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Tome II : Le Nœud de Regigigas de Alecx



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Informations

» Auteur : Alecx - Voir le profil
» Créé le 22/05/2009 à 18:42
» Dernière mise à jour le 27/06/2009 à 15:33

» Mots-clés :   Action   Aventure   Sinnoh   Suspense

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Chapitre 9 : Les nuages s'amoncèlent...
(ndla : Je tiens à remercier imhotep43 pour les conseils qu'il m'a donnés à la lecture de la première version de ce chapitre. Bien que cette version bis ne soit pas non plus géniale, elle est un passage obligatoire, alors autant le rendre le plus agréable possible. Merci imhotep43, et merci à tous ceux qui lisent ceci !)



De l'eau. Beaucoup d'eau. Des trombes d'eau. Un véritable déluge. Un ferry. Un homme armé d'un poignard. Une noyade. Un martèlement sourd, régulier. La pluie qui tombe au-dehors. Une tempête de neige. Un lit chaud. Ambre. Les gouttes qui s'écrasent contre la fenêtre avec fracas. Regigigas, Pokémon de légende… La Team Galaxie. De l'eau. Beaucoup d'eau. Beaucoup trop. La noyade.

Julien se réveilla en sursaut, se redressant brusquement dans son lit avant de se rallonger tout aussi rapidement sous l'effet de la douleur que provoquèrent ses côtes cassées. Il était trempé de sueur, vêtu d'une chemise et d'un pantalon légers bleu ciel. Il se trouvait dans une chambre d'hôpital. Il le sut à cause des couleurs claires et du mobilier typique : lit, table de chevet, télévision et appareils compliqués qui émettaient des bips réguliers. Et contre le mur, au niveau de sa tête, un bouton dont les fils montaient jusqu'au plafond, et qui servait certainement à appeler un médecin. Était-il à Joliberges ? Il ferma les yeux. Certainement. Il repensa aux événements qu'il avait vécus… quand ça d'ailleurs ? Il n'en avait aucune idée. Il y a quelques heures ? Hier ? Cette seconde hypothèse, d'après la pâle lueur solaire que laissait passer la fenêtre de sa chambre, semblait la plus probable. Tiens, il avait pourtant cru qu'il pleuvait ?

Cet homme, sur le ferry… Il avait voulu le tuer ! Et sans le Symbole qui s'était mis à briller soudainement, il aurait certainement réussi. Et à l'heure qu'il était, bien qu'il ne la sût pas, Julien était sûr qu'il serait en train de nourrir les Pokémon aquatiques. Il se remémora l'acharnement avec lequel l'homme avait essayé de lui prendre sa Ball. Était-il de la Team Galaxie ? sans doute. Mais alors cela signifiait qu'il était suivi ? Ça n'allait pas. Et sa famille ? Ambre, ses enfants… Étaient-ils en sécurité ?

Il appela l'infirmière qui arriva une minutes plus tard… et qui était en fait un infirmier.
-Ah ! Vous êtes enfin réveillé ! On pourra dire que vous nous avez fait peur ! s'exclama-t-il d'une voix grave et chaleureuse. Comment vous sentez-vous ?
-Comme quelqu'un qui vient de se réveiller après avoir trop dormi, confessa Julien. Et j'ai mal aux côtes, fit-il dans une grimace.
-Ah, oui, nous avons vu. Pour les côtes, nous ne pouvons rien faire à part vous conseiller de prendre des anti-inflammatoires et effectuer le moins de mouvements possible. Votre copine va être contente de vous savoir en bonne santé, elle s'inquiétait drôlement. Vous avez dormi presque cinq jours !
-Cinq jours ? Mais c'est beaucoup trop ! Depuis que je suis arrivé ?
-Non, les deux jours de voyage que vous avez faits sont compris. Vous pourrez d'ailleurs remercier votre amie d'avoir pris autant soin de vous.
-Quand puis-je partir ?
-Eh bien, si vous le voulez, tout de suite, après avoir signé quelques papiers administratifs. Mais cependant, je vous suggère de rester encore un peu pour vous reposer.
-Je suis désolé, je n'ai pas vraiment le temps, s'excusa Julien. Peut-on s'occuper de la paperasse tout de suite s'il vous plaît ?
-Bien, souffla le médecin, déçu que les gens ne prennent même plus le temps de se faire soigner. Je vais vous demander de vous rendre à l'accueil. Vous donnez votre numéro de chambre à la réceptionniste, vous signez les papiers, puis vous pourrez partir. Faites tout de même attention !
-Merci, dit Julien en se levant délicatement de son lit. Savez-vous où je pourrais trouver Morgane ?
-Elle dort au Centre Pokémon, mais elle nous a dit qu'elle passerait certainement beaucoup de temps à la bibliothèque. Portez-vous bien, conclut-il en le quittant.

