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Entre infini et au-delà de Cyrlight



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» Auteur : Cyrlight - Voir le profil
» Créé le 12/02/2013 à 09:33
» Dernière mise à jour le 08/09/2020 à 20:05

» Mots-clés :   Action   Drame   Fantastique   Mythologie   Suspense

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Chapitre 30 : Ne dis jamais adieu
« Ne dis jamais adieu
A un ami qui part »


Ne dis jamais adieu - La route d'El Dorado



— Unionpolis ? répéta une Léa surexcitée. Tu veux dire que je pourrai vraiment aller à Unionpolis ? Et me produire sur scène ? Et participer au Grand Festival ? Et…

Elle était intarissable, à l’inverse du professeur Chen qui ne prononçait pas un mot. Une expression abattue se lisait sur ses traits, celle d’un employeur qui s’apprêtait à perdre une indispensable salariée pour la seconde fois en l’espace de peu de temps.

Après avoir mis un terme à sa conversation avec Cynthia, Cassy avait prétendu que ses parents étaient contraints de retourner à Sinnoh dans les plus brefs délais, et que, ne supportant pas de la savoir si loin d’eux, ils l’exhortaient à gagner elle aussi cette région, en dépit de la situation qu’elle avait au Bourg-Palette.

Elle avait donc proposé à Léa de l’accompagner là-bas et d’accomplir son voyage initiatique sur place. Ainsi que Cassy le supposait, la convaincre avait été une sinécure. Elle savait que son amie ambitionnait de devenir coordinatrice pokémon, or il n’y avait que peu de Concours à Kanto, et la plupart n’étaient que des tournois amateurs, alors que Sinnoh était au contraire réputé pour son Grand Festival. Seul celui de Hoenn pouvait rivaliser avec sa popularité.

— Quel dommage que tout s’enchaîne si rapidement, soupira le professeur Chen. J’aurais aimé avoir le temps de chercher quelqu’un pour te remplacer avant ton départ. Quant à toi, tu aurais pu faire une demande pour recevoir officiellement ton premier pokémon et le statut d’apprentie dresseuse.

Cette idée avait traversé l’esprit de Cassy peu après son arrivée au Bourg-Palette, mais elle avait rapidement dû y renoncer. L’obtention d’un starter impliquait beaucoup de paperasse administrative, or elle ne pouvait remplir des documents qui seraient ensuite transmis à divers organismes régionaux, tels que les Centres Pokémon, la Ligue ou les services de police, car cela équivaudrait presque à braquer une flèche fluorescente sur sa double identité.

Cassy n’avait cependant pas renoncé à l’ambition d’entraîner un jour sa propre équipe de pokémon, qui lui serait utile pour assurer sa sécurité autant que pour l’aider à mener à bien sa vengeance. Elle devrait seulement trouver un autre moyen de parvenir à ses fins. En attendant, il lui fallait se focaliser sur les réponses qu’elle souhaitait obtenir. Si elle s’éparpillait, cela ne la mènerait nulle part, or elle avait besoin de connaître l’entière vérité pour rendre justice aux siens.

— Je suis sincèrement désolée, professeur Chen. Moi aussi, j’aurais aimé qu’il en soit autrement, et j’espère que mes parents me laisseront revenir ici un jour, parce que j’adore mon travail et la vie que je mène au Bourg-Palette, mais d’ici là…

Cassy ne poursuivit pas. Tout ce qu’elle venait de dire était très proche de la réalité, car retrouver le laboratoire et s’établir pour de bon une fois qu’elle en aurait terminé avec ce qu’elle avait à accomplir était son souhait le plus cher. Elle ne pourrait cependant commencer une nouvelle vie que lorsqu’elle aurait balayé toutes les ombres de la précédente.

Malgré son dépit, le professeur Chen fit preuve de générosité en autorisant Léa à demeurer parmi eux jusqu’au lendemain, puisque Cassy était convenue avec Cynthia qu’elles partiraient pour Sinnoh à l’aube. Cela lui laisserait assez de temps pour tout planifier sans avoir à se précipiter.

Seule la place faisait défaut, obligeant Léa à partager la chambrette de son amie. Elle était si excitée par la perspective de découvrir une nouvelle région, et surtout de participer à des Concours prestigieux, qu’il lui fallut un temps considérable avant de parvenir à s’endormir. Sitôt que ce fut le cas, Cassy se leva sur la pointe des pieds et quitta la pièce.

