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Chroniques du Pokédex - Le souffle de Drad



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Informations

» Auteur : Drad - Voir le profil
» Créé le 25/11/2014 à 20:05
» Dernière mise à jour le 18/02/2023 à 11:59

» Mots-clés :   Action   Aventure   Hoenn   Organisation criminelle

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Chapitre 1 - Le jour
Activité spontanée propre aux êtres organisés, qui se manifeste par les fonctions de nutrition et de reproduction, auxquelles s'ajoutent chez certains êtres les fonctions de relation.

- "Vie", Pokédex de Hoenn.


***

L'aube. L'irradiation originelle.

Des profondeurs chtoniennes, le Titan, à pleines pattes, s'élève, fusion à foison, et tonne.

Planète de feu – masses abjectes – noires luisantes – rocs compacts – violences pyroclastiques. Sécheresse burine-monde, transperce-terre, frappe-roche.

Grondements effusifs. Fissures dans le sol. Craque et déchire à grands coups de secousses.

Soudain, par-delà la fumée, un spectacle, une brillance géocosmique.

Un soupir parmi les étoiles.

Une explosion.


***

Il fut brusquement réveillé par le crachotement des hauts-parleurs, rouillés par le sel.

– Mesdames messieurs, notre ferry arrive à Nénucrique. Nous espérons que vous avez effectué un agréable voyage. Veuillez dès à présent vous diriger vers le pont de débarquement.

Il se redressa promptement, secoué par un éclair d'énergie vitale ; son encyclopédie tomba lourdement sur le pont de bois. Par-delà la balustrade, il vit l'océan, étendu jusqu'au bout du monde, à se perdre dans l'horizon, qui était chargé de nuages noirs, tout là-bas. Il était encore dans le flou du réveil, et ce retour soudain à la réalité lui secoua la tête. Il se la tint un court instant, essaya de se remettre les idées en place ; oh, oui, le départ de Port Tempères, l'arrivée à Hoenn, le rendez-vous, une étude de Chartor... ? Est-ce que c'était bien des Chartor ? Il ne savait plus très bien. Il vit son encyclopédie par terre. Il se baissa et tendit péniblement une main vers son volume. Les passagers commençaient à s'agiter, et le pont extérieur résonnait aux coups des talons ; beaucoup de monde passa devant ce jeune homme sans y faire attention. Cependant, une jeune femme, le voyant se pencher, se dépêcha d'attraper pour lui le livre tombé. Elle arriva une fraction de seconde trop tard, il l'avait déjà ramassé. En voyant une ombre et une jambe fine arriver, il leva la tête ; la jeune femme se sentit obligé de s'expliquer.

– Oh ! Excusez-moi, je voulais juste vous aider à...

Il la regarda : il vit son embarras, puis sa main qui désignait le livre. Il regarda son livre. Enfin, l'hébètement du sommeil le quitta tout à fait, et il comprit.

– Ah, d'accord ! Oh, heu, oui, merci ! sourit-il, un peu perdu.

La jeune femme fit un petit rire poli, et repartit presqu'aussitôt qu'elle fut venue, en souriant sur quelques mètres en pensant à la réaction de ce jeune homme. Finalement, il se releva, et, avec la consigne qui l'avait réveillé en tête, il se hâta de se diriger vers la passerelle.


Il arriva néanmoins parmi les derniers passagers à descendre. En effet, il s'était rendu compte au bout de cinq minutes qu'il avait complètement oublié ses affaires dans sa cabine ; il avait donc dû redescendre au pont numéro trois, déranger quelques matelots sur le passage qui vérifiaient les cabines, se dépêcher d'attraper sa sacoche et ses Poké Balls, de fourrer tout ce qui traînait sur la table dans cette première et de bien s'assurer qu'il avait empoché ces dernières. Puis il était remonté de trois étages, pour arriver à la porte plus ou moins essoufflé. Il y rendit sa carte d'embarquement au Commandant en personne, qui était là à chaque embarquement ou débarquement – c'était son plaisir de souhaiter face à face un bon voyage, ou de s'assurer que chaque passager en ait passé un, de bon voyage.

