[Défi] Concours "amateurs" de fics!

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Solyx
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Solyx » ven. 02 mars 2012, 21:31

Je serais pas de la partie. Sûrement de la prochaine.

Srithanio, désolé, mais je me suis retourné le cerveau et aucune idée allait avec ton thème saugrenu ^^
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Merci à Versus pour le kit

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » dim. 04 mars 2012, 16:11

Participation de Raishini bien reçue ^^
Je rendrai sûrement mes jugements le week-end prochain, avec le nombre actuel de participants.

Allez ! Il ne reste plus que quelques heures pour renvoyer vos participations !

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Srithanio » dim. 04 mars 2012, 16:31

Reçu aussi de ce coté. Pour l'instant, vous n'êtes que... trois. Bon, ce sera plus vite évalué ! :P

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Drayker » lun. 05 mars 2012, 00:15

Fin du concours !
Bande de flemmards, que 3 participations. C'est la faute au thème ou c'est moi qui vous ai fait peur ? :mrgreen:

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » lun. 05 mars 2012, 07:37

C'le thème & toi, cannibale.
En ce qui concerne les jugements, c'est pour ce week-end (coucou la répétition).

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Raishini » lun. 05 mars 2012, 10:50

Non Drayker, je pense que c'est la faute au thème plus que la tienne *non Dray, pas taper Raishini ! :paf: *
Enfin j'ai hâte de voir les résultats ^^
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par dragibus » lun. 05 mars 2012, 12:31

Ahem... C'est parce que tu ne connais pas Drayker... :o

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Raishini » lun. 05 mars 2012, 14:24

Ah... Il est terrible à ce point ^^' ?
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Srithanio » lun. 05 mars 2012, 18:52

T'as pas idée.

Et vous plaignez pas de mon thème. Vous avez failli avoir "igloo". Ou "paradigme", j'ai hésité.... :mrgreen:
Je débute mes éval' ce soir. On les poste toutes en même temps, ou vous préférez qu'on les rédige et qu'on vous fasse un faux suspense, du genre un juge par jour ? ^^

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » lun. 05 mars 2012, 18:54

Perso, ni l'un ni l'autre ne me dérange. Peut-être qu'on devrait poster en même temps ?
Ah, et la prochaine fois, tu choisis "du coq à l'âne".

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Raishini » lun. 05 mars 2012, 19:06

Honnêtement, je n'ai aucune objection à élever contre l'un ou l'autre des procédés. Tant qu'on a les correcs', je considère que c'est bon.

Srithanio, t'as carrément hésité sur paradigme ? :? Ah ouais, là ça aurait été d'un tout autre tour ton thème :lol:
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Srithanio » ven. 09 mars 2012, 20:19

Purée, je suis grave à la bourre.
J'évalue ça ce soir/demain dernier carat. Rendez vous demain soir pour les résultats.
Les autres ? Drayker, Artemis ?

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » sam. 10 mars 2012, 15:53

Je suis en train d'achever la seconde évaluation. Je pense pour demain matin dernier délai.
Et tant que j'y suis, voici les participations des concurrents (personne y avait pensé avant, on se demande pourquoi) :
dragibus
Spoiler :
Cactitude : n. f. sens 1 : ensemble des attitudes et des actes d’une personne qui résiste (en référence à la capacité des plantes de la famille des Cactaceae à faire face aux longues périodes de sécheresse et à s’adapter aux terrains les plus difficiles).
sens 2 (figuré): agressivité extérieure dissimulant une grande richesse intérieure (toujours en référence aux cactacées dont les épines protègent les réserves de liquide et de nutriments).

Voir aussi : négritude (Aimée Césaire), bravitude (Ségolène Royale)

Bibliographie : dragibus, Ma Cactitude dans le topic [Défi] Concours "amateurs" de fics ! sur Pokébip, mars 2012.

Ma Cactitude


« Non, je ne suis pas folle ! Hein mes chéris ! » La vieille qui murmure ces paroles de façon à peine audible est penchée sur une petite table coincée dans l’angle de la pièce et s’adresse à un cactus en forme de boule terminée par une couronne de fleurs jaunes. Elle tâte la terre du pot d’un doigt arthritique mais connaisseur. « Vous êtes encore bien humides, ça veut dire que je suis ici depuis une semaine, à peine. »

Elle s’approche en boitillant de la porte qui donne sur le couloir et pose l’oreille contre le battant. Personne. Elle l’entrouvre discrètement, écoute en retenant sa respiration et la referme doucement. Elle n’a pas entendu le bruit caractéristique du chariot de soin dont l’une des roues est voilée. Elle est donc maintenant sûre qu’aucune infirmière n’est sur le point de la surprendre. Rassurée, elle se dirige alors vers la minuscule salle de bain.
Elle prend au passage le pilulier posé sur la tablette roulante et regarde d’un air méprisant les gélules qu’il contient. « Ils croient qu’ils pourront me faire parler avec ça, mais je ne suis pas dupe ! J’ai bien compris que ces cachets ne servent qu’à affaiblir ma résistance mentale. Ils me prennent vraiment pour une demeurée ! »

Elle ouvre la porte de la salle de bain et s’avance jusqu’à la cuvette des WC. Puis elle presse délicatement sur l’une des gélules, tout en lui imprimant un mouvement de rotation, comme pour la dévisser, jusqu’à ce que les deux parties de la capsule s’ouvrent. Puis elle jette son contenu dans la cuvette.
Elle répète son geste avec les trois autres médicaments et tire la chasse. Une fois, deux fois, jusqu’à ce que le tourbillon d’eau ait évacué avec lui les dernières traces de poudre blanche. Elle rebouche ensuite chaque gélule et les remet à leur place dans le pilulier.

Tout à l’heure, quand l’infirmière Joëlle passera et qu’elle la grondera : « mais Mamie, vous n’avez à nouveau pas pris vos médicaments ! », elle fera la sotte tout en lui retournant son sourire le plus candide : « oups, j’ai oublié ! » et elle les avalera bien sagement devant elle. Hihi !
Bien sûr, Joëlle lui fera une fois de plus la morale avec son air de sainte-nitouche : « Mamie, vous savez que c’est important de les prendre, vous ne guérirez jamais si vous oubliez tout le temps ! » Gnagnagna…
Pfff… Guérir ! Mais de quoi donc ? Elle n’est pas malade. Vieille peut-être, mais certainement pas malade !

Elle retourne auprès de la table d’angle et caresse doucement les lobes d’un second cactus, plus grand que le premier, et dont certaines excroissances se terminent par une fleur couleur fuchsia.
« Il n’y a que vous qui me compreniez, que vous qui sachiez la vérité, que vous qui me connaissiez vraiment. N’est-ce pas ? On a traversé tellement d’épreuves ensemble. C’est pas eux, murmure-t-elle en pointant du menton la porte donnant sur le couloir, qui vont me faire croire que je suis sénile hein ! »
Elle tâte à nouveau la terre des pots et grommelle : « ah vous êtes encore suffisamment humides…», puis comptant sur ses doigts : « ça fait donc une petite semaine que je suis ici. »
Elle retourne s’assoir sur le lit médicalisé, attrape une revue qui traine sur la tablette à roulettes et la feuillette d’un air distrait. « Tiens, c’est bientôt les élections… »
Tout en lisant l’article, elle frotte machinalement son genou, puis fronce les sourcils, relève son pantalon et observe son genou. « C’est bizarre, pourquoi j’ai une cicatrice là ? » Elle passe son doigt sur la fine ligne blanche, puis caresse de sa main ridée la partie encore gonflée de l’articulation. « Hum, je sais : ils m’ont encore torturée… Mais je résisterai, comme je l’ai toujours fait ! Ils ne tireront jamais rien de moi, je mourrai avec mon secret !»

On toque légèrement à la porte. « Oui ? »
Ah, c’est sa fille. Pas trop tôt, ça fait déjà un moment qu’elle l’attend. Plusieurs jours au moins.
« Bonjour maman, comment tu vas ?
- Ah c’est toi ! Ça me fait plaisir de te voir, ça faisait longtemps !
- Euh… Je suis passée hier… Mais c’est pas grave… Et ton genou ? »
Genou ? Comment le sait-elle ? Mmm… Sa fille doit être de mèche avec les hommes en noir. Elle a dû négocier avec eux un pourcentage sur le bénéfice de la découverte. Mais elle ne lui révèlera rien ! Son secret est bien au chaud au fond de son cerveau !
« Ah oui, mon genou. Il va bien, il cicatrise. »
Entrer dans son jeu. Donner les réponses qu’elle attend. Faire croire qu’on n’a rien deviné du complot.
« La rééducation se passe bien ?
- La rééducation… ? Euh oui… ça va. Ce matin, j’ai dû marcher sur un tapis roulant, d’abord en me tenant aux rampes de chaque côté, puis en les lâchant.
- Ah c’est bien, tu progresses ! Il y a dix jours, tu n’arrivais pas encore à te déplacer sans béquille. »
Dix jours ? Mais elle n’est là que depuis une semaine à peine, ses Pokémon cactus en sont la preuve ! Sa fille cherche certainement à lui embrouiller l’esprit, cette saleté ! Pour en être sûre, elle se lève et va toucher une fois de plus la terre des deux pots.

