent la porte.

- Je retourne au bureau des admins, écouter ce qu'ils trament. Toi, fais un tour dans le quartier général et essaie de récupérer des informations auprès des sbires.

Elle accepta et partit dans la direction opposée à celle de Pierre. En cas de problème ils avaient leur Pokénav pour se joindre. Au bout du couloir, elle croisa quelques sbires. Elle tentait de rester le plus naturel possible pour ne pas éveiller les soupçons. Ils parlaient beaucoup des « deux prisonniers », se demandant à quoi ils serviraient dans leur plan. Il fallait qu'elle en sache un peu plus sur ce plan et les prisonniers, car ils avaient l'air importants. Elle continua donc sa visite des lieux jusqu'à tomber, avec un peu de chance, sur les prisonniers. Ils pourraient lui parler et organiser leur libération. Yaen tenta donc de demander à un des sbires où ils se trouvaient.

- Eh bah, dans la grande salle !

Il lui avait répondu comme si c'était une évidence. Il ne serait donc pas aisé de trouver cette salle, de plus rien n'était indiqué. Elle tenta donc de suivre discrètement la foule. Si des prisonniers importants se trouvaient dans une grande salle, les visites devaient être possibles, au moins pour le spectacle. Elle devait avoir un coup de chance, car son intuition était bonne. Les sbires se dirigeaient bien en nombre vers la grande salle, et deux prisonniers s'y trouvaient, dans une cage trop petite pour eux. Et quels prisonniers ! Il s'agissait des Légendaires Latios et Latias !
Yaen s'approcha de la cage pour les contempler de plus près. Les Pokémons étaient déprimés et n'avaient aucune liberté de mouvement. Elle examina la cage pour trouver une faille, un moyen de les libérer, mais elle ne vit rien d'autre qu'un énorme cadenas. Il serait bien trop difficile à forcer, même à deux. Elle sortit son Pokénav et tenta de joindre Pierre, en vain. Il devait encore être en train d'écouter discrètement la conversation des deux admins.
Soudain, l'alarme retentit.

« Alerte intrusion, une dangereuse prisonnière est en liberté dans le QG, tout le monde est attendu au bureau d'Arthur »

Les sbires se ruèrent vers les pièces adjacentes. Yaen profita de la cohue pour se cacher dans la grande salle. Son Pokénav sonna.

- Yaen, où es-tu ?

- Dans la grande salle, cachée. Il se passe quoi ?

- Le sbire que tu as assommé s'est réveillé, Arthur est sorti de ses gonds. Ne bouge pas, j'arrive !

Elle s'assit pour se faire plus discrète et attendit que Pierre la rejoigne. La salle était entièrement vide lorsque le Maître arriva. Il remarqua immédiatement les deux Eons. Yaen sortit de sa cachette et se dirigea vers la cage.

- Il faut qu'on les libère au plus vite !

Réactif, Pierre envoya son Galeking pour qu'il force le cadenas. Mais un sbire un peu plus gradé que les autres les repéra.

- Halte !

Il ordonna à son Grahyena de les attaquer. Yaen se mit entre lui et la cage, et envoya Jungko au combat.

- Occupe-toi d'eux, Yaen, je m'occupe des Légendaires !

Elle obéit et ne mit pas bien longtemps à mettre le sbire à terre tandis que Jungko dominait le Grahyena. Galeking parvint à briser le cadenas en forçant au maximum, libérant les deux Légendaires qui n'attendaient que la liberté. Ils s'envolèrent et sifflèrent de joie. Mais ils n'étaient pas encore saufs. Les sbires ne mettraient pas longtemps à remarquer leur libération, grâce aux caméras de surveillance. Et en effet, Arthur et Matthieu ne mirent pas longtemps à arriver, suivis de tous leurs sbires.

- Fini la rigolade, les enfants. Ces Légendaires sont toujours à nous et vos vies aussi.

Chacun des Eons se plaça devant Yaen et Pierre pour les protéger avec un dôme psychique. Les admins envoyèrent deux Sharpedo foncer dans le mur protecteur, en vain. La protection des Eons était trop puissante. Il fallait qu'ils trouvent un moyen de fuir.

- Yaen, on doit passer par le toit !

- Mais comment ?

Latias sembla avoir compris et se détacha du groupe, laissant Latios gérer seul leur protection. Elle se dirigea vers le plafond et fit appel à ses pouvoirs psychiques pour l'ouvrir comme on ouvre une banane. Puis elle siffla en direction de Latios, qui porta Pierre sur son dos. Latias retourna vers Yaen et lui fit signe de faire de même. Ainsi ils purent s'enfuir du quartier général.

Pierre indiquait la route la plus sûre à Latios. Ils retournaient à Algatia.
Ils atterrirent dans le jardin, sains et saufs. Latios et Latias étaient encore inquiets, mais ils refusaient d'entrer dans la maison. Il leur laissa donc le jardin et la liberté de partir. Ils n'en firent rien et restèrent sur place, attendant quelque chose. Yaen s'approcha de Latias pour la remercier, et elle lui transmit des images par télépathie. La façon odieuse dont ils avaient été capturés, la maltraitance qu'ils avaient subie. Elle comprit qu'ils avaient besoin de sécurité, mais que leur confiance envers les hommes était amoindrie. Pierre lui raconta ce qu'il avait entendu :

- Ils les ont capturés pour le pouvoir qu'ils recèlent. La Team Aqua n'a pas été capable de retrouver l'orbe Bleue qui permet de faire appel à Kyogre, mais elle est au courant que la Team Magma a en sa possession les méga-gemmes de Latios et Latias.

- Des méga-évolutions ?!

- Oui, méga-évolués, ils seraient capables de maîtriser Kyogre dans une forme antique, la Primo-Résurgence. Je croyais que ça avait disparu. La Team Magma, elle, tentait de récupérer les Légendaires pour maîtriser Primo-Groudon. Mais nous avons chamboulé leur plan, conclut-il avec fierté.

Latias et Latios furent soulagés de savoir que Pierre était au courant de ces plans. Ils s'installèrent au fond du jardin et se cachèrent dans un des arbres touffus.
Yaen et Pierre rentrèrent au chaud, jetèrent les uniformes et prirent une douche. Ils n'avaient pas encore faim, malgré le temps qu'ils avaient passé depuis leur dernier repas. Ils passèrent alors leur temps à discuter de la mission, assis dans la cuisine, à faire un compte rendu écrit pour les autres membres de la Ligue. Une fois fini, Pierre se rendit dans le salon, Yaen l'entendit fouiller dans un tiroir et revenir avec un boîtier en bois. Il se mit à genou de manière théâtrale devant elle et ouvrit le boîtier, contenant un anneau large d'un centimètre et très coloré.

- Yaen, acceptes-tu de… Bénéficier de la méga-évolution ?