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Des vacances mouvementées... de Don d'ARCEUS



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» Auteur : Don d'ARCEUS - Voir le profil
» Créé le 07/05/2011 à 11:04
» Dernière mise à jour le 05/07/2012 à 18:55

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Entre amour et dépendance
Lorsqu'elle arriva à la hauteur de la maison de son ancienne amie, Célinda vit surgir Vitalio au coin de la rue opposé. Mue par un pressentiment, la jeune fille se cacha prestement derrière un muret proche après l'avoir enjambé silencieusement. Le garçon alla frapper à la porte de la maison d'Éliana, inconscient du regard intrigué posé sur lui. Une jeune femme d'une quarantaine d'années vint lui ouvrir, un sourire aux lèvres qui s'estompa quelque peu devant la mine – que Célinda devinait (ou espérait ?) malheureuse – du jeune homme avant de s'effacer pour le laisser passer. Célinda parcourut la distance qui la séparait de la maison de son ancienne amie pour aller se poster à la fenêtre de la chambre d'Éliana, en se demandant si son amie avait présenté le garçon à ses parents alors qu'elle n'avait même pas eu le loisir de le faire, elle.

Lorsqu'Éliana et Vitalio firent leur entrée dans la pièce, Célinda ne rata rien de leur mine souriante. En façade seulement, tout du moins. Néanmoins, cette bonne humeur apparente suffit à provoquer chez la discrète observatrice un trouble qui ne lui fit plus voir que ce à quoi elle s'attendait, c'est-à-dire tout sauf la réalité. Leurs regards eurent beau respirer tout sauf un éventuel bonheur, une éventuelle joie – à part, peut-être, celle de se retrouver pour partager cette souffrance qui ne tarda pas à s'afficher sur leurs visages, une fois qu'Éliana eut refermé la porte de sa chambre sur le jeune homme –, Célinda fut aveugle à cette douleur qu'elle n'aurait eu aucun mal à discerner si elle avait bien voulu voir la réalité telle qu'elle était et non telle qu'elle se l'imaginait, telle qu'elle se la représentait : elle vit Éliana se jeter violemment dans les bras de Vitalio pour – visiblement – y chercher un réconfort ou une consolation – illusoires – qui l'enlaça presque machinalement – « Et pas le plus maladroitement du monde... » ne put s'empêcher d'observer l'espionne de la scène, un goût amer dans la bouche – mais la jeune fille ne vit là que l'expression d'un besoin pressant de se sentir l'un contre l'autre, et non pour pleurer cette amitié perdue depuis peu. Elle aurait pourtant aisément pu discerner l'expression de tristesse infinie qui se lisait sur leurs visages si elle n'avait pas voulu voir, malgré elle, la réalité à travers le filtre de la jalousie. "Sa" réalité, celle où Éliana et Vitalio s'étaient rapprochés pour mieux combler le vide qu'avait laissé son absence, lui semblait tellement plus crédible qu'une autre qu'elle lui semblait réellement plausible. Elle ne s'attarda pas plus avant à déchiffrer l'expression de leurs visages, qu'elle aurait toutefois pu décrypter si facilement si elle avait eu le courage de se défaire une bonne fois pour toute de cette jalousie intense qui la dévorait de l'intérieur depuis l'apparition de Vitalio dans sa vie : Célinda courut jusqu'à sa maison pour se réfugier dans sa chambre sans pouvoir conserver l'envie irrépressible de pleurer jusque-là.

« C... Célinda ? » fit une voix alors que l'interpellée venait tout juste de s'allonger sur le lit.

Cette dernière stoppa net de sangloter. Cette voix... c'était celle de Vitalio.

« Que viens-tu faire ici ? Tromper Éliana, peut-être ? s'enquit Célinda, d'un air mauvais, sans tourner le regard vers la porte dans l'encadrement de laquelle Vitalio venait de faire son apparition.
– De quoi parles-tu donc ?
– S'il y a un langage qui ne trompe ni ne ment, c'est bien celui du corps...
– Et ?
– Et je t'ai vu l'enlacer, la câliner... à l'instant...
– Ce n'est pas du tout ce que tu crois !
– Qu'est-ce qui peut donc bien me le prouver ?
– Je... tu lui manques terriblement, Célinda. Et elle n'a trouvé que moi pour partager sa peine.
– Pourquoi ne vient-elle pas me le dire elle-même en face, si c'est la Vérité ?
– Je... Elle regrette ce qu'elle t'a dit. Mais elle n'estime plus pouvoir être autre chose qu'une... enfin, elle estime ne plus être à la hauteur de ton Amitié...
– Tes paroles sonnent si justes que... que j'ai l'impression qu'elles sont fausses ! » s'emporta la jeune fille en se levant et en bousculant le garçon au sortir de la pièce.

Mais avant qu'elle n'atteignît la porte d'entrée, Vitalio la rattrapa et la plaqua contre un mur.

« Aïe ! Tu... tu me fais mal ! »

Bruits de voix au dehors...

« Qu'est-ce que... ? »

Bruit mat. D'un corps qui tombe au sol. Ténébrax fit alors son entrée et vit Vitalio et Célinda proches l'un de l'autre, elle acculée contre un mur, et lui, si près qu'il lui semblât qu'il allait l'embrasser. Peut-être même l'avait-il déjà fait ? Vitalio distingua alors le corps d'Éliana au sol juste derrière le nouveau venu.

« Que... que lui as-tu fait ? parvint à articuler l'homme aux yeux d'un violet intense, contrôlant de justesse une colère immense.
– Ne te fâche pas pour si peu, elle ne fait qu'un petit somme... »

Ténébrax hésita avant d'ajouter, un rictus terrifiant étirant ses lèvres :

« ... parsemé de cauchemars, bien entendu... »

Vitalio se jeta sur l'autre jeune homme et, l'ombre d'un instant, Célinda crut voir en lui le Pokémon qui l'habitait. N'était-il pas donc mort, lui non plus ? Ténébrax ne fut cependant nullement surpris : il projeta un Laser Glace qui stoppa net le jeune homme puis il s'approcha de Célinda sans lui accorder un regard supplémentaire : il était gelé.

« Je... désolée, je n'ai trouvé aucune autre personne aussi directe que moi et qui me plaisait un tant soit peu à part lui... s'excusa celle-ci, qui paraissait réellement navrée.
– Ça ira pour cette fois. Mais aujourd'hui, je suis prêt ! déclara Tén d'une voix déterminée, après avoir fait la moue.
– Prêt à quoi ? l'interrogea la jeune fille, intéressée, une lueur amusée dans les yeux.
– Eh bien, à... à...
– Mmmmh ? fit Célinda, pas décidée le moins du monde à l'aider.
– Je... mais qu'avez-vous fait, au juste ? Il t'a... touchée ? »

La jeune fille fit "oui" de la tête d'un air désolé.

« Il... il ne t'a pas embrassée, au moins ?
– Je... Non, pas du tout !
– Heureusement pour moi que tes yeux mentent moins bien que ta bouche... Et c'est tout ? Enfin, je dis ça, c'est quand même déjà pas mal...
– Tu veux savoir si nous... sommes allés plus loin ? s'enquit Célinda, souriant malgré elle devant l'air penaud de son interlocuteur.
– Alors ?
– Non je... je n'étais pas prête... Il m'a suffisamment réconfortée... avec des caresses et des baisers, révéla la jeune fille, jubilant intérieurement devant la mine déconfite du garçon.
– Et... et moi, alors ?
– Eh bien, sois patient, toi aussi tu auras ta chance.
– Tu n'attends donc plus rien de moi ?
– Seulement pour le moment, rassure-toi ; un jour viendra où j'aurais encore besoin de tendresse... Contente-toi d'être là, le moment venu... »

Ténébrax n'en menait pas large. Elle était fautive, elle avait trahi sa confiance, et pourtant, elle faisait comme si de rien n'était, comme s'il était naturel de tromper son petit-ami...