« Je vois que tu prends toujours bien soin des deux cactus que je t’ai apportés. Ils ont bien poussé depuis que tu ici ! »
Mais qu’est-ce qu’elle raconte ? C’est pas des cactus, c’est des Pokémon !
« Tu veux parler de Cacnéa et de Maracachi ?
- Oui, si tu préfères. Je sais que tu leur as donné le nom de tes compagnons… C’est d’ailleurs pour ça que je te les ai apportés : ici, les Pokémon sont interdits, donc j’ai pensé qu’avoir des cactus leur ressemblant te ferait plaisir… »
Mais bien sûr… Voilà qu’elle cherche à lui faire croire que Cacnéa et Maracachi ne sont pas des Pokémon ! Mon dieu, sa propre fille !
Elle retourne s’assoir sur le lit et feuillette distraitement son magazine. Encore des élections ?

« Sinon, je suis passée comme tous les jours chez toi, à la maison. J’ai relevé le courrier, mais il n’y avait rien de particulier, juste quelques pubs. Tiens, je t’ai apporté le dernier catalogue de jardinage. J’ai aussi arrosé tes Baies et soigné tes Pokémon Plante : tout le monde va bien. »
Humpf ! Elle n’aurait jamais dû lui donner les clés de sa maison, c’était une grossière erreur ! Si ça se trouve, cette fouineuse a mis son nez partout dans ses affaires… Pourvu qu’elle n’ait pas découvert sa petite cachette secrète, celle où elle a planqué une coquette somme d’argent. Simple précaution au cas où « on » bloquerait son compte en banque…
Elle ne dit rien pendant un petit moment. Exprès. Elle voit bien que son silence gêne sa fille et que celle-ci cherche désespérément un sujet de conversation…

« Et qu’est-ce que tu as mangé à midi ? »
La vieille dame ferme les yeux, fouille dans sa mémoire et au prix d’un gros effort de concentration parvient à en extirper l’image d’une scène où elle se trouve attablée, une assiette garnie posée devant elle.
« Euh… De la viande en sauce, des pâtes et des haricots verts.
- Maman, tu dois te tromper : hier déjà tu m’as dit que tu avais mangé ça… »
Ouch, faute…
« Ah oui, c’est vrai, se reprend-elle avec un petit rire gêné, j’ai confondu le repas d’hier et celui d’aujourd’hui : c’était steak haché purée et carottes vichy.
- Pas grave... Tiens, je suis allée voir l’infirmière avant de venir : il faut encore compter deux bonnes semaines de rééducation avant que tu puisses retourner chez toi. »
Ah ça non ! Hors de question ! A la première occasion, elle fichera le camp de cet hôpital-prison ! Mais elle préfère ne rien répondre, pour ne pas se trahir.
« Oui, comme tu vis seule et qu’il y a des escaliers partout dans ta maison, il vaut mieux rester ici un peu plus longtemps, pour être sûr que ton genou soit complètement remis.
- Mon genou ?
- Ben oui, ton opération, la prothèse qu’on t’a posée.
- La prothèse ? »
Mais sa fille raconte n’importe quoi ! On ne lui a pas posé de prothèse, on l’a torturée ! TOR-TU-RÉE !
« Maman, rappelle-toi : tu es ici parce qu’on t’a posé une prothèse du genou suite à tes problème d’arthrose. Tu es ici en rééducation post-opératoire. »
Mon dieu, comme elle déteste le ton pseudo-pédagogique de sa fille ! Comme si elle était un tout petit enfant à qui on est obligé de répéter lentement et plusieurs fois les choses pour qu’elles rentrent !
Et la voilà qui en rajoute une couche !
« Ici c’est un centre de rééducation et de réadaptation post-traumatique. Les gens y sont admis pour plusieurs semaines, voire plusieurs mois, le temps de se remettre de leur opération. Un genre de centre de convalescence si tu veux… »
Cause toujours ! Elle sait bien qu’elle est dans l’une des discrètes cliniques de la Team Rocket, qu’ils ont essayé de lui arracher son secret, mais qu’ils n’y sont pas parvenus. Si c’était le cas, elle ne serait plus en vie…
« Et ça fait déjà un mois que tu as été opérée, Maman. »
Impossible, la terre de ses Pokémon n’est pas du tout sèche, ça veut dire qu’elle n’est là que depuis une semaine.
Elle ne répond pas, faisant mine de se replonger dans sa revue. Tiens, il va y avoir des élections… Voilà qui devrait mettre fin à la visite. Ah, gagné, elle s’en va !
« Bon je me sauve, j’ai encore des courses à faire, je reviens demain. D’accord ?
- Oui c’est ça, à demain. »

Sa fille se lève, se penche vers elle et la serre longuement dans ses bras - elle peut sentir son parfum familier quand elle l’embrasse – puis elle quitte rapidement la chambre. Un observateur extérieur remarquerait les larmes qui perlent à ses yeux.
La mère se relève et va une fois de plus tâter la terre de ses cactus : « ah, vous êtes à peine humides mes chéris, donc ça doit faire cinq ou six jours que je suis ici. Encore un peu de patience, on rentrera bientôt à la maison. Demain. »

On toque à la porte, c’est l’infirmière Joëlle : « Mamie, il est 18h, il est temps de descendre au réfectoire. Vous voulez que je vous accompagne ou vous y arriverez toute seule ?
- Oh ça ira, je peux me débrouiller seule. »
Avant de sortir, la vieille dame fait un détour par la salle de bains pour se laver les mains et en profite pour se donner un petit coup de peigne. Non pas qu’elle veuille encore plaire à son âge, mais c’est une question de dignité. De même, elle inspecte sa tenue : pas de taches, pas de plis disgracieux. Elle ouvre le minuscule placard à vêtements et choisit un joli gilet, parfaitement assorti à son pull à fines rayures et à son pantalon noir en panne de velours. Voilà, à présent elle peut descendre.

Elle trottine à petits pas jusqu’à l’ascenseur devant lequel attendent deux autres personnes, l’une le bras en écharpe, l’autre, le cou enserré d’une minerve.
Dans le réfectoire, elle s’assoit à la première place libre qu’elle trouve.
« Ah non, intervient une aide-soignante en désignant une table plus loin, vous c’est là-bas. »
Elle la regarde d’un air désapprobateur. Elle a quand même le droit de s’assoir où elle veut, non ?
« Mamie, c’est là-bas votre place habituelle, vous vous rappelez ? Il y a votre pilulier avec votre nom dessus, » lui explique la jeune femme en souriant et en la prenant gentiment par le bras.
Humpf, raté. Elle qui pensait pouvoir échapper de cette manière à la prise de médicaments, il faudra qu’elle trouve autre chose.

Autour d’elle les tables se complètent progressivement, avec des jeunes et des vieux, des hommes ou des femmes, des gens en fauteuil roulant, d’autres en béquilles. Certainement des victimes de la Team Rocket, comme elle.
Pendant le repas, chacun papote de tout et de rien au milieu du cliquetis des couverts et des assiettes qui s’entrechoquent.
« Et vous Mamie ? C’était quoi votre métier, avant ? »
C’est à elle qu’on parle ? Il semble bien…
- Moi ? J’étais la fleuriste de Doublonville.
- Oh ! Celle qui donnait le Carapuce A Ô ?
- Oui oui, c’est ça. Mais maintenant je suis à la retraite, bien entendu ! »
Pendant un bref instant, la vieille dame n’entend plus le bruit ambiant, son esprit s’échappe vers sa boutique, bien des années auparavant.

Ah, ils en voulaient à mon secret, ces fameux hommes en noir, mais ils ne l’ont pas eu ! Le secret de la Gracidée… Il est là, dans sa tête, et personne ne saura jamais comment elle a réussi à obtenir cette fleur si rare, quels croisements, quels bouturages elle a fait pour aboutir à sa création. Héhé, ils peuvent bien continuer à la torturer, à la charcuter pour lui mettre de soi-disant prothèses, jamais elle ne leur révèlera où elle a caché ses précieuses graines !
Puis telle une bulle qui éclate, le souvenir disparaît, cédant à nouveau la place au brouhaha des conversations.