À peine eut-elle fait un pas dans le couloir qu’elle percuta quelqu’un de plein fouet. Elle dut plaquer ses mains sur ses lèvres pour étouffer le cri qui lui échappa et inspirer de grandes bouffées d’oxygène pour apaiser son cœur qui cognait violemment contre sa poitrine.

— Eh là, c’est moi, murmura Régis. J’étais sûr que tu finirais par sortir, mais je commençais à m’impatienter.
— Désolée… J’ai cru que Léa ne s’assoupirait jamais.

Bien qu’elle ne puisse distinguer son ami dans l’obscurité totale, Cassy sentit les doigts de Régis se refermer autour des siens pour l’entraîner en direction de la cage d’escalier, sur les marches duquel ils s’assirent. Pendant un moment, ils ne prononcèrent pas un mot, se contentant de rester blottis l’un contre l’autre.

Cassy s’interdisait de songer à quel point le jeune scientifique allait lui manquer. Ses étreintes, ses paroles réconfortantes, leur complicité… Elle n’avait jamais été aussi proche de quelqu’un, pas même d’Éric. Lui était peu tactile, plus porté sur la raison que sur les sentiments. Régis, c’était différent. Elle avait parfois l’impression qu’il la connaissait mieux qu’elle ne se connaissait elle-même.

— Est-ce que tu as peur ? finit-il par lui demander.

Elle ignorait combien de temps s’était écoulé. Dix minutes ? Une heure ? Deux ? L’aube allait-elle bientôt poindre ? Cassy aurait secrètement voulu que le soleil ne se lève jamais, et qu’elle puisse rester là indéfiniment, où rien d’autre ne comptait que la main de Régis dans la sienne et le contact rassurant de son corps.

— De quoi ? De ce que je pourrais encore découvrir dans les notes d’Éric ? Ou du monstre qui s’en est pris à ma famille ?
— Les deux.

Cassy ne répondit pas immédiatement. Elle avait peur, oui, mais pas de tout cela. La menace qui pesait sur ses épaules, les sombres légendes entourant les hybrides que son frère avait esquissés à l’encre invisible… Ce n’était rien comparé à sa plus grande crainte.

— Non, avoua-t-elle dans un souffle. Ce qui m’effraye vraiment, ce serait plutôt de ne rien trouver. Et le pire, c’est que… Jusque-là, il n’y avait que moi, mais maintenant… Que va-t-il se passer pour Léa ?
— Tu as songé que les marques qui sont apparues sur votre peau pouvaient être étrangères à ton enquête ? C’est peut-être juste le fruit du hasard. Après tout, comment expliquer qu’elles se soient subitement manifestées l’une à la suite de l’autre ? Et pourquoi spécialement sur vous deux ?
— Je te retourne la question. Pourquoi ? Et pourquoi est-ce que je porte le glyphe dragon ? Léa a été frappée par un Bulbizarre, c’est donc plus ou moins logique qu’elle arbore le symbole du type plante, mais moi, j’ai été brûlée par la Flammèche de Magby… Plus je réfléchis et moins j’ai l’impression que ça a un sens.

Ce fut au tour de Régis de marquer une pause dans la conversation pendant que Cassy enfouissait son visage entre ses mains. Quel était ce mystère dans lequel elle s’enlisait ? Elle était passée de la sanglante disparition de sa famille à l’apparition de glyphes mystiques. Non, cela ne pouvait pas être une coïncidence… Ses parents savaient quelque chose. Et Éric l’avait découvert. À présent, c’était à elle d’en faire de même.

— Tu sais que tu viens de me donner une idée ? lâcha brusquement Régis.
— Pardon ?
— Oui, oui, une idée ! Viens avec moi !

Avant que Cassy ait le temps de réagir, Régis avait déjà bondi sur ses pieds et l’avait agrippée par le bras pour qu’elle l’imite. Ils dévalèrent quatre à quatre l’escalier, manquant de trébucher à plusieurs reprises dans l’obscurité, mais atteignant tout de même la dernière marche en un seul morceau.

Cassy, éblouie, dut fermer les yeux quand Régis actionna l’interrupteur et que les néons blancs fixés au plafond du laboratoire s’illuminèrent. Lorsqu’elle les rouvrit, il tenait une pokéball dans sa main droite, qu’il lança en l’air.

— Tu dors avec tes pokémon ? s’étonna-t-elle.
— Pas exactement. Je pose toutes mes balls sur ma table de chevet, mais depuis quelque temps, j’en garde une dans la poche de mon pyjama.
— Pourquoi ?

