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Crossworlds de Khimeira



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» Auteur : Khimeira - Voir le profil
» Créé le 22/02/2014 à 21:10
» Dernière mise à jour le 05/06/2014 à 23:26

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Chapitre 7: To a new world
Date indéterminée
Lieu inconnu


Je me suis réveillée dans un nid.
Je ne savais pas combien de temps j'avais pu dormir ; quelques heures, quelques jours ? Cela semblait flou. Je me demandais aussi comment j'avais pu atterrir ici, puisque j'avais l'air d'avoir été sortie de ma cellule pour être amenée à un autre endroit, loin des autres.
Surtout, je me demandais sérieusement ce qui avait bien pu se passer. Les souvenirs semblaient flous quand j'essayais de les chercher, et quelque chose au plus profond de mon être me disait qu'il ne fallait mieux pas que je le sache.
Puis ça me revint violemment, comme une vision : la table d'opération, Jared, une aiguille... Puis je m'étais évanouie. Et ce déclic qui me revint comme un boomerang : j'avais perdu la seule personne capable de m'aider, de pouvoir me sortir de la situation dans laquelle j'étais.

Ma tête me faisait un mal de chien, impossible de la bouger. De même pour mes bras : j'essayai de le bouger, mais il resta immobile, et ce même quand j'y mettais presque toute mon énergie et me concentrai pour faire en sorte de le bouger.
J'avais une migraine juste effroyable, qui me clouait au sol. J'avais l'impression d'avoir passé plusieurs heures dans une centrifugeuse.
Je voulus crier un bon coup, pour faire passer la douleur, mais je n'entendis qu'un gémissement. Un simple gémissement, qui me fit comprendre que ma poitrine n'avait pas récupéré non plus.

Je sentis soudain quelque chose s'avancer dans le noir, mais comme je ne parvenais pas à me lever, je décidai de me dire que c'était une simple hallucination, provoquée par la migraine, pour me rassurer.
Je restai donc allongée de longues minutes, dans le noir. Je commençai par me demander comment j'avais pu deviner que j'étais dans un nid. La texture. La courbure peut-être. Ou encore autre chose, une présence sans doute, une odeur plus animale qui aurait pu me mettre sur la voie.
Je restai de longues minutes à regarder le plafond, plongée dans l'obscurité la plus totale, puis je sentis quelque chose approcher, et j'entendis un son qui me fit indiquer que ce quelque chose rampait. Ca ne m'avait pas rassuré le moins du monde, et je priai intérieurement pour que ce ne soit pas ce que je crois. Je n'avais pas tourné la tête, ne voulant pas voir qu'est-ce qui s'approchait de une, mais aussi sachant mes douleurs un peu partout.
Soudain, j'eus l'impression que quelque chose s'enroulait autour de moi. C'était bien ce que je craignais. Un serpent.
J'avais complètement paniqué intérieurement, sachant ce qu'un serpent de cette taille était capable de faire. Et surtout, j'avais peur des serpents, et dans le noir j'étais incapable de distinguer sa taille ou même à quoi il ressemblait.
Celui-là n'avait pourtant pas l'air inoffensif. Il s'était juste enroulé autour de moi et n'avait pas trop resserré son étreinte. Comme s'il ne cherchait pas à me faire du mal, plutôt à me relaxer.
Là encore, j'essayai de crier, mais je ne pouvais pas émettre d'autres sons que des petits couinements, mon corps me faisant comprendre rapidement que j'avais besoin de repos.
L'étreinte presque relaxante, et mon manque complet de forces à ce moment-là firent que j'avais du mal à garder les yeux ouverts. C'était fini, il pouvait faire ce qu'il voulait de moi à ce moment précis.
Je luttai quelques secondes, les yeux fermés, essayant vainement de bouger et de crier, puis finis par m'endormir, terrassée par la fatigue.

* * * * *
Je me réveillai le lendemain matin avec la lumière du soleil. J'étais toujours au fond de ce nid, mais ce coup-ci, grâce à la lumière ambiante, je pus savoir ce qui m'entourait.
J'étais en réalité dans une espèce de grotte qui donnait vue sur l'extérieur. Je voulus me lever mais j'hésitai d'abord, connaissant ma douleur à la poitrine, avant de me décider et d'essayer de me mettre debout.
Chose qui s'avéra impossible puisque je vis que quelque chose se trouvait sur ma poitrine et me mettait une pression supplémentaire pour que j'évite de me lever..Je levai la tête pour regarder ce qui me bloquait plus en profondeur, étant donné que ça n'avait pas l'air de vouloir bouger.

