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Justice, gloire et Graffias. de illapa



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» Auteur : illapa - Voir le profil
» Créé le 30/04/2010 à 00:25
» Dernière mise à jour le 01/05/2010 à 14:06

» Mots-clés :   Aventure   Humour   Région inventée

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5 - Bienvenue sur mon Boulevard...
Le soleil n'était pas encore couché lorsque nous quittâmes le centre, mais le couchant allongeait l'ombre des grands bâtiments, et ils faisaient déjà suffisamment sombre pour m'effrayer. A peine avions nous tourné le coin de la première rue que les premiers yeux rouges apparurent, dans les recoins les plus sombres, derrière les fenêtres brisées et parfois même au milieu des murs. Mademoiselle Joëlle nous avait recommandé de ne pas parler entre nous. Les spectres aimaient terroriser leurs victimes, en provoquant des hallucinations ou en changeant d'apparence. Moins ils en sauraient sur nous, moins on avait de chance d'être piégé.

Le premier d'entre eux nous attaqua quelques rues plus loin. C'était un fantominus. Paniqué, je voulus me réfugier derrière Ikse, mais Leveinard s'y trouvait déjà.
Ce qui me permit de découvrir que mon attaque tranche-nuit était redoutable contre eux. Gloria Arceus ! J'avais un moyen de survivre dans cet asile d'effroi ! Soudain fier de ma force, j'avançais avec plus d'assurance, la queue bien haute comme tout bon mâle dominant, et gare à quiconque m'approcherait ! Tremblez fantominus, le Grand Graffias est dans la place !

La nuit finit par tomber complètement, ce qui m'inquiéta un peu, mais les fantominus n'étaient pas plus forts, juste plus nombreux. Heureusement, Leveinard veillait sur moi avec son E-coque.
Et après un quart d'heure de recherche, on vit ce qu'on cherchait au milieu de ce qui avait été un boulevard. Le caninos et le lixy étaient dos à dos, essayant vaillamment de repousser les assauts de spectrums en enchaînant les Flammèches et Étincelles.
Puis le petit lion bleu nous vit et l'annonça à son compagnon. Leurs assaillants en profitèrent pour charger. Sans même attendre l'ordre de Ikse, je rampais à leur secours à grands coups de Tranche-nuit. Derrière moi, mon dresseur beugla :
-Caninos ! Lixy ! On est venu vous sauver !
Comme si on aurait pu venir là en promenade de santé ! Idiot !
Sous nos efforts conjugués, les pokémon gazeux reculèrent...

Et soudain, ils se mirent en ligne façon haie d'honneur, figés, au garde-à-vous. Un ectoplasma s'avança entre eux d'un pas conquérant. Il tenait une canne et portait un drôle de chapeau (qu'on appelait chapeau haut de forme, mais je ne le sus que plus tard.). Il s'adressa à l'assemblée en langage compréhensible pour les humains.
-Voilà qui est intéressant. Des invités ! Cela faisait si longtemps ! Pourquoi personne ne m'a-t-il prévenu ?
Un spectrum répondit :
-On essayait de les attraper pour vous faire la surprise, Monsieur.
-Vraiment ? Oh, ça c'est trop gentil !
Comme un seul fantôme, les subordonnés s'élancèrent sur nous...
Comme une seule victime, on s'élança dans la direction opposée, les repoussant tant bien que mal pour les empêcher de nous mettre la griffe dessus.

Et bien qu'ils fussent plus nombreux et plus rapides, on parvint étrangement à les semer. Lorsqu'on se rendit compte que plus aucun ne nous suivait, on s'arrêta enfin pour souffler. Je ne sentais plus mes pauvres pattes. Le chien rouge haletait comme un ventilateur cassé, et le lionceau bleu semblait à moitié mort. Ikse et la leveinard se soutenaient mutuellement pour ne pas tomber.
Et bien qu'il ne soit pas en mesure de comprendre notre réponse, l'humain du groupe demanda :
-Ils sont tous partis ? Ils ne vont pas revenir ? Que s'est-il passé ?

