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Le Maître du Vent de supersian



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» Auteur : supersian - Voir le profil
» Créé le 11/05/2008 à 19:28
» Dernière mise à jour le 11/05/2008 à 23:43

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Conversations
Albert se sentait mal. Toute la semaine, Mika et Alizée s'étaient exclus, lui parlant peu, mais parlant beaucoup entre eux... Ça ne pouvait plus durer !

Il se sentait... Possédé. C'était ridicule de dire ça, mais c'était bien l'impression qu'il avait. Quelqu'un, quelque-chose lui disait, l'obligeait à ne rien faire contre les sacrificateurs. Car il savait bien que lui-même aurait été le premier à réagir, s'il avait été dans son état normal !

Se sentir ainsi mis à l'écart était très vexant. D'autant plus qu'il savait que la méfiance de ses deux amis était plutôt compréhensible.

Déjà, Mika s'était installé à côté d'Alizée pendant les cours. Lui avait du s'assoir avec Fabio, lequel lui avait sussuré des blagues salaces à mi-voix pendant une heure.

Albert enrageait en ce dimanche, mais se réconfortait en se disant que la reprise des entraînements allait quelque peu modifier la situation. Mika et Alizée seraient bien obligés de se rapprocher de lui !

En maugréant, le jeune homme descendit à la cuisine pour le goûter.

La salle paraissait encore plus grande le dimanche après-midi, puisqu'elle était vide. Cependant, le jeune homme aux cheveux bleus eut la surprise de voir arriver Philibert, encore tout décoiffé, certainement pas son long voyage à dos de Ptera.

A son arrivée, le jeune noble ne payait pas de mine, avec ses beaux habits qu'ils n'assumaient pas et son air gauche. Mais quand il avait libéré son pokémon préhistorique, ça avait été autre-chose. Et quand on avait vu que sa voix presque bégayante devenait assurée et puissante dès lors qu'il s'agissait de combattre, tout le monde avait changé d'avis sur lui.

- Bonjour Albert ! dit gentiment Philibert.
- Lut... marmonna le concerné.

Laurent arriva de la cuisine, portant une assiette pleine de pains au chocolat *. Il fut surpris de voir le jeune noble : habituellement, seuls son neveu et lui goûtaient ensemble. Les autres arrivaient plus tard. Il s'assit en face d'Albert et de l'autre disciple.

- Y'a un problème Philou ? demanda le Champion d'un ton innocent, se servant un peu de thé.
- Je...

Le jeune homme avait les larmes aux yeux. Il y avait fort à parier que voir Luca partager le lit d'Alizée un soir sur deux avait du avoir des retombées sur son moral.

- Euh, je t'oblige pas à en parler, hein... se rattrapa vite Laurent, sentant, un peu tard, qu'il y avait des questions à ne pas poser.

Mais c'était trop tard justement : les vagues moments de bonheur que Philibert avait trouvé dans son Week-End venaient d'être balayés par l'évocation du problème, celui qui le faisait tant souffrir... Le jeune noble jetait des regards suppliants sur Albert, qui s'en aperçut, et se mit lui-même à jeter des regards suppliants sur Laurent.

Laurent sortit en soupirant, comprenant qu'il devait laisser les deux garçons seuls à seuls.

- Alors... Tu penses toujours à elle, c'est ça ? commença Albert en tapotant sa tasse de thé.

Il se disait qu'en s'occupant des problèmes des autres, il oublierait les siens.

- Mais oui !!! approuva Philibert, une larme commençant à couler le long de sa joue gauche. Enfin tu comprends, je sais que c'est ridicule, qu'elle en aime un autre, qu'elle est trop bien pour moi, mais... Je l'aime !

Il enchaîna ensuite sur une symphonie alternant entre les larmes et des éloges sans fin sur Alizée.

- Oh, tu sais, je connais Luca, commença Albert, d'un ton optimiste.
- C'est vrai !? fit Philou en relevant la tête.

Son ton était rempli d'espoir. Son ami allait lui dire que Luca était un salaud qui allait lâcher Alizée dès qu'il en aurait marre, et alors lui, Philibert, pourrait la consoler !

- Oui... Luca est un Absol-Garou ** ! dit le futur champion en rigolant.
- Oh, Albert, te fous pas de moi...

Philibert imaginait très bien Luca en Absol-Garou, et lui venant lui trancher la tête pour sauver la vie de sa bien-aimée !

- Et d'abord, comment as-tu entendu parler des Absol-Garous ? C'est des histoires d'épouvante démodées... reprit le noble, comme désespéré par cette référence.