« Bon, il faut peut-être réveiller Éliana et dégeler Vitalio...
– Tu n'as qu'à te débrouiller toute seule ! » rétorqua le jeune homme en sortant de la maison, la mine sombre.

En le voyant sortir pareillement, Célinda eut un pincement au cœur. Mais elle devait faire preuve de fermeté si elle voulait se retrouver seule avec ses amis. Car, oui, ils l'étaient encore, elle ne devait plus fermer les yeux, se voiler la face. Mais garder les pieds sur terre.

La jeune fille transporta d'abord son amie jusqu'à sa chambre pour l'allonger doucement sur le lit puis revint dans le salon tout en réfléchissant à un moyen de décongeler Vitalio. Elle se rendit finalement dans la salle de bain puis se saisit d'un sèche-cheveux électrique, peu convaincue cependant de l'efficacité de son idée. Elle s'activa néanmoins autour du jeune homme pour essayer de faire disparaître la glace qui le recouvrait et, à sa grande surprise, elle y parvint... sauf que le jeune homme ne fit pas le moindre geste lorsqu'il fut complètement délivré de sa prison de glace ; il était figé.

« Logique... raisonna Célinda, toujours calme. Lorsqu'on subit une telle décharge de glace, si on n'est pas immobile, c'est qu'on a un problème... ou qu'on est de type Feu... Mais comment le ranimer, maintenant que l'enveloppe de glace physique n'est plus ? »

La jeune fille s'assit sur le divan en face du jeune homme et réfléchit longuement à la question sans parvenir à y trouver la moindre ombre de réponse. Perdue dans ses pensées, elle contemplait le garçon, si parfaitement immobile, se demandant s'il pouvait la voir, l'entendre... Mais quand bien même cela serait vrai, à quoi cela pourrait-il servir ? Désespérée, la jeune fille se leva pour s'approcher du garçon, toujours en quête d'un moyen pour le ranimer. Une expression de haine pure se lisait sans mal sur les traits du garçon. Il semblait en mouvement bien qu'il fût complètement figé. Les bras ouverts, il cherchait une victime qui n'était déjà plus là. Une fois de plus, ils se retrouvaient ô combien proches et pourtant ô combien loin l'un de l'autre.

« Tu... tu as essayé de le... toucher ? suggéra Éliana dans son dos, d'une voix faible et mal réveillée.
– Pour quoi faire ? Je suis sûre qu'il n'approuverait pas, de toute façon... dit Célinda, pas le moins du monde surprise par la présence de son amie.
– Eh bien... le feu de l'Amour qui vous consume tous les deux ne peut tout de même pas le laisser de glace, pas vrai ?
– Joliment formulé...
– Et puis... il te tend les bras, tu ne vas tout de même pas... l'ignorer ? »

Célinda s'approcha de Vitalio, se faufilant entre ses bras tendus sans les frôler. Les bras de la jeune fille, quant à eux, se refermèrent sur le dos glacé du jeune homme.

« Il ne se passe rien ! gémit Célinda en jetant un regard paniqué à son amie.
– Mets-y un peu du tiens ! »

Les lèvres de Célinda, hésitantes, se mirent alors à chercher lentement celles du garçon. Elles remontèrent d'abord le long de son cou, parcoururent doucement et tendrement sa joue, pour enfin atteindre la commissure des lèvres. Mais Célinda n'arriva pas à aller plus loin...

« Je... je ne peux pas... C'est contre tous mes principes et...
– Oublie un peu tes principes, je ne t'en tiendrai pas rigueur ! déclara Éliana en levant les yeux au ciel puis en ajoutant, devant l'hésitation persistante de son amie : Tu veux le sauver, oui ou non ?
– Bien sûr mais... et s'il explosait ?
– Alors tu sauras que tu en as fait assez... pour le ranimer, ajouta la jeune fille après une brève hésitation, un mince sourire sur les lèvres qu'elle décida de cacher en sortant de la maison.
– Mais... »

Éliana n'était déjà plus là. Célinda reporta son attention sur Vitalio. Elle resserra son étreinte autour de lui puis apposa ses lèvres sur les siennes après un dernier instant qu'elle passa à balayer les derniers doutes qui peuplaient son esprit. Ils étaient ensemble, tous seuls, c'était tout ce qui comptait. Le garçon reprit alors brusquement vie entre les mains de la jeune fille ; cette dernière, ayant oublié qu'il avait été stoppé en plein dans son élan, n'avait pris aucune précaution en conséquence. Vitalio la précipita contre un mur sans aucune vergogne, comme si la personne qui l'enserrait n'était autre que Ténébrax. Bien que Célinda se retint de pousser un cri déchirant de douleur pure, Vitalio se rendit compte que la personne qui l'avait entouré de ses bras et qui avait déposé un baiser sur ses lèvres n'était autre que son amie, celle-ci ne ripostant pas à sa charge.

« Je... je... Célinda ? balbutia-t-il, catastrophé.
– V... Vi... talio... répondit l'interpellée.
– Je... comment ça se fait que... Je suis désolé, s'excusa le jeune homme en s'écartant vivement de son amie pour lui laisser un peu d'espace pour respirer.
– Je... je l'ai mérité, je n'aurais pas dû t'embrasser... Je... Ooooh ma tête... » fit la jeune fille en fermant les yeux et en portant une main à sa tête.

Elle sentit alors qu'on la prenait tendrement dans ses bras et qu'on la serrait. Fort. Les lèvres de la jeune fille recommencèrent leur quête des lèvres du garçon. Avec plus d'assurance, cette fois. Et aucune pause jusqu'à leur but. Les lèvres des deux jeunes gens s'unirent de nouveau mais cette fois, ce fut... différent. Célinda eut l'impression de goûter un fruit sucré qu'elle n'avait que trop rêvé. Les mains tremblantes de Vitalio caressèrent doucement les joues de Célinda. Le contact de leurs peaux fit aux deux adolescents l'effet d'une décharge électrique ; leurs lèvres s'éloignèrent dès qu'il se fit sentir. C'était si... bon et si étrange à la fois... Célinda plongea son regard dans l'univers mauve des yeux du jeune homme tandis que celui-ci plongeait le sien dans l'océan bleu ciel de ses yeux à elle, en faisant glisser ses doigts dans ses cheveux. En réponse, la jeune fille poussa un soupir d'aise comme elle n'espérait ne jamais pouvoir pousser.
La porte d'entrée claqua à cet instant précis, au beau milieu de ce moment de bonheur pur. Ténébrax fit son entrée.

« Pourquoi... pourquoi êtes-vous encore ensemble, là, tous les deux ? s'enquit-il.
– Je... commença Célinda.
– C'est ma faute. Je l'ai forcée à... m'embrasser, l'interrompit Vitalio, un air de défi sur visage.
– Bien sûr, je m'en doutais un peu. Que te faut-il donc pour que tu comprennes que cette fille est à moi ? » s'exclama Ténébrax.

Vitalio bondit pour la deuxième fois sur Ténébrax. Mais ce n'était qu'un reflet ; un autre Ténébrax l'attendait au dehors. Mais vrai, celui-là. Il se mit d'ailleurs à s'enfuir, conscient de la colère de son poursuivant. Célinda poursuivit Vitalio jusqu'au seuil de sa maison. Mais à peine l'eût-elle franchi qu'il était déjà loin. Elle retourna dans le salon pour l'attendre, morose.

