Le Projet Orion - Réalité parallèle de ABE

Lucas, debout dans le noir, les yeux fermés, tentait de se concentrer. Il aurait juré avoir entendu du bruit. La main posée sur sa ceinture, ses sens aux aguets, il était prêt à envoyer Galifeu en cas de problème. Quelques minutes plus tôt, il avait fait rentrer son Pokémon dans sa ball. Son Pokémon se fatiguait et il était préférable de garder des forces pour le cas où ils en auraient vraiment besoin. Or, il semblait n'y avoir personne dans le coin. Du moins le croyait-il jusqu'à ce qu'il entende tous ces bruits. Des cris, de la lumière, des rires... Peut-être même y avait-il en fait beaucoup de gens ? Pendant quelques secondes, l'idée d'une grande fête lui traversa l'esprit mais qui aurait l'idée de s'amuser dans pareil endroit ? Il ne se sentait pas rassuré. Peu importe où il se trouvait, il était évident que l'endroit était habité. Mais l'était-il par des humains ? Après tout, rien ne lui garantissait qu'il était encore sur Terre. Lorsqu'un énorme passage rouge s'ouvre dans le vide et vous attire pour vous faire atterrir dans une grotte sombre, on peut se permettre de douter de tout. Et s'il se retrouvait nez-à-nez avec d'étranges extraterrestres mi-hommes, mi-Pokémon ?

« Tu as lu trop de livres de science-fiction, se murmura-t-il d'une voix incertaine. »

Il se dit que la meilleure solution pour lever un voile à ses questions était d'aller voir par lui-même. Il trouva étrange, ridicule même, la peur qu'il ressentait alors qu'Aurore s'exaspérait toujours des initiatives qu'il prenait, les jugeant trop dangereuses. Il n'avait pas l'habitude d'adopter un tel comportement. Pourquoi avait-il peur d'une chose qu'il ne connaissait pas ? Aurore... Quand la reverrait-il ? Que faisait-elle tandis que lui était ici ? Il soupira. Il fallait maintenant qu'il se rende vers le lieu où, il l'espérait, l'attendaient des réponses. Après tout, le seul moyen de sortir d'un labyrinthe est de chercher la sortie, pas d'attendre par peur de se perdre. Mais comment trouver son chemin dans ce noir ? Les flashes avaient cessé, il n'y voyait de nouveau plus rien et il préférait attendre avant de sortir Galifeu, ne voulant le fatiguer qu'en dernier recours, si son aide s'avérait indispensable. Il lui vint alors une idée. Lorsqu'il invoquait Darkrai, et parfois même sans raison, le Symbole dans sa main brillait. Pouvait-il le faire briller un peu sans appeler Darkrai ? Il se concentra, les yeux toujours fermés. Peu à peu, il fit basculer son énergie dans sa main, trouva cette connexion quelque part en lui. Il ressentit cette habituelle sensation de chaleur, toujours aussi agréable, qui l'envahit. Mais, contrairement à d'habitude, il ne mit pas toute son énergie dans ce "rituel".
Lorsqu'il rouvrit les yeux, ce fut pour contempler les parois rocheuses qui l'entouraient, incroyablement bien éclairées par la forte lueur que sa main diffusait. Il avait réussi à créer sa propre source de lumière. Il se dit que c'était sans doute d'une façon similaire dont les Pokémon s'y prenaient pour faire leurs attaques. Maintenant que son chemin était éclairé, il pouvait se diriger dans la grotte sans risquer de se payer un mur et il n'en fut que plus soulagé. En effet, maintenant qu'il pouvait voir ce qui l'entourait, il n'était plus aussi apeuré qu'il avait pu l'être quelques minutes auparavant. Il avançait, sûr de lui mais prêt à tout, au pire comme au meilleur. Soudain, il entendit des voix. Elles étaient faibles mais témoignaient bien d'une présence en ces lieux. Mieux encore, il comprenaient ce qu'elles disaient ! Heureux, il accéléra le pas. Au fur et à mesure que les voix s'amplifiaient, les murs devinrent plus clairs et la lueur bleutée de sa main se mêla à celle orangée des autres personnes.

« Plus besoin de lumière, se dit Lucas tandis qu'il arrêtait de se concentrer sur sa main qui cessa subitement de luire.
« Tant que je le peux, je resterai discret au sujet de Darkrai, se promit-il alors qu'il voyait maintenant des ombres sur le mur en face de lui. »

Il ne lui restait plus qu'un tournant avant de se retrouver en face des propriétaires des voix qui se faisaient entendre depuis tout à l'heure. Amis ou ennemis ? Il ne se laissa pas le temps à la réflexion puisqu'il ne souhaitait de toute façon pas rester seul dans cette grotte plus longtemps. Si jamais on lui voulait du mal, il aviserait. Il n'était pas sans défense.

Plein d'entrain, il passa le virage pour se retrouver en face d'une bande de quatre ados dont l'âge semblait varier de onze à dix-sept ans, dix-huit maximum. Cependant, Lucas fut un peu étonné et une pointe de déception naquit en lui. Il s'attendait à se retrouver en face de personnes sensées qui auraient pu lui expliquer ce qu'il se passait ici, peut-être même l'inviter à passer la nuit avant de repartir mais, à sa grande surprise, il trouva une bande d'olibrius dont seule la plus âgée des deux filles semblait à peu près équilibrée, si l'on exceptait le fait qu'elle se baladât dans une tenue d'équitation tâchée de boue comme si elle venait de courir une grande course. Les autres étaient difficiles à cerner : l'un, qui devait avoir son âge, portait un t-shirt à moitié cramé et paraissait mal en point. L'autre garçon, visiblement plus jeune, était vêtu d'un peignoir rose criard et la dernière, une fille à qui Lucas donnait approximativement le même âge que le gamin, n'était habillée qu'à l'aide d'une petite chemise de nuit en soie sexy qui ne la protégeait pas vraiment des regards indiscrets, dont Lucas s'abstint cependant. Sa perplexité face à ce quatuor invraisemblable devait certainement se lire sur son visage car le plus jeune des deux garçons lui demanda :