L'évocation du paradis terrestre, de ses arbres donnant du miel, des Ecremeuh portant spontanément du lait aux hommes, et de la paix éternelle et universelle l'aurait de toute manière déprimé.

- Bah, j'ai fait des colos quand j'étais petit. répondit Albert.
- C'est vrai ? Moi aussi ! répondit Philou d'un ton neutre.

Un ton neutre était un progrès. Le futur champion décida de sauter sur l'occasion.

- Et d'ailleurs, bon, j'ai jamais osé le lui révéler, mais j'ai fait une colo avec Marie, quand j'avais cinq ans ! continua Albert.
- Et elle s'en souvient pas ? questionna Philibert, intéressé.
- Je crois pas, non... En tous cas, elle m'en n'a jamais parlé. C'était au Lac Colère.
- AU LAC COLERE ? Mais moi aussi j'ai fait une colo là-bas ! s'exclama le noble, transcendé. Wahou, tu te rends compte ? Si ça se trouve on a fait une colo ensemble et on s'en souvient pas !

Il parut tout heureux, et mordit avec véhémence dans un des pains au chocolat.

Albert contempla le fond de sa tasse, où subsistaient encore quelques gouttes de son infusion. Philibert était vraiment un enfant, capable de s'apitoyer sur lui-même avec fortes larmes, pour ensuite se réjouir pour rien. Etait-ce vraiment pour rien ? Les mots de Mika lui revenaient...

"Marie... Marie et... Philibert..." sur son ton persifleur. Et pourquoi pas, Marie et Philibert ? Sans vouloir être méchant, les deux plus spéciaux de l'arène ensemble, cela semblait logique... Quoique Lanmart en tenait une couche quand-même.

- Merci Albert, ça va mieux !!! s'exclama Philibert en saisissant un autre pain au chocolat, avant de sortir de la cuisine en sautillant et en chantant une vieille ballade médiévale.

Le futur champion avait vraiment du mal à le suivre. Mais tant que Philou allait mieux...


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Albert était dans sa chambre, rêvassant paisiblement, assis sur son lit.. Il regardait par la fenêtre, et apercevait l'horizon qui se couvrait d'éclairs. Un orage arrivait, ce qui créait une ambiance très particulière, l'ambiance habituelle qu'on ressent, quand, bien à l'abri chez soi, les éléments se déchaînent au-dehors, impuissants.

De plus, cette ambiance électrique était couplée à celle du dimanche soir, où chacun est crevé et s'endort vite. Ce mélange d'excitation et de langueur donnait un air surréaliste aux conversations.

- Albert, faut qu'on parle.

Aïe. Mauvais, très mauvais. Généralement, quand une phrase commençait comme ça, la conversation prenait vite un tour agressif...

Alizée, l'air ennuyée, venait d'apparaître à l'encadrement de la porte. Ses cheveux gris encore mouillés séchaient, dépassant de l'espèce de turban fait d'une serviette de toilette qu'elle avait noué sur sa tête.

- Ecoute Albert... commença t-elle en s'asseyant à côté de lui sur son lit. On a parlé par télépatie avec Prophète. Il nous a confirmés qu'il avait reçu le message "fuyez", comme tu nous l'as raconté, mais...

Elle s'interrompit, reprenant son souffle, sous le regard froid de son interlocuteur.

- ... C'est toi qui l'as envoyé, Albert.

Pas de réponse. Le futur champion se leva, se rapprochant de la fenêtre. Il en écarta les rideaux d'un geste brusque, manquant arracher les morceaux de tissus bruns.

- C'est toi qui l'as envoyé. répéta la disciple. Il nous l'a dit. Tu leur a dis de s'enfuir, tu les as avertis de notre présence... Alors qu'on aurait pu les piéger !

Elle venait de hausser le ton. A cet instant, Mika rentra à son tour dans la chambre Xatu en peignoir, comprit aussitôt, et ferma la porte à clef derrière lui.

La scène se jouait entre eux-trois à présent.

- On aurait pu les piéger Albert ! Mais pourquoi tu as fait ça !? Pourquoi !?

La dresseuse s'était levée, et regardait fixement Albert, la mâchoire tremblant, sous l'effet de la colère.

- Tu es... Tu es de leur côté, c'est ça ? Et tu nous l'as caché ! Tu acceptes ces horreurs !? Je peux pas y croire !

Elle croisa les bras et ferma les yeux, tentant de retenir ses larmes.

Albert semblait ne pas écouter son amie, son regard toujours plongé sur les nuages noirs qui se rapprochaient. Il ne voulait pas répondre, il ne pouvait pas répondre...

- Albert... commença Mika.