« Hé bien, que s'est-il passé ? l'interrogea Éliana en faisant son entrée dans la maison. J'ai vu Vitalio courir après Ténébrax...
– Je... je n'ai pas pu le retenir... Je n'ai pas trouvé les mots... ni le courage... Mais toi, tu le connais si bien... comparé à moi... que tu les aurais trouvés... sans aucun mal.
– Je le connais peut-être mieux que toi, oui, peut-être, mais seulement pour le moment. Je t'assure qu'il me reste encore beaucoup à apprendre de lui... Toutefois, je ne risque pas d'approfondir ma connaissance de lui.
– Il ne t'intéresse donc pas plus que ça ?
– Réveille-toi, Célinda ! C'est ton petit-ami ! Pas le mien !
– Oui mais ce n'est pas moi qui ait été le plus proche de lui, ces derniers temps... ni même ceux d'avant, à bien y réfléchir...
– Je n'ai aucun mérite...
– C'est-à-dire ?
– Au risque de passer pour une prétentieuse, je... j'ai l'impression d'être née avec le don de comprendre les autres... de les aider... Oui, je possède une certaine aptitude, enfin, j'éprouve une certaine aisance à me mettre à la place des autres pour mieux les comprendre... Alors devenir proche de Vitalio, ce ne fût qu'une formalité, pour moi...
– Toujours est-il que tu en sais plus sur lui que moi, trancha la jeune fille.
– Pour le moment, Célinda. Seulement pour le moment.
– Je... En tout cas, merci... Tu... C'est grâce à toi si Vitalio peut de nouveau bouger et... et si... et si... sanglota Célinda.
– Et si quoi ?
– Je... on... on s'est embrassés... avoua la jeune fille, à la fois gênée et heureuse.
– Mais c'est merveilleux, pourquoi pleures-tu donc ?
– Je... ça n'a pas duré très longtemps en fait mais... enfin, nos lèvres se sont unies, c'est déjà un bon début, se reprit Célinda en essuyant maladroitement ses larmes du revers de la main. C'est grâce à toi tout ça... Je... Merci...
– C'est tout naturel...
– Si c'était aussi naturel que tu l'affirmes, tu aurais déjà un petit-ami, toi aussi, car je t'en aurais trouvé un... D'ailleurs, maintenant que j'y pense, tu t'es toujours penchée sur mes problèmes... et ceux de Vitalio... et moi – ou nous –, jamais sur les tiens... Tu n'en as donc aucun ?
– Je préfère m'occuper des problèmes des autres aux miens car eux, au moins, possèdent des solutions, c'est tout.
– Tu aurais donc des problèmes ?
– Tout le monde en a ! La perfection n'est qu'un idéal !
– Vers lequel chacun doit tendre !
– Mais que personne n'atteindra jamais...
– Si on veut... Mais pourquoi tes problèmes seraient-ils moins solubles que ceux des autres ?
– Parce qu'ils n'ont tout simplement aucune solution. Et que leur autre nom est Destin.
– Et... quel est ton Destin ?
– Il... il me faudra un jour te quitter... Vous quitter... lui révéla gravement Éliana.
– Bientôt ?
– Même si je le savais, je ne te le dirais pas. Il faut juste que tu gardes à l'esprit que chacune des secondes que nous vivons ensemble est peut-être l'une des dernières... Profite juste du temps qu'il nous reste à passer ensemble... »

Silence.

« Tu n'as pas l'air étonnée outre mesure, je me trompe ?
– Non je... aussi bizarre que cela puisse paraître, il m'a toujours semblé que notre relation n'était que temporaire, éphémère... Que, d'une manière ou d'une autre, notre amitié était vouée à l'échec...
– Non, détrompe-toi Célinda ! Bien au contraire ! Elle n'a jamais été vouée à l'échec. Elle a même porté quantité de fruits... et quels fruits !
– Il y a pourtant un ou deux fruits supplémentaires que j'aurais aimé la voir porter...
– Ne parle pas ainsi, on ne se quitte pas maintenant !
– J'ai pourtant le pressentiment que le moment de se quitter viendra bientôt... avant que j'aie pu te trouver un petit-ami... te donner le change, en quelque sorte...
– Tu l'as déjà fait...
– Comment ?
– En m'offrant l'amie la plus extraordinaire du monde, tout simplement... répondit Éliana en esquissant un sourire.
– Qui ça ?
– Toi, bien sûr !
– Oui mais... Je ne vaux pas un petit-ami...
– Ça, c'est toi qui le dis...
– Tu comptes en trouver un, au moins, un jour ?
– Si jamais il croise ma route, je ne reculerais devant aucun sacrifice pour le conquérir mais...
– Mais sinon tu n'iras pas à sa recherche, c'est ça ?
– ...
– Pourquoi ?
– ...
– Tu es bien silencieuse, tout à coup... La fatigue, peut-être ?
– Sans doute...
– Mais pourquoi es-tu si fatiguée, au fait ?
– Mes pouvoirs Pokémon requièrent une quantité importante d'énergie... Et je les utilise très souvent, ces temps-ci...
– Quels sont donc ces pouvoirs ? Non, ne réponds surtout pas ! » lui interdit brusquement Célinda alors que son amie ouvrait la bouche pour le faire, catastrophée, les yeux écarquillés par une terreur sans nom.

Éliana lui lança un regard interrogateur.

« Je... J'allais révéler à Vitalio le mot que j'ai entendu dans mon esprit lorsque ma nature mi-Pokémon s'est révélée à moi mais il ne voulait pas l'entendre... s'expliqua la jeune fille. J'ignore pourquoi mais... il a sans doute ses raisons... Enfin, quelle que soit ta nature, promets-moi de te reposer dès que possible...
– Lorsque tu es un Pokémon du Temps, ce type d'engagement ne vaut rien...
– Éliana ! Tu as dit "Temps" !
– Et alors, il ne m'est rien arrivé ! Tu aurais préféré que je dise plutôt : « Pour le Pokémon que j'abrite, ce genre de parole – promesse – n'engage à rien... » ?
– Je... oui, je pense.
– C'est d'ailleurs parce que je fais des voyages dans le Temps que je suis fatiguée, puisque tu veux le savoir.
– Éliana !
– Trop tard ! fit la jeune fille, en lui tirant la langue. De toute façon, je ne veux avoir aucun secret pour toi ; nous sommes amies, après tout, pas vrai ?
– Oui, bien sûr mais... tu as peut-être fait une bêtise... Enfin, promets-moi au moins de tout faire pour trouver ton âme sœur, puisque le temps de notre amitié nous est compté, et donc le délai pour que je la trouve aussi...
– Je... j'essaierai...
– Promis ?
– ... promis.
– J'espère tout de même la trouver avant toi... Tu as tout fait pour mon Bonheur et moi rien pour le tien... Tiens, pour me racheter, je t'autorise à embrasser Vitalio sur la... Non, non, non ! Je plaisante, bien sûr ! »

Éliana lança un regard assassin à son amie.