Régis se passa les doigts dans les cheveux, l’air gêné, comme s’il répugnait à l’idée de lui donner une réponse. Cassy observa d’abord son Noctali, qui venait d’apparaître et qui se frottait affectueusement contre la jambe de son dresseur, avant de comprendre. C’était pour elle. Ou plutôt, c’était à cause d’elle. À cause du danger qui planait au-dessus de sa tête.

— Mieux vaut être prudent, non ? marmonna-t-il sans oser la regarder. Bon, trêve de bavardages, passons aux choses sérieuses ! Noctali ?

Les oreilles du pokémon remuèrent pour montrer qu’il était aux aguets. Régis remonta sa manche jusqu’à son coude et plaça son avant-bras dénudé à hauteur de la gueule de l’évolition. Celle-ci le renifla avec curiosité, avant de lui donner un coup de langue amical.

— Oui, moi aussi, je t’aime, Noc, mais ce n’est pas le moment. Utilise Morsure.
— Quoi ? s’exclama Cassy, et Noctali eut sensiblement la même réaction, car il laissa échapper un cri d’incompréhension.
— Comme tu l’as souligné toi-même à l’instant, déclara Régis, ton glyphe et celui de Léa sont tous deux apparus à la suite d’une attaque pokémon. Si j’en encaisse une, moi aussi, peut-être que…
— Arrête, c’est complètement stupide ! Je suis certaine que des dizaines de personnes subissent chaque jour des attaques pokémon, quelles qu’elles soient, sans pour autant que les symboles des plaques d’Arceus se manifestent. Si le phénomène était courant, ton grand-père en aurait forcément entendu parler, non ?

Régis dodelina de la tête, semblant soupeser la pertinence de cet argument. Il finit par concéder à Cassy qu’elle avait probablement raison, mais que c’était malgré tout une hypothèse qu’il ne fallait pas écarter.

— Non, Régis ! insista-t-elle. En admettant que tu aies vu juste et qu’un glyphe apparaisse sur toi aussi, on ignore tout de ce que ça implique ! Si ça se trouve, c’est dangereux, et même si ça ne l’est pas… Ma famille a disparu, elle a certainement été tuée à cause de cette histoire. Tu veux vraiment prendre le risque ?
— Oui.

Sa réponse fut claire et nette, prononcée sans l’ombre d’une hésitation. Régis réitéra son ordre auprès de Noctali. Celui-ci, quoique d’abord réticent à l’idée de faire du mal à son dresseur, finit par s’exécuter.

Il planta ses crocs dans la chair de Régis, qui serra les dents pour contenir un gémissement de douleur. La Morsure de l’évolition n’avait pas été violente, mais suffisante pour imprimer la marque de ses canines pointues dans l’avant-bras de son maître. En revanche, il n’y avait pas la moindre trace d’un glyphe.

— Au moins, j’aurai essayé, constata-t-il avec un soupçon de dépit. Si quelque chose s’était produit, j’aurais pu mener des expériences de mon côté, chercher une explication un tant soit peu scientifique à tout ça, mais… Si tu ne trouves rien à Sinnoh, tu pourras toujours revenir pour qu’on procède à des analyses.

Cassy se garda d’émettre un commentaire. Régis était déjà trop impliqué, et voilà qu’il dormait avec la pokéball de Noctali dans la poche de son pyjama au cas où il lui faudrait réagir promptement en cas d’attaque. Oui, elle ne pouvait compter que sur lui, et oui, elle aurait peut-être besoin d’en passer par là si elle ne trouvait pas de pistes satisfaisantes dans sa région natale, mais pour l’heure, elle préférait ne pas y songer.

— On devrait remonter se coucher, déclara finalement Cassy. Histoire de profiter de quelques heures de sommeil avant de quitter le Bourg-Palette.

Régis avait obtenu de son grand-père le droit de prendre sa matinée afin d’accompagner les deux filles à Cramois’Île, où elles devraient embarquer à bord d’un ferry en partance pour Joliberges. C’était Cynthia qui avait suggéré ce port plutôt que celui de Rivamar, car la ville possédait l’une des plus grandes bibliothèques de Sinnoh, remplie d’ouvrages rares traitant de mythes et de légendes. L’endroit était selon ses dires parfait pour commencer leurs recherches.

