Les récrés du Ptiravi de dragibus57

Aujourd'hui, j'avais hâte d'aller à l'école ! Pour une fois. Parce que notre maîtresse, Madame Gardevoir, nous a expliqué qu'on allait avoir un nouveau dans notre classe.

« Je compte sur vous pour accueillir gentiment votre petit camarade, qu'elle a dit. Occupez-vous bien de lui, car il se sentira certainement très seul au début et sera un peu perdu.Tout sera nouveau pour lui : le quartier, les bâtiments, les professeurs, les élèves... » Nous, on a promis.
Pas pour rendre service, mais parce qu'on était tous curieux de voir sa tête.

Alors ce matin, quand il est entré dans la cour, on a tous foncé sur lui. On se pressait, on se bousculait, on se poussait pour être le premier à lui parler.
« Comment tu t'appelles ?
- D'où tu viens ?
- Pourquoi t'es parti de ton autre école ?
- Tu sais jouer aux Pokéhoms ?
- T'as quoi comme goûter ? »
Ça, c'était Goinfrex qui demandait.

Le nouveau, il répondait pas. Il serrait son sac tout fort contre lui et nous regardait à tour de rôle d'un drôle d'air.
La maîtresse est arrivée pour voir ce que c'était que cet attroupement.
« Mais laissez-le un peu respirer, voyons ! » Et elle nous a dit d'aller jouer plus loin et de ne plus l'approcher. Faudrait savoir ce qu'elle veut, la maîtresse !
« Allez, viens avec moi, Ramoloss. Je vais te montrer la cour des petits, la cour des grands, les toilettes... »
Et puis, y a Parecool qui est arrivé. Après tout le monde, comme d'hab.

En classe, Madame Gardevoir a installé le nouveau à côté de moi.
« Ptiravi, je te confie une mission très importante : je te charge d'expliquer les habitudes de la classe à ton petit camarade. » J'étais très fier !

« Nous allons commencer la journée par une petite dictée qui va me permettre d'évaluer le niveau de Ramoloss en orthographe. Sortez vos cahiers rouges et soyez bien attentifs. N'oubliez pas de sauter des lignes pour la correction. »
Pfff ! Ça commençait bien ! Voilà qu'à cause du nouveau, on devait faire une dictée !

« ...Le long Serpang... s'enroulait autour de sa proie... Je répète : s'enroulait autour de sa proie...Faites attention aux terminaisons. Il y a des lettres muettes dans cette phrase. Réfléchissez bien ! ...s'enroulait autour de sa proie...pour l'avaler...d'un seul coup...Point final. Ramoloss, tu veux relire, s'il te plaît ?
- Le-long...Ser-pang...s'en-roulait-au-tour-de-sa...proie-pour...l'a-valer-d'un-seul-coup... »
Punaise ! Il avait du mal, le Ramoloss ! Parecool a commencé à bailler en faisant beaucoup de bruit. C'est le signe qu'il s'ennuie. Et nous avec.
« Hum ! Ta lecture est encore hésitante, mais ne t'en fais pas, qu'elle a dit Madame Gardevoir. Avec un peu d'entraînement, tu vas vite progresser ! »

Après, on a sorti nos stylos verts et la maîtresse a envoyé Ramoloss au tableau pour écrire la correction. Et c'est là qu'on a commencé à rigoler.
Il avait écrit : le lon serpan sans roulette autour de sa proie...

La maîtresse a froncé les sourcils et elle lui a demandé d'où il sortait cette histoire de roulettes. Et puis elle a compris : « Ramoloss, quand je vous ai dicté cette phrase, j'ai fait la liaison, entre « s'enroulait » et « autour », pour que vous puissiez entendre la terminaison du verbe et l'écrire sans faute. Mais en temps normal, ce « t » est muet, on ne le prononce pas. On n'a jamais vu un Serpang avec ou sans roulettes ! Tu dois réfléchir au sens de ce que tu écris ! »

Du coup, on a dû se taper une leçon d'orthographe. Sur les liaisons.
La maîtresse nous a expliqué cette bizarrerie de notre belle langue, comme elle dit toujours quand elle veut nous parler d'un truc qui a été inventé rien que pour embêter les élèves.

Notre oreille, soi-disant, ne supporte pas d'entendre deux voyelles qui se heurtent à la fin et au début d'un mot. C'est pour ça qu'on fait la liaison avec la lettre muette qui termine le mot précédent ou qu'on en rajoute carrément une quand y en a pas.
Elle nous a même donné plusieurs exemples : un arbre, des arbres, un petit homme, un grand homme etc...
On a tous copié soigneusement la leçon dans le classeur et on a noté dans le cahier de textes qu'il fallait l'apprendre pour le lendemain... Ah, j'te jure !

Pendant la récré, y a eu une bagarre. Entre Ramoloss et Elekid.
Ils discutaient des cadeaux qu'ils allaient avoir sous le sapin et Elekid lui a dit qu'il ferait bien de rajouter un cerveau à sa liste au père Noël. Nous, on rigolé, mais Ramoloss, une fois qu'il avait compris, ça lui a pas plu et il a donné un coup de queue à Elekid.
Monsieur Alakazam, le directeur, est arrivé en courant et il les a collés tous les deux au piquet jusqu'à ce que ça sonne.

Quand on est remontés en classe, Madame Gardevoir a voulu savoir ce qu'on avait encore fait comme bêtise pour avoir été punis. Alors Ramoloss lui a expliqué :
« Nélekid, il m'a dit des méchancetés !
- Nélékid ?... Non, Elekid !
- Mais... vous avez dit qu'il fallait faire la liaison ! »
La maîtresse a levé les yeux au ciel et on s'est retapé toute une explication sur les liaisons ! Un Elekid, des Elekid...

Mais le bouquet, c'est quand on a dû lire nos rédactions. Ramoloss avait écrit : « Il faisait beau, les Irondelle volaient dans le ciel, une Zapitrini bourdonnait...Soudain, mon ami Oeuneuf se trouva nez-à-nez avec un Arbi des Ruines Alpha... »

Nous, on était tous morts de rire. Mais pas la maîtresse. Elle nous a grondés parce ce qu'on se moquait et elle a dit qu'elle allait chercher, qu'il y avait certainement une explication au problème de notre camarade et que souvent quand on avait l'explication, on avait aussi la solution.

L'après-midi, Ramoloss n'est pas venu à l'école.
Madame Gardevoir s'est inquiétée et nous aussi. Peut-être qu'on y avait été un peu trop fort avec lui et qu'il voulait plus revenir.
Mais Lippoutou, qui est sa voisine, a apporté un mot d'excuse de la part de la maman de Ramoloss :

« Madame,Veuillé zexcuser mon fils qui ne viendra pas en classe, car nous avons rendez-vous chez le gériâtre.
Avec tous mes remerciements antipicés.Madame Ramoloss »