« De toute façon, je n'ai pas du tout envie de l'embrasser ! Je ne l'ai même jamais eue cette envie, peut-être bien... Et la prochaine fois que tu me fais une mauvaise blague pareille...
– Je... Il n'y en aura pas, promis...
– Et puis, on n'a pas idée de permettre à son petit-ami d'en embrasser une autre ; c'est comme si tu l'autorisais à me faire un enfant pour les services que je t'ai rendus...
– Oui, bon, n'exagérons rien, c'était juste une plaisanterie – de mauvais goût, je te l'accorde, mais une plaisanterie tout de même... Et puis, tu es et tu resteras toi à jamais. Je te connais suffisamment bien pour savoir que tu allais refuser, d'une manière ou d'une autre... Enfin bref, il y a forcément une personne que tu souhaites embrasser, quelqu'un qui occupe une place bien particulière dans ton cœur, comme un acteur ou bien... un chanteur, je ne sais pas moi, n'importe qui ! Mais toi seule sait de quelle personne je parle ; qui est-elle donc ? »

Éliana se mordit les lèvres.

« Ça, ça veut dire que tu connais la réponse à ma question, tu viens de te trahir toute seule ! Allez, dis-moi qui occupe tes rêves les plus fous, qui tu veux embrasser plus que n'importe qui ! Je ferais tout pour que ça arrive !
– Je... Toi... » révéla la jeune fille, jugeant ne pas avoir d'autre échappatoire que répondre à la question de son amie en toute sincérité.

Moment d'incertitude absolue. De flottement incroyable.

« Je... Tu... tu... enfin...
– Oui... plus ou moins... » avoua timidement Éliana fuyant l'autre du regard.

Célinda contempla son amie, abasourdie au possible. Elle finit cependant par murmurer, après un long silence :

« Alors qu'attends-tu pour m'embrasser ?
– Tu... tu es sûre que tu veux... Enfin, je veux dire, tu ne dis pas ça en te sentant obligée de... Que tu... que tu le fais de ton plein gré, pas contre ta volonté, quoi ? articula difficilement Éliana, les yeux embués.
– Je te dois bien ça... Et puis, je n'ai jamais été contre de nouvelles expériences, après tout...
– Et si Vitalio nous surprenait ?
– Arrête donc de déballer des hypothèses stupides pour te défiler et embrasse-moi... »

Éliana se mordit une nouvelle fois les lèvres, confuse comme jamais, tandis que son amie s'approchait d'elle d'un pas lent mais assuré. Les deux jeunes filles se regardaient les yeux dans les yeux, se toisant intensément du regard, ni l'une ni l'autre n'étant prête à dévier le sien. Un frisson d'expectative parcourut les deux jeunes filles lorsqu'elles furent plus proches l'une de l'autre qu'elles ne l'avaient jamais été ; Célinda ne tarda pas à entourer la taille de son amie de ses bras comme elle l'avait fait un peu plus tôt avec Vitalio afin de ne pas laisser s'installer une quelconque gêne quant à la distance si petite qui les séparait, contrairement à d'habitude. Éliana l'imita timidement puis toutes deux inclinèrent la tête jusqu'à ce que leurs fronts se touchassent, toujours sans se quitter des yeux. Elles les fermèrent alors simultanément et doucement, comme pour mieux savourer cet instant incroyable qui, à l'évidence, échappait à leur commun entendement. Leurs lèvres s'entrouvrirent lentement puis s'unirent, d'abord avec hésitation et maladresse, puis Éliana quitta son masque de pudeur pour embrasser franchement son amie d'enfance, consciente que c'était leur premier "vrai" baiser mais également leur dernier, qu'il lui fallait par conséquent en profiter au maximum. Lorsque le visage de Célinda s'éloigna de celui d'Éliana et que ses bras retombèrent le long de son corps, cette dernière, triste de cette séparation qu'elle jugeât beaucoup trop précoce, resserra l'étreinte qui la liait à son amie pour sentir la chaleur de son corps contre le sien. Bien que Célinda tentât de se défaire de l'étreinte pressante de son amie – après l'avoir à nouveau entourée de ses bras et l'avoir caressée comme elle l'avait fait elle-même pour ne pas la vexer –, celle-ci ne céda qu'au bout d'une poignée de secondes.

« Je... Désolée... je ne voulais pas... Je... haleta Éliana, comme si elle avait lutté pour reprendre le contrôle de son corps afin qu'il relâchât Célinda.
– Ne t'en fais pas... Tu ne pouvais pas prévoir que... tu tiendrais tant à me sentir tout contre toi au point de ne plus supporter notre séparation... Tu ne pouvais pas savoir à quel point tu me désirais... À quel point tu aimerais me sentir contre toi, combien tu apprécierais de me serrer dans tes bras, quoi ! plaisanta maladroitement Célinda, un drôle de sourire épanoui sur les lèvres.
– A... alors, c'était comment ? s'enquit Éliana, inquiète de la réaction de son amie, se mordant la lèvre pour la troisième fois, témoignant ainsi de son immense anxiété.
– Eh bien... fit Célinda en fermant les yeux comme pour se remémorer leur union puis en les ouvrant doucement. Il n'y a pas si longtemps, tu estimais ne plus être à la hauteur de mon Amitié, pas vrai ?
– Et ? interrogea Éliana, tremblant de peur en imaginant une future colère de la part de son amie.
– Et alors, en termes de comparaison, Vitalio embrasse presque mal, à côté de toi...
– Ne t'emballe pas trop vite, la prévint son amie, en rougissant et en respirant enfin. Au lit, je ne ferais jamais le poids...
– C'est vite dit, ça ; d'accord, tu ne remplaceras – peut-être – jamais un homme au lit pour une femme, mais je suis sûre que tu peux faire une femme fantastique... aussi bien au lit qu'en dehors, ajouta la jeune fille en adressant un clin d'œil à son interlocutrice qui s'empourpra de plus belle. En tout cas, sache que celui qui t'aura aura bien de la chance...
– Vitalio aussi a bien de la chance de t'avoir...
– Tu y es pour beaucoup... et pour ça je te suis infiniment redevable...
– Plus maintenant, Célinda, plus maintenant...
– J'embrasse si bien ? rit Célinda, pour cacher sa gêne.
– Entre autres, oui... approuva Éliana sans regarder son amie droit dans les yeux, mais il faut dire que ça m'a fait plaisir de jouer les entremetteuses pour toi... Tu en as même peut-être fait beaucoup plus que tu ne devais... Et puis, après tout, c'était ma mission de veiller sur ton Bonheur...
– Co... comment ça ?
– Je ne sais pas ; tout ce que je sais, c'est que je suis née avec le désir de te protéger, de t'aimer – au moins d'Amitié – et de faire un bout de chemin avec toi afin de te conduire progressivement au Bonheur... Maintenant que tu y es, je pense ne plus être d'une très grande utilité, ici... C'est pour ça que les instants que nous vivons actuellement comptent parmi les derniers qu'il nous reste à vivre ensemble ; j'ai rempli ma mission, il me faut à présent reprendre un peu de repos avant de m'envoler pour ailleurs et veiller sur une autre personne...
– Tu es une sorte d'Ange Gardien, si j'ai bien compris ?
– Si on veut. Mais je préfère qu'on m'appelle Éliana, si tu n'y vois pas d'inconvénient... »

Les deux jeunes filles éclatèrent de rire. Un rire franc. Un rire nouveau. Annonciateur de Bonheur. Aussi bien présent que futur, bien que le futur s'annonçât plus ou moins rayonnant si l'on prenait en compte leur séparation à venir... Mais elles s'en fichaient bien ; tout ce qui comptait, c'était l'instant présent. Et en cet instant, elles étaient ensemble.
La porte d'entrée s'ouvrit, laissant apparaître Vitalio, fatigué, certes, mais un sourire triomphant étirait ses lèvres ; un air interrogateur se peignit sur son visage en voyant ses deux amies rire de si bon cœur, dans les bras l'une de l'autre. Après avoir versé toutes les larmes de Bonheur qu'elles pouvaient, les deux jeunes filles finirent par accorder de l'attention au nouvel arrivant.