De retour dans sa chambre, le premier geste de la vieille est de tâter une fois de plus la terre de ses Pokémon : « hum, d’après l’humidité, six jours, sept au maximum que je suis là. »
Au même moment, l’infirmière Joëlle entre, un pilulier et un verre d’eau à la main : « Mamie Dragi, vous avez oublié de prendre vos gélules pour la mémoire au réfectoire. Et aussi, vos cactus étaient à nouveau tout secs ce matin, je vous les ai arrosés. »
Domino
Spoiler :
« Une aiguille dans une botte de foin »


J’arrive pas à m’enlever tout ça de la tête. Rien. Plus j’avance, plus ça empire. J’suis planté dans mon siège, à conduire, et je vais conduire encore des kilomètres, mais j’y arriverais. Il fait cinquante degrés, je ne vois que de la terre sablonneuse à perte de vue depuis des heures, j’ai la raie des fesses en feu à force d’être assis sur ce bon dieu de siège en cuir, mais dus-je en crever, j’arriverais à ce troquet. Bon sang, il faut aussi que j’évite de quitter la route. A force, j’arrive même plus à différencier le tracé du chemin des bas-côtés…

Qui suis-je… On m’appelle Jack. Mon métier et ma vie n’ont pas d’importance. Je suis inspecteur dans une compagnie des eaux. Voyez, le truc banal, sans relief. Je me contente de vérifier que l’eau potable est bien amenée chez tout le monde. Annuellement, je vérifie aussi les compteurs d’eau chez les gens pour vérifier que tout fonctionne. Et là, je vous jure que l’eau ça ne me manque mais alors pas du tout. Déjà parce que d’entendre parler de litres, d’hectolitres, de hausse et de baisse du niveau, d’écoulements et de fuites, ça me met la vessie en vrac, mais surtout parce que j’ai emmené deux packs de bouteilles de deux litres d’eau minérale. Et que j’ai déjà utilisé la moitié d’un en six heures de route. Croyez-moi, l’eau, c’est pas ce qui me manque.

Où vais-je… C’est précisément le sujet de cette histoire, si je vous le dis, ça n’aura pas grand intérêt de continuer. Je dois rejoindre un certain bar où se trouve une certaine personne. Ça vous va ?

Je sais, j’ai l’air très convenable, et je vous emmerde aussi. J’aime pas beaucoup parler ni exprimer mes sentiments de manière générale. C’est pour ça que je voyage avec Héricendre sur le siège passager.

Une fois de plus, je sais. Je travaille à la compagnie des eaux et j’ai un Pokémon Feu. Bravo pour avoir fait le rapprochement, Einstein. N’empêche que c’est mon meilleur ami et mon fidèle compagnon depuis, pfou… le jour où je l’ai trouvé dans le jardin étant gamin. On a toujours eu une relation spéciale.

- Arrête de mordiller le siège.

Il se relève, tourne son long pif vers moi avec un sourire narquois. Il s’ennuie un peu, faut dire, tout ce temps dans la bagnole… Et encore, là, il ne saute plus sur le volant pour me faire aller dans le fossé. Si, si, c’est arrivé. Oh, c’est juste pour rire, c’est comme quand je mets de la sciure dans sa pâtée.

Ouais, on s’amuse comme on peut. En même temps, dans la compagnie des eaux, vous vous doutez qu’on s’amuse pas trop, hein. Faut bien égayer la routine quotidienne.

Y’a une sorte de rade. Je me demande si c’est pas le bar que je cherche, mais impossible, je suis au kilomètre 53, le bar que je cherche est au moins dix-vingt kilomètres plus loin. Comme j’en ai un peu ras les miches de me rincer le gosier à l’eau, je vais me prendre un petit remontant un peu plus corsé. Ça peut pas faire de mal. Héricendre me regarde avec une gueule de pub de prévention contre la cirrhose du foie, mais j’en ai rien à battre.

En trainant ma silhouette de trentenaire hors de ma caisse – bon sang mes pauvres fesses… et mes guibolles c’est pas mieux… - je reçois un SMS qui me fait grommeler. J’y réponds, mais bon sang qu’est-ce qu’elle me fait chier, celle-là. Héricendre vient à mes côtés. En envoyant ce foutu message et en relevant la tête, j’aperçus une femme un peu forte en train de porter une grosse poubelle cylindrique dehors. Elle la pose à côté de la benne. J’avance un peu sur le « parking » devant la masure qui servait de troquet. La femme avait l’air un peu latina sur les bords, je rassemblais mon courage à deux mains pour aller lui parler.

- Madame…
- Ah quoi ? Si c’est pour consommer c’est à l’intérieur, monsieur !
- … Je me doute bien…
- C’est pour quoi alors ?
- Vous connaissez cet homme ?

Je tendais la photo que j’avais sur moi.

- … c’est qui ?
- Tom Dutronc.
- Dutronc ? Connais pas. Moi c’est Opuntia. Vous ?
- Jack.
- Je connais pas de Dutronc, désolé.

Elle repartit dans son bar. Elle me rappelait un peu ma mère, cette aigreur, cette fermeté, cette nature épineuse qui l’obligeait presque contre son gré à repousser les gens qui lui adressaient la parole. Trop attachée à sa solitude, elle n’arrivait pas à maintenir des liens solides avec les gens. Je crois qu’elle m’a un peu transmis ça. Et ça doit être pour ça que j’arrive pas à nouer des liens solides avec les gens.

Et ça doit aussi être pour ça que je me suis fait autant violence pour faire tout ce voyage.

Un cri perçant retentit dans l’immensité désertique autour de nous. Héricendre me grimpe sur l’épaule, apeuré. Faut pas croire, il est chiant mais il a rien dans le slip.

Opuntia nous rejoint, intriguée elle aussi. C’est un Guériaigle qui fond sur un Seviper à quelques centaines de mètres de nous. Le rapace stoppe la créature au sol et commence à essayer de la becqueter. Mais le serpent se défend bien en mordant l’oiseau à la face et dans le cou. Guériaigle semble vouloir attraper le crâne du reptile dans son bec pour le lui briser, mais la bestiole joue de sa queue pour frapper le rapace dans les pattes. Ça marche et le monstrueux oiseau s’envole sans demander son reste, probablement sévèrement touché.

- Eh bah… C’est pas tous les jours qu’on voit ça.
- J’ai vu un truc pareil quand j’étais petit… C’était moins impressionnant. Vous avez de la bière ?
- De la bière ? Vous nous prenez pour quoi, une brasserie ? Ici on sert de la téquila ou un cocktail maison !
- Va pour le cocktail… Vu la chaleur, la Téquila, ce serait du jus de fruits pour moi.

En entrant dans le petit bar, je remarque un vieil homme au fond de la pièce. Il boit un truc fumant, ça doit être fort.

Opuntia mélangea dans un shaker des glaçons, trois centilitres de rhum ambré, trois centilitres de curaçao bleu et douze centilitres de jus d’ananas. Elle servit le tout dans un tumbler qu’elle m’avança. La mixture était d’un vert hypnotique.

- Comment ça s’appelle ?
- Je sais pas. C’est le seul truc que je sais faire. Et je discute pas, je lis.

Elle s’assied sur un tabouret et prit un livre : « Les figuiers de Barbarie » de Rachid Boudjedra. Jamais lu. Sûrement une super aventure avec des barbares amateurs de figues.

Elle ne voulait pas discuter, tant pis, j’allais gamberger un peu. Je me mis à repenser à ma jeunesse. A une scène précise, j’étais gamin et je me baladais avec mon père, et nous nous promenions près de chez nous, même que c’était un peu désertique comme ici. Je crois me rappeler que c’était un quartier un peu mal famé. Je crois aussi me rappeler que j’avais de bonnes raisons de partir de ce trou et de changer de vie pour quelque chose de plus convenable.

Avec mon père, qui était une sorte de grand connard très sympathique, comme la plupart des pères ont l’air quand on a dix-douze ans et qu’on est un petit garçon un peu naïf, avec mon père on arrive devant un arbre mort. C’est très étrange. Quelque chose s’y passe, alors avec mon père, on s’arrête et on regarde, en bons badauds. Y’a un Etourvol qui dépiaute un Abo, c’est moche. Le piaf t’évide le bordel, c’est répugnant, y’a des tripes et des viscères qui volent. J’pensais pas que ça pouvait être violent comme ça, un Etourvol, j’voyais ça comme des créatures gentilles, et je me dis alors : « Cet endroit est vraiment horrible, à tel point qu’il rend même les Pokémon affreux. »

Mon père, qui était à ma droite, me saisit l’épaule gauche et la serra affectueusement dans sa grande connasse de main. Connasse parce qu’elle était fausse, cette poignée affectueuse. Parce que ce qu’il m’a dit en serrant mon épaule, ça m’a fait mal, et ça me fait encore mal aujourd’hui, et…

Et je secoue la tête parce que j’ai pas envie de repenser à ça. J’ai un tic nerveux débile quand je repense au passé : Je me frictionne la joue. Je sais pas pourquoi je fais ça, mais je le fais toujours après avoir repensé à cette période. Une amie à moi me disait que j’avais l’air d’avoir pris un coup de poing et de me frotter pour calmer une vieille douleur dans ces moments-là. Si j’avais été tabassé, je m’en souviendrais.
Je regarde Héricendre, sur le comptoir, à côté de moi. Il me grimpe dessus et me renifle derrière les oreilles, j’aime pas ça. Je le redépose sur le comptoir et saisis mon verre pour le siroter.

