Smirnoff, 2ème recueil de Domino

« N'attendez pas le jugement dernier. Il a lieu tous les jours. »
(Albert Camus)
Estelle restait à l'écart, s'exerçant seule. Rupert n'avait guère plus d'yeux que pour Antoine. Estelle grommela. Elle réfléchissait depuis quelque temps. De mauvaises pensées avaient envahi son esprit d'adolescente rebelle. Il fallait qu'elle tente le tout pour le tout. Ca ne pouvait pas en rester là. Antoine de Beaufort ne pouvait pas l'emporter ainsi.
Elle décida donc de se venger. Mais pour cela, elle devait mettre en place des tas de choses.
Estelle est une jeune fille compliquée : Elle a un mode de pensée qui l'oblige à penser toutes les éventualités et toutes les solutions. Elle n'a pourtant rien d'une surdouée, mais c'est sa mentalité et sa maturité qui l'ont obligée à adopter cette manière de réagir.
Elle regarda de nouveau vers son rival et vers le professeur.
Etape 1 : Regagner la confiance.

-Estelle…
Elle regarda le professeur alors qu'elle était en train de lustrer la coquille de Stanley, son Coquiperl. L'homme s'assit à côté de la jeune femme.
-Estelle, pardon. J'ai été injuste de te rejeter à cause de ce que tu as fait à Galopa.
Estelle soupira.
-Ce n'est rien, monsieur. Je suis désolée que votre Pokémon ait souffert. Si vous y tenez je ne m'approcherais plus d'elle.
Rupert hocha la tête.
-Ce serait… une bonne chose, même si… Enfin bref, je serais un prof immonde si je refusais de t'enseigner. Même si ma venue vers toi est uniquement sur une idée d'Antoine !
Estelle sourit.
-C'est rien. Je comprends tout à fait. Vous avez le droit de ressentir ce genre de choses même à mon égard.
-Ce n'est pas bien quand même. Bon, on reprend les exercices ?
Estelle hocha la tête et se leva avec son professeur.

Ce matin là, personne ne sait encore que la journée va être la plus chargée, la plus intense et la plus forte qu'ils n'aient jamais connue. En fait chacun allait, de gré ou de force être impliqué dans une lutte absolument titanesque entre deux « familles », deux « clans » en lutte depuis une génération. Tous allaient perdre un(e) grand(e) ami(e) et allaient avoir bien du mal à s'en remettre. Ou pas.
Cela commença en arrivant.
Le premier à entrer fut Lindbergh James Jr Winchester dit « Linus ». Il aperçut devant les portes de sa faculté une bande de profs en colère.
-Pas de suppressions ! Pas de suppressions !!
-Allons-bon, c'est pour ce matin… soupira le proviseur. Messieurs…
-On veut pas de postes supprimés !!
-Oui, oui, oui… Laissez-moi entrer…
Gary Mc Cage bloqua l'entrée au proviseur.
-Ahem… Vous avez le droit de faire grève, mais obstruer l'entrée du lieu de travail rend votre action illégale !
Le professeur vétéran et le proviseur se fixèrent intensément.
-Je vous déteste, asséna Gary.
-Je ne vous porte pas dans mon cœur non plus, mais il faudra faire avec.
Gary plissa les yeux et laissa passer le proviseur qui soupira tout son saoul.
-Bon sang... Pas ça tous les jours par pitié !
Norbert Finsbury entra immédiatement à sa suite suivi par Edward Banks dit Eddy.
-Oh là là, Linus vous avez vu ça ?!
-Vu ?! Ca me sort déjà par les yeux !! C'est TOUT vu !
-Vous comptez faire quelque chose ?! s'étonna Eddy.
-Aller poser mes fesses sur ma chaise de bureau et attendre que ça se passe !
Norbert et Eddy se regardèrent, interloqués.
-Oh, euh… c'est ce soir qu'on va au restaurant ! se souvint Eddy.
-Oui, Ed, c'est ce soir. Et je t'invite, évidemment.
Sourire réciproque. Norbert attrapa Eddy par le bras et l'embrassa. L'intendant regarda le doyen, intrigué.
-Quoi ?
-Rien, c'est… bizarre… d'habitude tu ne m'embrasses pas comme ça, pour rien…
-Qui te dit que c'est pour rien ?!
Eddy sourit.
-Sacré toi…
-Oui sacré toi aussi !
Ils repartent chacun de leur côté vers leurs bureaux respectifs, souriants.