« Eh bien, où est Ténébrax ? le questionna Célinda.
– Je crois qu'il ne nous embêtera plus, maintenant... dit simplement Vitalio.
– Tu... tu l'as tué ?
– Non, je n'ai fait "que" lui donner la raclée de sa vie.
– Mais j'y pense, le seul moyen que nous n'avons pas essayé pour tuer un Poké-humain, c'est de le faire vieillir, pas vrai ? se rappela Célinda en tournant la tête vers son amie.
– Je... Non, c'est inutile d'essayer ; moi aussi j'y ai songé, et bien avant toi, confia Éliana, mais même si on détruit l'enveloppe charnelle du Pokémon de Ténébrax, celui-ci finira par renaître... et la lutte recommencera.
– Comment peux-tu savoir ça ? s'enquit Célinda.
– Hé, minute toutes les deux ; j'avoue avoir un peu de mal à vous suivre...
– Viens donc prendre place à mes côtés, tu dois être épuisé... dit Célinda en s'asseyant sur le canapé après s'être arrachée à l'étreinte de son amie et en tapotant la place libre entre eux deux. Et toi aussi Éliana ! Tu meurs littéralement de fatigue, viens donc t'asseoir ! »

Ses deux amis s'exécutèrent puis, lorsqu'ils furent installés confortablement, Célinda passa ses bras autour de la taille de ces amis si chers.

« Je... Vous m'avez tellement manqué... fit Célinda tandis qu'une larme coulait le long de sa joue.
– Mais maintenant, nous sommes là... la consola Vitalio en essuyant la larme de son amie.
– Oui. » approuva Éliana.

« Mais plus pour très longtemps, malheureusement... pensa Célinda.
– Il vaut mieux que je ne m'attarde pas éternellement, si tu veux mon avis... lui répondit son amie, par la pensée.
– P... Pourquoi ? »

« Tu vas... partir ? demanda le garçon, à l'adresse d'Éliana, à voix haute.
– Je... Oui.
– Quand ?
– Je ne sais pas. Dès que j'aurais assez récupéré de nos précédentes péripéties, je présume...
– Pas avant ?
– Toi, tu as une idée derrière la tête, Vitalio...
– Je... Si on te maintient dans un état de fatigue constant, tu ne partiras jamais, si je comprends bien ?
– Je demande à voir comment tu vas me maintenir continuellement fatiguée...
– En faisant continuellement la fête, pourquoi ?
– Pour faire la fête, il faut avoir quelque chose à fêter... remarqua Éliana.
– Pourquoi pas le nombre de jours supplémentaires que nous passerions ensemble en te maintenant constamment légèrement fatiguée ? »

La jeune fille ne répondit pas, cette fois. Célinda, consciente de la détresse de son amie et bien que la cause de celle-ci lui fût inconnue – « Pour le moment seulement... » se disait-elle –, décida d'aller à son secours :

« Je veux bien mais... enfin, on ne pourra jamais veiller vingt-quatre heures sur vingt-quatre sept jours sur sept sur elle...
– On se relayera pour dormir...
– Tu as une vision bien étrange de la vie en couple, toi...
– Que veux-tu dire ?
– Rien à part le fait que deux personnes en couple ont parfois besoin de... faire des choses... si elles ne veulent pas que l'équilibre de leur union n'en pâtisse... Pas dès le début bien sûr mais... Je veux dire, quand on sera plus grands, on aura bien envie de... enfin, il y aura forcément des moments où nous ne pourrons pas surveiller Éliana...
– Elle n'aura qu'à nous promettre de ne pas s'endormir...
– Si tu crois que c'est facile de ne pas dormir lorsqu'on tombe de fatigue...
– On n'aura qu'à demander à quelqu'un de lui tenir compagnie, dans ce cas, si tu vois ce que je veux dire...
– Hum... fit Célinda en rosissant légèrement. Tu voudrais obliger Éliana à... coucher avec... quelqu'un ?
– Pas du tout ! Quoi que ce puisse être une bonne idée mais non, loin de moi l'idée d'obliger quelqu'un – surtout un ou une ami(e) – à... faire quoi que ce soit !
– Je préfère ça... Mais que ferait donc Éliana et la personne pendant que nous... enfin...
– Je ne sais pas, elle trouvera bien quelque chose à faire avec elle...
– Inutile de compter sur moi pour aider cette personne à faire quoi que ce soit, ces soirs-là ! s'exclama Éliana en rougissant afin de venir à son tour au secours de son amie, se demandant si le jeune homme était au courant de son secret.
– Vous êtes de mèche contre moi, toutes les deux, maintenant ?
– Je...
– Non ! Non ! Bien sûr que non ! contredit Célinda, apeurée à l'idée de causer de la peine à son ami récemment retrouvé. Je... Enfin, ce n'est ni humain ni Poké-humain de maintenir une personne dans un état de fatigue constant pour la garder près de soi ! C'est de l'égoïsme à l'état pur !
– Mais... c'est que... Elle est tout de même ton amie d'enfance... et mon amie aussi... Je croyais que tu aimerais qu'elle reste pour toujours à tes côtés...
– Oui mais je t'ai, toi, maintenant ! fit remarquer Célinda.
– Je... Ok, j'abandonne, tu as gagné. » finit par dire le garçon, las de cette résistance farouche.

La jeune fille tourna la tête vers son amie qui jubilait intérieurement. Celle-ci lui adressa un clin d'œil en guise de remerciement. Mais les mots qu'elle avait prononcés, Célinda ne les pensait pas le moins du monde ; il était vrai qu'elle avait à présent Vitalio, mais Éliana était tout de même son amie d'enfance, comme le garçon l'avait souligné... Quelle était donc la raison de cette dernière pour vouloir absolument s'éloigner d'eux ? Une explication qu'elle exigerait dès que possible de la part de son amie...

« Tu me fais pas la tête, quand même ? s'enquit Célinda en tournant la sienne pour voir Vitalio.
– Non, bien sûr que non...
– Vraiment ? »

Devant l'insistance de son amie, le jeune homme tourna la tête vers elle et voulut la détourner presque aussitôt lorsqu'il s'aperçut qu'elle cherchait simplement à l'embrasser. Mais Célinda fut plus rapide que lui ; elle posa une main – celle qui entourait auparavant la taille de son amie – contre sa joue pour l'empêcher de pivoter à nouveau la tête et plaqua ses lèvres contre les siennes... Mais à peine les eût-elle frôlées que les traits de Vitalio disparurent pour laisser place à ceux de Ténébrax. Célinda, muette d'étonnement, ne réagit pas immédiatement au baiser que lui fit l'intrus. Ce dernier se pencha sur elle ce qui la fit s'allonger sur le canapé – où était donc passée Éliana ? La jeune fille tenta de se défaire du poids de Ténébrax sans succès. Ce fut donc allongés l'un sur l'autre sur le canapé du salon que le – véritable ? – Vitalio les découvrit alors qu'il franchissait le pas de la porte d'entrée. Il allait tourner les talons, une expression de tristesse infinie et de mépris absolu sur le visage, lorsqu'il surprit la détresse dans le regard bleu ciel de son amie. Il se jeta alors sur lui et envoya valser son adversaire au dehors de la maison sans trop de difficulté.

« Tu ne supportes pas de perdre, hein ? Eh bien moi, je ne supporte pas les tricheurs ! »

Et Vitalio claqua la porte d'entrée pour retourner auprès de Célinda.

