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Chroniques du Pokédex - Le souffle de Drad



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Informations

» Auteur : Drad - Voir le profil
» Créé le 25/11/2014 à 20:42
» Dernière mise à jour le 27/11/2014 à 17:34

» Mots-clés :   Action   Aventure   Hoenn   Organisation criminelle

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Chapitre 6 - Le jour nouveau
Le calme précéda la tempête.

L'agonie, le cataclysme ; le temps passa, de l'eau coula dans les plaines. La vie, précieusement, reprit. Des fleurs éclosirent, des arbres se fournirent ; d'un terrain fertile et cendré émana un courage, un nouvel espoir. Quelques êtres, plus petits, qui s'étaient abrité, qui avaient eu de la chance – ceux-là ressortirent d'entre les herbes, et découvrirent le monde, qui se remplit. Dans un fouillis de poils épais, un Cochignon sua, et donna naissance à des Marcacrin, qui apprirent à renifler le sol. L'équilibre devait être certain.

Pendant de longs temps, les vents, les feuillages, les mers, la terre purent s'épanouir, frétiller dans des effusions colorées ; les sens à fleur de peaux rebattirent de leur plein, au gré de la brusque, hasardeuse évolution.

D'où l'imprévisible. Il y eut une divergence.

Cela se passa aussi légèrement qu'une bourrasque. Une branche se brisa ; ses nutriments provenant des racines, enfouies dans la Terre, ne lui parvinrent plus. Elle perdit sa puissance. Elle resta là, pendue, attachée par quelques fibres d'un bois vert. Naquirent des soucis. Un troupeau de Mammochon passa à côté ; quelques-uns, en relevant leur tête bossue, ne virent pas le bout brisé, et se le prirent – sans qu'il n'y eut de dégâts, ou que la gêne ne dure. Ce n'était qu'un bâton cassé. Mais, au sein du troupeau, cela perturba l'élan originel.

Malgré tout, la vie poursuivit sur sa lancée. L'arbre continua sa croissance, peu lui importait un rameau boiteux. Il donna de ravissantes fleurs roses, et de magnifiques fruits rouges, qui donnèrent, par dissémination, une forêt – des forêts. Les continents vivaient de nouveau, en harmonie avec les océans, unies par des profondeurs écumantes d'énergie.

Le développement suivait son cours sur ce globe ; la planète respirait par tous ces pores, exsudant l'espoir versicolore, et tournait insensiblement, dans le néant galactique.


***

On avait empoigné le Professeur Hellébore, et on l'avait traîné plus loin. On avait laissé Oniglali où il était tombé ; affaiblit comme il était, agonisant sur le sol, on n'en avait pas à craindre grand-chose. Et on avait plus important à faire. Les deux derniers golems, par exemple.

Dans cet habitacle sombre, éclairé par des néons vacillants, avait été entreposé, au beau milieu, une statue de glace ; Hellébore, si mal en point qu'il était, n'eut ni la force ni le besoin de sortir le Pokédex pour s'assurer qu'il s'agissait là du troisième golem. Sa froideur bleuté et ses sept pierres jaunes, disposées en croix, émettaient des bruits aigus et grinçants. Regice ne bougeait pas, ou plutôt ne pouvait pas. Emprisonné par une armature qui lui serrait ses pattes de sérac, son corps d'iceberg, il ressemblait à un gros glaçon pris dans une toile de Migalos. C'est pour cette raison que Regirock et Registeel avaient bondi ; maintenant, ça lui semblait évident, d'utiliser Regice comme appât. Peut-être aussi un peu par surprise, Pic Rocheux et Fer s'étaient fait ainsi capturés, de la même manière, immobilisés par ce dispositif complexe, noir comme la mort, et éminemment cruel pour le jeune Professeur. Ils ne cherchaient plus à s'en défaire ; ils avaient essayé, au début, mais, vu la situation, ils calculèrent rapidement qu'ils ne parviendraient pas à s'en sortir. Ils cessèrent très vite toute action, et le Pokémon Iceberg se tut aussi.

Freddy avait quitté la salle de commandement et s'était rendu dans cette soute arrière pour accueillir Lydie. La jeune femme laissa ses confrères s'assurer que les trois golems étaient neutralisés, contourna ces problèmes de manutention et gravit les quelques marches qui menaient au leader. Il lui lança quelque mots, et elle osa le couper, parler d'un bloc de glace tombé du ciel, prit sur le coin de la gueule ; elle rétorqua qu'elle se fichait pas mal de leurs ennuis avec Regice, et elle lui tendit la sacoche sans plus d'explications. Oh, si, elle félicita gauchement le succès de leur entreprise, et sans que Freddy ne daigne lui répondre, celui-ci retourna à ses occupations, la sacoche sous le bras. On ordonna à la jeune femme de s'occuper du "gars", et on débarrassa le plancher, en laissant seuls un Pokémon mal en point, deux humains, et trois golems.