- Eh ! Le Pokémon n’a pas le droit d’être posé sur le comptoir ! C’est dégoûtant !

Je regarde la grosse sur son tabouret et je secoue la tête.

- J’croyais que vous causiez pas…
- Hmph…

Je descends Héricendre du comptoir, ne voulant pas me faire éjecter. Nouvel SMS. Je grogne en lisant le contenu.

- Un souci ? demanda la tenancière, soudain bavarde (j’ai dû lui avoir fait perdre son fil dans le texte).
- Rien, seulement ma connasse de petite copine qui me harcèle pour savoir où je suis et quand je rentre… La tête qu’elle va faire quand elle saura que je vais voir un mec !

Elle haussa les sourcils et ne me dit plus rien jusqu’à l’addition, probablement parce que j’avais l’air de déconner ou de l’avoir envoyée chier. C’était pas le cas. J’adore cette nana mais qu’est-ce qu’elle m’énerve avec sa jalousie à la con. A tous les coups je vais me faire engueuler en rentrant.

Si je rentre. Parce que je sais pas exactement où ça va me mener cette histoire.

Après avoir bu mon verre, j’suis un peu assommé, mais ça va, je pouvais conduire. Un coup de flotte et me voilà légèrement dégrisé. Héricendre rejoint son siège en reniflant, attristé d’avoir été viré du comptoir.

Je repartais donc sur ma petite route chérie, toujours en quête du bar du kilomètre 68. J’étais pas très ragaillardi par mon escapade, j’étais même plus déprimé encore. La faute à ces maudits souvenirs qui me remontent.

Je me rappelle de ma mère. Déprimante et déprimée. Apparemment tout était de ma faute dans sa vie. Absolument tout. Je ne me souviens pas avoir été spécialement châtié, mais en tout cas, j’étais pas heureux, ça c’est sûr.

Est-ce que je le suis, maintenant ? Nan, te pose pas ce genre de questions. Héricendre dort. Dommage, j’aurais bien eu besoin de ses pitreries.

La route est franchement lassante et je crois que le cocktail de l’autre lunatique me reste sur le crâne.

Le monde entier est un rictus, il est impossible de savoir s’il est amusé ou ironique. Adolescent j’ai utilisé des psychotropes pour essayer de noyer mes idées noires. Ça marchait pas vraiment, mais à force d’essayer j’ai pas vu la déprime passer. Son rictus est passé d’ironique et grinçant, à sinistre et amusé.

Je crois voir la bâtisse. Merde. Merde, les souvenirs qui remontent. Le ventre qui se serre. Les sueurs froides. Putain. J’veux pas y aller. Demi-tour. J’veux même pas entrer, j’ai une boule dans la gorge, j’m’arrête pas, j’arrête pas la caisse, putain non…

L’autre hérisson de mes deux s’est réveillé, et il s’accroche au levier de vitesse. Mais qu’il est…

- Dégage ! Dégage de là !!

Il commence à le tripoter, mais quel abruti. J’suis obligé de freiner, un Héricendre qui tripote un levier de vitesse, c’est moins dix points sur le permis…

… au beau milieu du désert. Yes. Bravo, Jack. Et bravo Héricendre, sale petit psychopathe.

Me voilà obligé d’y aller. Je sais qu’il est là, je me suis renseigné. Je me frotte la joue, encore. Maudits souvenirs à la con.

J’entre. C’est genre méga glauque. Je regarde encore la photo et je surveille parmi les gens. Je flippe, c’est pas croyable. Héricendre, reste sur mon épaule. Si tu te barres au dernier moment, je t’arrache la tête.

Il est là. Ouais, c’est comme on m’avait dit, il vient boire ici tout le temps. Merde, merde, merde. Bon, j’suis venu jusqu’ici, c’est pas pour faire demi-tour. J’avance d’un pas assuré, je me présente devant lui. Il lève la tête.

Sa main serre mon épaule alors qu’Etourvol dépiaute Abo. Et puis il lâche :

- Fiston, ta mère et moi on se sépare. Et je pense pas qu’on se reverra un jour. Comprends-moi, j’ai jamais voulu ça, mais tu comprendras que dans la vie…

L’homme se met face à son fils. Il a une barbe de quelques jours, mal rasée.

- … on ne choisit pas toujours les chemins qu’on emprunte.


Cette fois j’avais choisi. Choisi de prendre un chemin, d’aller au bout et de ne pas reculer.

- Tom Dutronc ?
- … ouais…
- Je… euh, je crois que vous êtes mon père… Je suis Jack, ma mère est Francine Hardy, on vivait…
- Je… J’ai compris… c’est… c’est une joie de te revoir, fiston… Ca fait…
- Longtemps, ouais… ça… t’embête ?
- Non, non…

Mon père se lève et me fait la bise, comme un père ferait à son fils. Lorsqu’il s’éloigne de moi, je me frotte la joue et je regarde mon père, hébété. Et je prononce une phrase qui débloque en moi mille et une choses :

- Tu… Tu piques toujours autant, papa…

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EXPLICATION

C’est clairement pas ce que j’ai écrit de meilleur (un béta-lecteur me l’a confirmé) mais j’ai vraiment rien d’autre, je suis venu avec ça, je m’y suis tenu, bon.

Mon Challenge personnel de départ c’était : Pas de Maracachi, pas de Cacnéa, pas de Cacturne. J’avais fait un premier texte avec une fille maltraitée par son père et qui doit aller au puits pieds nu parce que c’est la seule qui peut traverser un champ de cactus pieds nus sans se faire piquer. Tout ça parce que son port de tête exceptionnel l’empêche de renverser de l’eau et de noyer les cactus. Son père, au final, se serait fait tuer par le Maracachi du champ qui aurait empalé le pater sur ses épines.

Ça m’a paru tellement con que je me suis dit : Si tu envoies cette merde, tire-toi une balle tout de suite.

J’ai étendu le challenge à : Pas de cactus.

Et là j’ai eu cette idée. Le postulat de départ c’était : Le personnage principal doit trouver que la barbe de X ou Y pique. Est venu ensuite l’idée du père.

Héricendre était censé être un humain et le OS être un peu plus « buddy movie » mais ça me paraissait terriblement con et compliqué également alors je l’ai remplacé.

Les multiples références aux cactus :

- Bah la barbe du père qui pique, quoi. Déjà…
- L’aigle et le serpent qui se battent : C’est une référence au mythe de la fondation de Mexico selon une prophétie (Cf Wikipédia, article Cactus)
- Le fait que le personnage boive beaucoup d’eau et travaille à la compagnie des eaux.
- Les noms : Jack, Dutronc, Tom (Thomas, le fils), Francine Hardy (Françoise Hardy est l’épouse de Jack Dutronc), le tout faisant référence à la chanson des cactus de Jacques Dutronc, le tout symbolisé par cette phrase : « Le monde entier est un rictus, il est impossible de savoir » qui fait écho à « Le monde entier est un cactus, il est impossible de s’asseoir »
- Le Pokémon de Jack est Héricendre, inspiré des échidnés, animaux notoirement piquants.
- « Opuntia » est un genre de la famille des cactus.
- Le cocktail qu’elle fait à Jack s’appelle le Cocktail Cactus. La recette est authentique.
- De même le livre qu’elle lit est un roman qui traite de relations familiales difficiles.

Après, certes, si on sait pas que le thème c’est cactus, on le devine pas. Brrref. C’est pas le meilleur truc que j’ai écrit, c’est clair et net, mais au moins j’aurais participé…
Raishini13
Spoiler :
Deux destins, une même fin :


Une chaleur torride sous un soleil de plomb. Un sol brûlant sous ses pattes. Et surtout, une immensité désertique et aride aussi loin que portait son regard...

Sous l'effet de la canicule, l'atmosphère tremblotait, et des panaches de fumée s'élevaient en volutes tourbillonnants du sol. Le ciel bleu et vide de tout nuage semblait se moquer de lui. Même le vent qui soufflait fort était ardent, suffoquant. On aurait cru se trouver dans l'antichambre de l'Enfer.

Il était tenaillé non seulement par la faim, mais aussi par la soif. Son palais asséché le torturait abominablement, et il n'avait même plus assez de salive pour s'humecter... De temps à autre retentissaient les gargouillements impressionnants de son estomac. Ah, si seulement il pouvait tomber sur des baies. Oui, si seulement...

