Kirby, l'instinct sauvage de Sévy

J'émergeai doucement de mon sommeil, découvrant à nouveau le visage de la vielle Anna. Cette fois ci, il faisait jour : la pièce dans laquelle je me trouvais était remplie de la lumière du soleil. Anna se pencha vers moi, et j'en profitais pour lui demander :
- Combien de temps ai-je dormi cette fois-ci ?
- Juste une nuit, Kirby, ne t'inquiète pas !
Ouf ! J'étais soulagée. Je n'avais pas envie de dormir trop longtemps, car je n'avais pas de temps à perdre.
- Au fait, précisa Anna. Je t'ai vêtue d'un pyjama bien chaud, afin que tu n'aies pas froid.
- Merci, bafouillais-je.
Je sautais sur mes pieds, ce qui surpris la vielle dame.
- Anna, j'ai un énorme problème, soufflai-je.
- Je suis curieuse de savoir lequel.
- Je suis un pokémon !
Anna fronça les sourcils.
- Es-tu bien sûre de ne pas être encore en train de rêver ? rigola t-elle.
- Non, c'est très sérieux ! Je suis un pokémon, il faut me croire !
Anna me dévisagea, stupéfaite. Je m'apprêtais à ramener mes mains à mes yeux pour pleurer, lorsque j'aperçus quelque chose de vert briller sur ma main droite. J'examinais cette lueur rapidement : c'était une sorte de plante, des lianes de lierre entrelacées, avec de petites fleurs roses qui poussaient sur les tiges. Ca ne ressemblait en aucun cas aux décorations appelées « Tatouages », que les humains gravaient sur leur peau. C'était un vrai signe, brillant de mille feux. Sans hésiter, j'avançais ma main jusqu'à Anna.
- Voyez par vous-même ! Ceci est la preuve qu'avant, j'étais un pokémon de type plante !
Je ne savais pas exactement si ce signe signifiait clairement que j'avais été un pokémon plante, mais bon…le tout était d'essayer de convaincre Anna que je lui disais la vérité.
La vielle femme semblait réfléchir.
- Te souviens-tu quel pokémon tu étais, avant ta transformation ? m'interrogea-t-elle.
- Non, j'ai perdu la mémoire lors de ma métamorphose.
- Voilà qui est embêtant…Tu ne te souviens donc de rien ?
- C'est exact. Simplement, je me rappelle de mon prénom. Et je suis presque sûre que j'étais un pokémon de type plante auparavant !
- Fais moi l'historique tout ce dont tu te souviens. Et n'oublie rien !
Je lui racontais absolument tout. Mon réveil dans la neige, ma rencontre avec le Goupix et mon arrivée à l'Orphelinat Bettendorf. J'avouais même que je venais tout juste de me rendre compte que je possédais un signe sur la main.
Après quelques minutes de silence et de réflexion, Anna se remit à me parler :
- Je vais voir si je peux trouver quelque chose au sujet des métamorphoses, à la bibliothèque. Si cela ne t'ennuie pas, je vais te laisser quelques instants, puis ensuite, j'enverrais quelqu'un pour te faire découvrir l'Orphelinat. Tu es d'accord ?
- Ca marche !
Je me disais que j'en profiterais pour me familiariser avec les objets des humains, vu que cette pièce regorgeait de babioles. Anna se dirigea vers la porte et me laissa seule. La chambre était si calme. Elle était peinte dans les tons de bordeaux et de vert foncé. Il y avait aussi des dorures sur les murs. Le tapis bordeaux était moelleux, à l'instar du lit. Sur une petite table était disposé un livre et un bouquet de Roses. J'inhalai le parfum des fleurs, si doux, si pur. Le livre ne m'attirait guère, mais je le soulevais tout de même. Je parcourais les pages : il n'y avait que de l'écriture humaine. Je ne comprenais que quelques mots. Un miroir attira mon attention. Je m'approchais de la glace et y découvrit alors mon visage. J'étais brune, et mes cheveux m'arrivaient sur les épaules. J'avais une jolie frange qui était placée sur le côté gauche de mon front. Je remarquais aussi que les pointes de mes cheveux étaient vertes. Le pyjama qu'Anna m'avait donné était noir, tissé dans une matière chaude et agréable. Je me tournais vers le lit défait dans lequel j'avais dormi. Les draps étaient soyeux et doux.

On toqua soudain à la porte de ma chambre.
- J'peux entrer ? interrogea une voix fluette.
J'étais sûre que ce n'était pas Anna. Mais j'acquiesçais tout de même :
- Oui, oui. Pas de problème.
La porte s'ouvrit en grand, laissant apparaître une jeune fille qui semblait avoir le même âge que moi. Elle était très jolie ; élancée, blonde aux yeux bleus. Ses longs cheveux d'or étaient noués en deux jolies tresses. Elle portait aussi une épaisse frange. Ses longs cils encadraient ses yeux azurs.