Andrew et Penny arrivèrent ensemble également. Ils vivaient en colocation depuis quelques jours et ça se passait plutôt bien. Un peu trop bien en fait.
-Andrew, à propos de ce qui s'est passé hier…
-Il ne s'est rien passé hier.
-Si, voyons, on s'est… embrassés !
-On regardait un film, on a rigolé ensemble, on a tourné la tête chacun du même côté, préjuger d'un baiser sur ce seul instant… C'est idiot.
-Je me doutais bien que tu réagirais comme ça…
-Ce qui rend tes gesticulations ridicules.
-Tu dis ça pour faire comme si tout était normal mais visiblement non !
-C'était involontaire !! grommela le jeune homme.
-Eh bien dans ce cas là ne dis pas qu'il n'y a rien eu !
-Je préfère dire qu'il n'y a rien eu parce que si j'en fais tout un cas tu vas te sentir mal à l'aise dans mon appartement. Oh, une grève. Comme c'est pittoresque et exotique… soupira indifféremment le fils Marble.
-Ce que tu peux être nul parfois… soupira la nièce Beaufort.

Etienne et Kenneth n'en revinrent pas de voir une grève devant l'établissement.
-Ouah… Fête-t-on… la mort des syndicats ?! C'est intéressant, je pourrais leur sortir mon dossier médical !
-Ca les passionnerait, surtout tes problèmes intestinaux entre 11 et 12 ans ! ironisa le CPE.
-Seigneur faites que jamais il n'y ait de flashbacks sur cette période traumatisante ! Au fait toi, ta demande en mariage, ça avance ?
-Sur un skate avec des roues carrées figure-toi… soupira le blond.
-Eh je regardais un truc sur Internet hier… A propos des Shipping. C'est le fait pour les fans de telle ou telle série de mettre en relation deux personnages. Et pour symboliser cette union, ils unissent les noms des personnages. Par exemple un shipping tordu entre Charles Ingalls et Harriet Oleson ça donne… Un Charriet !
Kenneth regarda Etienne, atterré.
-Les bonbons roses que tu voles dans la boîte à cookies… c'est très mauvais pour ton corps ! ironisa le CPE.
-Donc toi et Judith ça ferrait… Un Kendith ou un Judeth !
-Magnifique… C'est censé signifier un truc ?
-Ca fait figure de religion sur Internet depuis sa création !
-Laisse-moi essayer… Toi et Norbert ça fait Etibert ou Nortienne… Linus et Norbert ça fait Linbert ou Norbergh… Moi et toi ça fait Kentienne ou Etienneth…
-Oui bon ça va… Shippeur, arrête de Shipper ! Fous la paix à la langue française !
-Tiens, voilà Jonstelle en approche ! Ou Estethan selon la police !
-Tu fais toujours ça ? Prendre pour acquis tout ce qu'on te dit ?!
-J'adore ! sourit Kenneth.
Etienne et Kenneth croisèrent en effet Estelle et Jonathan qui se dirigeaient vers la faculté.
-Salut !
-Lut'
-Yo…
-M'sieur-dame… esquissa Kenneth.
-Chouette matinée, hm ? Le fond de l'air est frais ! plaisanta Etienne.
Estelle et Jonathan se regardèrent.
-S'il était embarrassé il se mettrait à fantasmer sur une miss météo ou à évoquer du matériel d'entretien hygiénique intime !
Kenneth ricana. Etienne le regarda.
-Pourquoi serais-je embarrassé ?! s'étonna Etienne. Ils vont juste ensemble à la faculté, ce n'est pas comme si d'un coup ils formaient un vrai couple !
Silence gêné. Kenneth renifla quelque peu.
-Estelle tu ne t'es pas parfumée ce matin…
-Non, j'ai pas eu le temps après la douche !
Le visage d'Etienne se déforma, gagné par la révélation implicite.
-OH MON DIEU JE VAIS LE TUER !!!!
Estelle et Jonathan se mirent à courir comme des gamins jusqu'à la faculté alors que Kenneth le retenait par le bras.
-T'es inénarrable !!! grogna Kenneth.
-Ils ont… Ils… Arceus tout puissant !!
-Ta sœur à 35 ans, Etienne, ce n'est plus une gamine…
-Mais c'est ma sœur !!! Tu peux pas comprendre toi, t'as qu'un frère boche à moitié homo !
-… comme je n'ai pas hâte que tu t'attaques à mon arbre généalogique détaillé…
-Y'aurait trop de travail, toutes ces coucheries, j'ai pas que ça à foutre !
-T'es de super bonne humeur toi aujourd'hui…
-Hmph… Ca devient…
Kenneth regarda Etienne, surpris. Les deux entrèrent dans la faculté sous les huées des grévistes.
-Vos gueules… grommela Etienne, repris par Kenneth.
-Tu sais mieux que personne qu'il ne vaut mieux pas emmerder ces types là !!
-Ca va, aucun d'eux n'a de flingue !
-Pour le moment !