Je déglutis légèrement en baissant la tête et la replaçant dans le lit. C'était un serpent. Magnifique. J'étais bloquée, et la mère de ce truc n'allait sans doute pas tarder à arriver. Je me retins de pas sombrer dans une panique complète.
Quoiqu'il en soit, c'était bleu foncé, et avec une toute petite corne sur son front. Il avait un petit air de dragon sur les bords. Déroulé, je pense que ça pouvait faire ma taille ; mais en attendant, c'était enroulé, sur mon ventre, et ça semblait profiter de mes respirations.
Je voulus alors faire en sorte qu'il se déplace, et levai ma main gauche pour le caresser. C'était en fait tout doux, et pas si écailleux que ça ; j'avais même l'impression que c'était de la fourrure sous ma main. Tout petit, mignon et tout doux de surcroît ; ça me rassura d'entrée. Mais le souci est que j'avais envie de me lever et ça ne se déplaçait toujours pas. J'essayai de le soulever pour le poser à côté de moi, mais mes bras refusaient de porter le moindre truc, et cette petite bête devait bien faire une dizaine de kilos.
Craignant des représailles, je le laissai profiter puis me replaçai dans ma position initiale, avec un semblant de difficulté dû à ma douleur lancinante au niveau de la poitrine. Je me mis alors à regarder le plafond, histoire de passer le temps.
Je tendis l'oreille pour me demander si j'étais seule avec la petite créature où si la mère allait finir par arriver. Et effectivement, la deuxième solution s'imposa assez vite.
Quelques secondes plus tard, j'entendis un long râle puis des pas. Etant complètement allongée et dans l'incapacité de bouger, j'étais évidemment incapable de savoir ce que c'était et flippais complètement, me disant que ce truc allait être capable de me bouffer sans même une arrière pensée. Je me fis des scénarios catastrophe jusqu'au moment où le gros monstre est arrivé à ma hauteur.
De ma position il semblait géant. Il l'était sans doute beaucoup moins en réalité, mais étant condamnée à une position allongée pour le moment, je ne pouvais pas le certifier.
Il ressemblait à un dragon, de couleur orange, mais bizarrement sans l'air méchant, et surtout avec des ailes plus petites. Il avait un air de « Denver » voire de « Casimir ».
Il me regarda pendant de longues secondes, qui me parurent d'ailleurs trop longues. Le petit serpent-dragon avait filé, et j'avais maintenant la possibilité de me lever. J'essayai d'entrée, voulant me mettre debout, mais mon corps me disait non, et il ne fallut pas longtemps au dragon pour poser sa grosse patte juste au-dessus de ma poitrine, empêchant tout mouvement supplémentaire. Il avait dû comprendre que j'avais justement mal à la poitrine, et qu'il ne fallait mieux pas que je me lève. Déçue, je me replaçai alors dans la position dans laquelle j'étais au départ. Le Pokémon, – puisque je pense clairement que c'en était un – lui, commença à s'allonger juste à côté de moi. Puis je sentis sa tête, juste au niveau de ma nuque, et sa respiration lente. Je me demandai ce qu'il était en train de faire lorsque je sentis une langue baveuse se coller contre ma nuque. Okay, j'ai compris: il veut que je reste.

* * * * *
Je n'ai pas compté le nombre de jours que j'ai dû rester avec eux. Ils me gardaient avec eux toute la journée, en attendant sans doute que ma poitrine aille mieux. Leur présence me rassurait, me confortait, presque comme si j'avais trouvé une seconde famille.
Je ne savais pas combien de temps j'allais rester, si j'allais partir, et techniquement je n'en avais pas grand-chose à faire ; j'avais envie de rester avec ces Pokémon, même si c'était pour quelques années.

