Justice, gloire et Graffias. de illapa

Et dès le lendemain, nous nous retrouvâmes de nouveau sur les routes. Ikse avançait, escorté par les frères de Cor qui gambadaient joyeusement devant, et par Khélone qui regardait le paysage d'un air rêveur. Moi, je me laissait porter sur son sac a dos en profitant du soleil.
Je me posais beaucoup de questions. Aurions nous assez de force pour lutter face aux teams ?
Et Monsieur Zhède, que cachait-il ? Ce type était louche. Mais il avait l'air de s'intéresser à Ikse; Il était venu voir notre match... Pourtant il ne pouvait pas ignorer qu'il était suivi... Quelque chose ne collait pas chez ce type. Il était... trop imposant, trop bizarre, trop mystérieux, trop imprévisible, trop... Je ne savais pas comment le dire. Je sentais qu'au fond de moi, je le savais, mais je ne savais comment l'exprimer.
-Et bien, mon Graffias, tu ne joues pas avec tes compagnons cette fois-ci ?

Ikse me prit et me regarda droit dans les yeux.
-T'es pas malade, dis ?
Je balbutiai :
-N... non...
Je vis les yeux de mon dresseur s'écarquiller.
-Qu'est-ce que... mon pauvre p'tit rapion t'es malade !
Je soupirai :
-Mais pas du tout, je suis juste en train de réfléchir...
-T'as l'air vraiment faible, il faut qu'on trouve un centre pokémon au plus vite...

Son ton et son air paniqué rameutèrent le reste de la bande qui se mirent également à paniquer :
-Quoi, Maître ! T'es malade !
-Je ne suis pas malade !
-C'est vrai qu'il n'a pas l'air très en forme... Allons ne t'en fais pas, petit frère, ca n'a pas l'air très grave.
-Je ne suis pas malade !
-...
-Je ne suis pas malade !
-Maître, t'as mal aux oreilles ?
-Je ne suis pas mal... j'ai pas d'oreilles !
-Tu as la truffe chaude ?
-Non ! J'ai pas de truffe !
-...
Khélone fit mine de tirer la langue.
-Je n'ai pas mal à la langue non plus !

Mais même eux ne m'écoutaient pas. Ikse avait au moins l'excuse d'être un humain inapte à la communication entre pokémon. Il m'avait d'ailleurs posé par terre et fouillait dans son sac. Une seconde plus tard il en ressortit une potion.
-Ah voilà ! T'en fais pas mon Graffias, tu vas aller mieux très vite !
-Je ne suis pas malade !
Et joignant le geste à la parole, je me mis à galoper devant.
-Graffias ! Reviens là ! C'est pour ton bien !
Et mon humain se mit à courir derrière, suivi par nos compagnons.

La course ne dura pas longtemps : je repérai vite un vieux chêne, que j'escaladai en deux temps trois mouvements. Il s'employèrent alors à me faire descendre.
Ce qui finalement, était assez drôle.
-Aller mon Graffias, descends ! Tu ne crains rien, viens !
-Je ne suis pas malade !
-C'est juste une potion, ça va te guérir !
-Je ne suis pas malade !
CorLéonis glapit alors :
-Maître tu n'es vraiment pas malade ?
-Non !
Son frère objecta :
-Pourtant, tout à l'heure, tu avais l'air malade.
-J'étais juste en train de réfléchir, c'est Ikse qui s'imagine des trucs ! Je vais très bien !
Le jeune luxio revint à la charge :
-Pourtant, là, tu ne vas nulle part...
Khélone acquiesça. Son frère ajouta :
-Et tu nous empêches d'avancer. Sois raisonnable et descends. Tu es cerné. Rends-toi sans faire de complication et tout se passera bien !