« Je... Ça va Célinda ?
– Je... Qu'est-ce qui peut me faire croire que c'est vraiment toi, Vitalio, et non pas une des projections de l'esprit Pokémon de Ténébrax ?
– Je ne sais pas moi... Tu n'as pas une question dont tu es sûre que je sois le seul à détenir la réponse ? »

« Ça ne prouverait rien... Ténébrax lirait sans aucun mal la réponse à ma question dans mon esprit... Peut-être même la saurait-il déjà... »

Avant d'avoir pu réfléchir à une ruse pour percer la vraie identité du jeune homme qui lui faisait face, la porte s'ouvrit une nouvelle fois, laissant apparaître un autre Vitalio. Ce dernier déclara en s'approchant lentement de son sosie :

« D'une, c'est toi qui ne supporte pas de perdre ; de deux, c'est moi qui ne supporte vraiment pas les tricheurs... Et de trois, j'ai découvert ton point faible, et tu vas prendre cher...
– Vraiment ? »

Le Vitalio qui venait d'entrer saisit par le col sa copie. Sa main libre s'illumina alors qu'il la fermait pour former un poing qui frappa bientôt. Fort. Une attaque Close Combat qui laissa son adversaire de marbre l'ombre d'un instant. Les contours de la silhouette du jeune homme vacillèrent alors pour laisser place au corps de Ténébrax. Celui-ci se releva en s'époussetant tout en demandant :

« Je serais bien curieux de savoir comment tu as fait pour le découvrir...
– Notre combat, tout à l'heure... As-tu donc la mémoire si courte ? ironisa Vitalio, en préparant une nouvelle attaque de type Combat.
– Je... Non, bien sûr. »

Et Vitalio frappa de nouveau. Sans aucun regret. Sans aucun remord, il se mit de nouveau en position de Combat. Alors qu'il allait faire profiter son adversaire d'une nouvelle attaque dont le Type était avantageux face à sa nature, celui-ci cria grâce en rampant à reculons jusqu'à rencontrer le mur derrière lui. Vitalio retint son coup, le temps de lui dire :

« Pourquoi t'épargnerais-je ? Donne-moi une seule bonne raison d'arrêter de te ruer de coups, et peut-être arrêterai-je...
– Je... Je... C'est grâce à moi si les gens rêvent ! balbutia Ténébrax, toujours à terre.
– Mauvaise réponse !
– Nooon ! s'écria le garçon à terre, fixant stupidement le poing de son adversaire, arrêté à quelques millimètres de son visage.
– Qu'y a-t-il encore ?
– Je... Ne me frappe plus... Je ne résisterai pas à une autre attaque...
– Je ne crois pas non plus, en effet.
– Je... Laissez-moi partir, je ne vous ferais plus jamais souffrir !
– C'est trop tard !
– Non Vitalio ! s'exclama Célinda en se postant entre les deux garçons.
– Mais...
– Il n'y a pas de mais ! Ténébrax ?
– Oui ?
– Est-il vrai que tu crées les rêves des autres ?
– Je... je le peux, oui...
– Alors tu peux partir, mais à une seule condition !
– Laquelle ?
– À condition que tu fasses s'évaporer toutes tes projections, si jamais il en existe encore ; que ton entreprise abandonne les recherches que tu lui as confiées, et que tu ne fasses plus jamais usage de tes pouvoirs macabres, ou alors seulement dans le but de faire le bonheur autour de toi, et non plus le malheur. Tu m'as bien comprise ?
– Je... Oui.
– Parole de Pokémon ?
– Parole de Pokémon.
– Bon. Allez, relève-toi ! ordonna Célinda en tendant une main secourable à Ténébrax.
– Je... merci.
– Ce n'est pas la peine de me remercier.
– Allez, pars ! Et ne reviens jamais ! » cria Vitalio à l'adresse du jeune homme, en utilisant une attaque Hurlement.

Les trois jeunes gens – Éliana venait de réapparaître – contemplèrent un instant la porte d'entrée de la maison que Ténébrax venait tout juste de fermer.

« Tu es sûre que la parole d'un Pokémon est fiable ?
– C'est ce que le tien a dit, en tout cas... expliqua Célinda.
– Oui mais... d'un certain point de vue, le Pokémon de Ténébrax et le mien se ressemblent... Ils semblent aussi perfides l'un que l'autre...
– Peu importe, après tout. N'a-t-on pas découvert son point faible ?
– Tu as raison...
– Bon, maintenant qu'on est enfin tranquilles, je pense qu'on va pouvoir se détendre un peu... fit Éliana sur un ton mystérieux.
– C'est-à-dire ? l'interrogèrent de concert ses deux amis.
– Eh bien, que diriez-vous d'aller faire un saut à une plage ?
– Ma foi, pourquoi pas... Qu'en dis-tu, Vitalio ? »

Le garçon resta muet.

« Ne nous dis pas que tu ne veux pas exhiber tes beaux pectoraux en notre présence, je ne te croirais pas ! plaisanta Éliana. Et ne dis pas non plus que tu n'as pas de maillot, mes metavêts feront parfaitement l'affaire... Oui, ils peuvent également se transformer en maillots de bain ! confirma la jeune fille devant l'air interrogateur du jeune homme. Bon, on va dans ta chambre, Célinda ? Il faut absolument que tu voies la collection de maillot de bain que j'ai réussi à cataloguer... »

L'interpellée s'exécuta en murmurant un « À tout à l'heure » teinté de tristesse au garçon. Une fois dans la chambre, Célinda interrogea pensivement son amie :

« Je... Tu crois que Vitalio ignorera une nouvelle fois notre conversation ?
– Maintenant, oui... répondit pensivement Éliana, un sourire aux lèvres. Pourquoi ?
– Je... Pourquoi veux-tu t'éloigner de nous dès que possible ? Pourquoi ne veux-tu pas accepter le plan de Vitalio ? Tu auras juste à être un peu fatiguée, pas beaucoup pour te retenir ici, non ?
– Je... Oui mais, si je reste ici, je vais gêner l'épanouissement de votre couple... Et puis, pense un peu aux autres ; quelqu'un attend quelque part mon amitié... Tu aurais voulu, toi, s'il y avait eu quelqu'un avant toi, que je le quitte un peu plus tard et que tu pâtisses ainsi de mon absence ?
– Je... Non, bien sûr, mais il n'y a jamais eu quelqu'un avant moi...
– Eh bien tu n'as qu'à prendre ça comme une nouvelle épreuve pour lutter contre ton égoïsme...
– Je... Ce n'est pas si facile...
– Il faudra pourtant bien que je m'en aille...
– Promets-moi que ce sera le plus tard possible ! supplia Célinda.
– Ne laisse pas ton égoïsme prendre le dessus, Célinda...
– Je... tu caches un autre prétexte derrière cette envie de départ si pressante... »

Éliana laissa errer son regard dans le vague, l'espace d'un instant.

« J'ai vu juste, ne le nie pas !
– Je... oui.
– Et quel est cet autre prétexte que tu ne voulais pas dévoiler ?
– Tu veux vraiment le savoir ? questionna gravement Éliana.
– Je... Oui. Nous sommes amies, on ne se cache rien, pas vrai ?
– ...
– Allez, dis-moi ce qui te pousse à vouloir nous quitter dès que possible, Vitalio et moi ! S'il te plaît... »

Cette dernière supplication eut raison des dernières réticences d'Éliana.