Les mois passèrent sans que j'eus d'ailleurs le temps de m'en apercevoir. On arrivait à ce qui semblait être l'hiver, puisqu'il faisait beaucoup plus froid.
Les fringues que j'avais ne me permettaient pas tellement d'avoir chaud. Au contraire.
On m'annonça alors que j'allais partir d'ici quelques jours, mais je ne me sentais pas de partir maintenant. J'avais envie de rester quelques mois de plus avec eux. Ne serait-ce que pour avoir un peu de chaleur pendant l'hiver et repartir au printemps, quand le temps serait plus clément.
Sauf qu'après réflexion, je m'aperçus qu'il fallait que je retrouve un contact humain. Rester avec des Pokémon pendant tout ce temps allait finir par se répercuter sur ma personnalité, et je préférais avant tout garder une petite part d'humanité.
La veille du départ, je suis retournée là où j'ai vu disparaître Jared. J'avais la boule au ventre à l'idée de retourner à l'endroit où j'avais tant souffert. Ma poitrine ne me faisait plus mal, je pouvais d'ailleurs marcher sans problèmes.
Je me dirigeai vers les douches, et décidai de me laver. La chaleur du liquide coulant sur ma peau me rassurait, et je restai encore quelques minutes après avoir fermé le robinet pour profiter de la chaleur qui s'était créée dans la douche.
En sortant, je regardai les affaires qu'on m'avait données, qui étaient contenu dans une valise d'un certain poids. Il y avait une doudoune, des moonboots, des vêtements qui me tenaient chaud, mais aussi des vêtements plus adaptés pour l'été. Je souris légèrement : ils m'avaient pris quasiment tout, mon ancienne vie, la personne que j'aimais, mais avaient quand même la décence de m'acheter des fringues. C'en était surprenant.
J'arrivai devant un portail, où deux Pokémon m'attendaient : le Lucario aux lunettes que j'avais vu dans ma cellule, qui avait quitté sa batte de base-ball mais gardé son carnet ; et le Braségali.
On me donna de l'argent (quelques billets d'une monnaie que je ne connaissais pas, de quoi subsister pendant un mois disaient-ils), puis on m'autorisa à partir.
J'inspirai et fermai les yeux. Ils m'avaient prévenue : si je passais ce portail, je rentrais dans une nouvelle vie et ne rejoindrais plus jamais mon monde d'origine ; ou sinon je pouvais rester définitivement dans une cellule. Je n'hésitai pas plus longtemps et rouvris les yeux avant de passer le portail, ma valise me suivant.
C'était parti. J'étais définitivement partie, et allais commencer ma nouvelle vie.

J'ouvris les yeux, et fus assez surprise de me retrouver dans une ville qui ressemblait beaucoup à Paris, au niveau d'une tour qui ressemblait plus ou moins à la tour Eiffel. Cet endroit me semblait à la fois familier et complètement inconnu. Mais c'est là d'où je devais repartir.
C'est ici que j'allais recommencer ma vie.

* * * * *
Je me souvenais parfaitement de ce qui s'était passé ensuite.
Je me suis installée sur un banc, devant une tour qui m'était à la fois familière, de par sa ressemblance avec la tour qui se trouvait normalement à Paris, mais complètement étrangère au vu du fait que cette tour avait l'air parfaitement nouvelle.

(Lady Antebellum - Hello World)

Je commençai à regarder le paysage dehors, et c'est à ce moment-là que je compris que je n'étais pas du tout au même endroit. Mieux : je n'étais plus dans le même monde.
Les bâtiments semblaient être restés les mêmes. Toujours cette même structure de vieux bâtiments haussmanniens, même s'ils semblaient disposés comme autour de la place de l'Etoile, avec la simili-tour Eiffel en lieu et place de l'Arc de Triomphe.
Pourtant, les personnes qui y vivaient avaient complètement changé. Et surtout, je voyais des Pokémon partout, qui accompagnaient les personnes qui semblaient être leurs dresseurs.
Je vis des créatures ressemblant à, pêle-mêle, un ours polaire géant qui avait une barbe faite de glace ; un renard à neuf queues de couleur crème ; une espèce de petit chat, couleur de glace, qui s'amusait à créer des boules de neige et à les lancer sur son dresseur... J'étais arrivée dans un autre monde, dans un monde qui m'était désormais étranger.

Traffic cars, cell phone calls,
Trafic de circulation, appels téléphoniques
Top video screams at me,
Le top des vidéos me crie dessus
Through my tender window I see
Par ma tendre fenêtre je vois


Assise sur mon banc, je regardais les Pokémon, qui étaient en train de faire des batailles de boules de neige contre leurs dresseurs. Des enfants qui jouaient avec le renard à neuf queues – j'entendis ensuite le nom de Feunard, donc je présumai que c'était le nom de ce Pokémon – qui réchauffait la glace autour de lui.

