Altaïr et Lesath 2. de illapa

C'était une journée pluvieuse. Et comme toutes les journées de ce genre, Altaïr s'ennuyait. Lesath s'était mis en tête d'attraper les fées de la pluie, il était donc parti joyeusement armé d'un parapluie.
L'absol aurait bien aimé savoir qui avait pu farcir la tête du togetic avec de telles idioties. Il aurait ainsi pu retrouver cette personne pour lui faire entrer autre chose dans la tête. Tout un attirail de griffes, pour commencer.
En bref, le pokémon porte malheur restait donc planté dans l'entrée de sa tanière à regarder tomber la pluie, espérant que son compagnon ne tarderait pas trop à revenir.

Mais ce qui arriva ne ressemblait en rien à un togetic. C'était un noctali. Il était très grand, tout en muscle et ses anneaux luisaient. Dès qu'il le vit, Altaïr voulut prendre ses pattes à son cou, mais...
a/ il fallait sortir pour cela, et il ne tenait pas à se mouiller, c'était un coup à attraper froid,
b/ l'autre l'aurait repéré et poursuivi, et malheureusement il courait plus vite que l'absol.
Ce dernier songea à aller se planquer, mais le noctali l'aurait rapidement retrouvé au fond de son trou. Il resta donc sagement assis à attendre…
-Altaïr ! Mon grand ! C'est moi !
-J'ai vu, et tu sais bien que je ne suis pas grand. Qu'est-ce que tu fiches ici ?
-Pour commencer, j'aimerais bien me mettre au sec si tu n'y vois pas d'objection. Cette pluie est vraiment pénible…
Altaïr fixa le noctali. Son père. Antarès. Qui avait osé s'allier à un humain et voyager avec lui. Qui n'était plus le bienvenu depuis que l'absol avait découvert cette trahison.
-Objection ! Tu restes dehors.
Le noctali prit un air peiné.
-Oh, tu es vraiment froid avec ton pauvre papounet…
-Plus que la pluie ? Te plains pas, les absols sont sensés vivre dans les neiges éternelles.
-Tu es cruel alors que j'ai fait tant de chemin…
-Pas pire qu'un humain.

Antarès se résolu donc à s'asseoir dehors et soupira. Les deux pokémons ténèbre se firent face.
-Nous y voilà donc.
-Toi tu y es. Je n'ai rien à te dire.
-Moi, si ! Tu sais mon grand, ils ne sont pas tous mauvais comme tu le penses. Tu devrais faire un effort pour essayer de les connaître. Ils sont tous aussi différents que nous, pokémons.
-Ils sont faibles et paresseux. Cruels et stupides.
-Ce sont des idées reçues. Et puis, ça ne te ferait pas de mal de quitter un peu ce bled pour découvrir le monde, tu sais ?
Altaïr fut vexé par « ce bled ». Il avait toujours aimé ce village. Ça allait se payer.
-A ce propos, il est où ton humain ?
-A Grenadia. Il a décidé de rester un moment, depuis le tremblement de terre. C'est sa ville natale, donc il aide à la reconstruction.
-Oh, tu t'es enfui pour me vanter le mérite de ces créatures ?
-Il m'a laissé partir. Altaïr, trésor, tu apprendrais plein de choses en voyageant ! Et tu deviendrais plus fort aussi.
L'absol ricana.
-Plus fort ? Avec les attaques pourries que j'ai hérité de toi ?
Mais le noctali était patient.
-Elles ne sont pas pourries, elles peuvent te permettre de vaincre n'importe quel ennemi, quelque soit son niveau.
-Oh, j'en regretterais presque d'avoir oublié l'attaque Vœu… Hmpf.
-Ne sois pas si ironique, je suis sincère.
-Tu es venu jusqu'ici pour me casser les oreilles avec ton charabia ?
-Non, je suis avant tout venu pour voir comment va mon grand garçon.
-Primo, je ne suis pas grand, secundo, je ne vais nulle part !
-Je voulais dire, comment tu te portes.
-Sur mes quatre pattes, et en plus je le fais sans humain.
-Tu es aussi têtu que ta mère.
-Hmpf.
Et il en était fier.
-D'ailleurs je vais passer la voir. Et quand j'y pense, trésor… Si on était sans humain ? Rien que toi et moi ? On voyagerait ensemble, comme quand tu étais petit…
-Tu ne lâches rien, hein ? C'est non.
-Je te protégerais !
-Comme quand j'étais petit ?
Un instant, Antarès parut mal à l'aise.
-Hé ! Je suis devenu très fort, tu sais ? Mon dresseur est un champion !
-Pff et il te laisserait partir comme ça, avec moi ? Seul, sans lui ? Ne me fait pas rire.
-Il le ferait.
-Et bien, puisqu'il est si formidable, retourne donc le voir.
-Non, je vais voir ta mère. Tu viens avec moi, n'est ce pas ? Ça lui ferait tellement plaisir de voir son petit garçon…