Après s'être habillé, ses vêtements ayant été lavés, pliés et proprement rangés dans son placard aux côtés de son sac, Julien se rendit au comptoir et s'empressa de signer tout ce que lui tendait la secrétaire. Enfin il quitta l'hôpital et s'aventura dans les rues de Joliberges.

C'était une petite ville paisible essentiellement habitée par des pêcheurs. Une trentaine de bateaux étaient solidement amarrés aux quais du port, faiblement bercés par les vagues. Des Goelise volaient dans le ciel bleu en poussant des cris joyeux. Malgré la faible température d'un mois de janvier, il faisait ici beaucoup moins froid qu'à Frimapic. Julien aimait le calme de cette petite cité. Frimapic était une ville morte. Ici, il régnait une perpétuelle activité, douce et tranquille. Des navires arrivaient, d'autres partaient, des pêcheurs discutaient sur le port, ou autour d'un verre à la table d'un café du coin. Là-bas, une vieille auberge charmante qui conservait une certaine fraîcheur de ses belles années, depuis longtemps passées. Ici, un pont levis de bois, qui servait de passerelle au-dessus du canal que les bateaux empruntaient pour partir en pleine mer. Et au loin, il distinguait un immense bâtiment de plusieurs étages, plutôt ancien, qu'il connaissait bien pour l'avoir déjà visité : la bibliothèque de Joliberges ; la plus grande bibliothèque de la région. Il s'était un jour rendu à une grande exposition qui avait été organisée. Des incunables en parfait état, des carnets de notes des plus grands scientifiques du monde, les cahiers dans lesquels étaient nés les classiques des romans de Sinnoh… L'événement avait attiré des milliers de personnes provenant des quatre coins du globe !

Ainsi, le sac sur l'épaule, les mains dans les poches, Julien s'aventura dans les rues en direction de ce phare de la culture qui dominait largement les autres constructions par sa taille imposante. La sérénité des lieux lui avait fait oublier la Team Galaxie et sa quête insensée. Il se promena dans de petites ruelles pittoresques, décorées par des jardinières suspendues aux balcons, ou posées sur des rebords de fenêtres. Si Morgane n'avait pas été en train de l'attendre, il aurait même pris le temps de s'arrêter dans un ou deux magasins qui lui paraissaient intéressants. Finalement, il quitta la vieille ville pour se retrouver sur une place un peu plus moderne, où le pilier de la culture contrastait avec l'architecture récente.

Entré dans le bâtiment, une dame l'accueillit en lui demandant de se faire le plus silencieux possible par respect envers les lecteurs. Elle était âgée, environ une soixantaine d'années, et portait une paire de lunettes, sans doute rendues indispensables après des milliers de pages parcourues.