Les sanglots nouèrent la gorge d'Albert. Le futur champion pouvait supporter beaucoup de choses, mais pas le ton déçu et si maître de lui de son ami Mika.

Mika, toujours le premier à faire des conneries, et ne se prenant jamais au sérieux...

Pour que LUI prenne ce ton-là, ce devait être grave.

Le jeune homme aux boucles noires s'avança à côté d'Alizée.

- Albert, il faut que tu nous dises. Ne reste pas silencieux, sinon, tu vas nous obliger à...

Mika s'interrompit, ne croyant même pas à ce qu'il allait dire.

- A... A croire que tu es coupable...

Un coup de tonnerre retentit. L'orage était sur eux.

Dans la lumière éblouissante d'un éclair, Albert sourit. Ou plutôt, montra les dents. Il devait conserver leur confiance. Il devait trouver la solution, il ne pouvait se passer d'eux. Malgré... Malgré cette force qui le faisait mal agir, il devait rester lui-même...

Il se tourna vers ses amis, et leva les yeux vers le plafond, pour ne pas voir leurs visages fermés et accusateurs.

- Oui... J'ai voulu toucher Prophète pour voir à travers le mur, moi-aussi. commença t-il.

Premier mensonge. Il savait dès son arrivée à la Tour ce qu'il allait faire...

- Mais à cet instant, quelque-chose m'en a empêché, je me suis senti en danger, à découvert. J'ai compris qu'un pokémon psy, certainement présent à la cérémonie, m'avait repéré. Et au fond de moi, j'ai eu tellement peur pour vous...

Oui... Elle était là, la solution... Il devait leur faire croire que ses mensonges n'avaient été que la honte d'assumer des sentiments, des sentiments nobles et beaux...

- Peur qu'ils ne vous sentent aussi, qu'ils sortent, qu'ils nous trouvent, qu'ils vous trouvent... J'ai paniqué, et j'ai voulu vous avertir, vous dire de partir, puisqu'ils nous avaient repérés. Le "fuyez" était pour vous !

Parfait, parfait ! Une erreur ! Il devait faire passer cela pour une erreur !

- Mais Prophète, ou plutôt, le pokémon psychique qui était avec eux a réussi à leur transmettre mes pensées, et la plus forte qui hantait mon esprit à cet instant était celle-ci. "Fuyez", mes amis...

Une larme roula sur ses joues. La pluie martela le carreau, poussée par un vent violent qui l'envoyait vers la fenêtre.

- Ma seule famille... acheva Albert en baissant la tête.

Mika et Alizée restaient tétanisés. De quoi ? Ce "fuyez" leur était adressé ?

- Pourquoi tu ne nous l'as pas dit plus tôt, Albert !? s'exclama la jeune dresseuse, tellement excitée que sa serviette ne tenait plus en place, et était déjà tombée par terre.

Le fracas de la pluie se calma un peu. La voix du futur champion s'échappait, faible et pleine de remords.

- A cause de moi... répondit le jeune homme d'un ton plaintif. Ils ont su que j'étais là... Je m'en suis tellement voulu, comme un con, de toucher Prophète alors que j'aurais pu vous croire sur parole... Mais je l'ai touché, et ils m'ont senti... A cause de moi...

Et s'en vouloir à soi-même. La comédie était terminé. Pas de public pour applaudir sa performance d'acteur, mais le résultat était là.

- Oh, Albert ! s'exclama Alizée en se jetant sur lui.

Elle le serra dans ses bras, alors que Mika restait en arrière, les regardant en hochant la tête. Alors, ce n'était que ça ? Ces inquiétudes, toutes ces conversations avec Alizée, du vent ? Un quiproco, un simple quiproquo ? Et son Albert, innocent ? C'était... Rassurant. Il sourit à son meilleur ami alors que la disciple aux cheveux gris s'écartait d'Albert.

- C'est pas grave, tu sais, que tu te sois fait repérer... On t'en veut pas pour ça ! Ne me fais plus jamais une peur pareille ! On les coincera, t'inquiètes pas !

Elle fit un clin d'oeil à son ami et disparut.

- Mon vieux... Content de te retrouver. conclut Mika en tortillant une de ses boucles noires.

- Merci, Mika ! répondit le jeune homme avec un sourire qui semblait sincère.

Pourtant, au fond de ses yeux brillait une étincelle bien plus dangereuse que tous les éclairs qui s'étaient abattus sur la forêt en cette nuit.


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* D'après ce que j'ai pu comprendre, on dit "pain au chocolat" dans le noir, et "chocolatine" dans le Sud. Ayant passé ma tendre enfance dans le Nord, moi je dis "pain au chocolat", et pis c'est tout !

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