Gisèle arriva peu après Judith.
-Un piquet de grève, et puis quoi encore !
Judith soupira.
-Vous allez travailler aujourd'hui ?
-Mais je travaille !
-Hier vous avez rangé les dossiers… par ordre alphabétique !
-C'est nettement plus pratique ! Et je ne vous pose pas de questions sur votre ridicule amourette avec le conseiller principal d'Education !
-Tant mieux vu que ça ne vous regarde absolument pas !

Estelle savait que son plan devait être parfait. Aucune bavure ne lui serait permise. Elle n'aurait pas droit à trente essais. Si elle voulait vraiment faire payer à Antoine cet affront, elle devait y mettre le paquet. Absence totale de remords, de laxisme, de doutes de la part d'autrui. Estelle contre Antoine, c'est tout ce qu'elle devait garder en tête. Peu importe les dommages autour, rien à foutre des dommages autour. Elle contre lui.
Etape 2 : Ne rien laisser présager.

-Antoine !
Il se retourna vers Estelle et sourit.
-Oh ! Ma petite colombe en sucre !
-*Ahem* oui, euh… J'ai apporté des gâteaux pour toi et des Poképains pour Galopa ! Faits avec des baies Tamato !
Antoine sourit.
-Merci… C'est très gentil…
Estelle sourit.
-J'ai décidé d'être gentille, après tout il n'y a aucune raison de se faire la guerre.
-Exactement ! D'autant que toi et moi, nos destins sont liés d'une manière ou d'une autre !
Estelle sourit sans sincérité. Elle posa les plats sur une souche. Rupert arriva.
-Je vois que l'entente règne à nouveau ! Excellent ! Bien, comment va ma chère Galopa ?
Le Pokémon hennit joyeusement. Antoine lui caressa le museau.
-Très bien, monsieur Hanson ! D'ailleurs, J'ai très justement préparé ces gâteaux pour votre Galopa, afin qu'elle ne manque de rien !
Estelle soupira alors qu'Antoine souriait. « Laisse-moi tirer bénéfice de ça ! »
Estelle se résigna.
-En effet, Antoine, ils ont l'air délicieux… marmonna Estelle, voyant qu'Antoine s'appropriait le mérite de ses douceurs.
-Magnifique, Antoine ! Je savais que je pouvais te faire confiance pour t'occuper de Galopa de la sorte !
Estelle hocha la tête. Antoine sourit, fier de lui. Rupert observa sa Galopa et la caressa.
-Eh bien, Antoine, tu t'en occupes comme un chef ! Je laisse ce Pokémon sous ton unique et entière responsabilité. Ne t'en déplaise, Estelle…
-Ce n'est rien, admit calmement la jeune femme. « Rien du tout, je vous assure… »

-A tout à l'heure…
Jonathan embrassa tendrement Estelle avant qu'elle n'aille travailler. En chemin, le regard enjoué de la sœur d'Etienne se décomposa légèrement.

Etienne arriva dans sa salle ou les quatre étudiants semblaient calmes et studieux.
-Oh-ho-ho… Vous, vous avez quelque chose à me demander…
Sadia, Jules, Penny et Andrew s'étonnèrent. Etienne regarda ses quatre étudiants.
-Même pas ?! Comme c'est étrange… Que signifient ces mines abattues ?! Quels sont les problèmes de la semaine ?
-Non ça va… s'étonna Sadia.
-L'effet vendredi, on attend le week-end avec impatience ! sourit Jules.
-Il y a une grève, nous pensions que vous en étiez, déception immense… marmonna Andrew.
-… Rien… marmonna Penny en regardant Andrew, furieuse.
-Génial… En conséquence, examinons les cas à traiter du jour et expédions ça…
-Au fait, Mr Smirnoff, vous ne nous aviez pas dit que vous aviez écrit un livre ! s'exclama Jules.
Etienne s'étonna.
-Il est sorti ?!
-Je pensais que vous le saviez ! Je compte me l'acheter en sortant de cours tout à l'heure ! Vous me le dédicacerez ?!
Etienne, Andrew, Sadia et Penny regardèrent Jules avec la même tête lassée.
-Quoi ?!