Altaïr réfléchit. Certes, aller voir sa mère était une bonne idée, mais il n'avait pas envie de devoir supporter son père et sa propagande atroce tout le chemin. Sans compter… Mais oui !
-J'irais la voir bientôt. Vas-y, je te rejoindrais chez elle.
-Trésor, je peux savoir pourquoi je partirais devant, sans toi ?
-Parce que je n'ai pas envie de voyager avec toi. Tu vas me casser les oreilles, et je dois attendre le retour de Lesath, ou ça va être une tragédie.
-Lesath ? Qui est-ce ? Ne me dis pas que… Tu vis avec quelqu'un ? Ooooh, mon grand ! Il faut que tu me le présente ! Où est-il ?
D'un coup, Antarès bondit sur ses pattes. Visiblement, le noctali commençait déjà à se faire des films.
-Si. C'est un togetic façon moulin à parole, croisé avec un pot de colle. Il squatte chez moi. Mais là, il est parti chercher les fées de la pluie.
Il y eu un instant de silence. Le pokémon noir était figé, béat, comme interdit.
-Il… il…J'y crois pas !
-Oui, je sais, c'est complètement débile, mais il a constamment ce genre d'idées. Je suppose qu'un jour je m'y habituerais...
-Tu vis avec un togetic ! Un togetic ! Ohlala, quand je vais raconter aux copains que mon grand p'tit trésor vit avec un togetic, ils ne vont pas en revenir ! Allons le chercher ! Tu DOIS me le présenter !
-Non. Si on le rate et qu'il ne voit personne en rentrant, il va piquer une crise. Vas le chercher tout seul, moi je reste là.
Le pokémon noir fut étonné, mais il ne perdit rien de son excitation.
-Il est colérique à ce point ? Un togetic ?
-Il pique des crises d'angoisse.
-Je comprends ! Alors garde bien la maison, je vais le chercher !
Sur ce, Antarès prit ses pattes à son cou et disparut entre les arbres. L'absol soupira. Il ne compta que jusqu'à trois, et le noctali réapparut.
-Au fait, il est parti par où ?
Nouveau soupir. L'absol désigna la direction opposée à celle où Lesath était allé.
-Par là. Il a…
Et le pokémon noir reparti aussi sec sous la pluie.


Altaïr resta un moment à contempler l'eau tombant du ciel, en pensant que l'occasion était idéale de se faire la malle, avant que les ennuis, le togetic et le noctali ne lui retombent dessus. Le seul problème, c'est qu'il n'avait nulle part où aller. Il pourrait éventuellement essayer le Château de l'Aurore, où un village pokémon s'était construit récemment. Mais ce n'était pas assez loin. S'il s'enfuyait, il ne fallait pas qu'il puisse être retrouvé.
Et cela impliquerait le fait de voyager.
Voyager.
Cette idée ne lui plaisait pas. Par esprit de contradiction avec l'autre traite obscur, parce qu'il aimait son village et ne voulait pas le quitter. Et Parce que, surtout, il risquait de croiser des humains. Finalement, il valait mieux avoir à supporter deux em… bêteurs quelques jours.
Ceux-ci revinrent moins de dix minutes plus tard, ce qui surprit l'absol.
-Dé… jà ?
-Oui, je suis allé à la source d'eau, et je l'ai trouvé tout de suite.
Le pokémon porte malheur se demanda vaguement comment on pouvait atterrir si vite à la source quand on se ruait à l'opposée, mais il préféra ne pas demander. Lesath s'en chargea.
-C'est dingue, quel flair ! Même sous la pluie !
-Oh, non, j'ai juste deviné, comme tu pouvais être n'importe où, je suis allé là où on a le plus de chance de trouver des fées de la pluie. Très joli parapluie, très original, cette forme de tarpaud.
-Quoi !?
Altaïr était scandalisé. Même son père croyait à ces histoires stupides !? Il était plus gravement atteint qu'il ne l'imaginait… Remarque à force de fréquenter ces êtres à longueur de temps… Lesath prit la parole :
-Mais je n'en ai pas trouvé. Alors Altaïr, tu es prêt à partir ! J'ai hâte de rencontrer ta maman ! Et puis, on va pouvoir se raconter plein de choses, tu te rends compte, ton père a voyagé jusqu'à Rosalia ! Tu te rends compte !
-Non. Tu te répètes là.
-C'est à Johto, c'est une ville mythique !
-Su-per.