Les deux adolescents regagnèrent leur chambre, mais en dépit de sa volonté, Cassy ne parvint presque pas à fermer l’œil. En son absence, Léa avait pris possession de tout le lit, si bien qu’elle dut se tasser dans une cinquantaine de centimètres, contorsionnée de manière inconfortable. Elle avait l’impression de n’avoir sommeillé que quelques minutes lorsque son réveil sonna, et que la fillette se leva d’un bond en poussant des cris stridents qui lui déchirèrent les tympans.

— C’est le grand jour ! C’est le grand jour ! Je vais découvrir Sinnoh. Oui, oui, oui !

Cassy soupira en portant une main à son crâne. Elle avait oublié à quel point Léa pouvait se montrer exubérante. La journée risquait d’être particulièrement longue… Heureusement, Régis l’avait anticipé, car il accueillit son amie avec une grande tasse de café corsé lorsqu’elle le rejoignit dans la cuisine.

Elle se laissa tomber sur une chaise et porta immédiatement la boisson chaude à ses lèvres, avant de prendre un croissant dans la panière qui était posée sur la table. Une fois qu’elle l’eut englouti, elle se tourna vers Régis :

— Et ton bras ?
— R.A.S. J’ai juste une petite ecchymose.

Il remonta sa manche pour montrer à Cassy la tache bleue sur son avant-bras, après quoi ils durent changer de sujet, car Léa fit irruption dans la pièce en sautillant. Elle fondit aussitôt sur les viennoiseries, pendant que Régis rajustait son vêtement.

— Tu veux quelque chose à boire ? proposa-t-il. Du jus d’oran ? Un choccolat chaud ? Un calmant ?

Il prononça cette dernière suggestion à mi-voix, juste assez fort pour que Cassy l’entende, et elle dut plonger dans sa tasse de café pour ne pas pouffer de rire. Intérieurement, elle était du même avis : elle espérait que Léa aurait gaspillé une grande partie de son énergie avant d’embarquer sur le ferry.

Elle bondissait toujours de joie lorsqu’ils quittèrent le laboratoire pour rejoindre la navette qui les conduirait à Cramois’Île. Elle était pile à l’heure, aussi n’eurent-ils pas à patienter longtemps. Ils montèrent à bord, chacun de leurs pas étant ponctué par les cris d’émerveillement de Léa, qui s’extasiait devant tout ce qu’elle voyait. Sachant qu’elle n’avait encore jamais mis les pieds sur un bateau, ils n’étaient pas au bout de leurs peines.

— Ne te penche pas par-dessus le garde-fou, soupira Cassy pour la troisième fois, alors que la côte de Cramois’Île se découpait déjà à l’horizon.

Elle n’avait aucune envie de devoir plonger pour repêcher la fillette si celle-ci basculait dans l’eau. Un seul bain en haute mer lui avait suffi, et elle ne souhaitait réitérer cette désagréable expérience pour rien au monde, d’autant qu’elle ne pourrait cette fois compter ni sur Sven ni sur Galopa pour l’aider à se tirer d’affaire.

Après une longue délibération, elle avait jugé qu’il valait mieux laisser son pokémon au Bourg-Palette, même si cela lui brisait le cœur, car elle n’avait jamais été séparée de lui plus d’une journée. Il ne serait pas assez discret à Sinnoh, surtout s’il devait sans cesse l’attendre devant des établissements publics tels que la bibliothèque de Joliberges. Qui plus est, Léa effectuerait son voyage initiatique à pied, or Galopa aurait fini par se lasser de devoir marcher d’un pas lent dans leur sillage.

En plus de son fidèle ami, Cassy avait confié un autre bien tout aussi précieux aux bons soins de Régis : les notes originales de son frère. Les documents et les esquisses de Gijinkas qu’elle avait glissés au fond de son sac n’étaient que des reproductions. Les vrais seraient quant à eux en sécurité au laboratoire, fermés à clé dans le tiroir du jeune scientifique.

La navette accosta dans le port de Cramois’Île et les passagers débarquèrent. La plupart étaient de simples touristes venus visiter l’île, mais d’autres, à l’instar de Cassy et Léa, étaient en route pour une destination plus lointaine. Ceux-là s’assirent sur les bancs qui s’alignaient le long des quais et attendirent l’arrivée des ferries. Le trio, sur la suggestion de Régis, s’installa un peu à l’écart.

— Il y a tout de même une dernière chose que je voudrais tester avant ton départ, murmura-t-il à l’oreille de Cassy sur un ton complice.
— Quoi ?

Elle le regarda tirer une pokéball de sa poche, non sans une pointe d’étonnement. Il actionna le mécanisme d’ouverture, la lança devant lui, et une silhouette massive s’en échappa. Léa, qui n’avait rien manqué de la scène, poussa une exclamation à la fois surprise, fascinée et effrayée.