« T'as vu un monstre ? »

Lucas trouva cette question plutôt drôle de la part d'un type qui se baladait dans un vêtement féminin trop petit pour lui mais il préféra ne rien dire. Le garçon au t-shirt cramé lui demanda :

« Es-tu le propriétaire du Pokémon feu dont on a vu les flammes tout à l'heure ?
-Oui ! répondit Lucas, heureux de voir que quelqu'un suivait l'histoire. Quelqu'un pourrait-il me dire ce que je fais ici et où se trouve la sortie ? »

Les autres le regardèrent avec une expression où l'on distinguait clairement une grande désillusion. Ils avaient si vivement souhaité que ce mystérieux jet de flammes les mènerait à quelqu'un qui en savait plus qu'eux !

« D'accord, fit Lucas en voyant leurs mines déconfites. Je suis désolé. On est dans le même bateau alors ? Comment vous appelez-vous ?
-Moi c'est Marine, lui répondit la jolie fille de son âge.
-Moi, Rachid, dit le petit gars dans son peignoir. Et elle c'est Roxanne, fit-il en désignant la fille à moitié nue.
-Et moi c'est Lilian, conclut le brûlé.
-Ok, enchanté. Je m'appelle Lucas. »

Le Pokémon qui les éclairait hennit.

« Oh, j'allais oublier, excuse-moi ! Voici Ponyta, ma meilleure amie, dit Marine, un peu honteuse. Je suis vraiment désolée, continua-t-elle après s'être tournée vers son Pokémon.
-Très bien. Quelqu'un a-t-il une idée de l'endroit où nous sommes ? Qu'est-ce que l'on fait ici ? Par où sort-on ?
-Calme-toi, le raisonna Lilian. On est tous dans la même galère et l'on n'en sait pas plus que toi. Nous sommes tous arrivés d'une façon similaire. Chacun d'entre nous était chez lui quand une sorte de vortex est apparu. Tu confirmes ?
-Euh... oui, hésita Lucas.
-On pensait tous les quatre venir vers toi en espérant en apprendre un peu plus sur notre cas mais apparemment c'est raté. Le mieux est de chercher une sortie maintenant. Tu veux te joindre à nous ?
-Qui me dit que je peux vous faire confiance ? Vous pourriez très bien être des membres de la Team Galaxie ! Peut-être est-ce vous qui m'avez amené là après tout. Je ne mets pas votre parole en doute, mais comprenez que je préfère me méfier. »

Roxanne, vexée, parut s'énerver. Rachid voulut la raisonner mais celle-ci le repoussa.

« On vient de te dire qu'on était tous dans le même pétrin, on te propose de te joindre à nous et toi tu nous rejettes ! cria-t-elle. »

Lucas se rendit compte de son manque de tact et s'excusa :

« Je suis désolé, toute cette histoire me rend nerveux. Je veux bien faire équipe avec vous, si toutefois vous voulez encore de moi après ce que je viens de dire, dit-il en baissant la tête.
-Bien sûr, le réconforta Marine en lui donnant une petite tape amicale sur l'épaule.
-Mouais, fit Rachid.
-Ne t'en fais pas, c'est normal que tu sois troublé. On l'est tous un peu. Mais dis-moi, où est ton Pokémon ? Tu t'en bien servi pour nous retrouver non ?
-Bien sûr. Je l'ai simplement fait rentrer dans sa ball lorsque j'ai vu de la lumière, celle du Ponyta.
-Avec quels Pokémon te bats-tu ? l'interrogea Rachid.
-Mes deux compagnons sont Galifeu et Luxio, répondit fièrement Lucas.
-Ah ok, t'es nul...
-Euh... Je n'ai pas beaucoup d'expérience, c'est pour ça. »

Après quelques échanges, les cinq ados et le Ponyta reprirent la route dans cet immense labyrinthe rocheux. Évidemment, ils ne rencontrèrent et n'entendirent personne si ce n'est que leurs échos. Au bout de vingt-cinq minutes à errer au hasard parmi les galeries, qui s'avéraient être d'une incroyable complexité, le groupe commençait à soupirer. Et alors que le groupe avançait, Lilian tomba pour atterrir sur ses genoux, amortissant sa chute avec ses mains.

« Décidément, rien ne va aujourd'hui, maugréa-t-il. »

Lucas l'aida à se relever et tous repartirent, excepté Rachid qui ne bougea pas d'un millimètre.

« Alors qu'est-ce que tu fous ? demanda Roxanne. »

Rachid, immobile, ne répondit pas.

« M'oblige pas à venir te chercher ! »

Pas de réponse ni de mouvement.

« Tant pis pour toi ! cria Roxanne en avançant dans sa direction, suivie par les autres. »

Quand tous furent arrivés à côté de Rachid, celui-ci leur montra un objet qu'il avait ramassé.

« Regardez sur quoi Lilian a trébuché, dit-il d'une voix étrange. »

Il tenait à la main une assez grosse branche d'arbre sur laquelle se dressait une petite feuille verte, éclatante.

« Une branche, fit Marine, abasourdie.
-Cela veut donc dire... commença Lucas.
-Qu'il y a de l'eau et de la végétation pas loin ! acheva Lilian. »

Le vert de la feuille contrastait avec la couleur froide de la roche. Bien que ce petit détail fusse maigre, il redonna de l'espoir au groupe. Ils avaient une piste...

A suivre...