– Oh, Professeur ! Justement, nous nous demandions où vous étiez passé, on ne vous voyait pas arriver.

– Excusez-moi, j'avais oublié des affaires dans ma cabine, sourit-il, un peu gêné.

La moustache fournie du Commandant frétilla de sympathie.

– Ah, vous avez pu les récupérer, j'espère ?

– Oh, heu, oui, oui.

– Bien. J'espère que tout s'est bien passé à bord ?

– On ne peut mieux.

– Parfait ! Il ne me reste plus qu'à vous souhaiter un bon séjour à Hoenn.

– Merci, Commandant. Oh, d'ailleurs !

Il s'arrêta net, fit un petit pas en arrière, et leva une main pour poser une petite question.

– Vous sauriez où se trouve le centre de Concours ?

Le Commandant lui indiqua chaleureusement la route à suivre ; le jeune homme le remercia, et mit pied à terre.


Une fois qu'il fut loin du navire, seul, à marcher sur les larges rues pavées de Nénucrique, il inspira profondément. Retrouver la terre ferme le rassurait, et, bien que le ciel fût menaçant par endroit, un grand soleil baignait encore la ville dans sa fin d'après-midi, dont l'atmosphère était chargée de toute l'activité de la journée. Il se laissa aller à flâner, du moins à ralentir sa marche, profiter du paysage, de l'air marin, de l'ambiance de la ville côtière, de la vue de ses jardins. La proximité de l'océan lui permettait de jeter son regard au loin, sur cet horizon d'où il était arrivé, agité et grisé par un mauvais temps. Cela l'amusa en quelque sorte, puisqu'après tout, il ne venait pas d'un endroit si terrible que ça ; puis, Hoenn, qui plus est Nénucrique, n'était pas non plus une destination dont il avait particulièrement rêvé. Non, il profitait simplement d'être à terre, et de cette sensation grisante d'arrivée dans un autre pays, chargé d'une atmosphère différente à respirer. Il appréciait particulièrement de changer d'air.

Il regarda sa montre, puis, en jurant entre ses dents, se mit à courir ; il tenait sa sacoche avec la précaution d'un jeune homme foutrement en retard, mais prudent. Il traversa les routes en regardant à droite, à gauche, l'air un peu déboussolé.


L'Infirmière Joëlle le vit débarquer en trombe entre les portes automatiques. Elle lui sourit, quand il vint la voir au guichet, après qu'il eût regardé tout le monde dans le hall d'accueil.

– Bonjour, excusez-moi, je cherche le Professeur Seko...

– Ah ! Vous êtes le jeune homme que le Professeur attend ?

– Il se peut bien, oui, je-

Là, d'une salle du Centre Pokémon, la figure légèrement barbue, costaude et affable du Professeur Seko sortit. Il tenait entre ses mains un papier usé par les multiples pliures, qu'il lisait attentivement ; il avait sur l'épaule un sac dont la bandoulière en cuir était usée, et avait des chaussures pleines de terre. Sur ce dernier point, Joëlle le prit sur le fait, et le gronda un peu. Surpris, et n'ayant effectivement pas fait plus attention, Seko redressa la tête pour s'excuser, quand il aperçut le jeune homme.

– Ah ! Professeur Hellébore ! s'exclama-t-il. Je vous attendais, justement.

– Excusez-moi du retard...

Les deux Professeurs se serrèrent la main vigoureusement.

– Avez-vous fait bon voyage ?

– Oh, oui, merci.

– Bien ! Ne perdons pas plus de temps, suivez-moi.

Alors que le Professeur Seko commençait à amener le Professeur Hellébore dans une autre salle, l'Infirmière rappela au Professeur ses chaussures sales. Il eut beau parlementer en souriant, il n'obtint rien d'autre que l'ordre immédiat de sortir d'ici tant que ses semelles ne seraient pas convenables pour un centre de soins. L'assistance de Dresseurs présents commença à chuchoter ; le Professeur sortit au bout du compte, en essayant de dédramatiser la situation :

– Bah, un coup de serpillère, et il n'y paraîtra plus !