Sans prendre le temps de chercher parmi les rayonnages, Julien monta directement au dernier étage, « Histoire et Culture », où il pensait trouver son amie. Et en effet, ce fut là qu'il la trouva, assise à une table sur laquelle était posée une pile impressionnante de bouquins, un livre ouvert sur les genoux. Il remarqua qu'elle avait profité de leur arrêt forcé pour s'acheter des vêtements moins chauds que ceux qu'elle avait auparavant et, indubitablement, plus féminins. Elle était resplendissante, ainsi vêtue. Julien s'approcha lentement et posa sa main sur le tas de livres :
-Je peux vous en prendre un ? demanda-t-il.
-Oui oui, allez-y, je les ai déjà lus, répondit-elle sans lever le nez, avant de reconnaître la voix. Julien ? Ça y est, tu es sorti ! cria-t-elle. J'ai eu tellement peur !
-Chuuuut ! souffla quelqu'un, assis deux tables plus loin, les sourcils froncés.
-Excusez-moi ! Alors, tu vas mieux ? questionna-t-elle en se retournant vers Julien.
-Ce n'est pas la grande forme, expliqua celui-ci, mais je peux marcher.
-Alors on peut prendre la route dès aujourd'hui je pense ?
-C'est exact, convint-il.
-Tiens, je nous ai trouvés ceci pour le voyage, dit-elle en lui tendant une montre fine et élégante, noire, avec un grand écran tactile.
-Ah, merci ! J'espère qu'elles ne coûtent pas trop cher… hésita-t-il.
-Ne t'en fais pas, elles sont distribuées gratuitement aux dresseurs.
-D'accord. As-tu trouvé des renseignements intéressants dans les livres ?
-Si tu savais tout ce que j'ai lu ! J'ai appris beaucoup de choses. Les villes où nous devons nous rendre se situent près des lacs de Sinnoh, qui abriteraient les trois gardiens de la région, mais je ne pense pas que cela ait un rapport compte tenu du fait que les textes concernant Regigigas et ceux concernant le trio légendaire ont plusieurs siècles d'écart. Une chose importante ! Il n'y avait rien d'explicite, mais il m'a semblé comprendre que les clefs ne sont accessibles que dans certaines conditions. Il n'y a rien de précisé là-dessus, il va donc vraiment nous falloir beaucoup de chance. J'ai aussi lu beaucoup de livres traitant de Bonaugure et de Rivamar. Je ne sais vraiment pas comment on va faire pour trouver des reliques là-bas. Quelque chose qui pourrait s'avérer important : Autrefois, Bonagure était une ville beaucoup plus grande que ce qu'elle est à présent. On risque donc d'avoir à chercher autour. Ah, et une petite anecdote pour la route, à caractère informatif. Savais-tu que la cathédrale d'Unionpolis aurait été construite par les hommes ET les Pokémon sous la direction de Regigigas ?
-Non. Notons-le au cas où, on ne sait jamais, bien que je ne pense pas que cela puisse réellement nous aider. Pour l'instant, notre objectif est la recherche des clefs.

Julien s'assit aux côtés de Morgane, encore un peu faible après un si long sommeil.
-J'ai aussi choisi quelques livres à emprunter, continua Morgane. Il y a celui-ci, dit-elle en lui tendant « Cartes d'autrefois de la région de Sinnoh » à Julien, celui-ci (« Les secrets de Sinnoh ») et celui-là (« Les Pokémon suivent-ils une monarchie ? »). Ce dernier est très intéressant.
-Oui, je m'en souviens ! s'exclama Julien. Il est devenu une véritable référence après le très célèbre « Référencement premier et thèse sur les Pokémon » du Professeur Chen. C'est lui qui a officiellement instauré les notions de Pokémon légendaires, semi-légendaires et divins. Il a mené de très longues études sur les légendes de toutes les régions pour en arriver là. Je l'ai déjà lu.

Morgane souleva tous les livres qui se trouvaient sur sa table, à la recherche de quelque chose qu'elle devait vouloir montrer à Julien.
-Mince, où l'ai-je mis ? Je l'avais gardé pourtant !