L'affrontement entre les deux jeunes spécimens avait détruit l'un physiquement. Encore une fois dans cette journée, l'action s'était déroulée vite, trop vite ; la Team Anima avait agit avec une organisation efficace, sans discours ni perte de temps, sans s'assurer précipitamment de leur victoire ni se vanter d'avoir mis la main sur ses légendes. Lorsque la jeune femme fut laissée seule, une fois de plus, elle redescendit jusqu'au jeune homme d'un pas lent, marche après marche. Elle menotta Basile à ne des entrailles de l'aéronef, en prenant soin d'entraver ses deux bras. Hellébore gémit sous la douleur particulièrement aiguë qu'il éprouva à son bras blessé, et la regarda avec un œil abattu.

– Hmpf. A cause de vous, je ne pourrais plus dessiner.

– La ferme.

– Lydie...

– J'ai dit : la ferme.

Les cliquetis qui secouaient ses mains cessèrent. Lydie en avait fini rapidement. Basile regarda ses yeux ternes, sa joue pâle, sa mèche de cheveux tombante, et la fente que leur accident y avait creusé.

– Tu ne vas pas me dire que ce que vous faites à ces Pokémon est défendable ?

– Ça l'est. Tu ne sais pas ce que nous comptons faire d'eux.

– Je m'en fous. Tout ce que je vois, ce sont des prisonniers, des terroristes, et des mauvaises intentions.

– C'est bien le problème, pour les gens extérieurs. Vous ne comprenez rien.

Elle fit mine d'arranger les menottes, et vérifia machinalement si elles étaient bien serrées.

– Tu ne fais pas partie de la Team Anima.

– Non, mais cela ne m'empêche pas d-

– La ferme, Professeur, ou je vais devoir vous tuer.

Le mot résonna dans la soute. Il fit vibrer l'air sèchement, et corrompit l'atmosphère. Basile ne voulait pas croire le sérieux qu'affichait Lydie. Il repensa au gens qu'il avait croisé, pendant son voyage, pendant la journée, et le soir ; tant de gens, et qui aurait cru qu'elle... Il balbutia :

– Sur le bateau... Je ne peux pas croire que la fille... Qui m'a rendu mon encyclopédie...

– Il faut savoir séparer la vie privée et le boulot.

– On n'a qu'une vie, répliqua-t-il. Vous ne pouvez pas la foutre en l'air sans aucune raison.

– J'ai des raisons, et elles ne vous concernent pas. Freddy sait ce qu'il fait, il..

– Qu'il y a-t-il dans ma sacoche ?

– Quelque chose de primordial pour la suite, répondit-elle professionnellement.

– Oui, mais quoi ?

– J'en sais rien. Freddy ne nous a rien précisé.

– Freddy, Freddy... Donc vous, vous ne savez même pas ce que vous faites ?

Elle qui avait affiché un certain calme jusqu'ici, elle explosa :

– SI ! JE ME BATS POUR LA VIE ! C'EST UNE BONNE CAUSE, BORDEL !

– Ah oui ?! Et séquestrer ces Pokémon, récrimina Basile, c'est une bonne chose, peut-être ?!

Il y eut un bref silence.

– C'est un mal nécessaire, sortit la jeune femme.

– Un mal nécessaire !

Basile, qui s'était exclamé ça en ne comprenant pas comment des êtres humains pouvaient débiter de telles sottises, secoua la tête ; il regardait les golems, leur impassibilité. La jeune femme au sweat blanc avait les yeux plantés dans le vide durant ce laps de temps. "Un mal nécessaire", répéta le jeune homme ; ses cheveux, trempés de sueur et salis par les dernières heures, tombaient en bataille sur son front ; "un mal nécessaire", murmura-t-il à nouveau. Un coin de ses lèvres s'était levé par sarcasme.

– Je comprends pourquoi vous n'avez jamais eu de Pokémon, souffla-t-il.

Ce fut la phrase de trop. Figée par la colère, elle le gifla. Il voyait les prunelles de la jeune femme se mouiller ; il remarqua qu'elle avait les yeux verts. Elle serra les dents, et, rageuse, elle le prévint :

– Arrêtez ça, Professeur. Arrêtez ça.