« Je... je redoute votre premier baiser... confia timidement la jeune fille.
– Pourquoi ?
– Je... je suis définitivement tombée sous ton charme, lors de notre baiser... Et je crains de ne pas supporter de devoir vous regarder vous embrasser... vous enlacer... à longueur de journée, délaissant notre amitié... Je sais ce que tu vas me dire, poursuivit Éliana : que mon discours sur l'égoïsme était bien beau, mais que je le suis au moins autant que toi mais... c'est plus fort que moi. Je voudrais pouvoir rester à tes côtés, qu'on puisse continuer à faire un bout de chemin ensemble mais je ne m'en sens pas la force...
– Ce n'est pas vraiment ce que j'appellerais de l'égoïsme... Tu as bien le droit de penser à toi, pour une fois ! Ce n'est pas un crime ! Et puis, Vitalio et moi ne sommes pas obligés d'exprimer notre Amour devant toi, tu sais...
– Votre absence n'en sera que plus douloureuse pour moi ; je ne cesserai de penser à ce que vous pourriez bien faire à l'instant même où vous me laisseriez seule...
– Je ne sais pas moi, je pourrais isoler Vitalio de temps en temps et...
– Serais-tu donc devenue amoureuse de moi ?
– Je... non, enfin... je ne pense pas. Mais si ça peut nous permettre de rester ensemble, je serais prête à...
– Vitalio se rendrait compte de la supercherie, un jour où l'autre...
– Il comprendra...
– J'en doute. Si une chose est sûre, c'est qu'il me haïra, à partir de ce jour-là...
– Peut-être n'a-t-il rien contre les amours triangulaires ?
– J'en doute fort : Vitalio rechigne de plus en plus à te partager...
– Pour un peu, on forme presque une famille, tu sais : toi tu serais la mère, Vitalio le père et moi la fille...
– Je préfère encore être ta sœur à ta mère... Et puis, tu en as déjà une.
– Un père aussi, tu sais... Ça ne t'emballe pas plus que ça ?
– Qu'est-ce que tu entends par là ? Tu voudrais... faire croire aux éventuelles mauvaises langues que nous formons une famille, Vitalio, toi et moi ?
– Je ne vois pas de meilleure couverture...
– Réfléchis donc un peu, Célinda : il y aura forcément un moment où... enfin, on finira bien par se rendre compte que nous sommes plus proches d'être sœurs que mère et fille...
– Bon sang, il existe forcément une solution !
– Écoute-moi bien, Célinda ; je ne remplacerai jamais Vitalio, comme tu l'as si bien dit auparavant, et surtout pas au lit. Et je crois que ce point est très important pour toi, pas vrai ?
– Oui, mais moins que celui de t'avoir près de moi...
– Je suis prête à parier le contraire...
– On trouvera forcément un moyen de compenser cette envie...
– Je refuse de coucher avec toi !
– Vraiment ? Et pourquoi donc ?
– Je... j'aurais trop peur de te décevoir... Et puis je ne vaux pas un homme !
– Tu vaux tous les amis du monde !
– Mais pas tous les amants ! Ne te fais pas tant de mouron, Célinda, Vitalio me remplacera aisément, j'en suis convaincue...
– Personne ne peut te remplacer !
– Celui qui s'affirme indispensable est un prétentieux, celui qui croit l'être un imbécile. Je crois réellement qu'il faut te faire à l'idée de notre séparation, Célinda. Je sais que tu détiens la force de franchir cette nouvelle étape de ta vie.
– Je n'en suis pas aussi sûre... En revanche, je suis certaine que pour moi tu vaux bien un homme au lit...
– Célinda, arrête de me tenter ou tu vas finir par le regretter !
– Comment peux-tu le savoir ? On n'a fait qu'un tout petit baiser de rien du tout...
– Et quelques caresses... ajouta Éliana, pinçant les lèvres en voyant que son baiser n'avait pas réellement marqué son amie.
– Oui, mais c'est bien peu...
– Tu plaisantes, c'est déjà trop ! J'ai l'impression que tu es maintenant accroc à moi au lieu de Vitalio...
– Pourquoi ne pourrais-je pas être... "accroc", comme tu dis, à vous deux en même temps ?
– Tu as raison, je me vois très bien, avec toi et Vitalio dans le même lit... Non mais où vas-tu donc chercher tout ça ? s'indigna Éliana.
– Pourquoi toi ne veux-tu pas essayer de coucher avec moi ?
– La vraie question est : pourquoi toi y tiens-tu tellement ?
– Je n'ai pas beaucoup l'impression d'avoir payé ma dette envers toi...
– Mais si ! Je t'ai déjà dit en plus que tu en avais peut-être trop fait...
– Oui, mais tu ne m'as pas dit pourquoi...
– Tout simplement parce que Ténébrax a lu tous tes désirs, toutes tes peines dans mon esprit, ce qui lui a permis de créer des cauchemars plus vrais que nature.
– Moi aussi je me suis révélée impuissante face à lui, et à bien plus de reprises que toi, sans doute... Et puis, avec le recul, ce n'était pas si mauvais que ça...
– De souffrir ?
– Non, les cauchemars.
– Et pourquoi donc ?
– Parce que j'y ai appris pas mal de... choses qui pourraient se révéler utiles par la suite, notamment une ou deux façons supplémentaires – par rapport à ce que tu m'as déjà enseigné – de charmer par des gestes... et infiniment plus pour charmer une fille...
– Je doute que cela puisse te servir un jour ou l'autre... Et si tu as appris des manières autres que celles que je t'ai "enseignées", comme tu dis, eh bien je te conseille de les oublier le plus tôt possible... La noirceur dans laquelle baigne l'âme de Ténébrax n'a rien de... moralement correct.
– Ce serait pourtant un moyen de me racheter pour tout ce que je t'ai fait endurer...
– Mais puisque je t'ai dit que tu en as déjà fait suffisamment !
– Pour te contenter. Et ce n'est pas suffisant pour moi. Et puis, dans quel esprit Ténébrax a-t-il lu tes peines, tu peux me le dire ?
– Dans le mien.
– Tu as l'air bien sûre de toi.
– Parce que c'est vrai, c'est dans mon esprit et dans le mien seulement que Ténébrax a lu les faiblesses de chacun d'entre nous. Cesse de chercher à me redevoir quelque chose, tu as déjà fait le nécessaire, pourquoi en douter alors que je te le dis ?
– Parce que tu cherches seulement à me protéger de toi alors que...
– Ne dis pas de pareilles sottises. Tiens, je... je ne te l'ai jamais dit – du moins pas explicitement –, mais j'ai toujours rêvé d'être ta sœur... jusqu'à ce que nous nous embrassions, parce que deux sœurs ne s'embrassent pas sur la bouche...
– Deux amies en revanche... mais la question n'est pas là ; il existe des choses bien plus profondes qu'un baiser passionné et des caresses superficielles que deux filles – ou une fille et une femme dans notre cas – peuvent échanger...
– Je... je... je ne suis pas plus femme que toi ! Enfin, peut-être en apparence, mais la différence s'arrête là ! Et puis, de toute façon, on ne pourra jamais aller plus loin, alors arrêtons de parler de ça et...
– Comment ça, "on ne pourra jamais aller plus loin" ?
– Je... Tes metavêts... Je les ai... modifiés pour qu'ils s'opposent à toute... intrusion de ma part...
– Mais... si je les enlevais moi-même ? s'enquit Célinda, ahurie devant la modification de son amie.
– Ils te retrouveront dès que je t'approcherai de trop près... en fait, ils m'empêcheront tout court de te voir toute nue...