Elle se pencha en direction de son sac. Le journal qu'elle cherchait était posé dessus, correctement plié.
-Ah, le voici. Tiens, regarde de quoi ils parlaient ce matin :

« L'exode des Pokémon doit-elle inquiéter les scientifiques ? »

« Le départ des Pokémon est-il un mauvais signe ? Voici maintenant plusieurs jours que les Pokémon adoptent un comportement pour le moins inhabituel dans les différents milieux de Sinnoh. Depuis les plaines jusqu'aux montagnes, aucun endroit n'est épargné. En effet, depuis moins d'une semaine, les Pokémon sauvages désertent leurs lieux d'habitation sans que personne ne soit parvenu à savoir où ils se rendaient. Cette attitude pour le moins étrange nous a été rapportée pour la première fois il y a cinq jours et depuis, les témoignages se font de plus en plus nombreux. D'après ce que l'on peut entendre dire, le phénomène gagne en intensité chaque jour. Car ce sont maintenant des troupeaux entiers que l'on peut voir se déplacer. Comme nous le savons, les Pokémon sont dotés d'un instinct animal hors du commun qui leur permettrait de ressentir le danger là où les humains l'ignorent, cependant les scientifiques restent formels : cet instinct ne peut se limiter qu'à des événements climatiques d'envergure, hors, selon les experts, rien de grave n'est à prévoir dans ce domaine. Ni ouragan ni séisme en prévision donc, pourtant les faits sont là : les Pokémon sauvages fuient. Cependant, les Pokémon dressés ne semblent pas vouloir en faire de même. La question qui se pose actuellement est : devons-nous nous préparer à quelque chose de grave ? La dernière exode de Pokémon connue, vieille de presque de plus de deux siècles, n'était pas d'une telle envergure et pourtant, quelques jours après, un volcan faisait près de mille morts. Aujourd'hui, le mouvement s'étend sur la région entière. Si jamais un drame devait effectivement survenir, à quoi devrions-nous nous attendre ? »

-C'est étrange ces Pokémon qui fuient, tu ne trouves ? constata Morgane.
-J'en ai vu s'enfuir en masse à Frimapic le jour où… où je me suis fait tatouer, se rappela Julien.
-Tu crois que ça a un rapport avec…
-Je ne sais pas. Le Nœud représente l'équilibre du monde. Et plus le temps passe, plus il est en danger. Il se peut que la situation aille crescendo.
-Espérons que nous parviendrons à rétablir la situation.
-Oui, espérons… répéta Julien. As-tu autre chose à voir ici ? demanda-t-il.
-Si tu veux savoir si l'on peut partir, la réponse est oui, répondit Morgane.

Et, deux heures plus tard, après avoir mangé dans un restaurant pour fêter le rétablissement de Julien, tous deux prirent la route, direction Bonaugure.



Sous terre, très loin sous terre, Hélio fulminait. Diode n'avait jamais échoué, jamais. Et aujourd'hui, alors qu'il l'avait envoyé sur l'une de ses plus importantes missions, il s'était lamentablement fait avoir. Soi-disant qu'il s'était laissé surprendre par ce tatouage qui brille. Il l'avait appelé dans la nuit. Après être tombé du bateau, Diode avait nagé sans trouver nulle part où aller. Alors qu'il s'était cru perdu, un homme était passé dans un offshore et l'avait recueilli. Il l'avait ensuite ramené à Frimapic. Mais Diode avait définitivement perdu la trace des deux jeunes.

Hélio s'en retourna à son bureau et consulta ses plans pour la énième fois. Il avait quand même réussi à dresser une fiche de l'élu de Regigigas. Il s'appelait Julien. Il s'était bien moqué de lui. Ludovic, des services secrets de Sinnoh… Hélio s'était tout de suite renseigné auprès de ses agents. Il n'existait aucune cellule spécialisée sur son cas. La Team Galaxie opérait maintenant en sous-marin. Après les arrestations de deux de ses commandants et la disparition de l'un d'entre eux ainsi que celle présumée d'Hélio, le groupe avait été considéré comme dissolu. Julien n'était donc qu'un imposteur. Et comme tout finissait par se savoir, il savait maintenant que ce jeune homme de vingt-cinq ans était en fait un chercheur Pokémon qui donnait des cours un peu partout dans Sinnoh. Il était marié et avait deux enfants. Une gamine d'une vingtaine d'années nommée Morgane l'accompagnait.