- Salut ! s'exclama t-elle. Moi, c'est Jill. C'est Anna qui m'envoie. Elle m'a dit que je devais te faire visiter l'Orphelinat. C'est toi Kirby ? La fille qui dit être un pokémon transformé ?
- Oui, c'est bien ça, bredouillais-je.
Jill m'observa, détaillant ma tenue. Ses yeux se posèrent à nouveaux sur mon visage, lorsque sa voix de velours retentit :
- T'es pas vraiment fringuée pour faire un tour dans l'Orphelinat.
- Ah non ? répliquais-je.
La blondinette fit non de la tête. A vrai dire, je n'avais aucune idée de comment s'habillaient les humains.
- Alors, ça sert ça quoi un pyjama ? questionnais-je.
- C'est juste pour dormir, rétorqua Jill.
Voyant que je ne comprenais pas vraiment, elle se radoucit.
- Où, si tu préfères, un pyjama, c'est un vêtement qui est utilisé pour dormir, la nuit.
Je n'arrivais pas à saisir pourquoi les humains possédaient des vêtements pour la nuit et d'autres pour la journée, mais bon…tant pis.
Je détaillais les habits de Jill. Elle portait un débardeur blanc aux surpiqûres bleues, et une petite jupe plissée, couleur azur. Ses baskets étaient blanches.
- Comment je vais faire pour me trouver une tenue acceptable ? m'enquis-je.
- T'inquiète, me rassura Jill. J'vais t'en apporter. Il faut juste que j'aille te les chercher dans ma chambre, qui est à l'étage au dessus.
- Ok.
Et la belle blonde sortit de ma chambre en un clin d'œil.
Quelques minutes plus tard, Jill revint avec une tenue complète sous le bras.
- Voilà tes vêtements, déclara t-elle en me les tendant. Tu n'as qu'à aller te changer ici. C'est la salle de bains.
Elle pointait une petite porte du doigt. Lorsque je l'ouvris, celle-ci grinça un peu. Je découvrais alors une douche, un lavabo, un miroir et des toilettes. J'enlevais rapidement le pyjama noir d'Anna, et enfilais le T-shirt blanc à rayures vertes que m'avait apporté Jill. La voix de celle-ci raisonna dans la pièce d'à côté :
- Anna m'a dit que tu pensais que t'étais un pokémon de type plante avant. Alors, je t'ai apporté un maximum d'habits verts. Ca te plaît au moins ?
-Oui, c'est joli, soufflais-je.
C'était de très beaux habits, en effet. Mais je n'étais pas vraiment habituée à porter une tenue. Je tentais de ne pas tomber en passant mes jambes le pantalon kaki que j'avais en main. Celui-ci était fait en lin. Il était très agréable à porter. Enfin, je glissais mes pieds dans les ballerines vertes de Jill. Après un dernier coup d'œil dans le miroir, je sortis enfin et attendis la réaction de la jeune blonde. Celle-ci sembla rester bouche bée.
- Ouah ! Canon !
- Ca-quoi ? C'est…une attaque ?
Par réflexe, je plaçai déjà mes mains en position de défense, en prévision du combat qu'annonçait l'attaque « Canon ». Mais l'attitude hilare de mon interlocutrice me fit comprendre qu'il y avait une méprise.
- C'est juste une expression ! Ca te fera pas de mal ! Au contraire, ça veut dire que t'es superbe !
- Ok, je vois…Je crois que je vais avoir besoin d'un bon briefing sur toutes vos habitudes !

Je marchais tranquillement, tandis que Jill m'expliquait plein de choses. Je posais quelques questions lorsque quelque chose m'échappait, mais sinon, j'essayais de ne pas l'interrompre, et d'assimiler un maximum d'informations. Je découvris alors la cantine de l'Orphelinat, les salles de classes, le majestueux hall d'entrée, ainsi que les dortoirs. Je me décidais enfin à poser la question qui me titillait depuis un bout de temps.
- C'est bien beau tout ça, mais, c'est quoi, à la base, un Orphelinat ?
Jill parut amusée de se trouver devant une adolescente qui ne savait pas ce qu'était un Orphelinat.
- C'est un endroit qui accueille les enfants sans famille, m'expliqua t-elle calmement. Le plus souvent, les Orphelinats sont médiocres et moches. Pour faire court, les chambres sont toutes délabrées, et y'en a pas beaucoup. A la cantine, on ne sert que du Pudding, alors que dans notre cantine à nous, on sert des plats délicieux. Et pour finir, il n'y a pas de salle de classes.