Antoine de Beaufort…
…avait franchi le piquet de grève sans qu'aucune huée ne vienne l'inquiéter. Il se dirigea avec calme et prestance vers sa salle d'histoire dans la vague agitation du hall d'accueil. Il se tint devant la porte menant à l'amphithéâtre avec un sourire béat. Il prit une Pokéball et lâcha Roigada.
-Cher ami… Allez chercher notre invitée, ramenez-la avec tous les honneurs dus à une dame de son envergure. Aujourd'hui est le grand jour, pour elle comme pour moi. Le jour… où elle va enfin être jugée pour ses crimes contre mon illustre personne…
Roigada partit dans les couloirs. Antoine souriait toujours avec cet air niais.
-Les salopes paient toujours…
Il entra dans sa salle ou les deuxièmes années de Stratégie l'attendaient. Seulement, bon, cette fois son retard pouvait se justifier par le piquet de grève. Antoine s'installa à son micro.
-FOUTEZ LE CAMP.
Hannah resta abasourdie par ce cri. Samuel plissa les yeux, intrigué. Ludovic regarda Antoine, surpris. Karen et ses copines s'avérèrent stupéfaites. Dylan et son groupe se regardaient, interdits.
-JE VOUS AI DEMANDE DE SORTIR DE CETTE SALLE !
Les élèves se dirigèrent calmement vers la sortie. Un élève se dirigea vers le pupitre.
-M'sieur, et la conférence de la championne de l'ar…
-SORTEZ !
L'élève couina et sortit. Dans le couloir, les élèves de deuxième année s'interrogeaient.
-C'est moi ou il est toqué ce prof ?! s'étonna Samuel.
-Laisse, je crois que c'est pas cette année qu'on brillera en histoire ! soupira Hannah. Je me demande ce qui est passé par la tête de Mr de Beaufort cette fois… D'habitude c'est lui qui sort, pas nous !
-CA SUFFIT, Y'EN A MARRE !!!
Tout le monde observa Karen qui se mit debout sur un rebord ou d'habitude les gens s'asseyaient.
-Je propose qu'on aille tous voir le proviseur pour se plaindre ! Ca suffit quoi !! D'abord il se casse, maintenant ça… Ca va être quoi après ?!
Les autres élèves semblaient à moitié d'accord. Dylan soupira.
-Ca sert à rien… On ferait plutôt mieux de rentrer chez nous, c'est le seul de nos profs qui ne faisait pas grève !
-Ouais… Je propose aussi qu'on rentre ! admit Shahrukh.
-DEUXIEME ANNEES !
Le proviseur apparut au bout du couloir.
-Bon sang, mais que faites-vous ici ?!! Vous n'êtes pas censés avoir cours ?! Vous ne trouvez pas que la situation est assez chaotique comme ça ?!
-AH ! MONSIEUR LE PROVISEUR !!! grommela une Karen irritée en s'avançant vers Linus.

Roigada atteignit le secrétariat rapidement. Il regarda Estelle dont le regard prit une teinte sombre. Eddy s'étonna.
-Que fait un Roigada ici ?!
Estelle se leva, mue par la volonté du Pokémon. Lequel partit dans les couloirs, suivi par la jeune femme.
-E… Estelle ?!!
Lentement mais surement, Estelle et Roigada partirent du couloir de l'administration, Estelle ayant perdu toute volonté. Eddy hésitait à la retenir, intrigué par ce spectacle.
Une seule personne remarqua le Roigada et la secrétaire.
Il s'agissait de Norbert Finsbury. Il vit d'abord Roigada. Puis Estelle. Il sortit de son bureau alors que les deux passaient la porte séparant l'administration de la passerelle entre les jardins et la faculté en elle-même.
-Mademoiselle Smirnoff ?!
Pas de réponse. Marche prompte et directe vers la salle d'Histoire. Norbert ne sait que faire. Il se dirige vers le bureau de Linus, mais celui-ci est de sortie.

Devait-elle avoir pitié de son adversaire ? Devait-elle le voir comme un être humain ? NON. Rien à foutre. Quoi qu'elle doive poser en sacrifice, Estelle se vengerait des affronts causés par Antoine de Beaufort. Elle arrivait difficilement à faire comme si elle n'avait rien préparé en voyant sa sale face niaise et ridicule. Quant au prof, ce n'était qu'un élément basique du plan. Non, même pas, ce n'était rien du tout. S'il devait voler en éclats, la vengeance n'en souffrirait pas.
Etape 3 : Tout mettre en place.