Et ce vieillard… Aucune information sur lui. Un véritable fantôme. Il n'apparaissait dans aucun document officiel. A croire qu'il n'avait jamais existé. Et pourtant, il n'était que bien trop présent. C'était lui qui avait aidé Lucas. Un gamin de seize ans n'aurait jamais pu faire tout ce que Lucas avait accompli sans l'aide de quelqu'un. Les événements du Mont Couronné lui revinrent en tête. Il se souvenait. Quand il était arrivé là-bas, il n'y avait sur le terrain que les deux Pokémon légendaires Dialga et Palkia, Saturne et ce vieil homme. Le vieil homme avait neutralisé Saturne. Il était surpuissant. Peu importe qui il était, tant qu'il était en vie, il était une gêne pour son organisation.

Hélio nota sur un post-it : « Confier le vieux à Diode. ». Il hésita un instant, sa plume suspendue au-dessus du papier, puis reposa le stylo. On verrait ça plus tard.

Ce qu'il se demandait pour l'instant était : où allait Julien ? Que savait-il ? Et que comptait-il faire pour l'empêcher d'accomplir ses desseins ? Avait-il des informations qu'il lui manquait ? Était-il à la recherche du Nœud ?

Le Nœud… Hélio n'en savait qu'une seule chose : son accès était « réglementé ». On ne pouvait y parvenir aussi facilement. Mais Hélio avait les trois serviteurs. Cela ne suffisait-il pas ? Dans le doute, il avait bien sûr consulté sa bibliothèque personnelle et envoyé les trois Pokémon à ses laboratoires. Les livres lui avaient permis de faire une hypothèse : si jamais atteindre le Nœud nécessitait quoi que ce soit, alors il en fallait trois. Il en avait toujours été ainsi. Le trois était un chiffre considéré comme sacré dans le monde des Pokémon. Et les exemples abondaient : beaucoup de Pokémon évoluaient deux fois, formant une famille de trois Pokémon ; il y avait trois oiseaux légendaires, trois chiens… Trois gardiens, songea-t-il amèrement… Un dresseur n'avait le droit de transporter que deux fois trois Pokémon. La PokéBall nécessitait l'intervention de trois énergies différentes. Et qui ne connaissait pas les trois premiers types de Pokémon découverts ? Feu, Plante et Eau… Tout tournait encore et toujours autour du trois. Et le Cœur du Monde ne ferait certainement pas exception à cette règle sacrée.

Hélio tournait en rond. Il fallait qu'il repère Julien et qu'il lui extorque des informations. Il fallait aussi que ses scientifiques se dépêchent de lui donner les résultats de l'analyse. Il sentait que tout était là, à portée de main, mais il ne parvenait pas à déceler l'information capitale qui se cachait au milieu des autres, bien moins intéressantes. Heureusement, Hélio était un homme patient. Il savait que les cartes finiraient par tomber… Et il attendrait.



De toutes les villes de Sinnoh, Rivamar était de loin la plus axée sur l'écologie. Une cité charmante qui avait grandie en bord de mer. Située au Sud-Est de la région, la température y était constamment élevée, réchauffant le corps et le cœur de ses habitants et, par la même, les fournissant en électricité. En effet, l'arène du Champion nécessitait une telle quantité d'énergie que Tanguy avait jugé nécessaire de faire quelque chose pour y remédier. Sous un soleil si abondant, la solution s'était imposée d'elle-même. Ainsi s'étaient construites les routes à énergie solaire. Des capteurs solaires qui facilitaient les déplacements dans la ville tout en nourrissant les besoins des habitants. Une grande avancée dans ce futur où technologie et écologie devaient avancer main dans la main.