Soudain, CorLéonis s'assit d'un geste qui se voulait déterminé, planta son regard dans le mien et déclara d'un ton autoritaire :
-Maître, ne fais pas l'enfant ! C'est MON rôle exclusif ! Toi t'es le rôle du maître. Comme dans la série à la télé ! Alors faut que tu fasses des trucs de maître !
Un silence lui répondit, seulement brisé par les supplications de notre dresseur. Qu'aurais-je pu répondre à une petite bouille sérieuse comme ça ? Même son frère le regardait avec étonnement.
J'eus tout-à-coup une illumination.
-Mais je veux pas boire de potion alors que je n'en ai pas besoin ! Ce serait du gâchis !
Ce fut à leur tour de ne savoir que répondre. A côté, Ikse avait posé son sac et tentait de grimper à l'arbre pour venir me chercher en débitant des idioties du genre :
-Mon pauvre petit rapion, je comprends que tu veuilles t'isoler quand tu te sens mal, que tu puisses être effrayé, mais on est là pour t'aider... Ne t'en fais pas, ça va aller...

Et sans prévenir, CorLéonis sauta, le fit tomber, lui vola la potion et se mit à courir sur le chemin.
-Voilà maître ! Comme ça, il ne gâchera pas ! Tu peux descendre maintenant !
Son frère aboya :
-Léo ! C'est du vol ! Ramène ça immédiatement !
Et se mit à lui courir après.
-Rends ça à Ikse tout de suite !
Le concerné dont il était question tentait de se relever en se frottant douloureusement le postérieur. Khélone lui demanda :
-... ?
L'humain lui répondit alors en le gratifiant d'une caresse sur le crâne :
-Ne t'en fais pas Khélone, je vais bien, je ne suis pas tombé de haut. Bon sang, qu'est-ce qui leur prend tout à coup ?
Le tortipouss répondit par un silence qui semblait signifier : aucune idée. Ikse se gratta la tête. Je profitai de la diversion du jeune lion bleu pour quitter mon refuge et reprendre ma place sur l'épaule de mon dresseur, qui sembla perdre patience l'espace d'un instant.
-Quoi ? Tu vas mieux tout à coup ? C'est quoi ce cirque ?
-Mais oui ! Je ne suis pas malade !
-Bien, CorLéonis, rends-moi cette potion !
Le pokémon électrique obtempéra, il trottina jusqu'aux pieds du connu Ikse et y déposa son butin d'un air espiègle et malicieux. Son frère était outré. « Tu devrais avoir honte de chaparder ! C'est un premier pas vers le vol, le mensonge et l'escroquerie ! Tu m'écoutes !? »

Notre humain soupira, rangea la potion, et nous commençâmes à repartir, lorsqu'une voix nous arrêta net.
-Vous savez, pour se faire obéir, le fouet marche aussi.
Nous nous retournâmes. Un homme se tenait au milieu du chemin. Ikse ne pu s'empêcher d'esquisser un mouvement de surprise. Moi non plus à vrai dire. Les frères de Cor eurent également une réaction étrange : ils se précipitèrent sur Ikse, s'interposèrent entre lui et l'homme et se mirent à grogner. CorCaroli particulièrement. Ses poils étaient hérissés, ses yeux exorbités, et il semblait prêt à sauter à la gorge de l'intrus d'un instant à l'autre. Son frère également. Je ne les avait jamais vu comme ça. Ikse se baissa et tenta de les calmer d'une caresse, mais renonça lorsqu'il constata que la fourrure du luxio s'était électrifiée.
L'homme en question était le portrait craché du directeur Cathode de la Tour Demain, en plus vieux. Il portait également un pull et un jean jaune canari, arborant le symbole de la team Electra.
-Vous devriez dresser un peu mieux vos pokémon jeune homme.
CorCaroli se mit à grogner plus fort. L'homme l'ignora.
-Je cherche les gens de ma team. Les auriez vous vus ?
Ikse secoua la tête en signe de négation. Il semblait plus préoccupé par la réaction inhabituelle des deux chiots que par l'homme.