A little girl, rust red minivan
Une petite fille, un monospace rouge-rouille
She's got chocolate on her face,
Elle a du chocolat sur son visage
Got little hands
Elle a des petites mains


Je voyais les sourires sur les visages des enfants, ainsi que ceux de leurs parents. Je ressentais leur joie.
Je souris en voyant ces gens, qui vivaient heureux. J'étais heureuse pour eux, moi qui ne voyais que des visages tristes dans mon monde d'avant.

And she waves at me,
et elle me fait coucou
Yeah, she smiles at me...
Ouais, elle me sourit...


Je me levai lentement de mon banc, et vis les gens me sourire, me faire coucou. Je leur répondis en retour par politesse, mais le coeur n'y était plus.
Je repartis en traînant des pieds, en voyant la neige tomber sur les pavés de la rue centrale, sentant la froideur de cette journée.

Well, hello world,
Eh bien, bonjour le monde
How've you been?
Comment vas-tu ?
Good to see you, my old friend
C'est bien de te voir, mon vieil ami


Alors que ces gens étaient heureux, moi je ne l'étais plus. J'avais tout perdu, j'étais obligée de repartir de zéro. Plus personne ne me connaissait désormais, j'étais condamnée à vivre dans ce nouveau monde, condamnée à revivre.
Et plus j'avançais, plus je voyais des gens heureux, et moins je l'étais. Ce monde avait eu l'habitude de vivre sans moi, et semblait d'ailleurs bien heureux en mon absence.

Sometimes I feel
Parfois je me sens
Cold as steel
Froid comme l'acier
Broken like I'm never gonna heal
Brisé comme si je n'allais jamais guérir


Mon sourire se faisait de plus en plus faible et de plus en plus forcé au fur et à mesure que j'avançais.
La dernière fois que j'avais réussi à profiter de la neige remontait à si longtemps... Cela faisait longtemps que la neige constituait pour moi plus un problème qu'un moyen de s'amuser. Et puis, avec qui pourrais-je m'amuser maintenant? Je n'avais plus personne. Je n'étais plus qu'une simple étudiante de 19 ans, sans attaches dans un monde qui m'était complètement inconnu.

I see a light, little hole in the little girl
Je vois une lumière, un petit trou dans la petite fille
Well, hello world...
Eh bien, bonjour le monde...


J'essayai de chercher quelque part un trottoir mais je n'en vis pas la trace. A l'inverse, je ne voyais même pas de voitures ; peut-être un ou deux taxis qui passaient de temps en temps. Cela me choqua ; la ville me semblait pourtant grande, mais personne ne semblait s'y balader en voiture ou en bus. C'en était assez déroutant.

Every day I drive by a little white church
Chaque jour je passe devant une petite église blanche
It's got these little white crosses
Qui a ces petites croix blanches
Like angels in the yard
Comme des anges dans la cour


Je n'étais pas complètement dépaysée, en réalité ; avec toutes ces choses qui étaient communes avec ce que je connaissais déjà, toutes ces choses que je connaissais de par mon ancienne vie.
Mon ancienne vie...
Cela me revint encore une fois. Je n'étais plus dans mon monde, dans ma réalité.

Maybe I should
Peut-être que je devrais
Stop on in and say a prayer
m'arrêter dedans et dire une prière
Maybe talk to God like he is there
Peut-être parler à Dieu comme s'il était là


Alors que je passai devant un Pokémon qui ressemblait à un lapin géant de couleur grise, je commençai à me poser des questions.
Etait-ce nécessaire que j'aille voir mes parents de cette réalité ? Me reconnaîtraient-ils ? Etaient-ils en vie, d'ailleurs ? Est-ce qu'une Amélie Grizals existait dans cette réalité où étais-je une exception ?

Oh, I know He's there,
Oh, je sais qu'Il est là,
Yeah, I know He's there...
Ouais, je sais qu'Il est là...


Je regardai le ciel et la neige qui tombait en petits flocons sur le sol gris et bétonné de l'endroit où je me trouvais. Et les gens qui étaient autour de moi, ensemble, me firent comprendre que j'étais, délibérément, complètement seule. Plus personne vers qui me tourner, plus personne pour essayer de me comprendre.