— C’est un Dracolosse ! s’enthousiasma-t-elle. C’est la première fois que je vois un dragon en vrai ! Je peux le toucher ?
— Oui, bien sûr. Il est très gentil. Mon grand-père a accepté de me le prêter, afin que je n’aie pas à attendre la navette pour regagner le Bourg-Palette une fois que vous serez parties.

Léa étendit prudemment sa petite main en direction du mastodonte. Elle semblait minuscule, face à lui, et lui arrivait à peine au niveau du coude. Elle posa sa paume sur ses écailles d’un jaune orangée, mais ne maintint pas longtemps le contact. Moins de cinq secondes plus tard, elle la retirait en couinant qu’il était glacé.

— C’est normal, les dragons ont le sang froid, souligna Régis d’un ton pédagogue. Allez, à toi, maintenant.
— À… moi ? hésita Cassy.

Elle commençait à comprendre où son ami souhaitait en venir avec le Dracolosse de son grand-père. Puisqu’elle portait le glyphe dragon, Régis espérait peut-être que la proximité d’un pokémon possédant ce type entraînerait une réaction, quelle qu’elle soit.

— Léa a passé toute la soirée à cajoler son Bulbizarre sans que rien ne se produise, chuchota Cassy. Pourquoi est-ce que ce serait différent pour moi ?
— Essaye quand même, insista Régis.

La jeune fille poussa un soupir en battant des paupières, puis fit un pas vers la créature. Elle se concentra, même si elle ignorait exactement sur quoi, et saisit sa patte rondelette entre ses doigts. Comme elle s’y attendait, il ne se passa rien. Elle s’assura que Léa ne les observait pas, puis remonta la manche de sa chemise pour dévoiler le symbole dessiné sur son avant-bras. Sous le regard doux et patient du Dracolosse, elle le frotta contre ses écailles, en vain.

— Il faut peut-être établir une sorte de connexion avec un pokémon pour que ça fonctionne, supposa Régis. Un lien assez profond afin que… Non, oublie ça. Je crois que je divague et que je suis prêt à bondir sur la moindre théorie, aussi absurde soit-elle.
— Toute cette histoire est absurde, répliqua Cassy. Ce que tu suggères n’est pas moins saugrenu que les dessins de mon frère ou le fait qu’une marque étrange soit apparue sur ma peau à la suite d’une brûlure. De toute façon, nous serons vite fixés sur ce point. Il me suffira d’observer l’évolution de Léa avec son Bulbizarre.
— Tu me tiendras informé ?

Cassy ne répondit pas immédiatement. Régis en savait déjà trop, or elle continuait à croire qu’il était préférable pour lui, et pour sa sécurité, de s’impliquer le moins possible, mais c’était un scientifique. Il avait décidé de consacrer sa vie à la vérité et au savoir, aussi serait-il particulièrement cruel de le priver des réponses qu’il l’avait aidée à chercher.

— Je m’efforcerai de te joindre régulièrement, assura-t-elle.
— J’espère qu’entendre le son de ta voix suffira à dissiper le vide que ton départ aura laissé en moi. Tu vas me manquer, Cassy. Énormément.
— Moi aussi.

L’adolescente lutta pour refouler les larmes qui menaçaient d’embuer ses yeux et passa ses bras autour du cou de Régis pour l’étreindre. Ils restèrent longtemps enlacés, oubliant Léa et les quelques voyageurs qui attendaient sur le quai, jusqu’à ce qu’une corne de brume les sorte de leur bulle. Le moment était venu d’embarquer à bord du ferry.

— Promets-moi que tu reviendras, exigea Régis en retenant Cassy par la main après qu’elle l’eut relâché. Quoi qu’il arrive, et même si c’est juste pour me dire adieu.

Elle plongea son regard dans ses yeux noisette, si doux, si chaleureux, si familiers… Son cœur se serra à l’idée de ne peut-être plus jamais les revoir. Non, elle ne supporterait pas. C’est pourquoi, presque malgré elle, et du bout des lèvres, elle déclara :

— Je reviendrai.

Sur ces mots, elle pressa doucement les doigts de Régis entre les siens, puis tourna les talons pour saisir Léa par l’épaule et l’entraîner en direction du bateau. Une larme roula sur sa joue, mais Cassy s’interdit de regarder en arrière. Elle tiendrait sa promesse, mais pour le moment, c’était Sinnoh qui l’attendait.