Ses membres, cloqués par la haute température du sable qu'il foulait depuis longtemps déjà, le faisaient souffrir. Ses bras et ses pattes d'habitude si robustes étaient à présent engourdis, aussi faibles que ceux d'un vulgaire vieillard humain. Même ses puissantes ailes ne pouvaient lui être d'une quelconque utilité dans son état. Il les agitaient vainement de temps en temps, par simple réflexe, mais il savait que c'était peine perdue...

Pourquoi avait-il donc fallu qu'il se retrouve ainsi, dans une situation si grotesque que lui-même peinait à ne pas en rire ?

Il vociféra sous le coup de l'indicible colère qui le gagnait, épuisant un peu plus ses forces déjà très amoindries... Ces énergumènes, ces pseudo-parents, ils le lui paieraient très cher. Comment avaient-ils osés arracher son meilleur ami à leur fille ? COMMENT ?

Et cette dernière, où était-elle à présent ? Allait-elle bien ? Oui, en l'instant, le Pokémon ne cessait de penser à la jeune fille, à ce qu'elle pouvait ressentir loin de son fidèle compagnon. Il avait continuellement à l'esprit son image, revoyant plus nettement que jamais son sourire innocent. Effectivement, elle avait toujours été ainsi... son amie.
* * * * * * *
Près d'un an auparavant, ils s'étaient rencontrés. Lui, le terrible Insécateur des bois aux allures farouches, et elle, l'enfant de riche au visage angélique et candide...

En temps normal, il n'approchait pas les humains. Il s'en était toujours méfié comme de la peste, oyant de la bouche de ses congénères des récits très peu flatteurs à leur propos.

Oh, bien sûr, il en apercevait assez régulièrement, bien que, à l'époque, il vivait dans une impénétrable et gigantesque forêt. Des randonneurs, des garde-chasses, des chasseurs... Tout un tas d'individus hétéroclites en somme.

A vrai dire, il n'était jamais parvenu à ressentir à leur égard autre chose qu'une profonde antipathie. Ils avaient beau se différencier par bien des aspects, ils n'en restaient pas moins pour autant ce qu'ils étaient au plus profond d'eux-même : des destructeurs.

Insécateur n'avait jamais oublié le braconnier qui, un jour, lui avait fait cette cicatrice à la joue alors qu'il le visait avec un fusil. Il n'avait jamais oublié non plus le jour... où ces mêmes humains avaient décimés sa tribu, ne laissant en lui que tristesse et rage...

Dès lors, il y avait eu dans sa vie un vide que, malgré bien des efforts, il n'était pas arrivé à combler. Un vide qui, chaque nuit, lui avait arraché, une à une, toutes les larmes de son corps...

C'était parallèlement ces événements malheureux qui avaient fait de lui un Pokémon âpre et solitaire, une sorte d'ermite aigri et agoraphobe...

Mais, envers et contre tout, là où tout un chacun avait échoué, elle l'avait fait. Elle était devenue... son amie.

Au début, elle tentait de l'approcher directement, sans crainte ni doute. Et lui, pour faire bonne figure, l'effrayait gentiment en faisant mine de l'attaquer. Aude, c'est ainsi qu'elle s'appelait.

Malgré la mauvaise volonté manifeste de l'insecte géant vert, la petite fille, âgée de neuf ans tout au plus, n'avait pas abandonnée pour autant.

Aude était revenue, mais plus discrètement cette fois, se cachant derrière un arbre ou un buisson pour l'observer. Elle l'espionnait avec un intérêt vif et, petit à petit, Insécateur avait fini par tolérer sa présence, voire par l'apprécier.

Aude n'était en effet pas comme les autres humains. La petite fille avait quelque chose de différent, mais dans le bon sens du terme. Elle était pure, joyeuse, touchante et surtout... la seule personne a lui avoir jamais adressé la parole de façon amicale, la seule a ne pas l'avoir considéré comme un monstre bestial et sanguinaire qu'il fallait absolument mettre en cage...

Oui, tout cela l'avait d'ores et déjà conquit chez elle... Mais ce qui avait vraiment scellé leur amitié se produisit près de deux mois après leur première rencontre.

Hormis lui, il y avait un autre Pokémon dans cette forêt dont on disait qu'il était aussi dangereux qu'un fauve acculé. Honnêtement, lui-même le craignait. Et ce n'était pas faute d'avoir déjà croisé le fer avec lui auparavant pour tenter d'établir une hiérarchie. Jusqu'alors, ils n'avaient pas réussi à se départager, cumulant matches nuls sur matches nuls. Force lui était de reconnaître qu'il s'agissait d'un sérieux rival...

Ce Pokémon n'était autre que le plus vil et sournois Ursaring que l'on ait été en mesure d'imaginer. Plus colossal que la majorité de ses pairs, plus cruel et retors aussi, il n'hésitait pas à attaquer quiconque se trouvait sur son chemin, humain comme Pokémon. Son regard noir et aussi aiguisé que ses griffes suffisait généralement à faire fuir ses victimes. Néanmoins, si ce n'était pas le cas, il se montrait alors d'une violence rare, ne laissant de ses pauvres cibles que des lambeaux de chair sanguinolents.

Oui, contrairement à lui, Ursaring avait déjà tué un humain. On disait même qu'il avait emmené avec lui le cadavre pour qu'il serve de trophée dans son refuge, bien que cela ne demeurait qu'à l'état de théorie, -une théorie très sinistre d'ailleurs.

Et c'était précisément cet Ursaring que Aude avait eu un jour la malchance de croiser, alors qu'elle venait rendre visite à Insécateur d'un pas bondissant, l'air guilleret.

Jamais, de toute sa vie, l'insecte n'avait senti monter en lui une telle rage, une telle hargne. Lorsqu'il avait entendu hurler la petite fille... Lorsque, au détour d'un chemin, il était tombé sur l'impressionnant ours marron à l'air patibulaire, et qu'il l'avait vu menacer Aude, son profond rancœur envers l'animal s'en était retrouvé décuplé. Une fureur considérable l'avait animé.

Il ne comptait pas le laisser faire de nouvelles victimes... Non, hors de question ! Et surtout, il ne laisserait pas lui enlever sa seule amie, jamais !

C'est ainsi qu'il était parvenu à puiser en lui les ressources nécessaires pour terrasser l'ennemi en un seul mais fantastique coup de faux, grâce à son attaque Plaie-Croix. Dès lors, Ursaring avait perdu de sa superbe, et plus personne n'avait entendu parler de lui...

Probablement la honte d'une telle défaite restait gravée en lui comme une marque appliquée au fer rouge... Probablement n'osait-il de fait plus sortir de sa grotte. Quoiqu'il en soit, on eut plus vent du récit d'attaques venant d'Ursaring, et la forêt put alors couler des jours paisibles...

Quant à Insécateur ? Il était heureux, tout simplement. Aude était sauvée grâce à lui, et il ne lui en fallait pas plus.

A décider de ce jour, l'insecte était sorti de sa forêt pour vivre à ses côtés. Il était devenu son Pokémon. Son ami.

Mais voilà, tout cela était trop parfait pour durer...

Il avait eu en effet à faire face à une nouvelle menace. Une menace qu'il était à milles lieux de se figurer : les parents.

Oui, ces maudits parents qui, depuis toujours, rêvaient de voir leur fille unique devenir une « grande lady », ainsi qu'ils aimaient à le dire. Ils n'avaient jamais voulu la voir frayer avec ces créatures hideuses et vulgaires, qu'on appelait communément « Pokémon ».

Possédant bien plus de richesses qu'ils n'en avaient besoin, les parents d'Aude s'acharnaient à en faire la fille parfaite qu'ils désiraient tant, allant même jusqu'à la priver de vie sociale pour la voir satisfaire leurs envies.

Malgré l'opulence dans laquelle elle nageait, Aude n'avait jamais eu que du dégoût pour ce semblant de vie. Elle la trouvait fade, terne et si triste... Et l'interdiction qu'on lui imposait de ne pas fréquenter de Pokémon n'avait fait qu'affermir ce ressentiment.

C'est pourquoi, en cachette, elle avait commencé à visiter le bois qui jouxtait la demeure familiale, avec la volonté ardente de rencontrer une de ces fabuleuses créatures. Et c'est ainsi que, lors d'une excursion un peu plus poussée, son chemin et celui d'Insécateur avaient convergés. C'est ainsi que, l'un comme l'autre, ils furent plus heureux que jamais ils ne l'avaient étés dans leur misérable existence...