Il fit au revoir en agitant son papier d'une main, et fit signe à son nouveau collègue de bien le suivre, tout en gardant une franche bonne humeur à chacun de ses mots. Un peu embarrassé par cette scène qui attirait les regards, le jeune homme le suivit sans broncher, en essayant de ne pas se faire autant remarquer.


Une fois sortis, le Professeur Seko bondit dans le véhicule tout-terrain qui se trouvait garé devant le Centre Pokémon ; il ouvrit la portière pour le jeune, et lui fit signe de monter s'asseoir, quand il vit son air inquiet à l'idée de prendre la voiture.

– Ne vous inquiétez pas, nous ne partons pas ; c'est juste histoire d'avoir un coin où discuter.

Hellébore s'assit donc à la place du passager, et claqua la lourde porte derrière lui. Seko contourna le capot avant, entra de l'autre côté, s'affala devant le volant, et lui fit un grand sourire :

– Alors ! Prêt pour les Chartor ?

C'était donc bien ça.

– Oui, bien sûr... répondit le jeune homme, mit mal à l'aise par tant de camaraderie. Mais, j'ai dû bondir dans le premier bateau pour Hoenn assez rapidement ; le Professeur Platane m'a dit que vous me donneriez des informations plus précises sur place.

– Ah ! Dans ce cas !

Sur cette exclamation, Seko agrippa sa sacoche, l'ouvrit, puis y fouilla un moment avec une main, tandis qu'avec l'autre, il tendait à Hellébore la feuille pliée. Ce dernier l'attrapa, un peu en retard, puis la lit attentivement : un rapport sur des relevés effectués au Mont Chimnée, dans une cave à flanc de volcan, qui jouxtait le Chemin Ardent, décrivait les taux d'énergie géothermique du coin. De notables pics dataient d'il y a quelques semaines, mais ces jours-ci, elle restait et stagnait à une valeur bien au-dessus de la normale. Sur le même graphe était affichée une courbe de couleur noire, qui se notait en unité représenté par un epsilon minuscule ; à cette vue, le jeune Professeur frémit. Cette courbe ne pointait le bout de ses variations que lors d'intenses pics d'énergie, et ne se faisait vraiment notable que depuis la stagnation du tracé rouge. Tout à la fois intrigué et incrédule, il demanda fébrilement :

– Mais... Vous avez relevé tant d'énergie évolutive au Mont Chimnée ? Comment... Comment est-ce que ça peut être possible ? L'évolution de tout un troupeau pourrait-elle... Mais non, même ça, dans la possibilité où tant de spécimens seraient réunis au même endroit, en même temps, pour leur évolution, ça ne créerait qu'un pic, ça n'expliquerait pas ce niveau continu...

Le Professeur, content de voir l'effet produit, lui tendit d'autre paperasse :

– Haha, ça vous en bouche un coin, hein ? Et laissez-moi vous montrer ces documents-là !

Hellébore les attrapa avidement sitôt qu'il furent tendus ; les biotopes où les relevés avaient été effectués n'étaient fréquentés par aucune espèce migratoire de Pokémon, et seuls des Chartor colonisaient l'endroit et s'y pérennisaient au sein de telles conditions (le lieu analysé se trouvait riche en puits de charbon).

– Mais... Aucune forme d'évolutive de Chartor n'a été découverte jusqu'à présent... murmura le jeune Professeur.

– Et vous avez vu comme le taux se maintient ? Il ne s'agit pas d'une simple évolution ; si c'était le cas, nous n'aurions observé que des pics, et non une quantité constante...

– Vous voulez dire que... ?!

– Oui, mon jeune ami ! Je suis d'avis qu'il s'agisse d'une Méga-Évolution !

Hellébore n'en revenait pas. Il se passa la main sur le front plusieurs fois, jusque dans ses cheveux ; la mine réjouie de Seko jubilait, bordée par sa barbe châtain amusée. Celui-ci poursuivit :

– La quantité constante signifie un grand dégagement d'énergie évolutive dans le temps ; et il n'y a que les Pokémon dans leur état Méga-Évolué qui soient capables de cette émission en continu, jusqu'à ce qu'il reprennent leur forme normale... Vous le savez bien, suite à vos études avec Platane, non ?