– Des sortes de sous-vêtements qui seraient aimantés par mon corps lorsque tu serais dans les parages ? Je serais curieuse de voir ça... fit Célinda en commençant à se dénuder – lorsqu'elle devina le projet de son amie, Éliana se retourna pour ne pas la voir. Pourquoi me tourner le dos ? Cette modification serait-elle inventée ?
– Non mais... si ça ratait...
– Aurais-tu à ce point si peu confiance en toi ? Voilà qui ne te ressemble pas...
– ...
– Tu ne devrais pas : je n'arrive même pas à les faire ne serait-ce que bouger... Quand as-tu donc pris cette initiative ? questionna Célinda en faisant se retourner son amie et en posant ses mains sur ses épaules.
– Je... Depuis que je te les ai offerts... J'avais trop peur de déraper...
– C'est ce que tu as pourtant fait... enfin, ce qui est arrivé.
– Oui mais... je ne voulais pas nous empêcher de nous embrasser, si jamais tu le voulais...
– Mais je désire bien plus que ça ! s'exclama la jeune fille, indignée.
– Moi aussi, si tu savais à quel point...
– Tu peux annuler la modification, au moins ?
– ...
– Non ?
– Si. Mais je ne le ferais pour rien au monde.
– Vraiment ? Pourquoi ?
– Tu n'as pas à céder à mes... caprices.
– Je ne cherche pas à y céder, mais à les expérimenter !
– Je ne vois pas la différence...
– Céder à tes caprices, c'est le faire contre sa volonté, tandis que les expérimenter, c'est le contraire. D'ailleurs, depuis quand en as-tu de pareils ?
– Depuis... longtemps.
– Pourquoi ne pas m'avoir parlé de... m'en avoir parlé plus tôt ?
– J'avais peur de te pervertir à un point où tu serais incapable de retourner en arrière...
– C'est pourtant ce que tu as fini par faire... Enfin, je ne pense pas être déjà rendue au "point de non-retour", bien entendu, mais toi, tu as bien franchi la limite, alors pourquoi pas moi ?
– Non, moi, je suis encore à la limite du basculement...
– Basculement irréversible, je présume ?
– Je n'en sais trop rien...
– Tu veux que je te dise ? Tu ne le sauras pas tant que tu n'auras pas essayé !
– Et toi, alors ?
– Assez pensé à moi, Éliana ! J'ai l'impression qu'à tes yeux, seul mon Bonheur compte !
– C'est la vérité.
– Eh bien tu sais ce qui me ferait vraiment plaisir ?
– Je...
– Ce serait que tu vives enfin tes rêves, Éliana ! Voilà, pourquoi tu vis ! Pour faire mon Bonheur, donc pour vivre tes rêves !
– Tu ne sais rien de mes rêves...
– Je ne les imagine que trop bien, au contraire ; alors tu vas me faire le plaisir de désactiver cette modification sinon, je serais malheureuse ! Et toi aussi, ce qui me rendra encore plus malheureuse !
– Je savais que je faisais une erreur en te disant que ce que je désirais plus que tout au monde, c'était t'embrasser... se lamenta Éliana. C'est le plus beau présent que tu pouvais me faire, jamais je n'aurais espéré plus beau présent de ta part, tu me l'as fait, et voilà qu'à présent, il se retourne contre moi ...
– Ne sois pas si défaitiste ; regretterais-tu à ce point notre baiser ? s'enquit Célinda.
– Je... Non, pas du tout !
– Alors où est le problème ?
– Si jamais tu devenais définitivement... ce que je ne veux pas que tu deviennes ?
– Vitalio sera là pour me ramener sur le droit chemin, je lui fais confiance ; tout ce que je veux, c'est que tes rêves deviennent réalité, un point c'est tout !
– Mon seul rêve a toujours été de trouver celui qui m'aimerait telle que je suis...
– Vraiment ?
– Oui... enfin, jusqu'à ce que tu me plaises...
– Eh bien profitons autant qu'il soit permis des derniers moments que nous aurons à passer ensemble, et trouve-toi ensuite le garçon de tes rêves, qu'il te remette sur le droit chemin comme Vitalio s'y emploiera pour moi !
– Mais je n'aurais pas le temps de le trouver !
– Prends déjà le temps de le chercher ; le Bonheur n'est jamais loin, il suffit d'ouvrir ses yeux, ses oreilles... et son cœur.
– Le mien t'appartient déjà ; celui que j'aime ne trouvera en tout et pour tout qu'une coquille vide, lorsqu'on se rencontrera...
– Je t'interdis de dire ça ! Tu m'as promis...
– ... d'essayer de trouver mon âme sœur. Pas de ne pas t'offrir mon cœur. De toute manière, c'est déjà fait.
– Je suis certaine que lorsque tu trouveras ton âme sœur, ton cœur battra bien plus vite et plus fort pour elle que pour moi...
– Si tu le dis...
– Alors, tu désactives la modification de mon metavêts ?
– Je... Il faut que je réfléchisse. Et puis on ne va pas faire... "ça" maintenant ! Tu n'oublierais pas Vitalio, quand même ?
– Il n'osera pas entrer dans ma chambre, pas si on ne le lui autorise pas...
– Je... je préfère mieux pas essayer...
– Pourquoi tout est-il tout à coup si compliqué ? Tout bien réfléchi, j'aurais mieux fait de ne pas t'autoriser à m'embrasser, puisque cela m'aurait, apparemment, permis de te garder indéfiniment auprès de moi...
– À t'entendre, je croirais presque que tu m'aimes plus que Vitalio...
– Je t'aime au moins autant que lui...
– À quoi ont donc servi tous nos efforts pour que tu parviennes à conquérir Vitalio ?
– À ce qu'il me remette dans le droit chemin lorsque je m'en écarte trop, je pense... Mais le problème n'est pas là ; je t'en supplie, reste avec moi...
– Et ainsi prendre le risque d'anéantir tous les efforts que nous avons faits ? Désolée, Célinda, mais je ne peux pas faire ça...
– Pourquoi pas ? À cause de tes principes ?
– On ne fiche pas en l'air un travail mené avec tant de difficultés, Célinda !
– ...
– Et puis, de toute façon, tout cela se serait forcément passé un jour où l'autre ! Peut-être pas de la même manière, mais notre relation se serait inévitablement conclue sur notre séparation. Je... j'aimerais que tu me croies quand je te dis que je ferais tout pour rester mais... on n'échappe pas à sa Destinée. Tu le sais aussi bien que moi. La mienne est de conduire au Bonheur certaines personnes particulières, le tien de finir avec Vitalio, point final. Bon, choisis un bikini qui te plaît parmi ceux disponibles en magasin et allons-y... fit Éliana en se dirigeant vers la porte.
– Tu ne risqueras pas de regretter d'avoir laissé passer ta chance ? lui demanda Célinda, ce qui la fit stopper net devant la porte. Tu ne veux même pas un dernier baiser ? insista la jeune fille, sentant les dernières défenses de son amie sur le point de s'effondrer.
– Je... comment ai-je pu être idiote au point de vouloir transformer notre Amitié en... Amour ?
– Toi, idiote ? Laisse-moi rire... s'adressa pensivement Célinda à son amie en s'en approchant par derrière. J'ai une dernière question...
– O... oui ?
– Tes sous-vêtements à toi ne sont pas protégés contre moi ? questionna la jeune fille en entourant le ventre de son amie de ses bras puis en le caressant amoureusement.
– Je... je suis désolée... s'excusa Éliana.
– Pour quoi ?
– Pour ça... »

La jeune fille, les larmes aux yeux, fit volte-face tout en s'arrachant – difficilement, sans aucun doute – à l'étreinte de son amie pour la gifler. Puis elle quitta la pièce, laissant Célinda seule, hébétée mais sans aucun doute les idées plus claires...