A notre grand effroi, l'ectoplasma réapparut.
-Bienvenue, bienvenue à Six-thés ! Prenez place je vous en prie !
Surgi de nulle part, un tabouret était apparu derrière Ikse. Qui eut le bon sens de refuser de s'assoir.
-Qui êtes vous ? Qu'est ce que vous allez nous faire ?
-Allons, ce n'est pas un ton à employer quand on demande quelque chose à quelqu'un, jeune homme. Il va falloir revoir vos manières. Je me nomme Dhur, mais je suis plus connu comme étant le baron Jean-Marie Gauthier de Tombobscure. Bienvenue !
Oubliant la remarque sur ses manières, mon dresseur demanda de but en bl... en violet fantôme :
-Vous allez nous manger ?
-Non... Je vais... Vous lire des poèmes !
Il y eut un gros bl... noir. Ce n'était vraiment pas crédible. Avec une hésitation, le baron machin truc se renseigna :
-Vous... aimez la poésie... hein ?
-Et après, vous allez nous dévorer ?
-Non, après nous débattrons de la futilité de la mélancolie face à la beauté subtile du monde.
-Et ensuite ?
-Il sera probablement l'heure de dîner...
Ikse prit un ton triomphant des plus exaspérants :
-Ah ! Là, vous allez nous ajouter au menu !
-Hm, non, mais j'ai là de délicieux lavacookies, et un thé qui s'accorde à merveille avec.
-Et après, vous nous croquez ?
-Non, mais nous pourrions méditer sur l'élaboration d'un poème à la gloire de la lune.
-Et ensuite vous allez nous dévorer !
-Ensuite, jeune homme, il sera l'heure où l'aurore aux doigts de rose poindra et il nous faudra retourner dans ce doux pays onirique....
Mon dresseur parut presque déçu.
-Mais alors, vous n'allez pas nous manger ?
Son interlocuteur répliqua timidement :
-Non. Mais, si ça peut vous aider, on peut vous hypnotiser...

Visiblement frustré, Ikse s'indigna :
-Pas question ! On veut pas faire tous ces trucs ! On veut rentrer au centre pokémon ! L'infirmière s'inquiète pour nous ! Et franchement, on a marché toute la journée, on est claqué, on veut aller dormir maintenant ! Et dans ce centre bien éclairé, pas ailleurs ! En plus je ne mange pas de lavacookies, et je me fiche de la poésie !
Le chef fantôme eut l'air profondément peiné.
-V... Vraiment ? M... mais, pour une fois que j'avais des invités... J'étais si content... Vous ne voulez vraiment pas...
-Nan ! Je m'en fiche de la poésie ! Je vais devenir justicier, moi ! Je vais mettre fin au règne de terreur des teams, et pour ça, j'ai besoin de bien dormir et selon MON rythme de sommeil !
Contre toute attente, le baron biduloir ne s'énerva pas, mais au contraire, il commença à pleurer.
-M... mais...
-Soyez raisonnable, quoi ! Si vous voulez voir du monde, partez en voyage !
-M...
-Écoutez, moi je voyage, et je pars tôt demain matin ! Si je suis là, c'est uniquement parce qu'on pensait Caninos et Lixy en danger et que la Justice se doit de protéger les faibles et les opprimés ! Maintenant si vous voulez bien m'excuser – et même si vous ne voulez pas – je n'avais pas fini de manger, et je suis sûr que tout le monde doit crever la dalle ! Hé !

Ce dernier « hé ! » s'adressait au caninos qui se frottait contre les jambes du dresseur, des étoiles pleins les yeux et laissant s'échapper un léger hurlement d'admiration. Quant à moi, je dois bien avouer que même si je jugeait mon humain aussi intelligent qu'une petite cuiller, il m'impressionnait par son cran et sa détermination. Le baron sombre-tombé semblait ruminer dans sa ba... son chapeau sur le fait de voir du monde, de voir LE monde. Avant de s'écrier :
-Adjugé vendu, p'tit homme ! Ok les gars, c'est parti ! On va découvrir le monde et écrire les plus beaux poèmes qui soient !
Une nuée de clameurs accueillit ses propos. Pas toutes enthousiaste, mais peut-être était-ce mon imagination.