Les épices contenues dans les pains d'Estelle donnés à Galopa rendirent cette dernière toute folle. Toute excitée. Si bien qu'Antoine avait du mal à la tenir à la bride lors de leur habituelle promenade.
Estelle et Rupert étaient près d'une falaise en train de préparer des baies.
-Je crois que je vais te laisser t'occuper de Galopa à l'avenir.
Estelle s'étonna.
-J'ai réalisé… que ce n'était pas de ta faute, que c'était juste un accident, tout ça. Tu n'as vraiment pas à en pâtir. Antoine est très doué pour l'élevage mais j'ai bien conscience que sa préoccupation principale c'est le combat…
Les gâteaux qu'Estelle avaient fournis à Antoine contenaient une dose réduite de somnifères. Ainsi, le Pokémon était très excité, tandis qu'Antoine était comme sous calmants.
Et que se passe t-il lorsque quelqu'un de très excité est mis en présence de quelqu'un sous calmants ?
Ce genre de choses…
-Qu'est-ce qu'on entend ?!
Estelle se tourna vers les fourrés. La forêt et le sol tremblaient.
-Nom d'un…
-Mais que…
Galopa sortit des fourrés, furieuse, fonçant droit devant. Rupert se leva, étonné. Antoine, tenant le Pokémon par la bride, était trainé, mais lâcha rapidement. Et heureusement pour lui car le Pokémon sauta droit dans le vide offert face à lui.
-GALOPA NON !!!!
Le Pokémon cheval chuta droit dans le précipice. Rupert resta ébahi. Antoine, à terre et couvert d'éraflures de ronces, était abasourdi. Estelle resta muette de stupeur.
-GALOPA !!!! OH SEIGNEUR ! GALOPA !!!!
Le professeur se pencha par-dessus la falaise. Antoine se releva.
-Oh… Je… J'ignore ce qui s'est passé !! Elle…
Rupert Hanson se releva et se tourna vers Antoine.
-ELLE ETAIT SOUS TA RESPONSABILITE !
-N… Je… J'ignore ce qui…
-COMMENT AS-TU PU LA LAISSER PARTIR COMME CA ??? TU TE RENDS COMPTE QU'ELLE EST MORTE ET QUE C'EST TA FAUTE !!!! MAIS QUEL IMMONDE CRETIN TU FAIS !!! SEIGNEUR DIEU !!! OH… OH BON SANG !!!
Antoine était éberlué. Il regarda Estelle qui était en larmes.
-Comment t'as pu faire une chose pareille ! s'écria t-elle, attristée.
-M… Mais… C'était un accident !!
-TU PLAISANTES ??? UN ACCIDENT ??? TU LA TENAIS !!! TU AURAIS PU LA RETENIR !!!
-Pardon monsieur !! Je…
Rupert, fou de rage et de tristesse, gifla Antoine qui s'approchait pour demander pardon.
-Je te colle un rapport aux fesses, jeune homme ! Tes excuses, tu peux te les garder !! TU AS TUE MON POKEMON LE PLUS CHER !!!!
Antoine resta abasourdi pendant que Rupert sortait son téléphone spécial.

-Jeune homme, vous êtes interdit de passer votre examen. Interdiction également de passer quelque concours ou agrégation. C'est la peine encourue pour toute exclusion ordonnée par le professeur.
Antoine soupira tristement alors que le dirigeant de la commission statuait sur son cas. L'adolescent sortit et fondit en larmes. Relevant la tête il aperçut Estelle.
-E… Estelle, tu es venue !
La jeune femme sourit.
-Tu n'as eu que ce que tu mérites, n'est-ce pas ?
Antoine regarda Estelle, surpris.
-Qu… Quoi ?!
Estelle eut un sourire méchant.
-Mais qu'est-ce que tu croyais ? Ce que tu m'as fait, ce que tu as osé penser à mon propos, ce que tu as osé… imaginer à mon sujet, ton attitude dégoutante à mon égard… Enfin Antoine, tu m'as quand même fait passer pour une empoisonneuse !!
-… et tu as été jusqu'à tuer un Galopa…
-MAIS QUELLE ATTITUDE TU CROIS QUE LES GENS DOIVENT AVOIR FACE A UN TYPE COMME TOI !!!!
Antoine resta sonné.
-Tu es insupportable, lourdingue, borné, têtu comme une mule, manipulateur, irritant, machiavélique !! Il n'y a rien de bon à tirer de toi ! Cette insupportable impression que tu donnes de toujours t'en sortir dans tes sales coups… Pour une fois j'ai été plus forte que toi. J'ai été très loin, je n'ai pas la conscience très tranquille, mais au moins… Ce sentiment libérateur que j'ai de t'avoir collé une branlée…
Elle sembla chercher ses mots.
-C'est une insondable jouissance !!! Adieu, connard !
Antoine gronda intérieurement. Son visage se crispa sous la colère.
-Jeune homme, qu'est-ce que vous faites là…
Antoine marcha d'un pas lourd vers la sortie de la commission, l'air absolument révulsé par toute chose humaine.