- D'accord. Si j'ai bien compris, un Orphelinat généralement, c'est la maison des enfants qui n'ont pas de famille. Mais, pourquoi cet Orphelinat est si beau, si tant d'autres ne le sont pas ? Il ne me paraît pas médiocre du tout, avec ses dorures si…
- J'y viens, j'y viens, me coupa Jill. En fait, la fondatrice de l'Orphelinat s'appelle Rose Bettendorf. En bref, elle est très riche et généreuse. Elle est très sensible envers les enfants sans logement et sans famille. Donc, elle a créé cet Orphelinat, afin que les Orphelins puissent se cultiver, et avoir une vie heureuse.
Cette dame devait être vraiment gentille. J'aurais tant aimé la connaître !
- Pourrais-je la rencontrer, un jour ? tentais-je.
- Bien sûr que oui ! Je vais même te la présenter tout de suite, si tu veux !
- Oh oui, s'il te plaît !
- Suis-moi, je t'emmène dans son bureau.

La salle adjacente au bureau de Madame Bettendorf était, comme m'avait précisé Jill, une « salle d'attente ». Elle m'avait dit qu'on attendait dans cette salle, que Rose Bettendorf soit libre avant d'entrer dans son bureau. Une petite table était disposée à l'entrée de la salle d'attente. Une femme dodue se trouvait assise derrière cette table, et tapait sur les touches d'un clavier, relié à une grosse boîte grise, à une vitesse considérable. La boîte ressemblait à celle que j'avais vu la nuit de ma transformation, chez l'homme qui buvait du vin. La femme nous adressa un léger sourire.
- J'peux vous aider ? questionna t-elle.
- C'est la secrétaire de Madame Bettendorf, me glissa Jill. Non, c'est bon Martha, annonça t-elle, à l'intention de la secrétaire.
Jill me prit la main et m'entraîna près d'une chaise. Elle s'assit et j'en fis de même. J'observais la pièce dans laquelle je me trouvais. Les murs étaient peints en beige, les chaises étaient en plastique bleu. Les rideaux qui encadraient les larges fenêtres étaient de la même couleur que les chaises.
Au bout de quelques minutes d'attente, une belle jeune fille sortit du bureau de Rose. Ses boucles rousses étaient superbement coiffées, et faisaient ressortir ses beaux yeux verts en amande. Elle avait un débardeur à fines bretelles de couleur orange, et une mini-jupe blanche. Elle adressa un regard moqueur à Jill, puis lui lança :
- Toujours aussi mal accompagnée à ce que je vois ?
Un peu surprise, je posais sur la rousse un regard interrogateur.
- C'est vrai, continua la fille, la brune à côté de toi à un air tellement paumé…
Je compris qu'elle parlait de moi. Jill prit ma défense :
- Je préfère avoir un air paumé qu'être aussi superficielle que toi, sale nunuche !
La rousse se renfrogna puis me dévisagea.
- C'est qui ? demanda t-elle à Jill.
- C'est la fille dont Anna t'à parlé l'autre jour, souffla sèchement Jill.
Alors Anna avait raconté mon arrivée à tout le monde ? Je n'étais donc pas passée inaperçue.
- Oh, c'est toi la bestiole ? reprit la rousse.
- Tais-toi Eva ! explosa Jill. Si il y a une bestiole ici, c'est bien toi ! Kirby n'est pas une bestiole, c'est un pokémon !
- C'était, un pokémon, rectifia Eva. En tout cas, j'espère qu'elle était plus jolie en tant que pokémon, ajouta t-elle, moqueuse.
C'en était trop pour moi ! Cette peste allait voir de quoi j'étais capable. Je poussais un grognement furieux, tout en avança vers Eva, et en montrant les dents, comme si j'allais attaquer. Je sautais vivement sur Eva, la plaquant au sol. Jill gloussa et la rousse poussa un cri strident. Martha, la secrétaire, se décida à intervenir :
- Ca suffit les filles ! s'exclama t-elle. Arrêtez de vous disputer, vous êtes ridicules !
Martha me saisit par les bras et m'obligea à me lever. J'essayais alors de me calmer, bien que ce ne fût pas très facile, tout en rejoignant Jill qui posa sa main sur mon dos, essayant de m'apaiser.
- C'était quoi ça ? interrogea Eva, s'adressant à moi.
- Ca, c'était mon instinct sauvage, répliquais-je.
- Je te rappelle que t'es plus un pokémon ! lâcha la rousse. Et puis d'abord, c'est quoi un instinct sauvage ?
- Quand quelqu'un m'embête, j'attaque ! C'est comme ça que les conflits se règlent, chez les pokémon !
- Tu devrais plutôt dire chez les fous ! rigola Eva. Tu éviteras ce genre de chose, à l'avenir ! Je peux te faire renvoyer de l'Orphelinat quand je veux !
Je lançai un regard à Jill. Pourquoi prétendait t-elle avoir le droit de me faire mettre dehors ?
- C'est la fille de Madame Bettendorf, m'expliqua Jill, dépitée. Elle est quasiment intouchable.
Je comprenais mieux, maintenant. C'est en me lançant un regard haineux, qu'Eva sortit de la pièce en se recoiffant.