Puis ils vidèrent les lieux. Voir tous ces fantômes s'envoler avait quelque chose de terrifiant. Mais néanmoins magnifique. Toutes ces volutes mauves aux reflets de lune, qui s'élevaient au dessus de nous en une immense spirale avant de disparaître dans les ténèbres...
Et soudain, on se retrouva seul comme des cons au milieu de la rue silencieuse. Si on ne tenait évidement pas compte du « Ouhouuuu » admiratif qui s'échappait du chiot de feu.
Et lentement, on se redirigea vers le centre pokémon.
Mais alors qu'on se remettait en route, pour une raison inconnue, je me retournai. L'homme mystérieux, Zhède, était là et nous contemplait de loin. Je restais quelques secondes à lui renvoyer son regard, mais la voix d'Ikse m'appelant me fit détourner le regard. Une seconde après, il n'était plus là. Ce type était vraiment très louche. J'espérais que ce n'étais pas ce genre de pervers dont on entendait parler dans les télés. Sinon... sinon je l'empoisonnerait méchamment !

Un peu plus tard, lorsque nous arrivâmes au centre, l'infirmière ne put cacher sa joie de nous revoir, et je crus l'espace d'un instant qu'elle avait l'intention de fusionner avec sa leveinard. Elle fut également ravie de revoir ses deux protégés canins.
Et tandis que Ikse lui racontait ce qu'il s'était passé, je me gavais de pâtisseries au chocolat et de thé. Ce qui me valut une nouvelle indigestion et de ne pas entendre la moitié des raisons qui poussaient mademoiselle Joëlle à rester dans ce trou paumé.

J'eus en revanche la visite du caninos et du lixy. Ils entrèrent plus ou moins discrètement (ils voulaient plus, ils eurent moins.), et se couchèrent sagement près de moi, l'air de rien.
Et il ne se passa rien.
Du moins, pendant un bon moment.
Jusqu'à ce que je craque et leur demande ce qu'ils fichaient là.
-On veille sur le sommeil de notre sauveur !
Le chien rouge avait l'air fier de lui. Mais je n'entendais pas me laisser pourrir mon indigestion.
-Il n'est pas ici. Il est dans la salle du réfectoire.
Mais ils ne bougèrent pas.
-Vous comptez rester là longtemps ?
Pensant probablement que j'étais plus d'humeur à discuter, le clébard pencha la tête, se mit à agiter la queue et répliqua :
-On est là depuis si longtemps, un peu plus ou un peu moins...
-Vous me voulez quoi ?
-Tout entier !
Quels idiots.
-Je ne vous demande pas comment vous me voulez, mais ce que vous me voulez.

Le lixy intervint :
-Grand frère, il est sûrement fatigué. On pourra parler demain !
J'étais un peu étonné.
- « Grand frère ? »
-Oui, c'est mon petit frère. Même père, deux mères différentes. Tu t'appelles donc Graffias ?
-Non, je ne m'appelle pas. Ce sont les autres qui m'appellent. Moi je porte un nom.
-C'est un nom original.
-Moins que de porter un oui.
Le pokémon rouge sourit. Son frangin avait les yeux écarquillés et étrangement brillants. Voyant qu'un silence allait s'installer et pressé d'en finir avec leur compagnie, j'enchainais :
-Et quel est votre « oui » à vous ?

Soudain très enthousiaste, le lionceau me sauta presque dessus.
-Moi c'est CorLéonis ! Enchanté !
-Je suis appelé CorCaroli. Enchantant.
-Ravi de faire votre connaissance. Je peux dormir maintenant ?
-Je voulais te demander quelque chose avant.
-Vous ne pouviez pas le demander plus tôt ?
-J'aimerais vous accompagner toi et ton dresseur.
Sous le choc, je ne répondis pas. Le lixy ajouta :
-Moi aussi, moi aussi !
Bizarrement, le clebs rouge fut aussi étonné.
-Quoi ? Une minute petit frère, ce sera sûrement très dangereux !
-Je veux aller avec Graffias ! Ce sera mon Maître ! Je vais devenir fort comme lui ! Et, et...
Les étincelles qu'il avait dans les yeux durent descendre lui brûler la gorge, parce qu'il ne trouva plus la fin de sa phrase. Je demandais au clébard...
-Et toi, tu veux venir pour quelle raison ?
… qui prit l'air gêné.
-Parce que... Parce que Ikse croit encore à la justice !
-Et ?
-Ben... C'est tout.