– Oui, mais... Monsieur ! On n'a jamais observé de Méga-Évolution à l'état naturel !

– Justement ! s'écria Seko. Ce serait une première mondiale ! D'où l'importance de votre venue, et de votre mission, mon cher Hellébore. Platane vous m'a chaudement conseillé, en me vantant les qualités d'observation dont vous avez fait preuve dans vos études. Je sais que vous êtes Professeur depuis un an à peine, mais je vous fais amplement confiance. Votre thèse sur la Gardevoirite m'a beaucoup plu ; j'aime croire que vous serez à la hauteur.

Le jeune Professeur n'en fut pas peu flatté ; il rougit un peu, mais garda l'air digne. Il assura :

– Merci de votre confiance. Vous pouvez compter sur moi.

– Vous avez bien le paquet que Platane vous a confié ?

Hellébore mit sa sacoche sur ses genoux, l'ouvrit ; il y glissa les documents de Seko, et en sortit par la suite un petite boîte en bois simple, qui, après avoir été enroulée dans un papier grossier, avait été nouée par une ficelle. Il n'eut qu'à l'extirper ainsi de son sac pour que le Professeur hoennien s'en ravisse :

– Parfait ! Gardez-la précieusement ; vous l'ouvrirez une fois sur place. Cela vous aidera à compléter vos études, à faire varier les paramètres ; à, je ne sais pas moi, étudier sa réaction aux énergies du Chemin Ardent, par exemple.

– Qu'est-ce que c'est ?

Seko lui fit un sourire :

– Haha, vous verrez bien une fois sur place ! Cela vous fera une raison de plus pour vous rendre sur les lieux, hm ?

– ...Si vous le dites.

Le jeune Professeur ne chercha pas plus longtemps. Alors qu'il avait été en train de montrer le paquet, son regard était tombé sur sa montre, et déjà le soleil perdait de l'altitude. Il s'empressa de demander s'il devait savoir autre chose, et le Professeur Seko, après lui avoir répondu négativement, lui demanda, en le voyant ouvrir avec hâte la portière, pourquoi tant d'empressement.

– C'est que, je dois me rendre au Centre des Concours avant dix-sept heures trente...

– Ce n'est que ça ? Mais, remontez, voyons, je vous emmène !

Ne sachant que répondre, Hellébore se laissa faire sous les insistances de son collègue, et se rassit ; il attacha sa ceinture sans ajouter d'autre mot que "Merci, c'est gentil". Le Hoennien lui certifia que c'était ce qu'il y avait de plus naturel, et, en un tournemain, il démarra le tout-terrain en mettant le contact. Le trousseau de clés cliqueta, la voiture vibra, et partit tout à fait silencieusement. Le Professeur Seko venait de changer son ancien véhicule pour un électrique ; il était fier de pouvoir en profiter pour aider quelqu'un. Il fut ravi d'ailleurs, quand ce jeune homme lui fit la remarque, au moment où ils se glissèrent sur la route, entre deux voitures :

– Tiens, elle est-

– Oui ! le coupa-t-il, un peu trop rapidement. Pas mal, hein ? Une invention hoennienne. Tout le monde s'y met, en ce moment, dans la région. Il fallait bien qu'en tant que Professeur Pokémon, je montre l'exemple !

Hellébore sourit à cette remarque, et, en regardant par sa fenêtre, jeta un coup d'oeil aux grand arbres dont la ville était parsemée, en plus d'être fleurie ci et là de parterres où les dernières corolles roses, éclatantes, resplendissaient de leurs ultimes couleurs de l'année. Il inspira profondément, gonflant ses poumons de l'odeur de l'habitacle, avec son plastique, son tissu neuf, le parfum d'homme de Seko, la terre séchée et les herbes ramassées sous les sièges. Il expira, et se sentit bien pour la première fois depuis longtemps. De cette voiture, à ce Professeur, aux rues de Nénucrique, en passant par ces documents, ce ciel, ces espoirs, tout lui paraissait sentir Hoenn. Il pensa à un moment que, peut-être, cette région lui avait un peu manquée, depuis le temps.