C'était dans cette magnifique ville moderne qu'avait grandi Alice, une adolescente de dix-sept ans dont les belles années faisaient ressortir la beauté éclatante. Elle était née ici d'un père océanographe et d'une mère professeur, qui enseignait dans le collège où elle avait été, quelques années auparavant. Et actuellement, elle était élève au lycée de Rivamar, où elle étudiait avec brio l'Histoire de Sinnoh. Elle ne savait pas encore précisément le métier qu'elle voudrait exercer plus tard, et elle s'en moquait. Comme elle le répétait souvent : « Carpe diem ». Dresseuse talentueuse depuis l'âge de seize ans, Alice était une fille passionnée d'Histoire depuis sa plus tendre enfance. Tout remontait en réalité au jour où, alors âgée de huit ans, la gamine était sortie dehors malgré les avertissements de ses parents. Il pleuvait énormément et la mer était déchaînée. Les vagues, plus hautes que jamais, venaient frapper avec fougue les crêtes rocheuses de la ville. Mais Alice adorait sortir sous la lueur éblouissante des éclairs déchirant le ciel. C'est comme ça.

Ce jour-là, Alice avait donc décidé d'aller admirer l'étrange rocher que l'on voyait dépasser fièrement de l'eau tel un iceberg. Étrangement, elle lui avait toujours trouvé une forme de Goinfrex, avec ses deux pointes en sommet et son air de bonhomme de neige rondouillard. Rendu luisant par les flots d'eau qui s'abattait sur lui, brillant sous les éclairs, il devait être magnifique.

Traversant la ville sur ses petites jambes, elle s'était donc rendue en bord de mer. Arrivée au bord de la falaise la plus proche du rocher, elle s'était bien sagement assise et, heureuse, avait contemplé le magnifique spectacle des flots déchaînés qui s'écrasaient à pleine vitesse sur la roche imperturbable. C'était magique. Des décennies, voire des siècles plus tôt, des personnes qui avaient vécu dans une autre époque que la sienne et qu'elle ne connaîtrait jamais avaient peut-être admirer la même scène, au même endroit. Elle trouvait cela très poétique, cette petite fille de huit ans. Et puis, il était rare de voir la mer à un tel niveau !

Hélas, la petite gamine n'avait pour ainsi dire aucune connaissance en géomorphologie. Aussi ne connaissait-elle pas le phénomène de l'érosion, qui détermine le relief des roches soumises à certaines conditions géographiques et météorologiques. En bord de mer, il est possible que des plaques de roches s'effondrent quand elles sont frappées par les vagues. Ces événements, bien sûr, ne sont pas communs en ville puisqu'en général, le lieu de construction est d'abord scrupuleusement analysé par des professionnels. Mais, très rarement, il se peut que cela arrive. Et ce fut le cas ce soir-là.

Le drame s'était annoncé par un craquement sinistre ; celui de la roche qui cède face à la pression de l'eau après avoir vaillamment résisté. Alice avait sursauté, regardant autour d'elle. Mais elle n'eut pas le temps de faire autre chose. Elle fut emportée par l'éboulement.

La chute en elle-même fut très désagréable. La petite fille avait roulé le long de la crête rocheuse en criant, essayant désespérément de s'accrocher là où ses petites mains auraient la bonne grâce de tenir. Elle s'était égratignée les jambes, les bras, le visage… Mais finalement, elle était tombée à l'eau. Le choc avait été horrible. La mer était glacée. Elle avait senti sa respiration se couper, sa cage thoracique se contracter. Il lui avait semblé qu'elle brûlait entièrement. Puis elle fut remuée par les courants violents, ne parvenant pas à lutter à l'aide de ses faibles forces. Ce jour-là, elle crut mourir. Elle s'imaginait déjà son corps s'écraser lamentablement contre les rochers. Mais elle ne parvint même pas à rester à la surface. Elle était entraînée vers le fond.