Estelle et Roigada arrivèrent près de la salle d'histoire, ou Karen et Linus étaient en train d'argumenter.
-Vous avez quand même conscience que ce type n'est presque jamais là pour nous faire cours ?!
-Eh bien s'il n'y a que ça je vais aller le sermonner !! D'abord il n'a pas à vous lâcher avant l'heure comme ça…
Linus s'approcha de la porte mais Roigada le repoussa d'une Psyko.
-AOUCH ! Mais qu'est-ce que… Mademoiselle Smirnoff ?!!
Les élèves s'étonnèrent. Le Roigada ouvrit la porte. Estelle s'avança et entra. Roigada s'avança à son tour et ferma derrière lui.
-Grands dieux… Mademoiselle Smirnoff !!!
Linus se releva et tenta d'ouvrir la porte sans succès.
-Nom d'un… Allez prévenir Mr Ludges immédiatement !!
Les élèves regardèrent le proviseur, ahuris.

Antoine regarda Estelle, heureux. La jeune femme reprit ses esprits.
-Hein… Oh non ! Oh…
-Comme on se retrouve… pétasse ! Je n'espérais pas que tu te pointerais ici malgré ma très claire menace ! Qu'est-ce qui a pu te forcer à venir…
Estelle se tourna vers Roigada.
-Entrave…
-Ah oui ! Mon Roigada est venu te chercher…
Antoine se saisit d'un talkie-walkie.
-Que la fête… Commence ! Dooms ! C'est bon, la pièce est en place !

Explosion.
L'explosion surprit tout le monde dans l'établissement.
Elle surprit Norbert qui se trouvait dans le couloir de l'administration et qui allait vers le bureau d'Eddy.
Elle surprit Gisèle, seule dans son bureau, en train de chercher son nom sur Google.
Elle surprit Linus qui était dos au mur, étonné, dans le couloir près de la salle d'histoire, à côté des élèves de 2ème année.
Elle surprit Etienne, dans sa salle avec ses quatre étudiants.
Elle surprit Kenneth et Judith qui s'embrassaient dans le bureau du premier.
Elle surprit Jonathan Ludges qui sortait des croissants de son Motisma muté en four pour les offrir à Estelle.

Les professeurs rentrèrent, accompagnés par des dresseurs mercenaires, engagés pour l'occasion.
-On y va, les gars. Foutez le bordel, ne tuez personne, causez juste la panique. Si possible, coincez des élèves dans des coins et retenez-les.
Gary Mc Cage se retourna vers les profs.
-C'est la guerre !!

Etienne et ses élèves sortirent de leur salle.
-Bon sang…
-Monsieur ?!
Etienne plissa les yeux.
-Les grévistes… Ne sont pas des grévistes mais des terroristes !
-Ce sont des profs comme les autres… marmonna Andrew.
-Donc de potentiels terroristes !
Sadia fit une tête étonnée.
-Hier à peine, De Beaufort parlait avec les profs… D'où la mutation ! Tels les Tortues-Ninjas, les profs sont devenus des tortues qui ne voient la vitesse que dans les coups et les explosions !
-Jolie métaphore… on fait quoi ?! s'étonna Jules.
-Séparation ! Voyez où vous pouvez être utiles.
Sadia s'offusqua.
-N'importe quel prof sensé demanderait à ses élèves d'évacuer !!
-Qui vous a dit que vous étiez avec un prof sensé !? Bon, ma sœur est en danger de mort ou au pire de viol. Je vais donc faire ce que tout frère prévenant ferait…
Etienne sortit son portable et composa un numéro.
-…Dans une situation pareille… Allo-Hello, Allan !

Le chef du club Diogène observait un entrainement entre Bob et Joséphine.
-Hey, Smirnoff le fou ! Comment va ? Toujours dans ton école de petits fous-filous ?!

-Oublie le catho hystérique des Simpson, pour la dernière fois, son cœur est et restera avec Maud !!

-You're not Funny aujourd'hui, Etienne ! Que se passe t-il dans ta fabrique d'adultes conscients du monde qui les entoure ?!

-Tu pourrais utiliser ton armée d'hommes, de femmes et d'hommes-femmes bizarres avec de la moustache pour empêcher la police d'accéder à la faculté sous peu ? Ma sœur pourrait mourir et… Comment dire, cent-trente trisomiques en uniforme, ça peut faire des bavures, et je ne voudrais pas… Enfin tu comprends !

-Absolument, Génie du crime en culottes courtes ! Bloquer la police, on adore… Pas gratuitement !

-Très bien, tu auras mon livre dédicacé ! J'y parle de toi en plus !

Allan fit une mine surprise voire intriguée.
-…ça… marche comme sur du savon noir !

-Super ! Merci par avance !