En revanche, quelqu'un voyait d'un mauvais œil cette relation complice, cette amitié étroite. Encore et toujours ces satanés parents. Aude avait crû bon de présenter Insécateur à ces derniers, espérant leur faire réaliser au travers de leur entente presque symbiotique qu'ils s'étaient fourvoyés, qu'ils ne pouvaient la rendre heureuse qu'en acceptant sa présence.

Malheureusement, s'il y en avait bien une qui se fourvoyait, c'était elle.

Bien loin de supporter la simple vue de l'insecte, la femme comme le mari s'étaient évertués à lui rendre la vie impossible. Au début, cela ne se traduisait que par de déplaisantes remarques à son encontre. Rien de bien méchant en somme.

Mais, progressivement, leurs mauvais tours étaient devenus d'un tout autre type, bien plus pendable. Insécateur fut notamment contraint, une soirée d'été, à fuir face à la dizaine de Pokémon féroces qui l'avait assailli en traître. De cette expérience, il en était ressorti grièvement blessé, et les parents n'avaient pas mieux trouvés pour tenter de se disculper que de feindre la compassion.

Cependant, à leur regard froid et sévère, il avait tout de suite compris. On ne voulait apparemment plus de lui dans cette maison.

Et s'il était resté, c'était uniquement pour Aude. Oui, uniquement pour elle.

Devant la ténacité de la mante, les parents en étaient venus à une solution de dernier recours, totalement radicale. Ce dernier geste de leur part... qui avait gâché sa vie.

Il y a deux jours, ses tortionnaires l'avaient « convoqué », sans toutefois en avertir leur « bien-aimée » fille. Insécateur, curieux et prudent à la fois, s'était rendu dans leur gigantesque jardin agrémenté d'une imposante fontaine aux sculptures d'or. La maisonnée entière y était rassemblée, formant un cercle bien net dont le centre n'était autre que les parents d'Aude. Peut-être comptaient-ils s'avouer vaincu ? Peut-être accepteraient-ils enfin son indispensable présence dans la vie de leur enfant ?

Si, sur le moment, c'était ce qu'avait espéré de tout son cœur l'insecte, il n'en était pas moins tombé des nues. L'informant qu'il était un « fauteur de trouble », un « monstre » qui s'accaparait l'attention de leur fille, les parents avaient alors claqué des doigts...

Douleur, peine et incompréhension, voilà tout ce que la mante put ressentir l'espace d'un instant, alors même qu'on le frappait sans ménagement au niveau de la nuque... Sa vue s'était obscurcie, puis ce fut le trou noir, le néant.

* * * * * * *
A présent Insécateur avait atterrit ici, dans cette étendue sablonneuse vide et inhospitalière. Elle déroulait ses méandres à perte de vue, et l'insecte se figurait mal qu'elle puisse avoir une fin, ou même un commencement. Probablement l'avait-on emmené en avion pour le jeter dans cet endroit.
Oui, c'est bien l'idée que les parents d'Aude devaient se faire d'un châtiment adapté à son cas. Plutôt que de le tuer immédiatement, ils comptaient le faire périr à petit feu...

Lui, le souverain des insectes, le plus puissant et agile qui soit d'entre tous, il en était maintenant réduit à errer. Titubant et marchant à pas lents, la tête basse, la mante verte ressemblait à un ivrogne en quête de vin ou tout autre spiritueux. Comme il devait avoir l'air pathétique...

Cela ne l'empêchait toutefois pas de scruter occasionnellement l'erg avec ce mépris, cette fierté orgueilleuse et cette stature qui étaient les siens. En dépit du contexte, il demeurerait tel qu'il avait toujours été, et ce jusqu'à la fin.

Ah, il avait chaud, tellement chaud...

Il observa fugitivement les environs, en quête d'une quelconque lueur d'espoir. Même si l'insecte devait s'avouer être abattu et n'agir de la sorte que par le biais d'un futile mécanisme de survie, il attarda son regard...

Et là, au détour d'une haute dune, il l'aperçut. Cette source d'espérance, ce monument d'allégresse, cette vision si troublante mais si réconfortante à la fois...

Une véritable forêt de cactus ! Il y en avait partout : des grands, des petits, des ronds, des ovales, des verts, des grisâtres... Toute une palette de ces fabuleuses réserves de suc... et donc d'eau !

Faisant fi de sa douleur et de sa fatigue, Insécateur mobilisa ses ailes et se propulsa vers cette large tache verdâtre au milieu du désert doré, soulevant des torrents entiers de sable dans son sillage. Il sentait ses ressources décuplées sous l'effet de l'euphorie qui le gagnait à mesure que sa chance de salut se rapprochait. Mu par une volonté nouvelle, il combla la distance qui le séparait des plantes en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire. Même les protestations muettes de sa peau égratignée, brûlée et lancinante lui paraissaient dérisoires en l'instant. Il allait vivre. Oui, VIVRE !

Une fois arrivée sur la vaste aire envahie de cactus, sa joie s'intensifia, si possible. Certains végétaux, hauts de plusieurs mètres et hérissés de grandes épines blanchâtres et dures, portaient en effet des fruits sur leurs raquettes. Des figues de Barbarie !

Quelque peu incrédule, l'insecte contempla quelques instants les fruits charnus et ovales, de couleur jaune-rouge. Aude lui en avait déjà montré dans un des très nombreux livres que comprenait sa collection. Quelle chance il avait d'en trouver en une période si précaire de son existence !

Insécateur savait exactement comment procéder. D'un geste vif et précis de ses bras en forme de faux acérées, il trancha la liaison entre un des fruit tant convoité et sa raquette. Puis il pela la figue minutieusement, ôtant la peau couverte d'aiguillons avec une précision chirurgicale, et la porta à sa gueule...

La première bouchée fut une renaissance, un électrochoc bienfaisant. Le flux comme interrompu de son sang sembla reprendre, ses yeux s'agrandirent, ses muscles tressaillirent de vitalité... La vie coulait à nouveau en lui !

Les uns après les autres, Insécateur dévora goulûment les fruits, savourant avec délectation le goût sucré et légèrement acidulé de leur chair pulpeuse et juteuse à souhait. Même les nombreux pépins qu'ils contenaient ne purent faire obstacle à sa voracité. Il se sentait déborder d'énergie malgré le climat impitoyable et le Soleil qui était à son zénith dans le ciel. C'était comme si plus rien ne pouvait venir à bout de sa vigueur et sa résolution nouvelles. Il avait l'impression de pouvoir gravir les montagnes les plus escarpées, franchir les mers les plus tumultueuses et traverser les contrées les plus hostiles...

Toutefois, ce repas riche en sucre avait paradoxalement exacerbé sa soif. Pour pallier à cela, il lui fallait de l'eau. De l'eau bien fraîche et désaltérante... Et quoi de mieux pour cela que la multitude de cactus qui l'entourait, attendant de l'abreuver encore mieux que les figues ne l'avaient fait ?

Les sens affûtés, il entreprit de pratiquer une large ouverture dans le cactus le plus proche, prenant bien soin d'éviter les dangereuses épines qui en criblaient la surface. De toute façon, il était aguerri et parfaitement pourvu afin d'effectuer cette action. Il n'y avait donc pas de soucis à se faire.

Lorsque le suc s'écoula en perlant et que l'insecte y goutta, ce fut comme l'apothéose, l'aboutissement de tout un projet ambitieux. Il exaltait, parcouru d'un frisson de fraîcheur. Jamais il n'aurait pensé que le simple fait de boire ce liquide vital le revigorerait autant. C'était fabuleux ! Il devait en reprendre. Il en voulait davantage, toujours plus...

C'est ainsi que la mante déchaîna sa frénésie, avide de ce breuvage qui, telle une panacée, le guérissait de tout ses maux.

Pris dans son élan, Insécateur n'entendit pas le grognement qui résonna à ses oreilles lorsqu'il taillada un énième cactus. Enivré par le besoin graduel qu'il éprouvait d'étancher sa soif, il était sourd à toute autre chose. Un peu moins lucide qu'il n'aurait du l'être, l'insecte s'attaqua à une nouvelle cactée, sans même constater que sa précédente cible n'avait pas cédée sous la brutalité de sa découpe. Ce fut probablement pour cela que la mante encaissa, incrédule, un rude coup de poing qui lui sembla transpercer son dos de mille petites lames...

Il tomba face contre terre, inhalant du sable et toussant, le souffle court. Un grondement fit vibrer l'air, tel le roulis du tonnerre. On aurait dit qu'un essaim d'abeilles particulièrement féroce le cernait. Il avait si mal...

Un sentiment d'angoisse profonde le saisit, lui noua douloureusement le ventre. Son corps trembla malgré lui tandis qu'il se relevait avec peine, le visage grimaçant. Autour de lui, il percevait de nombreux mouvements... Comment avait-il pu être inconscient au point de ne pas surveiller ce qui l'entourait avec la prudence qui s'imposait ?