Well, hello world,
Eh bien, bonjour le monde
How've you been?
Comment vas-tu ?
Good to see you, my old friend
C'est bien de te voir, mon vieil ami


Une larme commença à couler sur ma joue alors que fis le tour de la place du regard. C'était en même temps tellement familier, tellement ressemblant à quelque chose que je connaissais déjà... et pourtant tellement étranger.
Combien de mois s'étaient écoulés depuis le moment où je suis partie de ma réalité ? Et puis comment ont réagi mes parents ? Et surtout... mes parents me manquaient. Jared me manquait. Mon ancienne vie me manquait.

Sometimes I feel
Parfois je me sens
Cold as steel
Froid comme l'acier
Broken like I'm never gonna heal
Brisé comme si je n'allais jamais guérir


Je sentis quelque chose se frotter à moi et fis bouger mon regard vers la source.
C'était un très gros chien. Quand je dis très gros, il était plus grand que moi. J'eus un léger mouvement de recul en le voyant, un peu apeurée par la bête.

-Arcanin, laisse tranquille cette jeune fille !

Le dit Arcanin s'exécuta, et je me retourna vers son propriétaire : un homme, sans doute cadre, une quarantaine d'années. Lunettes de soleil, petite canne pour se diriger ; aveugle, sans quasiment aucun doute.
Je m'arrêtai quelques secondes, essayant de me reprendre du petit choc que je venais de subir. Je continuai ensuite mon errance autour de cette place, mes moonboots laissant des empreintes dans la fine couche de neige sur le sol.

I see a light, little grace, little faith unfurl
Je vois une lumière, petite grâce, petite foi déployée
Well, hello world...
Eh bien, bonjour le monde...


J'essayai de trouver un moyen d'être heureuse comme tous ces gens autour de moi, tous ces gens qui avaient des Pokémon, mais je n'y arrivais pas ; je n'avais plus de famille, plus d'attaches, plus rien. Et je culpabilisais. Parce que mes parents ne retrouveront jamais leur fille. Même ma sœur, j'osais à peine imaginer sa réaction ; malgré le fait qu'elle et moi nous disputions souvent, j'étais certaine qu'une partie d'elle m'aimait bien.

Sometimes I forget what living's for
Parfois j'oublie ce qu'est la vie
And I hear my life through my front door
Et j'entends ma vie à travers ma porte d'entrée
And I'll be there,
Et je serai là,


Je culpabilisais parce que tous mes amis se sentiraient responsables pour ma disparition ; parce qu'ils n'avaient pas assez discuté avec moi, qu'ils ne m'avaient pas assez écouté, et que je n'aurais même pas la chance de les consoler une dernière fois...
Je secouai la tête. J'étais en train de m'acharner à penser à des gens que je ne reverrai plus jamais. J'étais désormais ici, le point de non-retour a été franchi depuis longtemps.

Oh, I'm home again...
Oh, je suis de nouveau à la maison...


Je repassai une nouvelle fois à l'endroit où j'étais arrivé. Cela devait faire la troisième ou la quatrième fois déjà.

I see my wife, little boy, little girl...
Je vois ma femme, un petit garçon, une petite fille...


Je regardai la tour géante qui se dressait devant moi. Elle était resplendissante, comme celle du monde d'où je venais. Je fis un sourire ; au moins cela ne m'était pas complètement étranger.

Hello world...
Bonjour le monde...


Au fur et à mesure que je regardais mon nouvel univers, mon sourire s'éteignit progressivement à partir du moment où je commençai à me poser de nouvelles questions.
Comment j'allais faire pour survivre, pouvoir manger, dormir ? Je devais chercher des petits boulots, mais à seulement 19 ans et sans aucune qualification ça s'avérait compliqué. Et je ne connaissais pas les Pokémon, deuxième mauvais point.
Je devais donc impérativement trouver quelqu'un à qui me rattacher, en qui je pourrais voir une famille de substitution. Ou au moins trouver un moyen de survivre pendant quelques temps.

Hello world...
Bonjour le monde...


Mais qui ? Qui serait capable de me loger, de m'accueillir ? Qui accepterait de m'héberger quelques temps, le temps que je puisse trouver une situation stable ? Personne. En ces temps-là, je n'avais vraiment personne qui soit d'accord pour m'accueillir.
Dans ce cas, il me fallait une solution de secours, une porte de sortie pour le cas où ça ne marcherait pas. J'aurai à fouiller beaucoup.