-Sois prudent, Smirnoff le fou…
Allan ferma son portable.
-Ok les gars, j'ai une mission pour vous… Ca va être archi-mechi-mecha-z'excitaaaant ! La récompense de ce forfait sera… Un bouquin !

-Très bien ! J'ai exclu les flics de mon affaire personnelle !
-Bravo… Doit-on vous applaudir ou vous frapper ?! soupira Andrew, énervé.
-Oh ça va hein… Vous êtes étudiants, et en tant qu'étudiants vous êtes censés protéger votre établissement !
-On n'est pas dans Harry Potter ! grommela Sadia.
-Vous lisez ça vous ?! Avec toutes ces références à la sorcellerie ?!
Sadia leva les yeux au ciel. Penny s'étonna.
-Vous voulez qu'on…
-Dispersez-vous et aidez les gens ! C'est la panique, là ! Allez, hop-hop-hop !!
Les étudiants se dispersèrent. Etienne descendit en direction des couloirs et notamment de la salle d'histoire.
« Estelle… J'arrive !!! »

-Eddy !!
-Norbert, viens, on s'enfuit par là !!!
-S'enfuir ?! Mais enfin…
-CA VIENT D'EXPLOSER ! J'ai pas envie de me retrouver shooté par quelqu'un !!! Pas ici ! Viens !
Norbert s'étonna.
-Mais… Linus… Etienne…
Eddy prit la main de Norbert et le tira vers lui.
-Et moi alors ?!
Norbert plissa les yeux.
-Fais pas ta chochotte, Eddy !! Si la fac est attaquée, on doit rester et la défendre !!
-J'ai peur !! Tu peux comprendre, ça ?!
-Oui… Oui mais…
Un regard fut plus éloquent que toutes les explications. Norbert aida Eddy à descendre. Une fois hors des bureaux, le couple aperçut un professeur qui les observa, menaçant.
-Messieurs…
Norbert s'étonna.
-Monsieur Santi ?!! Qu'est-ce que cela signifie ?!!
-C'est qui ?!
-Un prof… Il est professeur de techniques de combat pour les troisièmes années de stratégie !
Le prof observa les deux hommes. La façon dont ils se tenaient…
-Je vois… Et où vous comptiez aller ?!
Eddy frissonnait. Norbert garda la tête froide.
-Euh… On comptait… partir tranquilles !
-Je peux pas vous laisser faire ça, monsieur le doyen… On a besoin de vous pour annuler les suppressions de poste.
-Quelles suppressions de poste ?!
-Vous allez changer les programmes. Huit postes vont être supprimés. Je refuse de partir de cet établissement. Il en va de ma réputation.
-Il en va aussi de votre réputation de faire sauter un établissement scolaire pour avoir des droits ?! toisa Norbert.
Santi sourit.
-C'est vous qui faites l'homme et c'est lui qui mord l'oreiller, c'est ça ?!
-Je vous défends de…
-Je serais vous, je me la jouerais moins, Finsbury.
-… Eh bien, comment dire… COURS !!!
Norbert et Eddy partirent rapidement dans un coin. Une fois sur le parking, ils furent bloqués par un tremblement de terre qui les fit trébucher. Norbert aperçut un Tyranocif au milieu des voitures. Santi regarda ses victimes et ricana.
-J'aime jouer… Vous aimez jouer ? Avec autre chose que du latex, ça va de soi !
Norbert regarda le professeur, furieux.

Un Staross traversa le couloir en tournoyant. Une fois devant la porte de la salle d'histoire, il activa ses boucliers. Linus s'étonna.
-Nom d'un…
Un type arriva sur un Tortank en pleine charge. L'homme sortit un Aligatueur, un Hypnomade et un Alakazam. Linus resta abasourdi.
-Par le peuple irlandais !! Monsieur Leonhardt ?
-Hello, proviseur ! Activation du Verrou Aquatique !!
Tortank et Aligatueur lâchèrent des trombes d'eau. Alakazam et Hypnomade modelèrent cette eau avec leurs pouvoirs psychiques. Elle se limita dans le but de bloquer l'accès à la porte et aux autres couloirs.
-NOM D'UN… RELACHEZ CETTE JEUNE FEMME !!!
Leonhardt était dans une bulle avec ses Pokémon psychiques. Il haussa les épaules et regarda le proviseur avec un air malicieux. De l'autre côté du couloir, les élèves de 2ème année semblaient inquiets.
-Oh seigneur noooon !!! Quelle situation… FOLLE !!! Vous serez licencié, Leonhardt !
-Vous savez faire que ça, hein ?! Licencier ?!
Linus se retourna vers Gary Mc Cage.
-Vous et moi…. On va discuter, sombre merdasse.
Linus grimaça.
-PAR-DON ??? REPETEZ CA ?!
-Je vais te casser la gueule, petite merde. Ton règne ici en tant que machine à détruire des vies de braves professeurs est TERMINE !
-Ooooh mais rassurez-vous ! La délation c'est très moche d'après les documentaires sur la seconde guerre mondiale, mais je suis persuadé que quelqu'un trouvera les foies d'appeler la police !!
Mc Cage sourit.
-Pas sur…