Et c'est à ce moment-là que l'impensable s'était produit. Sous les flots, les mouvements étaient différents et l'attiraient loin de la falaise. Les courants la menaient près de son « Goinfrex ». Mais elle ne fut pas projetée contre la paroi du rocher. En effet, à force d'être ballotée, elle avait rejoint une sorte de couloir où l'eau se faisait moins froide. Et pourtant, elle se trouvait maintenant très loin sous la surface. Ici, tout était calme. Elle songea même un instant qu'elle était morte. Mais elle sentait encore son corps, ses muscles qui la tiraillent, tout son être qui criait désespérément à l'aide, à la recherche d'oxygène. Elle sentait la brume envahir son esprit. Elle voulait ouvrir la bouche, elle devait l'ouvrir ! Juste une goulée d'air !

Et elle put respirer. Sa tête venait, contre toute logique, de jaillir de l'eau. Il n'y avait plus de vague ni de lumière. La ville avait disparu, les nuages aussi, ainsi que la lune et la pluie. Plus rien. C'est quand, en « nageant » aussi bien qu'elle le pouvait, elle percuta un mur qu'elle se rendit compte qu'elle n'était pas dehors. Elle était dans une grotte.

Elle était restée cinq minutes sans bouger, à reprendre son souffle avec force. Agrippée à la paroi, elle avait attendu que son rythme cardiaque diminuât. Finalement, ses yeux s'accoutumèrent à l'obscurité ambiante et elle put évaluer la taille de la grotte, qui semblait légèrement éclairée. Elle se trouvait dans une pièce circulaire, d'environ dix mètres de diamètre, au sol inexistant à l'exception d'une petite bordure qui faisait tout le tour de la salle et qui ne devait pas mesurer plus d'un mètre de largeur. Cette bordure étant située à quelques centimètres de la surface de l'eau, Alice eut un peu de mal à s'y hisser, mais elle y parvint finalement au troisième essai. Ses muscles étaient engourdis par le froid. Accroupie, les genoux sous le mentons, grelottante, elle leva la tête au plafond pour se rendre compte qu'une faible lueur y glissait silencieusement. En observant plus attentivement, elle se rendit compte que le long de la paroi de la grotte – qui, bien qu'elle ne le sût pas, était beaucoup trop lisse et propre pour être l'œuvre de la nature – grimpait un très mince escalier qui semblait avoir été taillé à même la roche avec une extrême précision. Il paraissait mener à un étage supérieur qui devait certainement être l'endroit d'où provenait la lumière. Curieuse de nature, la petite fille décida d'aller jeter un œil.

En prenant son temps pour ne pas tomber, elle avait longé le mur de la grotte sphérique, s'appuyant précautionneusement sur les marches dont la largeur ne devait pas excéder les cinq centimètres. Après de longues minutes, elle parvint finalement à atteindre ce qui s'avéra être un second étage, en tout point similaire au premier à deux exceptions près : étant plus haut dans la bulle que formait cette grotte, le diamètre s'en trouvait considérablement réduit ; et un petit socle de pierre de forme cylindrique – lui aussi parfaitement lisse – trônait fièrement à deux ou trois mètres d'elle. A quatre pattes, le plafond étant plus bas ici qu'à l'étage du dessous, elle s'en approcha prudemment, se méfiant de ce qui pouvait arriver. Quand elle fut devant, à genoux, elle l'observa attentivement. C'était un petit réceptacle haut d'environ quarante centimètres le long duquel des symboles incompréhensibles étaient gravés, constitués de points. Des bribes d'Histoire que jamais personne ne lirait… Un anneau d'or l'entourait en son sommet et sur sa face supérieure était placée une petite pierre plate et ronde dont le relief formait un tourbillon envoutant. Elle était incrustée de trois petites pierres rouges alignées en une colonne, brillantes, qu'Alice ne sut identifier alors. Des rubis. L'objet avait l'air très vieux et il semblait que la lumière ambiante émanait de lui. C'était captivant. La petite fille fut soudain prise du désir de s'en emparer. Devait-elle le prendre ? Ou appartenait-il à quelqu'un ? Cet objet, cette relique, cette clef du passé paraissait l'appeler, lui demander de l'emmener avec elle. Alice croyait voir à travers les reflets des pierres précieuses la promesse d'un avenir hors du commun. Un avenir où elle-même aurait son rôle à jouer dans le destin du monde. Elle ne devait pas laisser cette pierre ici, elle en avait la ferme conviction. Elle approcha sa main tremblante avec hésitation, de peur que quoi que ce soit n'arrive lorsqu'elle toucherait l'objet. Le cœur battant, elle posa délicatement ses doigts dessus. Rien ne se produisit. Avec délicatesse, elle souleva la petite pierre et, sans faire de mouvement brusque, la ramena à elle. Elle était sienne. C'était aussi simple que cela. Du moins pour le moment. Elle contempla longtemps son bien avant de s'endormir, le gardant soigneusement au creux de ses petites mains…