Oh, the empty disappears
Oh, le vide disparaît
I remember why I'm here
Je me souviens pourquoi je suis là
To surrender and believe
A abandonner et espérer
I fall down on my knees
Je tombe sur mes genoux
Oh hello world...
Oh bonjour le monde...


Et puis une idée me vint à l'esprit : pourquoi pas raconter mon histoire ? Ce serait un bon bouquin, ça se vendrait et ça me mettrait à l'abri le temps de trouver quelque chose de stable...
J'enlevai tout de suite cette idée de ma tête. C'était beaucoup trop risqué : devoir sacrifier une partie de ma vie privée pour l'argent ? C'était loin d'être dans mes habitudes, et surtout finie la vie tranquille : traquée par les paparazzis, soirées en tout genre avec les autres célébrités... Ce n'était pas la vie que je voulais ; ce n'était pas mon monde, mon style de vie, je préférais largement une vie calme et sereine avec peu de moyens qu'une vie sous les projecteurs mais où je n'aurais plus le temps de souffler.

Hello world...
Bonjour le monde...


Et puis pourquoi révéler un passé que je voulais maintenant oublier ?

Hello world...
Bonjour le monde...


Je pensai alors à ce passé, ces derniers mois. Ces fameux jours entre le 17 et le 21 avril. Ces jours où j'étais avec Jared. Et maintenant Jared n'est plus.

Une nouvelle larme coula sur ma joue. Puis une autre.
Pourquoi a-t-il fallu que je me retrouve seule ? Pourquoi a-t-il fallu que Jared meure au moment où on s'aimait le plus, au moment où on voulait finir ensemble ? Et surtout, pourquoi m'envoyer dans ce monde dont je ne sais rien, dont personne ne m'a jamais parlé ?
Je sentis soudain quelque chose dans mon sac à dos. Sauf que je n'ai jamais eu de sac à dos. J'eus un bug. Comment se faisait-il que j'en aie un ?
Je décidai de vérifier le contenu du sac, tout en essayant de le protéger de la neige qui tombait encore par tous petits flocons sur le sol.
Il y avait là quelques unes des affaires que j'avais dans mon ancienne vie : mon ordinateur portable et son chargeur ; mon iPod avec son chargeur ; et surtout une pochette plastique. Je me demandais quel était le contenu de cette pochette plastique, et surtout comment j'avais obtenu ce sac et son contenu qui était pourtant resté chez moi, lorsque je sentis une présence à côté de moi.

-Belle vue, n'est-ce pas ?

Je me retournai et vis l'homme à l'Arcanin de tout à l'heure, sans le Pokémon ce coup-ci. Je détournai légèrement le regard, me sentant légèrement honteuse. S'en suivit alors un premier silence, pendant lequel je me sentis de moins en moins à l'aise. Je n'aimais pas d'ordinaire discuter avec des inconnus, et dans l'état mental dans lequel j'étais j'en avais encore moins envie.

-Vous allez bien ? Insista-t-il.

Je mourrais d'envie de le remettre à sa place, mais je ne voulais pas paraître désagréable. Je me contentai de secouer la tête de droite à gauche, signifiant mon refus.
Je le sentis alors enlever son manteau et le poser sur mes épaules. Cela ne me rassura pas plus, et je ne mis pas longtemps avant de l'enlever et de le lui rendre en lançant un faible « Désolée ».

-Si vous voulez parler, je peux...

Je commençai à marcher et m'éloigner un peu de l'homme, qui avait arrêté de parler au moment où il m'avait vue partir, puis quelques secondes plus tard m'installai sur un banc, juste devant la tour. Je regardai alors l'homme, qui me regardait d'un air déçu, puis l'invitai à s'asseoir à côté de moi d'un signe de la tête.
Il s'exécuta et se posa à côté de moi. J'en profitai pour le regarder d'un peu plus près, et de façon plus précise que lors de la fraction de seconde pendant laquelle je l'avais vu tout à l'heure.
C'était un homme d'une quarantaine d'années, avec des cheveux courts et dont la couleur était d'un châtain plus proche du blond que du brun. Il était habillé en costard cravate, donc semblait revenir du travail et faire une balade avec ses Pokémon.
Je vis son regard tendu vers moi, et après un silence de quelques secondes, je lançai sur un air monotone :

-Je ne sais pas où je suis, ce que je fais là. J'ai l'impression de reconnaître cet endroit, mais j'ai aussi l'impression qu'il est complètement opposé à l'endroit d'où je viens.
-Vous êtes à Illumis, dans la région de Kalos, et plus précisément sur la place Centrale. La tour qui se trouve derrière nous est la Tour Prismatique, qui héberge une arène Pokémon. Ca ne vous dit rien ?
-Absolument rien.
-Et d'où venez-vous exactement ?