J'étais atterré. Quelle bêtise.
-Tu veux suivre ce mec uniquement parce qu'il a la tête farcie d'idées bizarroïdes et de rêves utopiques ?
Un peu vexé, il rétorqua :
-Parce que tu le suis pour quoi, toi ?
-Je suis son premier pokémon. J'ai pas eu le choix.
Le chien parut quelque peu déçu de ma réponse, mais il ajouta :
-Mon ancien maître croyait en la Justice. Il s'est battu pour son idéal toute sa vie, jusqu'à la mort. Il disait toujours qu'il faut des rêves pour avancer.
-Je dirais plutôt qu'il faut avoir l'estomac plein pour avancer.
Et une vilaine réminiscence me fit ajouter :
-Enfin, pas trop quand même, sinon tous les chemins mènent aux chiottes.
-Ça, ça tient plus du cauchemar. Ce qu'il voulait dire était plus met-euphorique.
-A croire que le cauchemar aide aussi à avancer.

Un léger silence s'installa, vite rompu par CorLéonis.
-Alors t'es d'accord pour qu'on vienne avec toi ?
Je n'avouai pas que je n'en savais rien. Avoir de la compagnie pourrait être amusant, mais la leur... Remarque, ils ne pourraient pas être pires que Ikse. Mais si c'était pour avoir un Ikse version pokémon et son ombre...
-Fais ce que tu veux. Je ne suis pas ta mère, je n'ai pas à décider pour toi ce que tu veux faire de ta vie.
J'eus droit à une danse de joie, à un câlin du lixy, et enfin à la paix à laquelle j'aspirais.

Le lendemain, Ikse me réveilla trop tôt, m'obligea à me gaver « pour prendre des forces », après quoi il fit ses adieux à l'infirmière Joëlle sur le seuil du centre. J'avais été étonné de ne pas encore avoir vu les deux quadrupèdes, mais c'est sans surprise que je les vis s'avancer solennellement vers nous, une pokéball dans la gueule, puis déposer ces objets aux pieds de mon dresseur. L'effet fut un peu gâché lorsque CorLéonis ne parvint pas à recracher la sienne.
Cet idiot d'Ikse eut besoin de l'aide de l'infirmière pour comprendre qu'il gagnait plus que deux pokéball (enfin, une pyroball pour le caninos et une rapide ball pour le lixy.) Il y eut une nouvelle séquence larme entre les deux frères et leur nounou Joëlle, et enfin, on se mit en route.

La ville paraissait extrêmement étrange sans la colonie de fantominus. On s'attendait à ce qu'une telle ville soit angoissante, et elle n'était plus rien. Plus rien que vide et silencieuse, comme figée dans le temps et l'espace. C'était perturbant. CorCaroli nous guida jusqu'à la sortie, tandis que son petit frère gambadait autour de nous en me posant milles questions sur ce que j'avais déjà vu ou pas.

Enfin, on quitta la ville pour ce qui avait été des champs de thé. Avec les deux autres, c'était moins fatigant de voyager. Je n'étais plus obligé de me farcir les sempiternels idiots en série tout seul. Et le petit lixy était d'une efficacité redoutable contre ces maudits piafs. CorCaroli papillonna autour de nous un moment, puis en brave toutou, il finit par retourner dans sa ball. Son frère, lui, me collait au train, la tête bien haute et la queue bien fièrement dressée dans le but de m'imiter, au point de me foncer dedans lorsque je m'arrêtais.
Mais ses petites pattes se fatiguèrent vite et il finit par imiter son fraternel. Un dresseur idiot, deux clebs qui n'étaient guère plus intelligents, et moi blasé. La Justice était mal barrée pour faire son coming-out.

« Je les ai rencontrés un soir,
Dans ma vie, ma rue, au hasard,
Ils sont restés dans ma mémoire,
Chacun rangé dans son tiroir...

Bienvenue sur mon boulevard,
Quand vient la nuit quand ma raison s'égare,
Ombres paumées, recalés de l'espoir,
Compagnons du blues et du dérisoire,

Oubliés dans les moments de candeur,
Vous revenez dès que j'ai mal au cœur,
Partager mes faiblesses et mes erreurs,
Vous êtes un peu de mes amarres,
Un peu de mon histoire,
Bienvenue sur mon boulevard
Quand vient la nuit, quand ma raison s'égare... »

J.J. Goldman, Bienvenue sur mon Boulevard.