– Je dédie ma vie aux Pokémon, rétorqua-t-il en affrontant son regard. Je ne pourrai jamais arrêter tant que je ne vous aurai pas fait voir la vérité en face.

– Je la connais, la vérité. Une histoire de connards.

– Parce que vous faites tout pour.

Elle remarqua la haine qui brûlait dans les yeux du jeune homme. L'espace d'un instant, elle vit son reflet dans sa pupille noire. Elle se releva soudainement.

– Ça suffit.

Puis, elle tourna les talons, et, sans rien ajouter, monta les marches, et partit.


Il en était là.

Le jeune homme regardait les figures monolithiques de roche, de glace, et de métal. Ils n'avaient pas l'air de réagir de quelque manière que ce soit, depuis tout ce temps. Immobiles, ils se laissaient là, sans même essayer de se défaire de leurs attaches, sans faire aucun bruit, sans clignoter d'une manière étrange. Leur présence, calme, comme s'ils étaient soumis à la fatalité et n'attendait plus qu'elle les décapite, perturba le jeune Professeur.

– Désolé, Registeel... Regirock... Regice... Je... Je...

Il se tut. Il avait l'impression de parler dans le vide. Il parlait dans le vide. Personne ne l'entendait, depuis la soute. Toute force l'avait abandonné. Il se mit à avoir froid, à trembler. Il fut secoué d'un sanglot brutal ; des larmes brûlantes lui coulèrent sur les joues. Il haïssait cette foutue femme, cette soute, ces gens, cet aéronef – cet aéronef, qui volait, volait, vers un destin funeste ; rah, ce foutu engin ! Il aurait aimé le stopper par la volonté de toute son âme... Il voulait, voulait, voulait, et il fut secoué d'un nouveau sanglot ; les bras pendus au-dessus de sa tête, il expectora ses pleurs amers, qu'il essaya de ravaler. Il ne pouvait rien faire.

Un peu secoué par les perturbations du vol, un corps roula sur le sol. Basile releva la tête, et il vit Oniglali ; son crâne était fissuré. Un liquide translucide, bleu givre, en suintait, et brillait à la lumière artificielle. Un sentiment d'horreur emplit l'humain, qui éclata ; il hurla, à se rayer les cordes vocales. Révulsé par ce qu'ils avaient fait à son Pokémon, il se débattit comme un diable, ira sur ses chaînes, frappait le sol du pied, fulminait contre ses statues qui ne branlaient rien, ces sales sans-coeur, qui ne témoignaient aucune réaction. Cependant Face gelée avançait, péniblement, la figure grimacée par la douleur et la détermination, jusqu'à rejoindre les genoux de l'humain. Basile voulut le prendre dans ses bras d'une telle force ; il tira sur ses poignets, sciés par l'attache ; il voulait faire abstraction de ses maux pour réconforter son ami ; il voulait le toucher, au moins une dernière fois, mais n'y parvint pas.

Cette crise de démence épuisa ses dernières forces, celles du désespoir. En voyant son Pokémon se traîner, ne plus arriver à léviter, et cette fracture, ce liquide – il se culpabilisa atrocement, et se sentit condamné à assister à son échec. Un cauchemar horrible lui saisit le crâne. Il aurait fait sauter cet endroit, et lui avec, s'il avait pu arranger quoi que ce soit. Plus rien ne comptait, et il en venait à jurer contre l'humanité, contre l'existence – tant de souffrance, tant d'impuissance. Sa vision se brouilla ; il en sentait plus le sang dans son bras. L'impuissance. Il découvrit, au fond de lui, dans un subtil éclat de terreur, qu'il avait perdu quelque chose. Il tourna un regard paniqué vers les figures de roche, de glace, de métal. Lui, nous, eux – nos conflits. Comment tant de mal... Avait pu surgir d'un équilibre parfait ? Il n'y avait pour aboutissement... Que la destruction... Tant d'activité, vaine – la disparition des êtres les plus chers...

La condamnation.

Oniglali tomba.

Un frisson bouillant pénétra l'échine du jeune homme. Il se sentit défaillir.

Il y eut des gargouillis, des bips, des grondements, en concert.

La soute fut constellée d'étincelles géocosmiques.

L'humain fut aveuglé. Un souffle le révolutionna, et une brillance pharamineuse, multicolore, déflagra.
Il réapprit ce phénomène.
La Méga-Évolution.