« - Pourquoi t'es toujours tout seul ? »

Lorsqu'il balaya d'un regard de rapace les alentours, Insécateur comprit aussitôt. Sa situation était plus instable encore qu'auparavant. Il le savait... alors qu'il toisait effrontément la vingtaine de cactus humanoïdes qui l'encerclait !

« - Si tu veux, je peux être ton amie ! »

Ils étaient approximativement à taille humaine. Le chapeau vert sombre et tétraédrique qui leur tenait lieu de couvre-chef projetait des ombres lugubres sur leur visage démoniaque, ce qui donnait aux créatures un aspect plus repoussant encore. Les yeux jaunes de ces Pokémon brillaient d'une lueur intense et sournoise, les rendant franchement effrayants. La mine hargneuse, ils agitaient vigoureusement leurs membres arrondis et couverts d'épines pointues, comme s'ils s'échauffaient.

Des Cacturne !

Comme ça elle voulait devenir son amie. Pour qui la prenait-elle ? Pour une gentille peluche grandeur nature ?

Visiblement, l'insecte avait provoqué l'ire de ces Cacturne sauvages en transgressant les limites de leur territoire et en attaquant l'un des leurs par inadvertance. Et, de toute évidence, ils étaient prêts à lui sauter dessus pour se venger.

Finalement, elle n'était pas si désagréable que ça. Peut être se laisserait-il volontiers approcher à l'avenir...

Le moment était venu de défendre ce en quoi il croyait. Il allait se battre de toutes ses forces ! De part et d'autre de lui, les Cacturne se mobilisaient, fléchissant les jambes. Dans un dernier hurlement, la horde monstrueuse se jeta d'un même mouvement sur Insécateur...

Mais pourquoi donc avait-il risqué sa vie pour la sauver ? L'aurait-il pris en l'affection ? Son cœur avait battu la chamade lorsqu'il l'avait senti en danger. Serait-ce donc là ce que l'on appelait... l'amour ?

Un, deux puis trois Cacturne tombèrent, lacérés par les armes meurtrières de la mante. Mais ils étaient trop nombreux. Elle essuya un sérieux assaut, atteinte par les multiples Poing-Dard assénés par les adversaires. Dans un long saut, elle s'écarta, le souffle court et le corps en feu. Devant elle, le groupe de plante avançait, formant une sorte de cortège mortuaire. Leur regard était dur, inflexible. Aucune hésitation ne se lisait dans leurs yeux perçants et cruels. Les Cacturne n'auraient aucun scrupule, ils achèveraient leur fatale besogne. En l'instant, l'insecte en avait la certitude.

Jamais il ne s'était autant amusé, pas même avec un de ses défunts compagnons d'antan. Vraiment, elle avait un petit plus qui faisait toute la différence, mais il n'arrivait pas à mettre le doigt, -ou plus exactement la faux-, dessus...

Insécateur virevolta entre les cactées, portant coup après coup. Ses cibles chutaient lourdement, terrassées par la puissance de ses attaques. Oui, il était le plus fort, le plus redoutable... Mais pour une fois, il ne gagnerait pas. Tout ce qu'il pouvait, c'était retarder l'échéance. Survivre, tout simplement.

« - Mais qu'est-ce que cette horrible bestiole fait dans la maison ? Je t'ordonne de t'en débarrasser sur-le-champ ! Tu as mieux à faire que de fraterniser avec un tel monstre ! N'oublie pas le sang noble qui coule dans tes veines ! Franchement Aude, tu me fais honte ! »
Cette hostilité, cette attitude hautaine... Pourquoi ceux-là même qui avaient donnés la vie à Aude lui détruisaient-ils petit à petit l'existence ? Pourquoi disaient-ils agir au nom du plus grand bien, alors que de tout cela, il ne découlait que malheur et désespoir ? POURQUOI ?


Prise d'une soudaine idée, la mante s'envola grâce à de puissants battements d'aile, s'extirpant du dédale de cactus telle une torpille verte. Si elle allait assez vite, elle pourrait fuir cette bande malfaisante et poursuivre sa route. Même si cette idée lâche lui déplaisait profondément, il s'agissait là de son seul expédient...

« - Ne t'en fais pas Insécateur, je ne laisserais rien ni personne nous séparer, je te le promet ! »
Désormais, il ne serais plus jamais seul, il en avait la conviction.


Les Cacturne n'étaient pas décidés à lui laisser une marge de manœuvre pour autant. Une expression mauvaise se lisait sur leur faciès ténébreux. D'un geste vif et coordonné, la harde envoya sur l'insecte une légion virevoltante de dard tranchants. Une attaque Dard-Nuéee ! Décontenancé, Insécateur ne put esquiver ces dangereux projectiles et fut violemment happé par la nuée.

« - Tu sais Insécateur, je n'ai jamais eu d'amis. Tu es le premier. Merci d'être à mes côtés, tu ne peux pas savoir à quel point ça me fait plaisir. »
Lui aussi, il l'en remerciait. Le vide qui l'avait toujours habité, elle l'avait à présent rempli. Il était heureux.


Il chuta laborieusement, s'écrasant à terre dans un fracas épouvantable. Ah, que de douleur...

« - Est-ce que toi aussi, tu la sens ? Cette chaleur au niveau du cœur ? »

Oui, même en l'instant, il la sentait. Insécateur se releva avec pugnacité, l’œil droit fermé sous le coup de la souffrance. Jamais son corps ne l'avait autant torturé. Chaque centimètre carré de sa peau protestait ouvertement au moindre de ses mouvements. Toutefois, il se battrait. Pour elle. Pour Aude.

« - Jure-moi d'être fort Insécateur ! Quoiqu'il advienne, sois toujours toi-même. Ne l'oublie pas. On supportera mes parents. Ensemble. »
Même en cette période trouble, elle avait su trouver les mots justes. Franchement, il en avait de la chance...


Le cercle des Cacturne se resserrait autour de lui, tel un lugubre étau. Non, il ne les laisserait pas jouir de leur supériorité numérique sans leur avoir montré ce qu'il en coûtait de l'affronter. S'il devait périr, autant laisser des marques indélébiles de son passage en ce monde impitoyable.

« - Mais... Insécateur ! C'est quoi toutes ces blessures? Comment t'es-tu fais ça ?
Ce n'était pas grave, elle n'avait pas à s'en faire. Qu'ils essaient tous autant qu'ils étaient de les éloigner l'un de l'autre, et ils verraient...


Ses faux fendirent l'air en déplaçant des remous, et un Cacturne s'écroula, abattu en un seul assaut.

« - Je serai toujours avec toi, qu'importe les difficultés. Lorsque tu te battras, je serai là moi aussi. Je ne t'abandonnerai pas, car notre amitié est plus forte que tout au monde. »
A ce moment là, il n'était pas sûr d'avoir montré à quel point sa sollicitude le touchait. Peut-être aurait-il du s'attacher à lui démontrer ses sentiments de façon plus démonstrative...


Insécateur subit une énième riposte adverse alors qu'il foudroyait un second belligérant, puis tituba. Nouvelle douleur, nouvelle grimace...

« - Tu sais, je crois que je ne supporterais pas de te perdre, Insécateur. Tu es mon ami, mon compagnon, et sans toi, je ne suis rien. Absolument rien. »
Oui, lui non plus ne supporterait pas de la perdre, de la voir succomber sous les coups d'un autre, ainsi que cela avait été le cas pour sa famille...


Il frappait inlassablement et sans relâche, animé d'une volonté sans nom, du désir farouche de défendre son honneur et celui d'Aude. Il ne rendrait pas le dernier soupir, pas sans se battre une ultime fois... Du moins, il ne connaîtrait pas la mort pitoyable que les parents de la jeune fille lui avaient prédit avant de le balancer sans ménagement du haut d'un avion. Il affronterait son destin, droit dans les yeux.

« - Immonde créature, tu n'interviendras plus jamais dans la vie de nôtre fille, la chair de notre chair ! Nous allons te faire souffrir, et ta carcasse pourrira après une longue agonie, seule et sans personne pour la pleurer ! »
A vrai dire, ces furieuses diatribes lui avaient fait réaliser une chose : pour Aude, il était sa famille, la seule vraie famille qu'elle ait jamais eu. Et il ressentait exactement le même sentiment à son encontre
.

La mante plia un genou à terre, épuisée et blessée au-delà de l'imaginable. Autour d'elle, le sol était jonché de corps inertes. Finalement, elle ne l'aurait pas fait. Elle ne serait pas restée pour toujours auprès d'Aude. Elle périrait loin de son amie.