Jonathan vit le bureau vide d'Estelle. Son sang ne fit qu'un tour. Il courut à travers les couloirs.
-ESTELLE ?! ESTELLE !!!
Il atteignit le hall d'entrée de la fac. La façade en était complètement explosée.
-Putaiiiiin…
Il avança doucement et se heurta à un mec qui descendait.
-T'PEUX PAS FAIRE ATTEN…
Jonathan regarda Etienne, abasourdi.
-Toi ?!
-Toi ?! Je dois retrouver Estelle !! grogna Etienne.
-Moi aussi figure-toi !!
-Non, toi tu restes dans ton bureau à barboter, c'est encore ce que tu as de mieux à…
Jonathan attrapa le visage d'Etienne.
-Les petites têtes qu'ont de la barbe et qui parlent trop, je les connais, crois moi ! Je DOIS retrouver Estelle ! Alors tes conneries tu les gardes pour tes mioches !!
-C'est boooon c'est bon tu vas jouer les héros auprès de ma sœur ! Pas la peine de criser !!
Un cri de dragon les fit sursauter. Face à eux, un grand type aux cheveux hirsutes.
-Adorable… Un grand crétin en veste et un abruti nain en manteau de cuir !
Jonathan et Etienne virent l'homme sur le dos d'un Drattak, entouré par un Dracaufeu et un Carchacrok.
-Joshua Dooms ?! s'étonna Jonathan.
-Tu le connais ?! T'es si louche, ça m'étonnerait même pas !
-Ouais je le connais, pauvre crétin, je travaille ici, moi !
-Moi aussi j'bosse ici !! grommela Etienne.
-Oui mais moi je fais pas semblant !
-… crétin…
Dooms sourit.
-J'ai pour ordre d'attaquer quiconque passera par ici. Vous êtes passés par ici… Il y a des gens qui courent partout… Mais vous vous êtes arrêtés !
-Nan, j'me suis heurté à cet enfoiré !
-Et lui il se tape ma sœur, c'est tout !
Jonathan fronça les sourcils et frappa Etienne.
-Parle pas d'elle comme ça ou je t'explose !!!
-Moi je fais que parler, toi tu agis, c'est pire !
-Couillon…
-Merdeux…
Drattak cracha un Ultralaser qui brisa une baie vitrée derrière Jonathan et Etienne.
-Je suis professeur de combat direct pour la section médecine ! Les médecins ont besoin de savoir combattre, n'est-ce pas ?! Moi j'apprends aux élèves à lutter pour protéger les leurs. Et on veut supprimer mon poste !!
-Grave ! C'est nul, prof de combat direct pour un médecin !! grogna Etienne.
-T'es d'un conciliant, putain… On se sent en sécurité avec toi… soupira Jonathan.
Etienne regarda Jonathan, embarrassé.
« Linda m'a dit ça… la dernière fois… qu'on s'est retrouvés en danger… »
Dooms sourit.
-Notre combat sera âpre et sans fin… Je sens ça !!

Kenneth et Judith sortirent de sous le bureau.
-Y'a plus rien qui saute ?!
-Nan… sourit Kenneth. Fini les explosions !
-Je suis morte de trouille !!
Kenneth embrassa sa promise qui lui répondit avec joie.
-Je suis là. Ne t'inquiète pas.
Judith hocha la tête.
-On sort et on va voir ce qui s'est passé ? demanda Kenneth.
-Je sais pas trop… C'est peut-être dangereux ?!
-Mais non…
Kenny sortit le premier.
-La voie semble libre, poussin…
Kenneth se retourna et vit un type qui tenait Judith.
-K… Kenny !!!
Le CPE garda les yeux grands écarquillés.
-J… J…
Le type recula dans le couloir face à un Kenneth apeuré, mais froid, calme, le visage apaisé.
-Kenny !!
-Eh bien… « Kenny », c'est une bien jolie poulette ! Je savais que dans l'administration il y en avait de jolies comme celles là…
Kenneth resta impassible.
« Purée… pourquoi je n'arrive pas à avoir peur ?! »
Il observa Judith, morte de trouille, au bord des larmes.
Il se regarda ensuite, serein. Froidement serein.
« Je… Je suis incapable de la protéger… d'avoir peur pour elle… Purée !!! »