Quand elle s'était réveillée, elle avait précieusement rangé son petit trésor dans une des poches de sa robe. Un infime rayon de soleil filtrait à travers la jonction des deux sphères du rocher dans lequel elle se trouvait, venant lui annoncer qu'un nouveau jour commençait. Elle fut très surprise de constater lorsqu'elle s'était redressé et avait jeté un coup d'œil à l'entrée, que le niveau de l'eau avait étonnamment baissé. Ainsi, elle se rendit compte qu'elle se trouvait bien, comme elle l'avait supposé, dans cet écueil en forme de Goinfrex qu'elle admirait la veille au soir avant l'accident. Pendant la nuit, ses vêtements avaient séché et ne conservaient plus qu'une légère humidité de leur aventure sous-marine. Il était maintenant temps pour elle de rentrer à la maison et de se faire disputer par ses parents. Il ne fallait pas qu'elle leur dise où elle avait passé la nuit car, et avec raison, ils n'oseraient plus la laisser tranquille le soir. En petite fille qui avait grandi au bord de la mer, elle n'avait aucunement peur de l'eau et ce fut donc sans crainte qu'elle sauta de son petit rebord les pieds en avant, une main fermement cramponné à sa poche. La mer ayant presque regagné son niveau habituel et les courants s'étant calmés, elle parvint sans peine à rejoindre la surface. Elle avait ensuite nagé jusqu'à trouver un endroit où elle pourrait rejoindre la ville. Quand elle était rentrée, elle s'était faite disputée par ses parents. Puis l'incident était passé, les années s'écoulèrent…

Et aujourd'hui élève de la grande école de Rivamar, Alice apprenait l'Histoire avec ferveur et passion tout en entraînant une équipe de Pokémon en dehors des cours. Elle était une fille épanouie, curieuse et très intelligente. Elle était de ceux aux yeux desquels la vie était parfaite et jamais elle n'aurait eu à se plaindre de quoi que ce soit. Seulement elle ne savait pas que bientôt, les ennuis allaient arriver en masse. Tout cela à cause de cette petite pierre plate trouvée dans une grotte, il y a neuf ans de cela.



A Frimapic, dans sa maison, le vieillard soupirait. Les nouvelles n'étaient pas bonnes. Pas bonnes du tout. Pourquoi les choses devaient-elles se dérouler ainsi ? Il allait falloir qu'il agisse rapidement. Mais par où commencer ? Il y avait tant de choses à faire dans un laps de temps si court. « Il est des choses qu'un homme ne devrait jamais savoir, songea-t-il amèrement. » Mais il savait.

Et il n'avait pas le choix. Se levant de son fauteuil, il traversa doucement le salon pour venir se poster devant la fenêtre.

Dehors, il neigeait…