« - En dépit de ce que tout le destin pourra faire pour nous désunir, nous resterons ensemble, en connexion, aussi loin puissent être nos corps. Je t'aime, Insécateur, si tu savais... »

Au demeurant, ses craintes étaient infondées. Ils seraient toujours liés, gravés réciproquement dans le cœur l'un de l'autre, il n'y avait pas lieu d'en douter. Qu'importe la situation, l'insecte pourrait partir l'âme en paix.

« - N'aie crainte... »

Les Cacturne semblaient toujours aussi nombreux. L'air plus revêches que jamais, ils refermaient progressivement sur le Pokémon pris au piège le cercle infranchissable qu'ils formaient. Ils n'étaient plus qu'à quelques centimètres, levant leurs terribles bras armés de pointes...

« ...je suis avec toi. »

Depuis toujours, Insécateur avait conscience que l'aventure s'achèverait ainsi. Au fond de lui-même, il l'avait toujours su. Mais à présent qu'il savait que rien ne pourrait vraiment le séparer d'Aude, à présent qu'il en avait la certitude, il se sentait prêt à accueillir la main froide, glacée de la mort, presque comme une nouvelle amie qui l'ôterait à ses tourments. Sa douleur n'était plus que secondaire. Fermant les yeux paisiblement, il écouta une dernière fois les grognements avides de ses adversaires, sentit leurs membres l'agripper puis l'emporter...

Il n'avait plus peur. Plus maintenant.


PS : bon, comme vous l'aurez vu, le rapport avec le mot "cactus" est effectué avec le désert, dans lequel Insécateur découvre justement des cactus, mais aussi avec les Cacturne. Voilà, en espérant que ça vous aura plut ! paf:
Le niveau est très haut, vous allez être assez ardu à départager ^^

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dragibus
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par dragibus » sam. 10 mars 2012, 19:19

Boudiou ! Y a du niveau effectivement ! Les styles et les façons d'interpréter le thème sont radicalement différents, mais d'autant plus intéressants. Une jolie cuvée, ce cactus ^^

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Solyx » sam. 10 mars 2012, 19:23

Bravo à vous trois pour vos textes.
Sinon, j'ai particulièrement accroché sur le texte de Dragi', surtout avec sa relation avec le thème, mes félicitations à toi !
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Merci à Versus pour le kit

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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Raishini » sam. 10 mars 2012, 20:01

Franchement c'était bien, je sais pas comment vous faîtes ^^ Perso j'ai bien ri en lisant le texte de Domino :lol:
Héricendre me regarde avec une gueule de pub de prévention contre la cirrhose du foie, mais j’en ai rien à battre.
Et y en a plein comme ça 8)
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Nasca
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par Nasca » dim. 11 mars 2012, 08:01

Très bons textes ! J'ai beaucoup apprécié celui de Dragibus, mais les autres ont également fait du bon travail. Il me tarde de voir comment le jury va départager tout ça.

♣♦♣
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » dim. 11 mars 2012, 08:04

J'ai fini les jugements pour ma part, je pourrais les poster cet après midi.

EDIT : Je pourrais plus me connecter jusqu'à demain soir. On poste en même temps ou pas ?

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DimoniaK
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par DimoniaK » dim. 11 mars 2012, 11:17

Raishini13 a écrit :Franchement c'était bien, je sais pas comment vous faîtes ^^ Perso j'ai bien ri en lisant le texte de Domino :lol:
Héricendre me regarde avec une gueule de pub de prévention contre la cirrhose du foie, mais j’en ai rien à battre.
Et y en a plein comme ça 8)
Oui, ben c'est l'humour à la Skitty %) (qui se retrouve un peu dans le Lyrical Or Lyrics, au passage)

Sinon ces concours ont l'air bien, je vais essayer d'y participer entre ma parodie de LOTR, l'interview délirante de Cynthia, la song-fic avec Hallowed Be Thy Name et ma vie... %)
Image

Merci à Versus :D
Spoiler :
5/04/2022. La nostalgie est insoutenable. 600 caractères, c'est bien trop court pour remercier toutes les personnes géniales que j'ai pu rencontrer ici. Merci pour la sincérité, la diversité, la confiance, l'acceptation. On a toustes beaucoup appris ensemble. Prenez soin de vous.
une bouée spatiotemporelle

♣♦♣
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Re: [Défi] Concours "amateurs" de fics!

Message par ♣♦♣ » mer. 14 mars 2012, 19:08

Et voici les jugements :D
Des coups de coeurs, des coups de gueules, je vous laisse découvrir ça de suite :

Dragibus
Spoiler :
Respect du thème 1,75/2
La preuve qu'il suffit seulement d'ouvrir un dictionnaire pour avoir des idées ;)
J'aime vraiment ton interprétation du thème, chapeau bas.

Expression 3/3
Parfaite, rien à dire, fluidité et construction du texte bien arrangée sont au rendez-vous.

Originalité du scénario et des personnages 4/5
Le scénario est bien construit, tu décris bien les sentiments du personnage principal, sur ce qu'il ressent, sur ce qu'il vit... Mamie est un personnage extrêmement bien fouillé, bravo !
Petit regret tout de même, le fandom pokémon n'est pas assez présent. Dommage.

Total : 8,75/10, soit 4,375/5
Avis global : La perfection est presque atteinte, mes félicitations. Je n'ai rien d'autre à dire :D
DOMINO
Spoiler :
Respect du thème 1,75/2
Plutôt que de faire un seul et unique « objet » d’attention au thème, tu as préféré disséminé dans ton texte plein de détails qui se réfèrent au mot « cactus ». C’est original, mais faut avoir l'oeil pour les trouver. Je ne les aurais pas tous trouvé sans l’explication fournie à la fin.

Expression 3/3
Impeccablement maîtrisée, aucune faute, c’est fluide, et on ne bute pas sur les mots. La construction du texte est excellente, aérée, sans « fausse note ».

Originalité du scénario et des personnages 2/5
Et là, c'est le drame. Ton scénario n'est pas assez travaillé à mon goût, et la fin « incomplète », trop ouverte. Peut-être que l'apport d'éléments supplémentaires, tel qu'une motivation quelconque au personnage principal qui lui donne envie de retrouver son père. Tes personnages sont en revanche doté d'une véritable personnalité, ce qui est parfaitement appréciable.

Total : 6,75/10, soit 3.375/5
Avis global : Un petit texte sans prétention, qui brille par une syntaxe parfaite qui s'accorde parfaitement avec les événements, mais plombé par un scénario assez incomplet. C'est dommage, car tu m'avais habitué à mieux.
Raishini13
Spoiler :
Respect du thème 1,25/2
La note est principalement due au fait que l'Insecateur accoure dans un champ de figuiers de Barbarie, et qu'il se batte contre des Cacturnes. Mais comme je vais l'expliquer dans mon commentaire sur le scénario, je trouve que tu as vraiment collé ces éléments à ton texte, qu'ils font « tâche ». Plus de détails au champ approprié.

Expression 2/3
J'aime beaucoup ton vocabulaire assez riche et varié, et d'entrée de jeu j'ai été conquis par la fluidité de tes phrases. Attention toutefois, parfois tu te laisses trop aller dans le langage ampoulé, ce qui fait perdre de la saveur à ton texte.
Pour ce qui est de la construction du texte, j'ai deux-trois trucs à redire : pour commencer, quand le héros se bat contre les Cacturnes, tu as entrecoupé l'action par des extraits de souvenirs de l'Insécateur pour rendre ton texte plus pathétique. Ok, mais tu aurais au moins pu donner une raison à ces souvenirs de refaire surface. Dans ton texte, ils apparaissent comme par magie, comme ça. C'est vraiment dommage, et c'est ce qui te fais perdre des points.

Originalité du scénario et des personnages 3,75/5
Bon, pour résumer, l'histoire du pokémon abandonné a été vue et revue des centaines de fois au moins. Donc, ce n'est pas très original, mais on distingue tout de même un effort pour se sortir de ce cliché, en faisant intervenir des parents autoritaires qui ne veulent pas de pokémon pour leur fille. D'ailleurs, j'aurais aimé que tu approfondisses le personnage des parents, qui mériterait d'être plus fouillé.
Pour en revenir à ces fameux cactus qui surviennent du tout au tout, eh bien... Pour commencer, j'ai trouvé que ta fin était faite « de morceaux de textes recollés avec des bouts de scotchs ». Elle est assez « branlante », pour ainsi dire. Pourquoi Insécateur se jette-t-il dans le champs pour tout dévorer ? Pourquoi les Cacturnes veulent-ils défendre ces cactus ? Que de questions que tu aurais du te poser à la relecture. Cela aurait permis d'approfondir au maximum cette fin qui me laisse froid. Voilà :)

Total : 7/10,soit 3,5/5
Avis global : Un texte qui aurait tout gagné à être plus approfondi côté scénario, mais qui séduira sûrement par un vocabulaire et une expression riche et variée. Attention aux débordements de langage soutenu.

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