Je le regardai, puis me mordillai l'intérieur de la joue. Il allait me prendre pour un cinglé.

-Vous allez me prendre pour une folle si je vous le dis.
-Vous savez, il n'y a plus grand-chose qui m'étonne dans ce monde.

Je pris une grande inspiration et lançai :

-Si je vous dis que je viens d'un autre monde, vous me prenez pour une cinglée ?

S'en suivit un petit silence. A part nous deux, il n'y avait pas grand-monde, et personne n'avait, du coup, écouté la phrase que j'avais lancé.
Je vis l'homme pencher légèrement la tête sur le côté, l'air pensif, puis me regarder au bout de quelques secondes et lancer :

-Je pense surtout qu'on va en discuter un peu autour d'un café, parce que vous m'avez l'air d'être complètement choquée par un événement récent et dont je ne connais pas l'existence. Venez, je vous invite.

* * * * *
Nous marchâmes silencieux le long de la grande rue, qui restait toutefois assez remplie de monde. L'homme qui m'accompagnait m'indiqua que la rue dans laquelle nous nous trouvions était la rue Thermidor ; je pris compte du nom et nous continuâmes à marcher.
La rue était assez large pour plusieurs voitures, mais là encore je n'en vis même pas la trace ; peut-être un taxi, qui attendait sur le côté de la route des clients. De même, je ne vis pas de trottoir de quelque côté que ce soit, comme si cette ville était entièrement réservée aux piétons.
Le monde était assez présent en cette journée : beaucoup étaient en train de sourire en regardant la neige tomber ; d'autres étaient avec leurs Pokémon, à jouer ou tout simplement marcher.
L'homme me tenait la main, un peu comme si j'étais sa fille. En même temps, il devait sûrement en avoir l'âge. En lui tenant la main, marchant dans cette rue, des souvenirs me revinrent dans la tête. Des souvenirs de quand j'étais petite, de quand je passais des hivers à faire des batailles de boules de neige avec des amies. Des souvenirs d'avec mes parents, qui m'emmenaient dehors dans la neige et qui faisaient des batailles avec moi et ma sœur quand elle était toute petite. Des souvenirs qui me firent rappeler que j'aimais la neige. Je commençai à sourire, me rappelant de ces bons moments.
Puis ce constat qui me revint comme un boomerang : je n'allais plus connaître ces moments-là. Mes amis. Mes parents. Mon ancien monde. Disparus en une fraction de seconde, à partir du moment où j'ai commencé à mettre le pied dans ce nouveau monde.
Mon sourire commença alors à se dissiper, et j'essayai de m'enlever cette pensée aussi rapidement que possible de ma tête pour ne pas déprimer.

-Ca vous rappelle des choses, ces endroits ?

J'acquiesçai, et détournai légèrement le regard.

-Oui, des souvenirs de là où j'étais avant.

Je fixai le ciel, pensive. Je ne savais toujours pas ce que j'allais faire ce soir, où j'allais dormir. Je savais maintenant où j'étais, certes ; mais je ne savais toujours pas comment j'allais m'en sortir.
Quelques arbres bordaient la rue, qui avaient perdu leurs feuilles dans la saison hivernale. A un moment, un jeune habillé d'une veste en jean et d'une casquette rouge passa devant nous en rollers, qui semblaient extrêmement bien rouler dans la neige d'ailleurs.
Je voyais un ou deux cafés quelque part, mais l'homme avec qui j'étais semblait ne pas vouloir s'y arrêter. Même si mon esprit était de moins en moins rassuré par la situation dans laquelle je me trouvais, je me sentais mieux par la présence de cet homme, qui m'apportait une aide en venant me parler, et en qui je commençais à voir comme un père de substitution, quelqu'un qui pourrait me protéger.