Loin, en-dessous de ces idées élevées, sur la terre albâtre d'un cratère rempli d'eau de pluie, des enfants jouaient à la balle avec un Zigzaton. Ils étaient surveillés par l'œil sévère mais juste, bien qu'un peu myope, d'une vieille dame, qui reposait de temps à autre son roman sur ses genoux. Un Delcatty était couché à ses pieds, et profitait du plein air, du grand soleil de midi. La dame, en voyant son compagnon heureux, laissa quand même un petit sourire relever ses commissures serrées par les rides. Elle parcourut du regard les pentes escarpées de cette bouche surgie des eaux : ce granit blanc, ses villas aux toits plats, ces jardins émeraudes, en contre-bas... ce bout de civilisation, sous ce zénith, avait l'éclat d'une ville antique. Là-dehors, elle voyait encore la mer à perte de vue qui entourait le volcan endormi ; l'océan céruléen, aux reflets verts des mers du sud, qui tirait droit vers le profond saphir, cette entité liquide, gargantuesque, agitée de remous antédiluviens, abritait une telle perle de tranquillité, dans une coque de nacre. Elle se dit qu'Atalanopolis était une ville tout à fait charmante, et qu'elle avait peut-être eu tort de sermonner sa fille à propos de cet emménagement. Elle fut tirée de sa rêverie par une clameur, provenant des passants autour d'elle, et qui grossissait.

Des gens pointaient le ciel du doigt. L'attention se portait sur ce gros engin volant, noir, qui surplombait le cratère habité, et projetait son ombre au milieu du lac. Les nouveaux venus demandaient ce qu'il se passait, qu'elle était cette chose ; on racontait qu'elle était venue par les airs, mais qu'elle avait ralentit en arrivant au-dessus de la cité, pour finalement faire du sur-place, là-haut. On prétendait que cela faisait un quart, et d'autres à peine cinq minutes. Un des badauds qui assurait avoir été le premier à l'apercevoir essayait de convaincre le monde qu'il avait entendu un cou de feu ; d'autres, bien qu'il ne s'y connaissaient pas en ingénierie, prétextaient avoir entendu les moteurs agir étrangement. Quant à savoir ce que c'était, ils mettaient tous d'accord pour témoigner d'un aéronef noir ; le reste était sujet à plusieurs théories infondées.

Soudain, cet objet flottant explosa au niveau de la soute arrière. La foule cria. Des débris de rampe de chargement tombèrent dans le lac, de la fumée sortit de l'appareil, qui semblait à tous avoir été brusquement secoué sous le coup de la détonation. On s'exclama davantage lorsqu'on vit une boule d'un gris foncé, qui brillait à demi d'un éclat bleu givre, jaillir de l'engin ; les doigts levés redoublèrent, afin que les voisins voient bien de quoi l'on parlât. On demandait ce qu'était que cette créature, mais personne ne donnait de réponse précise, et tout le monde était occupé à garder ses yeux en l'air, rivés sur l'action. La boule fonça rapidement vers les flancs de l'aéronef, et, à la stupéfaction générale, déchargea un déluge phénoménal d'éclairs gelés. La puissance de l'attaque fut telle, et ses proportions si extraordinaires, que le gel mordant qui attaquait les moteurs se propagea sur un bon quart de l'engin, en formant une épaisse couche de glace.

On vit alors l'aéronef réagir, s'ébranler, et repartir soudain, reprendre de la vitesse ; mais la boule en lévitation ne le lâcha pas, et contourna cette carcasse noire sans interrompre son impressionnante capacité Glace. Elle voulait se sauver; on vit une personne en sweat blanc apparaître depuis les portes latérales, et sauter dans le vide ; quelques autres suivirent ; la moitié ouvrirent un parachute à temps. L'engin ne put s'échapper plus longtemps, alors qu'il prenait la glace de tout côté. Il y eut un tel déferlement de magie de la part du curieux Pokémon que, bien vite, tout l'aéronef fut enveloppé d'une coque de glace. Il s'alourdit, perdit de l'altitude, essaya une dernière fois de porter les moteurs au maximum, mais ne put lutter plus longtemps contre le givre surpuissant. Les pales des réacteurs peinèrent, jusqu'à l'arrête, et toute la machinerie d'urgence, frigorifiée, resta inopérante ; la chose se mit à chuter. On s'écria, on s'écarta, on paniqua, mais en quelques instants, l'engin congelé se rapprocha dangereusement du sol, avec ce son sourd et monumental qui fit vibrer les vitres ; il ombragea plusieurs terrasses, démolit une villa, et s'écrasa en pleine avenue, se fracassa en un furieux impact de roche, de glace et de métal.