Le pokémon porte malheur n'avait aucune idée d'où se trouvait Johto, et il s'en fichait. Il avait hâte que tout ceci soit fini. Une fois que Lesath eut pris son sac avec ce qu'il fallait pour voyager, l'absol partit en tête, laissant les deux autres discuter derrière. Loin derrière.
Ils marchèrent ainsi quelques heures. Le village où vivait la mère d'Altaïr se trouvait sur l'autre versant de la chaîne de montagne, il fallait donc passer de l'autre côté par un col.
La faim aidant, ils s'arrêtèrent à mi chemin, dans une sapinière.
-Oooh, regarde mon grand ! Tu adorais jouer avec les pommes de pin quand tu étais petit ! Tu te souviens ? Tu n'arrêtais pas de mordre dedans, Alshaïn avait une peur bleue que tu t'étouffes…
-Alshaïn c'est le nom de ta maman ?
-Ouais.
Lesath était aux anges.
-Oooh, je t'imagine trop en petite boule de poil hirsute en train de mordiller une pomme de pin ! Ça devait être tellement mignon !
Au grand dam de la boule de poil hirsute grandie, Antarès en rajouta une couche.
-Pour ça oui, il était mignon ! Et quand il marchait, il faisait des grands pas, il était tout pataud, c'était vraiment trop…
Altaïr en avait marre.
-Ça suffit ! Vous n'avez pas de sujet de conversation plus intelligent vous deux ? On s'est arrêté pour manger, pas pour déblatérer ces vielles bêtises ! Vous continuerez quand on repartira que je ne puisse plus vous entendre !
Lesath répondit joyeusement :
-A propos de manger, on a un problème ! Mon sac est déchiré, j'ai perdu nos baies en cours de route.
-Quoi !?
-Bah oui, je viens de m'en rendre compte. Désolé !
Là, Altaïr était vraiment énervé.
-Ne dis pas ça sur un ton aussi enthousiaste !
Antarès intervint :
-Allons, allons, ce sont des choses qui arrivent, ce n'est pas dramatique. Il suffit d'en trouver d'autres.
-Ah oui !?
-Tu connais la montagne par cœur, ça sera vite fait, trésor !
-Ah, parce qu'en plus, c'est à moi d'y aller !?
Le noctali eut un sourire malicieux.
-Tu préfère rester là à nous écouter jacasser ?
-C'est bon, j'y vais ! Mais ne venez pas pleurer si je ne peux pas en ramener plus de deux !
Et il s'éloigna à grandes enjambées colériques, tandis que les deux autres reprenaient leur passionnante discussion.

Le problème était de savoir où trouver des baies. Il était assez doué pour ça, il connaissait les lieux privilégiés pour leur croissance, le type de terre, les plantes qui poussaient à côté. Ce serait vite fait. Mais quand même ils étaient gonflés de lui demander un truc pareil !
Ils n'aurait pas dû venir, il aurait dû se tirer lorsqu'il en avait l'occasion. Oser l'exploiter comme ça c'était pas correct ! C'était… c'était…typiquement humain ! Oui parfaitement, c'était tout à fait humain de demander aux autres sans rien donner en échange. Il en était sûr !
Ce n'était pas bon pour les pokémons de les fréquenter, il en avait une preuve de plus.
Et cette foutue pluie qui n'arrêtait pas de tomber ! Comment pouvait il sentir quoique ce soit avec ça ?
Il en trouva finalement en montant un peu plus haut dans la montagne, près d'un petit torrent en bordure de la sapinière. Il n'y avait que des baies Framby. Le problème allait être de les transporter jusqu'aux deux autres. Bah, il n'avait qu'à leur en ramener qu'une seule, ils se la partageraient. Ils ne méritaient pas mieux après la façon dont ils l'avaient traité.
Il s'en avala donc une, et en prit une deuxième, puis il redescendit vers la sapinière.