Nous arrivâmes à un croisement, dans une plus grande rue, et nous tournâmes à gauche. Au bout de quelques pas, nous arrivâmes devant un petit café, à l'air sympathique, qui s'appelait « Un autre regard » - c'est du moins ce que je voyais d'affiché au-dessus de l'établissement.
Juste avant de rentrer, je le vis sortir une petite boule, de couleur rouge et blanche, qui devait faire 5 centimètres de diamètre. Je pensais que c'était un petit grigri ou un truc dans ce genre, jusqu'à ce qu'il appuie au centre. Je vis à ce moment-là la boule doubler de diamètre, et j'eus un léger mouvement de recul. Il me regarda et me fit un petit sourire.
Il appuya une deuxième fois sur le bouton central, et la boule s'ouvrit. Je vis alors une lumière rouge en sortir, puis se diriger vers le sol et prendre une forme précise. Après quelques secondes, l'Arcanin que j'avais vu tout à l'heure était juste devant moi. Je paniquai légèrement quand il s'approcha de moi, mais parvins finalement à rester calme et le caresser un peu.
L'homme me prit alors la main, et nous rentrâmes à l'intérieur du café.

* * * * *
-Alors comme ça, vous venez d'un autre monde ? Lança l'homme en commençant à siroter son café.

Nous étions isolés sur une table du fond, de sorte que personne ne puisse nous entendre. Il n'y avait pas grand-monde dans ce café.

-Oui.
-Et il ressemble à quoi exactement, votre monde ?
-Disons que là d'où je viens... les Pokémon n'existent pas du tout. On a d'autres animaux qui y ressemblent parfois, mais pas de ce genre.
-Et quand vous dites que cette ville vous dit quelque chose...
-C'est parce que j'ai habité dans une ville qui ressemble beaucoup à celle dans laquelle je me trouve en ce moment. La tour que vous appelez la Tour Prismatique... Disons qu'il y en avait une équivalente dans mon monde.

Il semblait boire mes paroles et essayer d'assimiler. Il semblait presque intrigué par ce que je venais de dire, mais n'avait pas l'air de me prendre pour une dingue. Le Pokémon, lui, penchait la tête sur le côté en me regardant. Je ne me sentais pas à l'aise et rougis légèrement.

-Est-ce que vous savez comment vous êtes arrivée là ? Continua-t-il.

J'eus un bug à ce moment-là. Etait-ce nécessaire de le dire à une personne que j'avais rencontrée moins d'un quart d'heure auparavant ? Malgré tout le respect que je lui devais, je ne pouvais pas me le permettre.

-Ce serait trop long à expliquer, lançai-je pour éviter de répondre.
-Je vois. Comment vous connaissez les Pokémon ? Puisque vous avez l'air de connaître ce mot.
-Ca existe dans notre monde, mais plus sous forme de jeu vidéo.

Il acquiesça, semblant comprendre. Il ne me prenait pas pour une folle.
S'en suivit alors un nouveau silence. Nouveau regard de l'homme. Je me sentais de moins en moins à l'aise.

-Je ne vous ai toujours pas demandé comment vous vous appelez, ajouta-t-il.
-Amélie, répondis-je.
-Enchanté. Pour ma part, c'est Julian.

J'acquiesçai une nouvelle fois pour essayer de parler le moins possible.

-En fait, je suis venu vous voir parce que je me disais que vous étiez seule, et disons qu'en ce jour il n'est pas très bon d'être seul.
-Qu'est-ce que vous voulez dire ?
-Vous ne savez pas quel jour on est aujourd'hui ?

Je secouai la tête de gauche à droite pour montrer que je ne savais pas.
Il fit un sourire et regarda les décorations un peu partout dans le café. Je suivis son regard et vis les couleurs dominantes du café, qui allaient dans le rouge et le vert. Je vis le petit sapin juste à côté du bar, décoré par des guirlandes. Je semblais déjà comprendre. Il suffit juste que je voie le houx accroché en plein milieu du café pour confirmer ce que je pensais.
On était le 24 décembre. Le jour de Noël. Et sans lui j'aurais été seule. Je lui devais une fière chandelle.
Je me retournai vers lui ; il me regarda avec un sourire, prit sa coupe de champagne et me regarda avec un grand sourire en lançant :

-Comme on dit chez nous... Feliz Navidad.