Pour ma part, je trouvais ce bonhomme effrayant. Il en imposait, et pourtant il était souriant. Mais d'un sourire de séviper devant un nid de bébés mangriffs. C'était encore pire que le sourire de sharpédo de Mr. Tsunami. Sa voix était calme et posée, mais elle évoquait le calme et l'inquiétude qui se posaient avant un violent orage.
On sentait quelque chose chez cet homme ; quelque chose de malsain qui irradiait de lui comme une odeur nauséabonde venant d'un tas d'ordures fermentées. Je le regardais dans les yeux. Des yeux jaunes, acide comme un citron. Et un regard... Un regard qui exprimait de la détermination et de l'amusement. Un regard dément. Cet homme était complètement fou. Un malade, un vrai. Complètement malade.
En face de lui, les frères de Cor étaient presque prêt à mordre. L'homme se contenta de déclarer :
-Je vois. Dommage.
Puis il fit demi-tour et s'en alla sans un mot. Les deux pokémon canins firent quelques pas dans sa direction, toujours en grognant comme des enragés. Puis CorCaroli se mit à hurler :
-T'as de la chance que j'aie pour principe de ne jamais m'en prendre à un humain ! Mais ne t'approche plus jamais de Ikse ! ASSASSIN !

Il fallut un certain temps pour que les frères se calment. Ikse semblait bouleversé de voir ses deux petits protégés dans un tel état. Il s'assit sur le bord de la route, pris les deux pokémon dans ses bras et les câlina doucement. Khélone se couché contre le trio en signe de solidarité.
-Chut, là, c'est fini... Bon sang c'était qui ce type ? Chut, chut, c'est fini CorCaroli... C'est fini mon petit CorLéonis... Chut... Il est parti l'effrayant monsieur...
Ikse me regarda, puis déclara dans un soupir :
-Décidément, c'est la journée...
De mon côté, j'étais choqué par ce qu'il venait de se passer. Je n'avais jamais vu les deux frères aussi furieux. Et surtout, contrairement à Ikse, j'avais compris les paroles du caninos.
-Dites, cet homme, c'est bien... ?
CorLéonis tourna son museau vers moi. Il avait les yeux humides. Son frère me regarda aussi. Ses yeux à lui n'exprimaient que de la haine.
-C'est Diode, de la team Electra. C'est lui qui a tué Arbracames.

Nous restâmes là un moment. Ikse se désola de ne pas avancer, mais il préférait attendre que ses pokémon ait fini d'avoir des comportements étranges. Je n'osai pas en demander plus, savoir ce qu'il s'était passé. Ils étaient assez bouleversés comme ça. Puis, en fin de matinée, nous vîmes arriver, joyeusement et en dansant toute seule sur la route, une jeune fille déguisée comme une cow-girl : Hyg-Rek. Son arrivée remonta le moral de Ikse. Les deux décidèrent de manger ensemble. Ikse se plaignit de notre comportement bizarre.
-Ils devaient sentir qu'ils allaient rencontrer ce type. Les pokémon ont comme un genre de sixième sens tu vois ? Donne-leurs des brochettes, ils se sentiront mieux.
-Tu ne l'a pas croisé, ce type ?
-Si. Il m'a demandé aussi si j'avais vu les gens de sa team. Il m'a fait froid dans le dos, et je me suis enfuie.
-C'était qui ce bonhomme ?
La jeune fille regarda mon jeune homme d'un air grave.
-C'était Diode, le chef de la team Electra. J'avais déjà vu un reportage sur lui à la télé.
-Oh.
Il y eut un instant de silence maussade, embaumé par l'odeur des brochettes sur le grill, puis elle déclara :
-Je pense qu'on ferait mieux de voyager ensemble, si tu veux bien. J'ai pas envie de retomber seule sur ce mec ou ses sbires... Et ce sera plus sûr.
Je vis mon dresseur changer de couleur.
-Oh. Oui, bien sûr. Pas de soucis. Hm. Au fait, pourquoi t'es déguisée en cow-boy ?